L’Orfeo de Monteverdi

Partition de l'Orfeo - Venise - 1609

COMPOSITEUR Claudio MONTEVERDI
LIBRETTISTE Alessandro Striggio

 

ENREGISTREMENT EDITION DIRECTION EDITEUR NOMBRE LANGUE FICHE DETAILLEE
1939 1979 Ferrucio Calusio EMI 2 italien
1939 2004 Ferrucio Calusio Walhall 2 italien
1949 2001 Helmut Koch Berlin Classics italien
1949 2007 Helmut Koch Berlin Classics 2 italien
1954 2009 Paul Hindemith ORF 2 italien
1954 2010 Paul Hindemith Andromeda 2 italien
1954 2010 Paul Hindemith Music & Arts 2 italien
1955 1997 August Wenziger Deutsche Gramophon 2 italien
1960 2006 Leopold Stokowski Ponto 2 italien
1967 Nino Sanzogno Discoteca di Stato italien
1968 1968 Michel Corboz Erato 2 italien
1968 1992 Nikolaus Harnoncourt Teldec 2 italien
1968 1999 Nikolaus Harnoncourt WEA 1 (exts) italien
1968 2009 Nikolaus Harnoncourt Teldec 1 (exts) italien
1968 2008 Nikolaus Harnoncourt Teldec 2 italien
1974 1995 Jürgen Jürgens Deutsche Gramophon 2 italien
1976 1981 Nikolaus Harnoncourt Telefunken 2 italien
1980 1981 Siegfried Heinrich Jubilate 3 (LP) italien
1983 1994 Charles Medlam EMI Music 2 italien
1983 2005 Charles Medlam Virgin Veritas 2 italien
1984 1995 Herbert Handt Claves 1 italien
1985 1985 Michel Corboz Erato 2 italien
1987 1987 John Eliot Gardiner Deutsche Gramophon 2 italien
1991 1992 Philip Pickett Decca 2 italien
1991 1997 Philip Pickett Decca 2 italien
1991 2005 Philip Pickett Decca 2 italien
1993 1995 Gwendolyn Toth Artek 2 italien
1993 1995 René Jacobs Harmonia Mundi 2 italien
1996 Gabriel Garrido K 617 2 italien
1996 1997 Sergio Vartolo Naxos 2 italien
2001 Jeannette Sorrell Eclectra 2 anglais
2001 Christoph Spering Deutsche Oper am Rhein 2 italien
2003 2004 Emmanuelle Haïm Virgin Classics 2 italien
2003 2011 Emmanuelle Haïm Virgin Classics 2 italien
2004 Kurt Eichhorn Arts Archives 1 allemand
2004 2005 Jean-Claude Malgoire Dynamic 2 italien
2004 2005 Antony Walker ABC Classics 2 italien
2006 2006 Sergio Vartolo Brilliant Classics 2 italien
2006 2012 Sergio Vartolo Brilliant Classics 2 italien
2006 2007 Claudio Cavina Glossa 2 italien
2007 2007 Rinaldo Alessandrini Opus 111 2 italien
2010 2011 Ulf Schirmer CPO 1 allemand
2012 2013 Andrew Parrott Avie Records 2 italien

DVD

ENREGISTREMENT ÉDITION DIRECTION ÉDITEUR FICHE DÉTAILLÉE
1977/78 2007 Nikolaus Harnoncourt DG
1998 2005 Stephen Stubbs Opus Arte
2002 2002 Jordi Savall Dynamic
2004 2005 Jean-Claude Malgoire Dynamic
2008 2009 William Christie Dynamic
2009 2011 Rinaldo Alessandrini Opus Arte

 

L’Orfeo, favola in musica, sur un livret d’Alessandro Striggio (1573 – 1630), joueur de viole et chanteur, secrétaire du prince Francesco Gonzaga, fils du madrigaliste Alessandro Striggio.
La première représentation fut donnée le 22 février 1607, pendant le carnaval, à l’Académie des Invaghiti, lors d’une représentation « privée », à laquelle n’assistèrent que les familiers du duc. Dès le lendemain, le prince Francesco écrivait à son frère Ferdinando pour lui faire part du succès rencontré par la représentation. Elle fut suivie d’une seconde dans une petite salle (*) du palais ducal de Mantoue, le 24 février, puis d’une troisième, le 1er mars, spécialement ordonnée par Vincenzo Gonzague pour les dames de la Cour et de la Ville. Ce dernier assista aux répétitions et aux trois représentations.
(*) cette salle n’a pas été identifiée : la galerie des Miroirs était alors ouverte sur la cour, la galerie des Fleuves sur un jardin ; la salle du Miroir, de forme triangulaire, ne pouvait accueillir un spectacle.

 

La distribution réunissait notamment le castrat florentin Giovanni Gualberto Magli (La Musica, Proserpina), le ténor toscan Francesco Rasi (Orfeo), le castrat soprano Girolamo Bachini (Euridice). Francesco Rasi (*) était alors un ténor célèbre, attaché au duc de Mantoue depuis 1598. Le duc de Mantoue l’avait prêté au Grand Duc de Toscane pour la représentation de l’Euridice de Peri. En retour, Giovanni Gualaberto Magli, avait été prêté à Mantoue pour une quinzaine de jours. Castrat formé par Giulio Caccini, il était réputé pour exceller dans la musique récitative.
(*) Francesco Rasi – (1574-1621) qui, né à Arezzo, fut le plus grand ténor du premier Baroque, principalement au service des Médicis à Florence. A la fois chanteur exceptionnel à l’aise dans toutes les techniques du buon canto, comme on disait alors (giri da voce, passaggi, notes ribattute et autres diminutions funambules que plus que quiconque il a contribué à inventer) et virtuose insigne au luth et chitarrone d’accompagnement, Rasi fut une légende vivante pour ses contemporains fascinés par tant de dons, d’autant que sa qualité de gentilhomme ne le mettait pas dans l’obligation de travailler pour subsister. Et pourtant une espèce d’instabilité pathologique le poussera à bouger sans cesse, sillonnant tant l’Italie que l’Europe des princes, des Flandres à Vienne, à Prague et en Pologne où il accompagne le madrigaliste Marenzio en 1595. Et c’est sans doute ce déséquilibre existentiel qui le fera basculer dans le crime – le meurtre de sa belle-mère et de son intendant – pour de sordides raisons crapuleuses, sa condamnation à mort par pendaison et écartèlement n’étant en fait jamais mise à exécution, conséquence de la célébrité de l’artiste qui put continuer sa carrière pendant plus de dix ans à travers l’Europe sans être inquiété ! (Concertclassic.com)
L’orchestre était composé de claviers et d’instruments à cordes pincées (2 clavecins, 2 orgues en bois, un régale, 2 harpes doubles, 2 chitarroni), d’instruments à cordes frottées (10 viole di braccio, 2 violons piccolo, 2 contrebasses, 3 basses de viole), d’instruments à vents (2 flautini), de cuivres et percussions (4 trombones, 2 cornets, 1 clarino, 3 trompettes). La vingtaine de musiciens avait pris place de part et d’autre de la scène.
L’œuvre avait été commandée par le prince héritier Francesco de Gonzague pour ses propres noces avec Marguerite de Savoie, qui n’intervinrent qu’en 1608.
Quelques mois plus tard, l’opéra fut représenté à Crémone (en août), ainsi que dans les grandes villes d’Italie du Nord (Turin, Florence, Milan). Il fut sans doute représenté à Salzbourg le 10 février 1614, à la résidence des princes-archevêques.

La partition fut imprimée deux fois du vivant de Monteverdi. La première impression de la partition fut exécutée par Ricciardo Amadino, éditeur habituel de Monteverdi, précédée d’une épître dédicatoire du compositeur, datée de Mantoue, le 22 août 1609. Il existe quatre exemplaires de cette première édition, à Berlin, Gênes, Modène et Rome. La seconde édition, de qualité inférieure, parut en 1615. Il en existe également quatre exemplaires, à Breslau, Oxford, Londres et Bruxelles.
On dispose aussi du livret imprimé distribué au public lors des représentations à Mantoue du 24 février et du 1er mars 1607, Il n’en existe qu’un seul exemplaire, conservé à Florence, dans le Fonds Basevi.
Les différences entre le livret et la partition sont importantes dans l’acte V. Le livret de Striggio fait terminer la représentation par une Bacchanale au cours de laquelle Orphée est poursuivi par les Bacchantes pour avoir renoncé à l’amour féminin. On ne dispose malheureusement pas de la partition correspondante.
La partition conservée propose pour sa part une apothéose d’Orphée, par l’intermédiaire d’Apollon, son père, qui le conduit au ciel.

> Les éditions et versions de l’Orfeo

Livret de l'Orfeo - Mantoue - 1607
Le livret indique trois décors : pour le prologue et les deux premiers actes, un paysage de bosquets, prés, ruisseaux ; pour l’acte III, les Enfers ; pour l’acte V, un bosquet.

« Ce premier opéra accompli de l’histoire, véritable point de départ de la musique moderne, surpasse le modèle florentin en réalisant l’union du verbe et de la musique, idéal de modernité au XVIIe siècle. Le livret d’Alessandro Striggio reprend la légende antique qui devait inspirer nombre de compositeurs : fils d’Apollon, Orphée a le pouvoir de charmer par son chant dieux, hommes et bêtes. Ayant arraché son épouse Eurydice aux Enfers, il croise son regard et la perd à jamais.
Si le plan de l’opéra respecte la traditionnelle division en cinq actes, l’œuvre est néanmoins profondément originale. Après une brillante toccata et un prologue confié à une allégorie de la musique, le premier acte – une pastorale – montre Orphée défiant quiconque de trouver plus heureux que lui dans une mélodie qui mêle récitatif et arioso.
Le deuxième acte contient les premières scènes vraiment dramatiques du genre naissant. L’atmosphère joyeuse est brutalement rompue par l’arrivée de la Messagère. Suit un dialogue aux accents pathétiques où seul Orphée semble ignorer la funeste nouvelle, qui lui parvient enfin entrecoupée de silences expressifs et accompagnée de sombres accords d’orgue : «Ton épouse bien-aimée est morte.»
Au troisième acte, Orphée descend chercher sa compagne aux Enfers. Il illustre le pouvoir de son chant en tentant de séduire Charon par un air dont la virtuosité de plus en plus hardie se dépouille ensuite de toute ornementation. Véhément, d’une simplicité extrême, le récitatif final s’achève par une lente montée chromatique.
Le quatrième acte voit Eurydice rendue à Orphée grâce à l’intervention de Proserpine, mais le poète, négligeant l’interdit, se tourne vers son épouse et la perd à nouveau.
Au cinquième acte, la longue lamentation d’Orphée errant est interrompue par l’arrivée d’Apollon. Élevé au-dessus des mortels, Orphée contemplera dans les étoiles le visage d’Eurydice. La version originale (1607 ) comportait un dénouement tragique plus conforme à la légende.
Ainsi l’Orfeo de Monteverdi se présente comme une synthèse des modes d’expression de l’art du chant : l’air de cour, l’air de ballet, le madrigal, la canzone, le récitatif, l’arioso s’y succèdent, comme subordonnés aux seuls sentiments humains. » (Encyclopédie Hachette)

Synopsis
Prologue
Un personnage allégorique, La Musica elle-même, vient au-devant de la scène pour saluer les nobles commanditaires de l’oeuvre et leur raconter la glorieuse histoire d’Orphée. Le chant de La Musica illustre ses multiples pouvoirs. Accompagnée d’une cithare d’or ou de la lyre céleste, elle peut apaiser les coeurs, enflammer les esprits et charmer l’oreille des mortels. Elle achève ses propos par une description de la Nature apaisée.

Acte I
À l’entrée du temple d’Apollon, en Thrace. Les Nymphes et les Bergers célèbrent les noces d’Orphée et d’Eurydice. 1.eurs chants racontent le passé des deux amants et les tourments qu’a endurés l’amoureux avant que sa fiancée accepte leur union. Invoquant le bonheur d’Orphée, une Nymphe invite les Muses à unir leurs chants célestes aux prières terrestres. Le choeur dansé par les Nymphes et les Bergers prépare la première et très solennelle intervention d’Orphée, son hymne religieux au soleil, c’est-à-dire à Apollon. Il exprime avec passion son bonheur et sa joie d’être amoureux et d’être aimé en retour. Il ne désire rien d’autre. La belle Eurydice est aussi très heureuse car son coeur, depuis qu’il a rejoint celui d’Orphée, ne lui appartient plus. Pour chasser définitivement les peines et les souffrances du passé l’acte se termine par les prières au temple d’Hyménée.

Acte II
Une joyeuse pastorale. Orphée est heureux de retrouver les Bergers et de revoir ses forêts. Mais cette ambiance lumineuse s’assombrit d’un coup. L’arrivée de Sylvia, l’une des compagnes d’Eurydice, impose le silence. Elle est la Messagère de la terrible, irrémédiable nouvelle. Mordue par un serpent venimeux pendant qu’elle ramassait des fleurs, Eurydice n’est plus. Elle est morte dans les bras de la Messagère. Orphée reste muet de douleur. l.’effroi s’empare de ses compagnons.
Quand il sort de sa stupeur, sa résolution est ferme. Il descendra aux Enfers pour en ramener son épouse. La Messagère, désespérée d’avoir meurtri l’âme d’Orphée, se condamne elle-même à finir sa vie au fond d’une caverne. Profondément attristés, la Nymphe et les Bergers préviennent les mortels que leur bonheur est incertain et fragile.

Acte III
Orphée se présente à la porte des Enfers, guidé par l’Espérance. Avant de l’abandonner ici – conformément aux paroles inscrites à l’entrée: « Lasciate ogni speranza, o voi ch’entrate! » – elle lui montre le sombre marécage qu’il doit traverser seul, aidé uniquement de son chant. Orphée semble d’abord perdu. Le Nocher des âmes, Charon, qui paraît devant lui, le repousse. Pour traverser, Orphée s’efforce de l’attendrir. Dans une plainte qui touche au surhumain, au sublime, il évoque tour à tour les Enfers, la Terre et les Cieux. Mais le terrible gardien reste inflexible et explique que toute pitié est indigne de sa valeur. Orphée use alors d’une douce polyphonie, réussit à l’endormir, s’empare de sa barque et pénètre dans le monde souterrain, parmi les larves, les serpents et les monstres.

Acte IV
À l’intérieur des Enfers. Proserpine, l’épouse de Pluton, a été touchée par la plainte d’Orphée. Elle emploie toute sa séduction pour obtenir de son époux le retour d’Eurydice à la vie. Pluton rend les armes et pose son implacable condition : Orphée retrouvera son épouse mais ne devra pas lever son regard vers elle avant d’avoir quitté les abîmes. Aveuglé par son bonheur, Orphée exulte et célèbre les mérites de son art. Il commence sa remontée mais la joie cède soudainement la place au terrible doute: « Qui m’assure qu’elle me suit? » Aveuglé par son désir, il brave l’interdit divin et commet l’irréparable. Orphée se retourne, voit Eurydice mais ne comprend pas encore la tragédie qui va s’abattre sur lui. Son épouse infortunée a juste le temps de lui redire son amour avant de disparaître dans les ténèbres. Fou de douleur, Orphée renie son propre père, Apollon, en évoquant la lumière haïe du Soleil, le choeur conclut cet acte qui a vu Orphée triomphant de l’Enfer et vaincu par ses passions.

Acte V
Orphée a rejoint la sphère terrestre. Il confie sa douleur aux collines et aux pierres et ne reçoit qu’un faible écho en réponse à ses plaintes. La folie s’empare alors de lui. Le poète s’en prend violemment aux Femmes, orgueilleuses et perfides. Mais une douce polyphonie met un terme à sa démence et marque la descente sur terre d’Apollon. Le dieu reproche à son fils de s’abandonner à la douleur, d’être esclave de ses passions. Pour l’aider, il l’invite à le rejoindre au Ciel, d’où il pourra contempler l’image d’Eurydice parmi les étoiles. l.es Bergers et les Nymphes dansent et chantent àla gloire de celui qui va jouir des honneurs célestes.

(L’Avant-Scène Opéra)

 

Livret :
http://orfeo.grenoble.free.fr/Annexes/Texte_Orfeo.pdf (en italien et en français)
http://www.librettidopera.it/orfeo/orfeo.html (en italien)


L’Orfeo de Monteverdi fut représenté pour la première fois en février 1607 à Mantoue. Il fut repris avec succès à Crémone, Turin, Florence et Milan. Le livret de Striggio conte la mort d’Euridice, épouse d’Orfeo, piquée par un serpent. Orfeo part aux enfers à la recherche d’Euridice. Grâce à la beauté de son chant, il charme les monstres infernaux et parvient à obtenir de Pluton et de Proserpine la libération de sa bien-aimée. Les dieux acceptent de laisser partir Euridice à condition qu’Orfeo ne se retourne pas avant d’être arrivé à la lumière du jour. Mais Orfeo ne résiste pas, se retourne pour voir si Euridice le suit et la perd définitivement. Monteverdi utilise d’une façon «fracassante» les contrastes des différentes couleurs de l’orchestre à des fins dramatiques notamment par l’utilisation de trombones. Monteverdi obtient par les moyens les plus simples une extraordinaire intensité musicale. Les arias sont d’une grande force émotionnelle et dramatique, ainsi la bouleversante complainte d’Orfeo à la mort d’Euridice «Tu se’ morta, se morta mia vita», et le magnifique chant plaidoyer d’Orfeo pour faire libérer Euridice. Qui pourrait résister à la montée des demi-tons dans ce «Rendetemi il mio ben,Tartarei Numi» ? (Festival de Beaune 2002)

 

La Médiathèque – dossier http://www.lamediatheque.be/travers_sons/op_mon01.htm

Classica – novembre 2004 – Écoute comparée de douze versions

Diapason – décembre 2007 – L’œuvre du mois – Guide d’écoute – Discographie
Les énigmes de l’Orfeo – éditorial – février 2003


Représentations :

Munich – Monteverdi-Continuo – Ensemble und Mitglieder des Bayerischen Staatsorchesters / Monteverdi-Continuo-Ensemble and members of Bayerisches Staatsorchester – Zürcher Sing-Akademie – dir. Ivor Bolton – mise en scène David Bösch – décors Patrick Bannwart – costumes et vidéo Falko Herold – lumières Michael Bauer – dramaturgie Daniel Menne – chef de choeur Tim Brown – avec Christian Gerhaher (Orfeo), Anna Virovlansky (Euridice), Anna Bonitatibus (Messagiera / Proserpina), Andrea Mastroni (Caronte, Andrew Harris (Plutone, Angela Brower (Speranza / La Musica), Mauro Peter (Apollo), Mathias Vidal (Pastore I / Spirito I), Jeroen de Vaal (Pastore II / Spirito III / Echo), Gabriel Jublin (Pastore III), Thomas Faulkner (Pastore IV / Spirito II), Lucy Knight (Ninfa)



Opéra de Nancy – 10, 12, 14, 16, 17 janvier 2014 – Chœur de l’Opéra national de Lorraine – Les Talens lyriques – dir. Christophe Rousset – mise en scène Claus Guth – décors Christian Schmidt – costumes Linda Redlin – lumières Olaf Winter – vidéo Arian Andiel – dramaturgie Konrad Kuhn – avec Gyula Orendt (Orfeo), Emöke Baràth (Euridice), Carol Garcia (La Musique, la Messagère, l’Espérance), Gianluca Buratto (Charon, Pluton), Elena Galitskaya (Proserpine, une Nymphe), Damian Thantrey (Apollon), Reinoud Van Mechelen, Alexander Sprague, Nicholas Spanos, Daniel Grice (Les Nymphes, les Bergers, les Esprits) – coproduction Opéra national de Lorraine – Theater an der Wien


Forum Opéra

« Désarticulant le mythe d’Orphée pour en extraire le pire drame de toute vie humaine : la perte inexorable de l’être aimé, c’est en philosophe que Claus Guth a bâti une vision capable de toucher au cœur le public d’aujourd’hui. Après qu’une incarnation féminine de La Musique nous a invités à écouter sa fable, le grand rideau blanc s’ouvre sur un décor à demi-dévoilé où gît le cadavre recroquevillé d’un Orphée en costume de businessman. Flashback immédiat ; Orphée se relève et commence son voyage à reculons avant de franchir le Styx pour retourner au grand tout. Il habite alors dans une maison cossue. L’architecture et le mobilier stéréotypés avec escalier central évoquent un quartier chic de quelque métropole occidentale. Foin de nature luxuriante ; c’est là qu’une bande de joyeux drilles, sommairement vêtus de péplums et coiffés de couronnes de lauriers, débarquent afin de transformer le lieu en un grotesque simulacre de décor antique où l’on va célébrer les noces de leur ami avec sa bien-aimée. Cette sorte de folie bachique désorganisée n’empêche pas Orphée d’exprimer son bonheur intense dans un chant sublime « Rosa del ciel », auquel répondent les voix mélodieuses des nymphes et bergers de pacotille, tandis que, pour le plaisir des oreilles, se succèdent canzonette avec ornementations joliment exécutées, chœurs et danses accompagnées par le continuo et ponctuées par les ritournelles caractéristiques de la savante écriture de Monteverdi. La fête continue dans le plus grand désordre jusqu’à l’arrivée de La Messagère dont la poignante lamentation annonçant la mort d’Eurydice, mordue par un serpent, fait basculer l’action dans la tragédie qui va précipiter Orphée dans une chute solitaire et irrationnelle.
Si la première partie semble la parodie d’un péplum hollywoodien, la seconde cherche plutôt ses sources d’inspiration cinématographique dans le fantastique à la Cocteau : miroirs brisés et traversés, blessures sanglantes, dédoublement, fantômes. Le décor reste en place. Des éclairages angoissants et des projections vidéo (quelque peu sommaires) se chargent d’évoquer les Enfers et leur chemin barré par un Charon mafioso et alcoolique, fumant un joint pour se détendre. Utilisant tout l’espace avec ses deux niveaux reliés par cet immense escalier, toute la suite s’accommode du même dispositif scénique, ô combien symbolique, jusqu’au moment où Orphée saisi par le doute commettra l’erreur fatale qui fera mourir Eurydice une seconde fois. C’est alors que la mise en scène de Claus Guth prend toute sa force émotionnelle. Au bout de ce voyage de noces macabre mais imaginaire, Orphée choisit de rejoindre son Eurydice en se donnant la mort dans un dernier sursaut bouleversant.
Après tant d’autres propositions scéniques, ce qui fait la réussite de cette production audacieuse voire incongrue, c’est l’excellence de tous les interprètes. Citons en premier lieu, le rôle-titre tenu par le jeune baryton Gyula Orendt, formé à Budapest. Autant par son chant engagé, nuancé et profondément émouvant (magnifique « Possente spirto ») que par son expressivité corporelle, proche de l’art du mime, il incarne un Orphée, combatif et victime, sorte de pantin humain voué au néant. Sa partenaire, Emöke Baràth, issue de la même Académie hongroise et dotée d’une voix pure et musicale est une Eurydice de rêve. Quant à l’excellente soprano catalane, Carol Garcia, elle assure brillamment les trois autres principaux rôles féminins de la partition (La Musique, la Messagère, et l’Espérance). Le reste de la distribution est plus que satisfaisant. On distingue notamment la charmante Proserpine d’Elena Galitskaya.
Il reste à féliciter le Chœur de l’Opéra national de Lorraine et à rendre un hommage appuyé à Christophe Rousset et à son ensemble Les Talens lyriques pour leur présence tant elle semble évidente en dépit de ce qui est donné à regarder. C’est sans nul doute cet accord quasi miraculeux entre la fosse et la scène qui procure à ce spectacle irrévérencieux toute sa cohérence. »

Muse baroque – Orefo incontestablement humain

« L’Orfeo de Monterverdi marque un tournant dans l’histoire de la musique, conçu à une période charnière qui symbolisera la frontière entre le style de la fin de Renaissance et celui du début du Baroque avec la naissance de l’opéra. Même si le sujet du mythe Orphée et Eurydice a été à maintes reprises traité et mis en musique par les Florentins, ce nouvel Orfeo sera incroyablement accompli et orignal de par sa forme et sa cohérence. L’œuvre vit le jour le 22 février 1607 lors de l’ouverture des festivités du Carnaval à l’Académie des Invaghiti, lors d’une représentation « privée » puis dans une « petite salle » du Palais ducal le 24 février et enfin le 1er mars devant la ville comme la Cour devant son succès. Malgré sa grande qualité musicale (palette des voix, instruments baroques, expression des sentiments), ou sa fastueuse impression dès 1609 sous le contrôle du compositeur lui-même, l’œuvre va disparaître « aux enfers » et ne sera redécouverte qu’en 1904 par Vincent d’Indy qui en proposera une version abrégée à la Schola Cantorum. Il faut donc attendre 1930 que Gian Francesco Malipiero publie une édition fidèle à celle de Monteverdi avant que le regain baroque ne lui rende ses lettres de noblesse et ne le transforme en « tube» incontournable.
En coproduction avec le Theater an der Wien, l’Opéra national de Lorraine reprend la recette qui avait fait l’intérêt de sa production du Messie d’Haendel. C’est donc dans une mise en scène contemporaine de Claus Guth – directeur allemand de théâtre – qu’est présenté l’Orfeo en ce début d’année. L’expression des joies et des peines que renferme la vie, est criante de vérité, d’authenticité. Guth humanise Orfeo en lui conférant un rôle expressif face à la perte brutale et surtout inattendue d’un être cher, en l’occurrence sa femme Eurydice. Pour cela, Christian Schmidt offre un décor soigné et sobre : l’intérieur d’une maison bourgeoise doté d’une bibliothèque, un imposant escalier – symbolisant « l’ascenseur » entre les Cieux et les Enfers – ouvrant sur une immense mezzanine, avec de confortables canapés, un éclairage assuré par des lampadaires gardant des zones d’obscurité sur scène, selon les nuances du chiaroscuro, si chères à beaucoup d’artistes baroques.
Sans revenir sur la structure classique en un prologue et cinq actes, déroulons en même temps que le drame les mérites ou réserves de cet après-midi : la tonitruante Toccata en ré majeur ouvre l’opéra. Christophe Rousset impose sa conduite avec maîtrise et emmène les musiciens des Talens lyriques dans le spectaculaire. La qualité de l’instrumentation se fait sentir dès les premières notes lancées par les cuivres (trompettes, trombones) soutenues rythmiquement par un tambour, puis l’ensemble des autres instruments (cordes : violons, altos, harpe, théorbes, guitares, basse de viole, lirone, violoncelle, contrebasse, clavecin et orgue + régale et vents : flûtes à bec, cornets) qui vient renforcer l’opulente « fanfare » d’ouverture. Une basse continue opulente et soutenue permettra par sa ductilité et sa précision d’accompagner Orphée dans son périple tout en l’humanisant.
Côté distribution, La Musica interprétée par Carol Garcia explique le pouvoir de la musique. L’artiste tiendra également le rôle de la Messagère et l’Espérance et dénote une voix ample et colorée. On admire le soin apporté à la prosodie avec les voyelles bien structurées par les consonnes, de même qu’une belle gestion du souffle. Lors du mariage d’Orfeo et Eurydice, un temple grec est édifié par le chœur et figurants en un retour vers le passé voulu par le metteur en scène, alors que les toges portées par La Musica, les bergers et nymphes rappellent l’Antiquité. Le chœur de l’Opéra national de Lorraine dégage une admirable homogénéité lors de ces jeux et a montré une belle couleur et souplesse tout au long de la représentation.
Gyula Orendt, tenant du rôle titre Orfeo, pose sa voix sur une solide maîtrise de l’outil vocal et met en surbrillance ses talents d’acteur dramaturge (lors de sa propre mort, il rampe à plat ventre tête en bas dans l’escalier – descente aux Enfers – sans faire vaciller son chant.). En Eurydice, Emöke Baràth tient son rôle avec grâce : la déclamation n’est pas exagérée, le timbre ample. Autour d’eux gravitent les bergers interprétés respectivement par Reinoud Van Mechelen, Alexander Sprague, Nicholas Spanos et Daniel Grice, qui disposent chacun d’une bonne projection, d’une assurance scénique notamment lorsqu’ils déambulent sur la scène (en toge). Une note d’humour voulue par le metteur en scène s’affiche lors de la cérémonie nuptiale par une banderole « Just Married » sans oublier les boîtes de conserve… Mais voilà bien cruel destin que de mourir peu de temps après ses noces, et la notion du bonheur si fragile se fait sentir grâce à la sensibilité d’acteur de Gyula Orendt notamment dans de superbes récitatif et aria “Tu se’ morta, mia vita, ed io respiro ».
Pour les Enfers, le Charon de Gianluca Buratto met en garde Orphée “O tu ch’innanzi morte a queste rive” et impressionne par l’étendue de son étendue vocale de voix de basse. Elena Galitskaya (Proserpine, reine des Enfers) impose sa royauté avec son beau et riche timbre de soprano lui permettant ainsi de combler les oreilles des auditeurs. Toutefois, le seul bémol à apporter dans l’homogénéité de la distribution, est la prestation de Damian Thantrey qui a semblé souffrir d’un manque de projection, et vient donc se butter dans le masque de l’orchestre, ce qui est un comble pour le final apollinien.
Et alors que le héros perd son Amour mais conserve la vie, on salue Christophe Rousset et son ensemble Les Talens lyriques qui ont entraîné l’auditoire à vivre ce drame avec une humanité à fleur de peau. « 

ResMusica

« Claus Guth y reste fidèle à sa conception dramaturgique coutumière. Que Monteverdi et son librettiste Alessandro Striggio aient choisi délibérément un musicien, qui charme même l’Enfer par son chant, pour héros de ce qui est souvent considéré comme un des premiers voire le premier chef d’oeuvre de l’opéra, que cette histoire se soit élevée au rang de mythe dès la civilisation grecque, tout cela lui importe peu. Ce qui l’intéresse, ainsi qu’il l’annonce dans le programme de salle, c’est la dimension humaine d’Orphée, qui devient notre contemporain, habitant une maison au design léché où ses amis organisent une fête péplum au caractère bacchique appuyé pour célébrer ses noces avec la jolie Eurydice. Mais la liesse vire à la tragédie avec la mort soudaine et accidentelle de la jeune fille. Dès lors, Claus Guth va analyser avec une précision clinique les conséquences de la perte de l’être aimé pour le survivant, la douleur, l’absence et le sentiment d’abandon, les stratégies mises en œuvre pour ignorer la mort, à base de réminiscences et d’apparitions rêvées. Mais quand la cruelle réalité finit par s’imposer à lui, Orphée n’a plus que le choix du suicide, rejoignant ainsi son mentor Apollon et sa bien-aimée.
Si l’on y perd en noblesse de la légende ou en didactisme de la fable, si la nécessité de coller un tant soit peu au texte pousse parfois Claus Guth à quelques excès prosaïques (Charon s’endort après avoir fumé un joint), ces menues libertés choquent beaucoup moins que celles prises avec le texte sacré du Messie. Mais surtout, secondée par le réalisme cinématographique des décors et costumes et par une direction d’acteurs d’une incroyable intensité, cette énième actualisation nous touche au cœur, nous fait ressentir pleinement le drame et le délire d’Orphée, notre alter ego dans sa misérable condition humaine, et nous bouleverse comme rarement. En témoignent les yeux humides de maints spectateurs aux plaintes d’Orphée ou le calme et le silence remarquables des scolaires face à une œuvre dont les longs recitar cantando pourraient paraître arides à de non initiés.
Claus Guth dispose d’un atout supplémentaire pour nous émouvoir : le baryton Gyula Orendt, déjà remarquable en Guglielmo de Cosi fan tutte. Dans le rôle-titre, guidé par la précision des indications du metteur en scène, il montre des capacités d’acteur étonnamment riches et variées et campe un Orfeo d’une vérité poignante. Mais, malgré l’énergie dépensée sans compter dans ce travail scénique intense, le chant n’est jamais négligé et la voix traduit toutes les émotions par une exceptionnelle palette d’émissions, de couleurs, d’intonations. Une incarnation magistrale et reçue comme telle par le public au rideau final. A ses côtés, Emöke Baràth est une Euridice diaphane et touchante, à la vocalité limpide. Dans le triple rôle de la Musique, la Messagère et l’Espérance, Carol Garcia montre à nouveau toutes ses affinités pour le chant baroque, différenciant soigneusement ses diverses personnalités et attentive au texte, dont l’intelligibilité reste cependant perfectible. Gianluca Buratto est un irréprochable Charon / Pluton aux graves profonds à souhait mais qu’on souhaiterait encore plus sonores et Elena Galytskaya se fait remarquer dans sa courte scène en Proserpine.
A la tête de ses Talens lyriques, Christophe Rousset s’est doté d’une basse continue très étoffée pour faire vivre le drame et soutenir le chant. Il y parvient magnifiquement, dans une optique globalement sombre, par la variété des alliages de timbres, la richesse inaccoutumée des textures orchestrales, la souplesse et la cursivité d’un discours constamment relancé et d’une fluidité totale. Quoique peu habitué au style monteverdien, à la frontière entre Renaissance et baroque, le Chœur de l’Opéra national de Lorraine, très bien préparé par Merion Powell, tient sa partie avec conviction et réussite. »

Diapason

« Claus Guth l’affirme, c’est l’homme Orphée qui l’intéresse, et non le musicien. Partant, le monologue de la Musica qui, tel un manifeste, ouvre le premier opéra de Monteverdi, l’embarrasse : femme drapée de blanc, vaguement à l’antique, devant un rideau non moins immaculé… qui révèle le cadavre du poète suicidé aux somnifères et au whisky. Le metteur en scène allemand n’a-t-il donc rien de mieux à offrir qu’un sempiternel flash-back pour inscrire la fable dans ce réalisme cinématographique qu’il appliquait, à Nancy déjà, au Messie de Handel ?
Une dramaturgie transcendée par le souci du détail – Après deux premiers actes plus clichés que ludiques, où nymphes et bergers potaches envahissent la maison du poète et font tourner un inévitable joint, la brutalité du deuil emplit l’espace de visions cauchemardesques ou des tentations d’un au-delà idéalisé, auxquelles Orfeo finit par succomber. Reste que cette dramaturgie plus facile qu’abyssale dans son exploration de la psyché du protagoniste, et qui fait sciemment l’impasse sur la dimension syncrétique – mythique, philosophique et chrétienne – de l’œuvre, est souvent transcendée par ce souci du détail, ce perfectionnisme quasi obsessionnel qui métamorphosent chacun sur le plateau, qu’il soit soliste, choriste ou figurant, en un acteur prodigieux.
Une distribution qui frôle la perfection – À commencer par le baryton Gyula Orendt, qui incarne le rôle-titre avec un engagement, un naturel physique et vocal absolument stupéfiants, jusque dans les redoutables diminutions de son Possente spirto. Avec l’Euridice lumineuse d’Emöke Baràth, les Musica et Messagiera intensément pulpeuses de Carol Garcia, la distribution réunie par l’Opéra national de Lorraine frise d’ailleurs la perfection – mention spéciale pour le berger de Reinoud van Mechelen, dont l’aisance vocale et stylistique fait une nouvelle fois sensation, malgré la brièveté de sa partie.
Avec Orfeo Christophe Rousset clôt sa trilogie monteverdienne – Vingt ans après son premier Couronnement de Poppée, qui marquait les débuts de Talens Lyriques alors balbutiants dans une fosse d’opéra, Christophe Rousset clôt – enfin – sa trilogie monteverdienne par une ascèse. Au geste concis de leur chef, toujours au plus près du mot et du sens, les musiciens répondent par des textures raréfiées (aux antipodes du déluge de cordes pincées actuellement en vogue dans ce répertoire), d’un autre monde déjà, et tout simplement bouleversante. »

Radebeul, Landesbühnen Sachsen – 22 novembre, 13 décembre 2013, 30 janvier, 7 février 2014 – dir. Jan Michael Horstmann – mise en scène Jan Michael Horstmann – décors Stefan Wiel – costumes Merit Mohr – avec, Anna Erxleben (La Musica), Peter Diebschlag (Orfeo), Miriam Sabba (Euridice/Eco), Silke Richter (Messagera/Speranza), Patrizia Häusermann (Proserpina), Antje Kahn (Ninfa/Spirito), Paul G Song (Plutone), Hagen Erkrath (Caronte), Andreas Petzoldt (Apollo/Pastore/Spirito), Fred Bonitz (Pastore/Spirito)



Lausanne, Opéra de Lausanne – 27 octobre 2013 – version de concert – Ensemble Elyma – dir. Gabriel Garrido – avec Holger Falk (Orfeo), María Cristina Kiehr (Musica/Speranza), Luciana Mancini (Messaggiera), Capucine Keller (Euridice), Mariana Rewerski (Proserpina), Stephan MacLeod (Pluton), Stephan Imboden (Caronte), David Hernandez (Pastore I), Jaime Caicompai (Pastore II), Maximiliano Banos Pastore III, Valerio Contaldo (Apollo)
intégrale audio – 2 CD Premiereopera

 

Perm – Russie – Opera Theatre – 20, 22 octobre 2013, 30, 31 janvier 2014 – dir. Valery Platonov – mise en scène Georgy Isaakyan – décors Ernst Heidebrecht – lumières Sergey Martynov – chef de choeur Dmitry Batin



Bourg-en-Bresse, Théâtre – 3 octobre 2013 – Saint-Etienne, Grand Théâtre Massenet – 8 octobre 2013 – Opéra de Vichy – 11 octobre 2013 – Opéra de Reims – 19, 20 octobre 2013 – Orchestre et choeur de la 20e Académie baroque européenne d’Ambronay – dir. Leonardo García Alarcón – mise en scène Laurent Brethome – décors Rudy Sabounghi – costumes Marie-Frédérique Fillon – lumières David Debrinay – chorégraphie Yan Raballand – avec Fernando Guimarães (Orfeo), Francesca Aspromonte (La Musique), Reut Ventorero (Eurydice), Angelica Monje Torrez (La Messagère), Iosu Yeregui (Charon), Claire Bournez (Proserpine), Yannis François (Pluton), Riccardo Pisani (Apollon), Capucine Keller / Alice Kamenezky (Ninfas), Hugo Bolivar (Pastore I), Alexis Knaus (Pastore II), Julian Millan (Pastore III)




Forum Opéra

 » Loin du patronage dont ce genre de spectacle se rapproche parfois, l’Académie baroque d’Ambronay s’est donné les moyens de présenter un véritable spectacle, grâce à la coproduction assurée avec plusieurs institutions, dont le Théâtre de Bourg-en-Bresse, l’Opéra de Reims – où ont été fabriqués les décors – et l’Opéra-Théâtre de Saint-Etienne, où ont été réalisés les costumes et où cet Orfeo était de passage pour un soir, en version scénique, après qu’on a pu l’entendre en concert dans d’autres lieux, notamment à Bruxelles.
(Jeune) homme de théâtre, Laurent Brethome semble avoir fait pour l’occasion ses premiers pas dans l’opéra, mais il pouvait compter sur l’aide d’un scénographe expérimenté dans ce domaine, en la personne de Rudy Sabounghi, connu pour ses collaborations avec Luc Bondy et bien d’autres. Il y a de bonnes idées dans ce spectacle, et de magnifiques effets créés par une habile mise en lumière des décors par David Debrinay, avec notamment de belles transparences et ombres chinoises lorsque le héros retrouve Eurydice pour la perdre aussitôt. Les costumes de Marie-Frédérique Fillon sont contemporains, avec des bergers en tenue de soirée, un Caron punk et un Pluton aux allures de Dark Vador. Hélas, à l’impossible nul n’est tenu, et le livret de Striggio ne brille pas par ses qualités dramatiques : les deux premiers actes s’enchaînent sans temps mort, dans une ambiance fêtarde liée aux noces d’Orphée, mais il est bien difficile ensuite d’éviter ces tunnels que constituent les longs monologues du musicien, finalement déchiré par les Bacchantes, conformément à une version du livret dont la mise en musique n’a pas été retrouvée. Les quatre danseurs présents tout au long du spectacle tiennent ce rôle, après avoir été les chiens de Caron et avoir égayé la fête initiale de leurs évolutions gracieuses ou acrobatiques.
Pour assumer le rôle écrasant d’Orphée, Leonardo García Alarcón a fait appel à un de ses fidèles, Fernando Guimarães, déjà présent aux Académies d’Ambronay en 2008 et 2009. Le choix d’une voix aiguë pour ce personnage laisse un peu dubitatif dans les deux premiers actes, où une voix plus chaude et plus sombre semblerait plus à sa place, mais le ténor portugais s’impose ensuite par sa virtuosité et, par un phénomène inversement proportionnel, gagne en assurance vocale à mesure qu’Orphée mis à l’épreuve perd de sa superbe, son smoking initial se déchiquetant peu à peu. De manière générale, toutes les voix entourant le héros semblent se situer dans un registre plus élevé que ce que donnent à entendre certaines versions de l’œuvre. On le constate notamment chez les basses : le Caron de Iosu Yeregui s’avère ainsi très nettement barytonnant, loin des graves caverneux d’autres titulaires du rôle. Cette remarque presque autant pour le Pluton de Yannis François. De même, parmi les chanteuses, on compte bien plus de sopranos que de mezzos, ce qui peut poser problème pour certains personnages. Si Claire Bournez est une très élégante Proserpine, on est en revanche déçu par la Messagère d’Angelica Monje Torrez, qui ne touche guère et ne parvient pas à communiquer dans son soliloque l’émotion viscérale qui devrait être associée à l’annonce de la mort d’Eurydice. Revenant à la fin du spectacle pour fermer le rideau, Francesca Aspromonte est, elle, une très éloquente Musique et, de sa voix sonore, sait donner aux mots tout leur poids. Les solistes et choristes interprètes des bergers s’investissent pleinement dans ce que la mise en scène leur demande (beaucoup de courses et d’agitation au départ, puis des trémoussements de danse lors d’une soirée visiblement bien arrosée) et s’acquittent sans faillir de leur mission vocale, avec un « Lasciate i monti » pris à toute allure.
De manière générale, Leonardo García Alarcón opte pour des tempos très allants, même dans les passages sombres comme la déploration d’Eurydice : donné sans entracte, le spectacle dure à peine 1h50. Familier de Monteverdi (qu’il a même osé apparier avec Astor Piazzolla), le chef argentin dirige avec élan cet orchestre de jeunes musiciens, depuis une ouverture tonitruante et rapide jusqu’au ballet final des Bacchantes superposé à la Moresca finale »

Londres, Barbican Centre, Hall – 28 septembre 2013 – version semi scénique – Academy of Ancient Music – dir. et clavecin Richard Egarr – John Mark Ainsley (Orfeo), Sophie Bevan (Eurydice), Daniela Lehner (La Musica / Speranza), Nathan Berg (Caronte), Thomas Hobbs (Apollo / Pastore)


Berlin, Komische Oper – 19, 27 septembre, 3, 12, 27 octobre, 23 novembre 2013 – en allemand – dir. André de Ridder – mise en scène Barrie Kosky – costumes Katharina Tasch – lumières Alexander Koppelmann – chorégraphie Otto Pichler – chef de choeur André Kellinghaus – dramaturgie Ulrich Lenz – traduction Susanne Felicitas Wolf – avec Dominik Köninger (Orpheus), Mirka Wagner (Eurydike), Peter Renz (Amor), Theresa Kronthaler (Sylvia/Proserpina) , Alexey Antonov (Pluto), Stefan Sevenich (Charon)


Bucarest, Ateneul Roman – 7 septembre 2013 – version de concert – dir. Claudio Cavina – Roberta Mameli (La Musica/Euridice), Furio Zanasi (Orfeo), Josè Maria Lo Monaco (Messagera/Speranza), Monica Piccinini (Proserpina/Ninfa), Raffaele Costantini (Plutone), Salvo Vitale (Caronte), Makoto Sakurada (Apollo/Pastore), Alessio Tosi (Pastore/Spirito), Raffaele Pe’ (Pastore), Mauro Borgioni (Pastore/Spirito)

 

Passau, Fürstbischöflichen Opernhaus – 23, 24, 26 mars, 5, 6, 19, 26, 27 avril 2013 – dir. Wolfgang Katschner – mise en scène Kobie van Rensburg – décors, costumes Dorothee Schumacher, Lutz Kemper – avec Albertus Engelbrecht / Dávid Szigetvári (Orfeo), Jasmin Hörner (Musica/Ninfa), Mandie de Villiers-Schutte (Eurydike), Sabine Noack (Silvia/Speranza/Proserpina), Kyle Bradley (Pastore 1), Wolfgang Frisch (Pastore 2), David Szigetvári / Peter Tilch (Pastore 3), Michael Wagner (Pastore 4), Michael Wagner (Caronte), Peter Tilch / Michael Wagner (Plutone), Peter Tilch (Apollo), David Szigetvári / Wolfgang Frisch (Echo) – nouvelle production



Radebeul, Landesbühnen Sachsen – 16, 24, 29 mars, 13 avril, 16 mai 2013 – dir. Jan Michael Horstmann – mise en scène Jan Michael Horstmann – décors Stefan Wiel – costumes Berit Mohr – avec Anna Erxleben (La Musica), Peter Diebschlag (Orfeo), Miriam Sabba (Euridice/Eco), Silke Richter (Messagera/Speranza), Patrizia Häusermann (Proserpina), Paul G Song (Plutone), Hagen Erkrath (Caronte), Andreas Petzoldt (Apollo/Pastore/Spirito), Fred Bonitz (Pastore/Spirito), Antje Kahn (Ninfa/Spirito)


extraits vidéo

http://www.youtube.com/watch?v=3eTEFrYMsqk

Opéra d’Avignon – 31 octobre 2012 – Ensemble Les Nouveaux Caractères – dir. Sébastien d’Hérin – mise en scène Caroline Mutel – avec Jean-Sébastien Bou (Orfeo), Nicolas Courjal ou Jérôme Varnier (Pluton, un Esprit), Caroline Mutel (La Musique), Hjördis Thébault (La Messagère), Virginie Pochon (Eurydice), Théophile Alexandre (L’Espérance), Jean-Paul Bonnevalle (un Berger, un Esprit), Ronan Nédélec (Apollon, un Berger), Sarah Jouffroy (Proserpine, La Nymphe), Lisandro Nesis ou Svetli Chaumien (un Berger, un Esprit), Julien Picard (un Berger), Geoffroy Buffière (Caron)


Concertclassic

« Prototype du genre lyrique – moyennant quelques accommodements avec la chronologie – l’Orfeo de Monteverdi, fable plus qu’opéra, se distingue par sa simplicité dramatique. Une toile soutenue par trois mâts derrière laquelle s’esquissent les apparitions venues de l’au-delà, quelques planches et les instrumentistes sur les côtés du dispositif, la mise en scène imaginée par Caroline Mutel, qui tient par ailleurs avec sensibilité le rôle de La Musique, se met au diapason de l’extraordinaire économie de moyens de la partition – mesurons la beauté de la métaphore consistant à confier les ficelles du récit à la Muse. Créée en 2011 au Théâtre de La Renaissance d’Oullins où Les Nouveaux Caractères étaient en résidence – ils sont désormais accueillis par la Chapelle de la Trinité à Lyon – la production a été présentée à Versailles en janvier dernier, puis à Besançon. C’est dans le cadre du festival de Musique Ancienne Avignon-Vaucluse qu’elle est accueillie par la cité des Papes, avant une tournée l’année prochaine.
Ceux qui ont assisté aux représentations à l’Opéra Gabriel ne peuvent manquer d’être frappés par son intelligence, ayant su s’adapter aux variations des dimensions de plateau. Le resserrement de celui de l’Opéra-Théâtre d’Avignon favorise une intimité soulignée par des éclairages évocateurs, dûs à Fabrice Guilbert : blafards dans le royaume des Morts, solaires dans l’Assomption finale sous les auspices d’Apollon. Le résultat dévoile un naturel que les ors et la vastitude versaillais n’autorisaient pas, et nourrit audiblement les interprètes. Dans le rôle de l’aède mélancolique, Jean-Sébastien Bou déploie jusqu’au murmure un remarquable nuancier affectif. Délicate Virginie Pochon en Eurydice, Messagère d’une belle intensité par Hjordis Thebault, rayonnante Proserpine de Sarah Jouffroy aux côtés du solide Pluton de Jérôme Varnier, royale apparition de Ronan Nédelec en Apollon, la distribution affiche une diversité poétique analogue à celle de l’ouvrage. Geoffroy Buffière compose un Caron à l’émission ronde et sombre, mais sans excès.
Il n’y a pas jusqu’aux Nouveaux Caractères que l’on ne sent portés par l’alchimie de la soirée. Sébastien d’Hérin révèle les deux polarités de la musique de Monteverdi, entre l’éclat rude des sacqueboutes et des cornets, exemplaire dans la toccata inaugurale, et les accords diaphanes de la harpe ou de la viole de gambe – admirable Martin Bauer. Effectif limité – dix instrumentistes seulement – mais souplesse expressive maximale. On émettra quelques réserves quant à l’Espérance sur pointes de Théophile Alexandre et le contre-ténor de caractère Jean-Paul Bonnevalle, berger et Esprit, truculent quoique dépourvu de l’abattage d’un Dominique Visse, sans pour autant altérer un spectacle qui semble avoir trouvé sa vérité. « 

ClassiqueInfo.com – La beauté du classicisme

« Les Nouveaux caractères, nouvel ensemble de musique ancienne fondé en 2006 par Sébastien d’Hérin et Caroline Mutel montraient à Besançon leur version de l’Orfeo de Monteverdi. Présents sur scène, le proscenium étant comblé de fauteuils, ils se partageaient en deux pôles instrumentaux, la partie droite étant réservée à l’orgue, la viole de gambe et la harpe. A gauche, deux violons, un violone, un théorbe, un clavecin et deux cornets/flûtes à bec ainsi qu’une régale et trois sacqueboutes.
Précisons toutefois que cet instrumentarium est très léger par rapport au nombre considérable d’instrumentistes demandé par Monteverdi à l’époque, et que l’approche de Sébastien d’Hérin n’engage que lui, mais également que l’adaptation et le choix de la quantité des instruments ne vont pas forcément dans le sens qu’on croit, c’est-à-dire vers le minimalisme instrumental. Ceci dit, les treize instrumentistes suffisaient à rendre à cette partition très estimée et fondatrice pour l’histoire de la musique l’essentiel de ses couleurs.
Habillés comme les chanteurs en costumes du début du seicento italien, certains musiciens participaient partiellement à l’action. L’intervention de la violoniste et de la cornettiste pour l’écho avec les coulisses, ou celui de la harpiste au centre pour un discret échange théâtral avec Orphée désenclavent l’espace. Une douce lumière rappelant celle des chandelles, éclatante pour la joie, crue et blafarde pour la tristesse, raconte elle aussi l’histoire qui a tant inspiré peintres et musiciens. Elle suffit à animer un décorum simple lui aussi, unique et sans surcharges. Un fond noir fait ressortir trois voiles blancs bordant une passerelle en bois légèrement surélevée par laquelle toutes et tous arrivent, apportant leur lot de joies et de souffrances. Comme dans le théâtre classique, on ne montre pas crûment la mort, mais on l’évoquera ici en ombres chinoises projetées derrière le voile blanc, comme une vision poétique d’outre-tombe : Eurydice, cueillant des fleurs, piquée par le serpent, s’écroule, accompagnée par la couleur rose qui envahira la scène.
Le baryton Jean-Sébastien Bou sera un Orfeo sobre dans la joie, puis sombre quand le malheur arrive, comme tous les personnages qui l’entourent. Chant intériorisé, gestes pesés, sa présence est évidente de retenue et non pas moins efficace pour autant. De même pour Virginie Pochon dans une Eurydice qui n’est plus jeune fille, toute vêtue de blanc symbolique, se mouvant avec grâce et chantant avec la délicatesse qu’il convient à ce style d’écriture vocal raffiné où le respect de chaque nuance et une articulation précise sont la clé du succès. L’exubérance ne sera de mise nulle part, nous ne sommes par encore dans le grand opéra baroque vénitien, ce que les interprètes ont très bien compris.
Caroline Mutel aura la délicate tâche de l’entrée en matière dans le prologue où elle chante l’allégorie de la Musique, Geoffroy Buffière (baryton-basse) en Caron drapé de noir, Jérôme Varnier (basse) en Pluton hautain, Ronan Nédélec (baryton) en Apollon réconfortant et Sarah Jouffroy en Proserpine dominatrice entourée d’un vêtement rouge sang (mezzo-soprano) s’imposeront sans mal malgré leurs brèves interventions face au rôle-titre prédominant : voix sonnantes et très typées, ancrées dans la terre. Le ciel sera réservé aux hautes-contre Théophile Alexandre (l’Espérance) et Jean-Paul Bonnevalle (rôle multiple). Hjördis Thébault (soprano) sera émouvante en Messagère du malheur.
Le classicisme évoqué sur scène retiendra l’attention deux heures continues, un classicisme serein, probe et habité, sans poudre aux yeux ni aux oreilles. »

Inferno

« Cet Orfeo, interprété par «Les Nouveaux Caractères», troupe de musique ancienne fondée et dirigée par Sébastien d’Hérin, constitue un beau sujet pour évoquer les passerelles entre les vivants et les morts en cette veille de Toussaint. L’opéra de Monteverdi s’inspire directement de la mythologie grecque, large source d’inspiration de tous les Arts de la Renaissance, interprétée et idéalisée au goût de l’époque.
Le mythe d’Orphée est bien connu et s’est révélé être au fil des siècles une source d’inspiration récurrente. Orphée et Eurydice s’aiment d’un amour ardent. Le bonheur est éphémère et Eurydice meurt, victime de la morsure d’un serpent. Orphée, accompagné par l’Espérance, décide d’aller arracher sa bien-aimée à la mort. Il endort Charon, le passeur des enfers, et franchit le Styx. Proserpine, qu’il a charmé par sa lyre et son chant, convainc Pluton, le dieu des enfers, de laisser partir Eurydice vers le monde des vivants. Pluton accepte de laisser Eurydice suivre Orphée à condition que celui-ci ne se retourne jamais. Orphée, saisi d’un doute et tourmenté par sa passion, désobéit à Pluton. Il se retourne pour admirer Eurydice qu’il voit alors disparaître à tout jamais.
Que devient Orphée après la perte d’Eurydice ? Le mythe comporte plusieurs variantes dont certaines terrifiantes comme seule la mythologie grecque a su en imaginer. Le livret de l’Opéra retient la montée d’Orphée au ciel pour rejoindre son père Apollon où il pourra voir Eurydice dans les étoiles. Version sans doute plus conforme à l’esprit de la Renaissance, largement inspiré des mythes antiques mais profondément chrétien.
Les principaux personnages sont accompagnés d’un chœur de bergers, de nymphes et d’esprits infernaux et de personnages allégoriques, la Musique et l’Espérance, qui font office de coryphée à l’instar du théâtre antique grec. Cette « fable en musique» fut présentée en 1607 à la Cour du duc de Mantoue comme «un spectacle inhabituel où les acteurs disent leur partie en musique» dans le but de «contenter l’œil, l’oreille et l’entendement».
Dans cette version des «Nouveaux Caractères» l’opéra est magnifiquement interprété par une douzaine de musiciens et autant de chanteurs solistes et choristes. La mise en scène et le décor, constitué de grandes voiles qui évoquent le voyage, sont sobres et conviennent parfaitement à cet opéra dont l’action reste secondaire. L’accent est mis avant tout sur la narration et l’expression poétique des sentiments humains.
Les musiciens jouent sur scène, ce qui renforce l’aspect intimiste de l’opéra, et l’ensemble évoque un spectacle de salon comme cela était sans doute le cas lors de la création de l’œuvre. La musique, jouée sur des instruments d’époque à la sonorité et au timbre incomparables, est d’une grande beauté, pure et limpide, et laisse pressentir l’ornementation et l’esthétisme du baroque naissant. Elle sait s’effacer devant les voix et les chœurs pour rendre le texte, très poétique, parfaitement intelligible. C’est peut-être en ce sens que l’Orfeo est considéré comme le premier opéra. Monteverdi propose une forme musicale nouvelle dont le but semble être la recherche d’une synergie entre la musique et la poésie.
Les voix des solistes et les chœurs sont très homogènes et d’un bon niveau. On retiendra en particulier la prestation de Jean-Sébastien Bou qui, d’une voix de ténor claire et sonore, incarne un Orphée aveuglé par Eurydice et traduit bien les émotions et sentiments qui le traversent. Successivement l’amour-passion, le désespoir, l’espérance, le doute et l’amour fou qui détruit tout.
Orphée est profondément humain. La quête d’Eurydice aux enfers est une folie que seul l’amour provoque mais constitue également un voyage initiatique où Orphée se découvre lui-même. Comme le chante le chœur : «il sera digne de gloire éternelle celui-là seul qui saura se vaincre lui-même».
Orfeo constitue ainsi une belle entrée en matière à la saison lyrique de l’Opéra-théâtre d’Avignon et on ne peut qu’encourager la programmation d’opéras de cette époque qui restent souvent méconnus mais qui constituent de véritables joyaux musicaux. La Beauté n’est pas indispensable à l’Art mais elle en reste un solide support. »

Forum Opéra

« C’est un véritable retour aux sources que ce spectacle donné à l’Opéra Théâtre d’Avignon dans le cadre du Festival de Musique Ancienne Avignon-Vaucluse. L’Orfeo de Monteverdi, favola in musica, unanimement reconnu comme la première forme achevée du dramma per musica, propose une synthèse magistrale des expérimentations de la Camera fiorentina et des formes musicales héritées des siècles précédents. On peut l’imaginer dans un cadre richement orné, avec tout un luxe de décors et de dorures évoquant les fastes anciens du palais ducal de Mantoue. On peut aussi renouer avec ce moment unique et fragile qui voit naître progressivement, au cours d’une soirée, un art nouveau que ses interprètes eux-mêmes découvrent en l’inventant collectivement. C’est ce parti qu’ont choisi l’ensemble de musique ancienne Les Nouveaux Caractères, dirigé par Sébastien d’Hérin, et Caroline Mutel, dans sa mise en scène dépouillée, sobre, intensément humaine.
Quatre cent cinq ans, huit mois et quelques jours après la création (le 24 février 1607) de cet opéra originel, voilà que nous sommes de nouveau sous l’emprise de la magie première du spectacle lyrique. L’absence de rideau de scène crée une proximité immédiate avec le plateau, où s’installent les musiciens répartis en deux groupes, participant ainsi à la mise en espace, côté jardin (violons, violine, clavecin, cornets, flûtes et plus tard sacqueboutes) et côté cour (orgue, viole de gambe, harpe), tandis qu’une structure en bois, d’une grande simplicité mais éminemment symbolique, occupe le centre. Un parcours légèrement sinueux, sorte de chemin de l’existence, est borné par trois mâts, deux voilages, trois bouts de ficelle – matériaux simples évoquant la proximité de l’humain. De magnifiques effets de lumière (Fabrice Guilbert) créent tout au long du spectacle des effets de clair-obscur particulièrement réussis, font des voilages une extension de la robe de mariée d’Eurydice, puis les transforment en tenture transparente (derrière laquelle on voit en ombre chinoise Eurydice piquée par un serpent), en voiles de navire (on songe aux Argonautes), en écran, en cloison entre deux mondes, celui des vivants et celui des morts – la harpe, à l’acte III, est placée au point de jonction. Les chanteurs, comme les musiciens, sont vêtus sans apprêt particulier, dans la neutralité d’une tenue XVIIe siècle, évoquant, en accord avec la tonalité champêtre du contexte, leur rôle de représentation de l’humanité tout entière. Se distinguent bien sûr, par leurs costumes, les figures allégoriques et mythologiques, la Musique d’abord, dans sa robe blanche, Caron dans sa toge sombre, Pluton et Proserpine en majesté, l’Espérance dans son rôle de guide et Jupiter lors de l’apothéose finale. Ces contrastes, dus au travail d’Adeline Caron et de Marie Koch, mettent en valeur tout ce qui distingue la vie humaine des représentations de son destin.
Dès que les trompettes font leur entrée dans la salle et jouent devant les premiers rangs, marquant l’ouverture de la représentation et tissant un lien entre l’espace de la scène et celui de la salle, le public est partie prenante de l’expérience qui peut alors se dérouler, d’un seul tenant, sans entracte. C’est une parfaite réussite, un équilibre de chaque instant. La soprano Caroline Mutel est la Musique (et à ce titre, au sens propre, met en scène la fable d’Orphée) à qui elle prête sa voix souple, d’une grande ductilité, servie par de très beaux aigus. L’Orfeo du baryton Jean-Sébastien Bou est confondant de justesse, usant avec mesure de son timbre limpide, recourant à un phrasé passionné dans l’acte II, déployant avec distance la virtuosité des ornements spectaculaires de l’acte III afin de séduire Caron, exprimant sa plainte ensuite avant tout pour lui-même. Toute en intériorité, cette prestation émeut véritablement, tout autant que celle de Virginie Pochon en Eurydice lumineuse, dont la voix moelleuse sait se faire sensuelle et douce. Hjördis Thébault, soprano d’une grande expressivité, incarne Silvia, la Messagère, en alliant à la clarté de son timbre un sens très sûr de la diction qui donne à son intervention toute la portée dramatique requise. Aux Enfers, Sarah Jouffroy est une Proserpine de grande classe, qui tient le public autant que son époux sous le charme de sa voix charnue, au timbre somptueux, tandis que Pluton enamouré est campé avec majesté mais non sans humour par Jérôme Varnier. Dans le dialogue qui l’oppose à Orfeo, Geoffroy Buffière donne à Caron la solidité de son phrasé et les couleurs sombres de sa solide voix de basse. L’Espérance est incarnée avec grâce par Théophile Alexandre, contre-ténor au timbre séduisant qui donne aussi par son jeu dramatique beaucoup de vie au personnage. Ronan Nédélec prête à Apollon la sage gravité d’une voix bien équilibrée. Signalons aussi les prestations remarquées de Jean-Paul Bonnevalle et de Pierre-Antoine Chaumien en Bergers et en Esprits, ainsi que de Julien Picard en Berger, qui toutes contribuent au succès de l’ensemble.
La direction de Sébastien d’Hérin, au clavecin sur scène, au sein de l’action, donne à la musique cette dimension voulue par Monteverdi qui est d’être à chaque instant au service du drame. Et de même que Monteverdi obtient par les moyens les plus simples une intensité nouvelle, le dépouillement de cette représentation accroît la profondeur de sa réception. En proximité avec les chanteurs, acteurs, musiciens, le public ressent que le verbe, le chant et la musique parlent avec évidence de son expérience. Belle idée d’ailleurs que cette représentation au soir du 31 octobre, veille de la Toussaint et avant-veille du jour des morts. Dans le programme de salle, un texte de Caroline Mutel évoque une « veillée mystique ». À l’issue du spectacle, en réponse à quelques questions, elle nous a fait part de sa volonté de restituer à l’opéra sa dimension proprement humaine, parlant de la fragilité d’Orfeo – remarque qui vaut tant pour le personnage que pour l’opéra lui-même, reflet de la condition humaine et qui ne tire sa légitimité que de l’assentiment que lui donnent auditeurs, spectateurs, acteurs, chanteurs et musiciens. C’est un peu comme si nous avions assisté, ce soir, à la naissance de l’opéra, rappelant que la beauté de toute entreprise est liée à sa caducité, entre carpe diem et memento mori, expressions de la mentalité de la Renaissance, constitutives de notre modernité. »

Boston, MA – New England Conservatory’s Jordan Hall – 24, 25 novembre 2012 – Boston Early Music Festival Chamber Ensemble – dir. Paul O’Dette & Stephen Stubbs – mise en scène Gilbert Blin – costumes Anna Watkins – chorégraphie Melinda Sullivan – lumières Lenore Doxsee – avec Aaron Sheehan (Orfeo), Teresa Wakim (Ninfa & Proserpina), Mireille Asselin (La Musica & Euridice), Shannon Mercer (Messagiera), Ryland Angel (Pastore I, & Speranza), Jason McStoots (Pastore II & Apollo), Charles Blandy (Pastore III), Olivier Laquerre (Plutone), Douglas Williams (Pastore IV & Caronte)



Perm Opera – Russie – 27, 28 octobre 2012, 7, 9 avril 2013

 

Berlin – Komische Oper – 16, 22 septembre, 3, 19 octobre, 4 novembre 2012, 5 juillet 2013 – dir. André de Ridder – mise en scène Barrie Kosky – décors Kathrin Lea Tag – costumes Kathrin Lea Tag, Katharina Tasch – lumières Alexander Koppelmann – chorégraphie Otto Pichler – chef de choeur André Kellinghaus – dramaturgie Ulrich Lenz – traduction en allemand Susanne Felicitas Wolf – avec Dominik Köninger (Orpheus), Julia Novikova (Eurydike/Apollo), Peter Renz (Amor/Die Hoffnung/Die Musik), Theresa Kronthaler (Sylvia/Prosperina), Stefan Sevenich (Charon), Alexey Antonov (Pluto) – nouvelle production



Forum Opéra

« La scène ne comporte pas de décor à proprement parlé mais présente une profonde et unique perspective abritant une serre tropicale dans laquelle évoluent les chœurs tantôt en sarabandes effrénées ou en danses villageoises, tantôt en bacchanales suggestives.
L’élément aquatique, omniprésent dans les trois opéras, évoque immanquablement la mort. Le trou d’eau ménagé au milieu de la scène représente le Styx dans lequel Orphée se noie à l’issu de son épopée.
Les costumes, tout comme la réorchestration, se modifient au fil des œuvres ; ils s’adaptent aux différents tourments que l’amour fait endurer aux protagonistes. Avec Orphée il se veut romantique et bucolique, le dieu Amour apparaît ici sous les traits d’un Bacchus sorti tout droit du tableau du Caravage évoluant au milieu de personnages féeriques (faunes, chimères…), tandis que les personnages du monde humain sont vêtus de façon contemporaine. Dans cette lecture, Orphée et Eurydice sont doublés par des marionnettes, empreintes d’une grande tristesse, qui évoquent les tourments qu’ils endurent. La dimension mimée est d’autant plus signifiante que les accompagnements orchestraux des opéras de cette époque ne sont pas aussi expressifs qu’ils le deviendront au cours des siècles suivants, et ce, en dépit des apports d’instruments aux sonorités balkaniques et proche orientales qui émaillent la partition. Les modifications apportées par Elena Kats-Chernin confèrent notamment aux récitatifs des accents exotiques rendant la musique suggestive et intemporelle. Toutefois, la ligne du chant Monteverdien peine à trouver un écho dans cet accompagnement désincarné, rendant leur juxtaposition parfois maladroite. L’exercice est d’autant plus périlleux que le texte est ici chanté en langue allemande.
L’Orphée campé par Dominik Köninger est impressionnant de sensibilité. Sa voix fraîche confère à son personnage toute sa crédibilité et son jeu juste donne le ton aux autres artistes. La maigre partie dévolue à Julia Novikova (Eurydice) ne lui permet pas de s’épanouir pleinement. Le rôle de l’Amour est, tout au long de la trilogie, la pierre angulaire de cette construction scénique. Ce personnage volontairement asexué est joué avec brio par Peter Renz très à l’aise dans une partition qui ne lui réserve cependant pas la vedette. L’émission de Theresa Kronthaler précise et justement placée fait sensation dans ses deux emplois (Sylvia et Proserpine). Le Charon de Stefan Sevenich, moins expressif, apparaît légèrement en retrait. Alexey Antonov présente un Pluton crédible dont l’instrument sonne pleinement en réponse aux imprécations d’Orphée. »

Opéra Magazine – novembre 2012

« Nouveau directeur du Komische Oper, Barrie Kosky a voulu marquer le début de son mandat par un coup d’éclat, en mettant en scène les trois opéras conservés de Monteverdi en une seule journée. Chantés en langue allemande, ils seront ensuite repris séparément en cours de saison. Non content de réaliser ce tour de force, Barrie Kosky a tenu à faire réorchestrer ces ouvrages par sa compatriote, Elena Kats-Chernin (née en 1957), afin de trouver un mode d’expression musicale plus adapté à notre temps.
La compositrice australienne ne s’encombre pas d’instruments anciens et de recherches philologiques, mais puise abondamment dans l’arsenal contemporain pour créer des alliages sonores étonnnants. Ainsi un synthétiseur voisine-t-il avec un bandonéon, alors qu’un Steinway ajoute du corps à la masse des cordes dans les moments de tension dramatique extrême.
Fort heureusement, la ligne de chant n’est pas trop retouchée. Mais il faut avouer qu’entendre la plainte d’Octavie accompagnée par des musiciens proche-orientaux, groupés autour d’un joueur de djoza (petite vielle répandue en Irak), enlève de son éloquence à la musique. Orpheus (L’Orfeo) s’accommode à peu près d’un tel rhabillage. Le décor unique se limite à un plan incliné ; à l’arrière, quelques éléments changent d’une œuvre à l’autre, situent l’action. Sauf pour les personnages mythologiques, habillés avec cette fantaisie débridée qui incitait les artistes de la Renaissance à représenter les dieux en cuirasse et jupette, juchés sur des cothurnes, les costumes sont résolument contemporains. Tout droit sortis d’un catalogue de La Redoute, ils sont apparemment là pour illustrer la pérennité des situations mises en musique par Monteverdi et assurer un minimum de cohérence à cette «trilogie» qui, de fait, n’en est pas une, les trois opéras n’ayant que peu de points en commun.
Orpheus se joue devant un foisonnement de plantes exotiques ; les longues séquences dansées, dans la chorégraphie d’Otto Pichler, sont marquées di sceau d’une exubérance que le coloris oriental de la musique accentue, tout en imposant l’idée d’une fête improvisée par une population en liesse. Par contraste, les séquences de deuil, jouées au ralenti par des chanteurs comme paralysés par la pepeur de l’au-delà, rendent justice à la grandeur tragique du sujet. »

Théâtre des Champs Elysées – 22 juin 2012 – Balthasar-Neumann Ensemble – Balthasar-Neumann Chor – dir. Thomas Hengelbrock – avec Nikolay Borchev (Orfeo), Anna Bonitatibus (Messagiera/ Proserpina), Johannette Zomer (La Musique), Anna Stephany (Speranza), Katja Stuber (Eurydice), Tiziano Bracci (Pluton), Miljenko Turk (Apollon), Marek Rzepka (Caron)
Opéra Magazine – septembre 2012

« Si l’on part du principe que l’Orfeo est l’un des tout premiers opéras de l’histoire, il est légiiime de le considérer comme le matin d’un jour nouveau. C’est le parti qu’ont pris les musiciens du Balthasar-Neumann-Ensemble de Thomas Hengelbrock, qui nous ont offert une représentation de concert pourvue d’une animation scénique réjouissante et légère. Les chanteurs s’expriment sans partition, avec quelques accessoires (une veste, un maquillage, un bandeau, une lance … ), comme s’ils donnaient la vie, devant nous, à quelque chose d’inédit : un opéra.
Oublions la «Toccata» initiale, bizarrement jouée au fin fond des coulisses, et qui parvient avec un son aigrelet dans la salle, car la soirée tout entière procure une bienfaisante impression de fraîcheur. Les chanteurs bougent avec souplesse, tantôt au premier plan, tantôt sur un praticable situé derrière l’orchestre, certains instrumentistes entrent ou sortent, et tout semble aller de soi.
Plusieurs solistes viennent du Balthasar Chor, mais si l’on excepte Guido Loconsolo et Marek Rzepka, qui n’ont pas la noirceur vocale inquiétante qu’on attendrait de Plutone et de Caronte, chacun est à sa place. On saluera la légèreté fruitée de Johannette Zomer, la douceur expressive de Katja Stuber, et surtout la présence dramatique d’Anna Bonitatibus, qui joue d’abord la Messagère, celle qui apporte la mauvaise nouvelle à Orfeo, puis Proserpina, celle qui convainc Plutone de laisser sa chance à l’amour.
Mais la révélation de la soirée est, sans conteste, le jeune baryton Nikolay Borchev, originaire de Biélorussie : velours du timbre, réserves de puissance et, partant, maîtrise de la projection, tout est réuni dans ce splendide artiste, dont l’élégance vocale et physique n’est pas la moindre qualité. Tous les mouvements scéniques qu’on a évoqués semblent faits pour lui permettre de rayonnner, et Thomas Hengelbrock donne vie à l’ensemble, en soignant les sonorités de l’épisode aux Enfers (corrnets, violons en écho, harpe) sans que jamais se délite l’entrelacs des instruments et des voix. »

Versailles – Opéra Royal – 10, 11 janvier 2012 – Besançon, Opéra Théâtre – 13 janvier 2012 – Les Nouveaux Caractères – dir. Sébastien d’Hérin – mise en scène Caroline Mutel – avec Jean-Sébastien Bou, Jérôme Varnier, Théophile Alexandre, Jean-Paul Bonnevalle, Geoffroy Buffière, Sarah Jouffroy, Caroline Mutel, Ronan Nedelec, Lisandro Nesis, Julien Picard, Virginie Pochon

Classiqueinfo.com

« Les Nouveaux caractères, nouvel ensemble de musique ancienne fondé en 2006 par Sébastien d’Hérin et Caroline Mutel montraient à Besançon leur version de l’Orfeo de Monteverdi. Présents sur scène, le proscenium étant comblé de fauteuils, ils se partageaient en deux pôles instrumentaux, la partie droite étant réservée à l’orgue, la viole de gambe et la harpe. A gauche, deux violons, un violone, un théorbe, un clavecin et deux cornets/flûtes à bec ainsi qu’une régale et trois sacqueboutes.
Précisons toutefois que cet instrumentarium est très léger par rapport au nombre considérable d’instrumentistes demandé par Monteverdi à l’époque, et que l’approche de Sébastien d’Hérin n’engage que lui, mais également que l’adaptation et le choix de la quantité des instruments ne vont pas forcément dans le sens qu’on croit, c’est-à-dire vers le minimalisme instrumental. Ceci dit, les treize instrumentistes suffisaient à rendre à cette partition très estimée et fondatrice pour l’histoire de la musique l’essentiel de ses couleurs.
Habillés comme les chanteurs en costumes du début du seicento italien, certains musiciens participaient partiellement à l’action. L’intervention de la violoniste et de la cornettiste pour l’écho avec les coulisses, ou celui de la harpiste au centre pour un discret échange théâtral avec Orphée désenclavent l’espace.
Une douce lumière rappelant celle des chandelles, éclatante pour la joie, crue et blafarde pour la tristesse, raconte elle aussi l’histoire qui a tant inspiré peintres et musiciens. Elle suffit à animer un décorum simple lui aussi, unique et sans surcharges. Un fond noir fait ressortir trois voiles blancs bordant une passerelle en bois légèrement surélevée par laquelle toutes et tous arrivent, apportant leur lot de joies et de souffrances. Comme dans le théâtre classique, on ne montre pas crûment la mort, mais on l’évoquera ici en ombres chinoises projetées derrière le voile blanc, comme une vision poétique d’outre-tombe : Eurydice, cueillant des fleurs, piquée par le serpent, s’écroule, accompagnée par la couleur rose qui envahira la scène.
Le baryton Jean-Sébastien Bou sera un Orfeo sobre dans la joie, puis sombre quand le malheur arrive, comme tous les personnages qui l’entourent. Chant intériorisé, gestes pesés, sa présence est évidente de retenue et non pas moins efficace pour autant. De même pour Virginie Pochon dans une Eurydice qui n’est plus jeune fille, toute vêtue de blanc symbolique, se mouvant avec grâce et chantant avec la délicatesse qu’il convient à ce style d’écriture vocal raffiné où le respect de chaque nuance et une articulation précise sont la clé du succès. L’exubérance ne sera de mise nulle part, nous ne sommes par encore dans le grand opéra baroque vénitien, ce que les interprètes ont très bien compris. »

Concertclassic

« Claveciniste de formation, Sébastien d’Hérin (photo ci-dessus) travaille dans l’amitié et la convivialité. Ainsi du présent Orfeo, dont il a demandé la mise en scène à la cantatrice Caroline Mutel : une vraie complice, par ailleurs requise pour le prologue de la Musica.
Réunissant une distribution où l’enthousiasme est la vertu première, avec en figure de proue l’Orphée de Jean-Sébastien Bou, d’Hérin entend imposer comme un retour aux sources dans cette dramaturgie fondamentale, qu’on peut saluer certes du titre de premier opéra, mais tout autant «fable en musique» prompte à stimuler l’imaginaire. Et ici intervient la qualité du livret de Striggio et, plus encore, l’intuition scénique du divin Claudio qui associe en magicien tout un passé madrigalesque à la modernité radicale du recitar cantando.
Pour autant, conscient des risques de l’aventure, le jeune chef dit aborder Monteverdi, « mû par un immense respect ». Mais avec la volonté d’y rendre palpable «toute la gamme du vécu des hommes». A l’image de la si regrettée Montserrat Figueras qui nous captiva tant de fois dans l’appel liminaire de la Musica. »

Opéra Magazine – mars 2012

« Si l’on part du principe selon lequel L’Orfeo de Monteverdi est le premier opéra digne de ce nom, le premier ouvrage qui fasse jouer de concert la musique, la fable et le drame, alors la profession de foi du chef d’orchestre et claveciniste Sébastien d’Hérin prend tout son sens : « Jaime à pcnser que le plus beau moyen de faire vivre aujourd’hui cette partition est de laisser la musique mettre en scène sa propre fable. »
Cet Orfeo est en effet signé par Caroline Mutel qui y joue et y chante le rôle de La Musica. Mais si sa présence comme interprète est lumineuse, son travail de metteur en scène convainc beaucoup moins. Indiquer deux ou trois déplacements ne suffit pas, et ce spectacle souffre de trop ressembler à une esquisse. Ici, on écarte les bras et on regarde le ciel pour montrer qu’on jouit du printemps, on joue avec des accessoires vestimentaires qui deviennent des voiles, mais tout paraît timide et improvisé.
Pour convaincre Plutone de donner à Orfeo une chance de retrouwr Euridice, Proserpina dégage ses épaules de ses vêtements et libère ses cheveux, dans un geste qui se veut sensuel : hélas, ici encore, le mouvement n’est pas travaillé, de même que la grâce n’est pas au rendez-vous à la toute fin, quand chacun des personnages, pour rendre hommage au héros, dessine devant lui un salut différent. Et que dire du praticable pourvu d’une voile, au milieu de la scène. on ne peut plus mal utilisé ?
Les bonnes idées de Caroline Mutel, il faut les trouver dans la mise en espace des forces musicales. Car l’ensemble Les Nouveaux Caractères, très volubile et dirigé avec souplesse par Sébastien d’Hérin, fait partie du spectacle. Il est présent de part et d’autre de la scène, mais les cornets et sacqueboutcs, situés au départ en contrebas, se déplacent, la harpe (c’est-à-dire la lyre d’Orfeo) s’installe au milieu lorsque le poète demande à son chant d’exercer tous ses pouvoirs, les violons se partagent pour créer des effets d’écho, etc. Le tout avec efficacité et naturel, pour nous rappeler que la musique est bien au cœur de l’enjeu de L’Orfeo. Les solistes se mêlent eux aussi aux instrumentistes, on l’a dit, mais sans que la greffe prenne réellement. On accordera cependant une mention particulière à Jérôme Varnier, pour son Plutone sobre et sonore, à Virginie Pochon, qui chante Euridice avec l’émerveillement des premiers jours, et surtoul à Hjördis Thébault, Messaggiera d’une éloquence pleine de retenue.
Mais c’est bien sûr Orfeo qu’on attend principalement ici, et Jean-Sébastien Bou nous ravit par cette manière très particulière d’incarner un personnage mythique, sans prendre la pose ou donner dans l’emphase. Il répond à la spontanéité timide et un peu pâle du spectacle par une espèce de chant concentré, sans raideur ni pathos. Il n’y a rien là qui remette en cause nos certitudes, mais Jean-Sébastien Bou apporte une mélancolie et un héroïsme naissant dans un paysage un peu trop uniformément riant. »

Vienne – Theater an der Wien – 14 décembre 2011 – Freiburger Baroekorchester – Arnold Schoenberg Chor – dir. Ivor Bolton – mise en scène Claus Guth – avec John Mark Ainsley (Orfeo), Mari Eriksmoen (Euridice), Katija Dragojevic (La Musica/Messaggiera/Speranza), Phillip Ens (Caronte/Plutone), Suzana Ograjenšek (Proserpina/Ninfa), Jakob Huppmann (Quarto Pastore/Quarto Spirito), Mirko Guadagnini (Apollo), Cyril Auvity, Jeroen de Vaal, Maciej Idziorek, Jakob Huppmann (Pastore/Spirito) – nouvelle production


Opéra Magazine – février 2012

« Le rideau blanc devant lequel s’est joué le Prologue s’ouvre sur le décor sévère d’une maison bourgeoise. Une bande de copains excités y débarque pour fèter le mariage de leur «demi-dieu». «Semideo» est dit ici avec un petit air d’ironie entendu, qui signifie d’emblée que toute cette histoire sera vue au second degré. Avec quelques planches de contreplaqué, ils bricolent un temple dorien, puis se déguisent en Bergers et en Nymphes. Tout cela dans une esthétique volontairement de mauvais goût, assez dérangeante. La fète qui suit donné une sensation de de joie forcée, un peu vulgaire. La pastorale de Monteverdi s’est transformée en une dérisoire pantomime, sacrifiant la poésie des deux premiers actes.
Tandis que les époux ont disparu pour consommer leur union à l’étage, une des invitées annonce la mort d’Euridice. Lamentations. Tout le monde se retire, laisssant Orfeo à sa solitude et à son désespoir. La tragédie peut alors commencer et, pour Claus Guth, elle se situe dans le registre de l’intime et du métaphysique. Comme avec leur adaptation du Messie en 2009, le metteur en scène et son dramaturge, Konrad Kuhn, ont voulu raconter, au-delà du mythe, un drame ordinaire et contemporain, celui d’un homme confronté à la perte et au néant.
Les phases du deuil, les affres du manque, la descente aux Enfers, la quête de l’être aimé, tout cela se concrétise sous nos yeux en images réelles ou vidéographiques, d’une grande simplicité et d’une totale évidence. Fétichisme, apparitions, tentation du suicide, la deuxième partie prend une force étonnante jusqu’à la montée au ciel finale, vécue par Orfeo comme une épreuve terrible, car elle concrétise le renoncement dééfinitif au dernier lien avec Euridice.
Au centre de l’action, John Mark Ainsley impresssionne par l’intensité théâtrale de son incarnation. Musicalement, son Orfeo – d’abord marqué par la tentation de l’expressionnisme – mûrit avec l’avancée du drame, s’imposant finalement avec évidence. Autour de lui, les nombreux personnages secondaires sont comme autant d’êtres familiers incapables de lui apporter la consolation, et qui ne font que renforcer son isolement. La lecture d’Ivor Bolton, à la tête du Freiburger Baroekorchester, répond pleinement à cette vision sommnambulique et tout en intériorité, par des couleurs instrumentales nuancées et une texture orchestrale allégée. Passé une «Toccata» aux cuivres précaires, le discours s’affermit et seconde à merveille le propos. Même relégué en coulisses, l’Arnold Schoenberg Chor demeure un magnifique protagoniste, d’une homogénéité parfaite. Un excellent quatuor de Bergers et d’Esprits, où seul Jeroen de Vaal paraît un peu fragile, anime la première partie. Dans son triple rôle, Katija Dragojeyic fait valoir un timbre de mezzo charnu. Phillip Ens est solide, Mari Eriksmoen d’une grande fraîcheur, touchante de fragilité dans sa robe de mariée. Quant au ténor Mirko Guadagnini, il donne à son deus ex machina une véritable dimension surhumaine, par la manière dont il projette sa voix puissante et colorée.
La scène finale, jouée dans un décor où les éléments réalistes ont été neutralisés par un rideau blanc, révèle tout ce que le spectacle doit au pouvoir de suggestion de la scénographie de Christian Schmidt, dont se dégage une atmosphère propre à transcender l’apparente banalité du propos. Conme toutes les propositions un peu fortes, cet Orfeo laisse le public partagé et suscite autant d’enthousiasme que de protestations. »

Montpellier – Le Corum – 15, 16 avril 2011 – version de concert (version Bruno Maderna) – Orchestre National de Montpellier-Languedoc-Rousssillon – dir. Enrico Delamboye – avec Paul-Armin Edelmann (Orfeo), Sunhae Im (La Musica, Euridice, Eco), Marie-Claude Chappuis (Proserpina, La Messagiera, Ninfa), Lies Vandewege (Speranza, Ninfa, Spirito), Gabrielle Philiponnet (Speranza, Ninfa, Spirito), Jérôme Varnier (Caronte, Spirito, Pastore), Mathias Vidal (Pastore, Spirito), Nigel Smith (Apollo), Giovanni Battista Parodi (Pastore, Plutone)

 

Anaclase

« Voilà une soirée à faire grincer les dents de plus d’un « puriste », si tant est que le terme fasse réellement sens : à comprendre, le mélomane désormais habitué à des interprétations spécialisées en musique Renaissance et baroque. Il conviendra cependant de rappeler que, bien que savamment et justement « autorisées », ces interprétations demeurent des interprétations, précisément, et notamment des interprétations de textes relatifs à l’exécution de ces œuvres en leur temps, textes qui se pourront considérer eux-mêmes comme des interprétations, en amont ou après coup, des habitus musicaux à leur être contemporains. Bref, depuis un peu plus d’une trentaine d’années, musicologues et chefs, quand ce ne sont chefs-musicologues, s’attellent à retrouver des saveurs anciennes, des saveurs perdues, avec la complicité d’une nouvelle lutherie, si l’on peut dire s’agissant d’une facture qui s’est donné pour mission de reconstituer un savoir-faire dans la fabrication des instruments. Quel bouleversement dans l’histoire de l’interprétation ! Car, à souvent trop parler histoire de la musique, l’on en viendrait à oublier cette autre-là, si déterminante pourtant.
Considéré longtemps comme le tout premier opéra, l’Orfeo de Monteverdi avait bien de quoi occulter ces prédécesseurs en ce genre comme fasciner ceux qui se penchèrent sur lui quelques siècles après sa première. De fait, Orfeo compte quelques trois cent soixante printemps lorsque le compositeur italien Bruno Maderna conçoit de l’activement fréquenter, c’est-à-dire d’en écrire une version nouvelle, largement orchestrée, qui n’est certes pas à situer dans la prochaine inspiration baroqueuse, loin s’en faut. Au fond, qu’est-ce qu’une partition ? Celles d’aujourd’hui sont indiquées avec une précision quasi pharmaceutique, mais celles du Settecento étaient surtout des « guides » pour musiciens et chanteurs, partant que bien des choses, sans doute évidentes pour les habitudes de jeu de l’époque, n’y figuraient pas. Entre 1607 et 1967, ces évidences se seront largement émoussées, si bien que l’approche du lecteur des années soixante s’articule sur autant de suppositions que de lacunes, une intuition toute relative n’offrant qu’une clé bien limitée.
En toute connaissance de cause, le génial Maderna, trop érudit pour renoncer, entreprend de construire un nouvel Orfeo plutôt que de s’acharner à en vaincre la forteresse, et de le construire à sa manière propre, vraisemblablement conscient de ce qu’il allait falloir d’années aux chercheurs pour que les musiciens des décennies à venir proposent des exécutions s’approchant un tant soit peu de ce qu’à Mantoue les Gonzague et leurs proches purent entendre.
À lire les littérateurs italiens de ces années-là, on vérifie un intérêt précieux pour les formes du passé, alors réinvesties par des structures nouvelles, des mises en regard et autres adoptions souvent complexes ; il n’est qu’à penser à Calvino, Buzzati ou Gadda, par exemple. Un ancrage profond dans la culture italien ancienne est également indissociable des personnalités musicales d’alors, qu’il s’agisse de Malipiero, de Dallapiccola ou, plus encore, de Berio. À s’interroger sur les formes perdues, ces créateurs se les approprièrent, les actualisant dans un inévitable malentendu qui se fit vertu ô combien féconde. Ainsi de Bruno Maderna avec Orfeo, mais aussi dans bien des passages de ces autres œuvres pour la scène, telles Satirycon ou Hyperion [lire nos chroniques des 26 février 2004 et 22 février 2007], par exemple, dont les pertinentes et profuses citations abordent bien au delà des avenantes rives du seul pastiche.
Bien plutôt, dès l’abord de cette exécution de concert, c’est le temps qui semble s’être arrêté. Acceptons donc d’y placer notre écoute en 1967, dans cette dévoratrice redécouverte de Monteverdi par Maderna, avec son étonnante liberté, ses irrésistibles fantaisies, les monstres magnifiques qu’elle invente avec tant de superbe que de sensibilité. Ainsi de l’indicible tournerie de cuivres préludant à la fête, du subtil sextuor de cordes pincées (deux guitares, deux harpes, mandoline et clavecin), autant de procédés « modernes » qui sans lourdeur insufflent à la relecture un grand relief et une remarquable richesse expressive, truffés de traits solistiques à de nombreux pupitres, jusqu’à l’usage surprenant d’une acide pédale de cordes lorgnant du côté du Nevski de Prokofiev pour Voici les champs de Thrace (débit du cinquième acte).
De fait, à la tête de l’Orchestre National de Montpellier Languedoc-Roussillon, Enrico Delamboye triomphe de la déroutante hybridité de cette version par une confiance intelligente au compositeur. Voilà donc une direction qui chante fabuleusement tout en profitant, avec un grand soin du tissage des timbres, de chaque attribut de l’objet à servir, avec la complicité de musiciens enthousiastes et engagés.
Investi, le Chœur Orfeon Donostiarra s’avère non seulement vaillant mais encore expressif, précisément nuancé, et livre une prestation de haute tenue. Si l’on goûte des ensembles vocaux avantageusement réalisés, la distribution demeure assez inégale. Le soprano Lies Vandewege (Nymphe, Esprit, L’Espérance) possède puissance et impact, mais le chant ne paraît pas dûment conduit et accuse une instabilité vertigineuse. Plus convainquant, le mezzo Marie-Claude Chappuis ciselle adroitement ses interventions (Nymphe, Messagère, Proserpine) dont elle minaude systématiquement les attaques. Quant à elle, Sunhae Im incarne une Eurydice (également La Musique) un peu pointue mais jamais aigre, d’une couleur franche et d’une fiabilité indiscutable. Côté messieurs, la basse Jérôme Varnier (Esprit, Berger, Charon) se montre trop terne pour ne pas décevoir. La clarté de timbre de Mathias Vidal (ténor) convient aisément au répertoire (Berger, Esprit). La brève prestation de Nigel Smith en Apollon est irréprochable. On remarque la robuste basse italienne Giovanni Battista Parodi (Berger, Pluton) : dotée de larges possibilités, la voix affirme couleur et fermeté, dans un phrasé volontiers ample ; les parties à lui confiées n’ont guère permis de sortir d’un chant un rien monolithique, mais, pour sûr, voilà un jeune chanteur à suivre. Enfin, le Viennois Paul-Armin Edelmann livre un Orphée onctueux et toujours exquisément musical d’un timbre chaleureux, conjuguant un art de la nuance indéniable. »

Opéra Magazine – juin 2011

« A l’instar de Vincent d’Indy, Gian Francesco Malipiero, Ottorino Respighi, Paul Hindemith – et avant Luciano Berio -, Bruno Maderna (1920-1973) s’est penché sur les harmonies fondatrices du mythique Orfeo de Monteverdi. Si le principe de réorchestration d’une oeuvre de musique ancienne n’est en rien original, le travail accompli par le compositeur vénitien demeure, lui, stupéfiant de beauté et débordant d’imagination. Évidemment, les puristes crieront au sacrilège, face aux expansions sonores qu’autorisent les effectifs d’un orchestre symphonique au grand complet. Rien, pourtant, ne semble outrancier dans cette amplification monumentale.
Créée en 1967, au Festival de Hollande, cette mouture extravagante de L’Orfeo réveille indéniablement les sens et pique au vif par sa maîtrise somme toute pleine de déférence. En choisissant d’exalter certains contours de l’ouvrage, Maderna fait valoir une science admirable de la superposition des coloris, des timbres et des climats. En ce sens, la modulation harmonique récurrente du personnage d’Orfeo s’accommode merveilleuusement de la toile irréelle tissée par la harpe, le clavecin, le célesta, la guitare ou encore la mandoline.
Alors que les cuivres et les percussions doivent affronter parfois une construction kaléidoscopique vertigineuse sur la« Toccata» ou la «Moresca», l’arrmée de cordes somptueusement mise à profit dispense, elle, un souffle d’une force inouïe et d’un raffinement éblouissant. Soutenus comme jamais, «Ahi, casa acerbo !» et «Possente spirto» jouissent en conséquence d’une ampleur inédite. Si ce n’est l’ornementation un rien unifiée, les registres voocaux, récitatifs et effets de style, sont quant à eux scrupuleusement respectés.
Le jeune chef néerlandais Enrico Delamboye ne ménage pas sa peine pour élever l’interpréétation au plus haut niveau. Sous son contrôle, l’Orchestre National de Montpellier Languedoc-Roussillon, en grande forme, se joue des difficultés imposées par les arrangements minutieux de Maderna.
Du côté des chanteurs, l’enthousiasme est plus modéré. Hormis l’exceptionnelle Messaggiera de Marie-Claude Chappuis, le charismatique Orfeo de Paul-Armin Edelmann et le respectable Apollo de Nigel Smith, le plateau déçoit par son peu d’implication. Mathias Vidal apparaît très réservé, et Giovanni Battista Parodi, à l’inverse, plutôt débraillé. Sunhae Im fait valoir une ligne par trop édulcorée et une posture narcissique agaçante. Lies Vandewege expose des aigus fragiles. Quant à Jérôme Varnier, sa prestation manque singulièèrement de relief.
Fort heureusement, les choristes d’Orfeon Donostiarra sont là pour rappeler ce que le mot « engagement » veut dire. Postés en hauteur derrrière les pupitres de l’orchestre, ils font preuve d’une ductilité admirable. D’une grande richesse expressive, et loin d’être une curiosité, cet Orfeo revisité par Maderna réclame qu’on lui porte une attention soutenue. »

ResMusica

« Après Vincent d’Indy (1904), Gian Francesco Malipiero (1930), Ottorino Respighi (1935) et Paul Hindemith (1954), avant Luciano Berio (1984), Bruno Maderna avait délivré en 1967 sa propre orchestration de L’Orfeo de Monteverdi. Version curieuse, qui aujourd’hui nous paraît saugrenue, avec son immense orchestre symphonique (avec jeu de cloches, vibraphone, clarinette basse, …) et sa cetra (la lyre d’Apollon) formée par un ensemble de harpes, guitares, mandoline, clavecin et célesta. N’oublions pas que la création moderne de L’Orfeo par Nikolaus Harnoncourt dans son instrumentation d’origine ne date que de 1975.
Quoiqu’il en soit, Bruno Maderna, fin connaisseur de Monteverdi (il a collaboré avec Gian Francesco Malipiero à la première réédition critique de l’œuvre de ce compositeur à la fin des années 40), ne trahit pas avec cette orchestration gigantesque le propos original, qui est le respect et la compréhension du texte de Striggio. Sourdines, effectifs réduits, nuances pianissimo, tous les soutiens instrumentaux des récitatifs sont finement dosés et la machine orchestrale, même dans la fougueuse Toccata initiale ou dans la Moresca finale, ne se déchaîne jamais. Maderna n’ajoute, si ce n’est par le timbre, aucune modernité – contrairement à Berio, qui réécrivit littéralement l’œuvre. Tout juste regrette-t-on que les danses, alourdies, soient moins enlevées que dans les diverses versions originales enregistrées.
Mais que ce soit la version d’origine ou les diverses resucées, L’Orfeo exige des chanteurs qui soient aussi des diseurs. Pari relevé en cette soirée d’avril au Corum de Montpellier. Paul-Armin Edelman est un Orfeo solide, parfois trop monolithique (son chant manque un peu de nuances) mais qui possède toutes les notes pour le rôle. Sunhae Im propose un joli timbre acidulé, particulièrement bienvenu dans le long monologue du personnage de la Musica. Parmi le plateau vocal remarquablement homogène, saluons les excellents Mathias Vidal, Giovanni Battista Parodi et Nigel Smith ainsi que la prestation toute en finesse de l’Orfeón Donostiarra.
Le grand triomphateur de la soirée est sans conteste le jeune chef d’orchestre néerlandais Enrico Delamboye. Actuel principal chef invité de l’Opéra de Cologne, il est aussi un arrangeur accompli et fréquente assidument la scène jazz en plus du monde de la musique classique. L’Orchestre national de Montpellier-LR, qu’on a pu connaître moins inspiré, donne le meilleur de lui-même. Et l’ensemble des musiciens laisse transparaître un plaisir évident d’avoir travaillé ensemble. Un signe qui ne trompe pas. »

Anaclase

« Voilà une soirée à faire grincer les dents de plus d’un « puriste », si tant est que le terme fasse réellement sens : à comprendre, le mélomane désormais habitué à des interprétations spécialisées en musique Renaissance et baroque. Il conviendra cependant de rappeler que, bien que savamment et justement « autorisées », ces interprétations demeurent des interprétations, précisément, et notamment des interprétations de textes relatifs à l’exécution de ces œuvres en leur temps, textes qui se pourront considérer eux-mêmes comme des interprétations, en amont ou après coup, des habitus musicaux à leur être contemporains. Bref, depuis un peu plus d’une trentaine d’années, musicologues et chefs, quand ce ne sont chefs-musicologues, s’attellent à retrouver des saveurs anciennes, des saveurs perdues, avec la complicité d’une nouvelle lutherie, si l’on peut dire s’agissant d’une facture qui s’est donné pour mission de reconstituer un savoir-faire dans la fabrication des instruments. Quel bouleversement dans l’histoire de l’interprétation ! Car, à souvent trop parler histoire de la musique, l’on en viendrait à oublier cette autre-là, si déterminante pourtant.
Considéré longtemps comme le tout premier opéra, l’Orfeo de Monteverdi avait bien de quoi occulter ces prédécesseurs en ce genre comme fasciner ceux qui se penchèrent sur lui quelques siècles après sa première. De fait, Orfeo compte quelques trois cent soixante printemps lorsque le compositeur italien Bruno Maderna conçoit de l’activement fréquenter, c’est-à-dire d’en écrire une version nouvelle, largement orchestrée, qui n’est certes pas à situer dans la prochaine inspiration baroqueuse, loin s’en faut. Au fond, qu’est-ce qu’une partition ? Celles d’aujourd’hui sont indiquées avec une précision quasi pharmaceutique, mais celles du Settecento étaient surtout des « guides » pour musiciens et chanteurs, partant que bien des choses, sans doute évidentes pour les habitudes de jeu de l’époque, n’y figuraient pas. Entre 1607 et 1967, ces évidences se seront largement émoussées, si bien que l’approche du lecteur des années soixante s’articule sur autant de suppositions que de lacunes, une intuition toute relative n’offrant qu’une clé bien limitée.
En toute connaissance de cause, le génial Maderna, trop érudit pour renoncer, entreprend de construire un nouvel Orfeo plutôt que de s’acharner à en vaincre la forteresse, et de le construire à sa manière propre, vraisemblablement conscient de ce qu’il allait falloir d’années aux chercheurs pour que les musiciens des décennies à venir proposent des exécutions s’approchant un tant soit peu de ce qu’à Mantoue les Gonzague et leurs proches purent entendre.
À lire les littérateurs italiens de ces années-là, on vérifie un intérêt précieux pour les formes du passé, alors réinvesties par des structures nouvelles, des mises en regard et autres adoptions souvent complexes ; il n’est qu’à penser à Calvino, Buzzati ou Gadda, par exemple. Un ancrage profond dans la culture italien ancienne est également indissociable des personnalités musicales d’alors, qu’il s’agisse de Malipiero, de Dallapiccola ou, plus encore, de Berio. À s’interroger sur les formes perdues, ces créateurs se les approprièrent, les actualisant dans un inévitable malentendu qui se fit vertu ô combien féconde. Ainsi de Bruno Maderna avec Orfeo, mais aussi dans bien des passages de ces autres œuvres pour la scène, telles Satirycon ou Hyperion [lire nos chroniques des 26 février 2004 et 22 février 2007], par exemple, dont les pertinentes et profuses citations abordent bien au delà des avenantes rives du seul pastiche.
Bien plutôt, dès l’abord de cette exécution de concert, c’est le temps qui semble s’être arrêté. Acceptons donc d’y placer notre écoute en 1967, dans cette dévoratrice redécouverte de Monteverdi par Maderna, avec son étonnante liberté, ses irrésistibles fantaisies, les monstres magnifiques qu’elle invente avec tant de superbe que de sensibilité. Ainsi de l’indicible tournerie de cuivres préludant à la fête, du subtil sextuor de cordes pincées (deux guitares, deux harpes, mandoline et clavecin), autant de procédés « modernes » qui sans lourdeur insufflent à la relecture un grand relief et une remarquable richesse expressive, truffés de traits solistiques à de nombreux pupitres, jusqu’à l’usage surprenant d’une acide pédale de cordes lorgnant du côté du Nevski de Prokofiev pour Voici les champs de Thrace (débit du cinquième acte).
De fait, à la tête de l’Orchestre National de Montpellier Languedoc-Roussillon, Enrico Delamboye triomphe de la déroutante hybridité de cette version par une confiance intelligente au compositeur. Voilà donc une direction qui chante fabuleusement tout en profitant, avec un grand soin du tissage des timbres, de chaque attribut de l’objet à servir, avec la complicité de musiciens enthousiastes et engagés.
Investi, le Chœur Orfeon Donostiarra s’avère non seulement vaillant mais encore expressif, précisément nuancé, et livre une prestation de haute tenue. Si l’on goûte des ensembles vocaux avantageusement réalisés, la distribution demeure assez inégale. Le soprano Lies Vandewege (Nymphe, Esprit, L’Espérance) possède puissance et impact, mais le chant ne paraît pas dûment conduit et accuse une instabilité vertigineuse. Plus convainquant, le mezzo Marie-Claude Chappuis ciselle adroitement ses interventions (Nymphe, Messagère, Proserpine) dont elle minaude systématiquement les attaques. Quant à elle, Sunhae Im incarne une Eurydice (également La Musique) un peu pointue mais jamais aigre, d’une couleur franche et d’une fiabilité indiscutable. Côté messieurs, la basse Jérôme Varnier (Esprit, Berger, Charon) se montre trop terne pour ne pas décevoir. La clarté de timbre de Mathias Vidal (ténor) convient aisément au répertoire (Berger, Esprit). La brève prestation de Nigel Smith en Apollon est irréprochable. On remarque la robuste basse italienne Giovanni Battista Parodi (Berger, Pluton) : dotée de larges possibilités, la voix affirme couleur et fermeté, dans un phrasé volontiers ample ; les parties à lui confiées n’ont guère permis de sortir d’un chant un rien monolithique, mais, pour sûr, voilà un jeune chanteur à suivre. Enfin, le Viennois Paul-Armin Edelmann livre un Orphée onctueux et toujours exquisément musical d’un timbre chaleureux, conjuguant un art de la nuance indéniable. »

Santander – Sala Argenta – Festival Internacional de Santander – 26 août 2010 – version semi-scénique – La Venexiana – dir. Claudio Cavina – avec Mirko Guadagnini , Emmanuela Galli

 

Zagreb – Théâtre National de Croatie – 8, 11, 12, 14 janvier 2010 – Ensemble Baroque de Croatie – dir. Saša Britvic – mise en scène Ozren Prohic – décors Ozren Prohic, Marta Crnobrnja – costumes Julie Scobeltzine – lumières Deni Šesnic – chorégraphie Blaženka Kovac Caric – avec Kresimir Spicer (Orfeo), Ivana Kladarin (Musica, Proserpina), Helena Lucic (Speranza, Messaggiera), Ana Jembrek (Euridice), Goran Juric / Ivica Trubic (Plutone), Ante Jerkunica (Caronte, Pastore IV, Spirito IV), Alen Ruško (Apollo, Echo), Monika Cerovcec / Martina Burger (Ninfa), Dejan Vrbancic (Pastore I, Spirito I), Marko Cvetko (Pastore II, Spirito II), Alen Ruško (Pastore III, Spirito III)

 

Milan – Teatro alla Scala – 19, 21, 23, 25, 28, 30 septembre, 3, 6 octobre 2009 – dir. Rinaldo Alessandrini – mise en scène, décors Robert Wilson – costumes Jacques Reynaud – lumières Robert Wilson – avec Georg Nigl (Orfeo), Roberta Invernizzi (La Musica, Euridice), Sara Mingardo (Messaggera, Speranza), Marco Spotti (Caronte), Raffaella Milanesi (Proserpina), Giovanni Battista Parodi (Plutone) – nouvelle coproduction avec Opéra National de Paris


Opéra Magazine – novembre 2009

« Absent de l’affiche de la Scala depuis plus de trente ans – dernière reprise en 1978, sous la direction de Nikolaus Harnoncourt -, L’Orfeo y est revenu en tant que premier volet d’un cycle Monteverdi confié à Robert Wilson et Rinaldo Alessandrini, en coproduction avec l’Opéra National de Paris. Il ritorno d’Ulisse in patria suivra en 2011, avant L’incoronazione di Poppea en 2013.
Une perspective de cyprès, une étendue de gaazon, une panthère noire, un cerf, un lapin et la lyre d’Orphée dessinent le jardin de la première partie, inspiré du tableau Vénus avec Cupidon et un organiste de Titien. L’objectif est d’évoquer le pouuvoir ensorcelant de la musique. Les Enfers sont symbolisés par une énorme muraille, qui s’ouvre à mesure que le héros progresse dans le royaume des Ombres. Dans les deux cas, on retrouve la « marque de fabrique » de Wilson : gestuelle froide et abstraite, jeux de lumière particulièrement suggestifs. Par-delà un évident statisme, le résultat est, avouons-le, cohérent, à la fois avec la démarche du metteur en scène (« L’Orfeo ne doit pas être illustré, mais représenté de façon formelle ») et le contenu d’une favola in musica d’essence avant tout symbolique.
Responsable de l’édition critique publiée chez Barenreiter, Rinaldo Alessandrini est au pupitre d’une formation mêlant quelques cordes venues de l’orchestre permanent de la Scala, à la basse continue du Concerto Italiano et à des instrumentistes invités. Une trentaine d’éléments au total, que le chef dirige avec autant de fluidité que de sens de l’équiliibre, en mettant en évidence le caractère hybride de cette partition, où le texte demeure encore le principal vecteur des états d’âme des protagonistes.
Dans cette perspective d’un théâtre autant parlé que mis en musique, on s’explique mal le choix du baryton autrichien Georg Nigl pour le rôle-titre. Son recitar cantando trahit de flagrants problèmes de diction qui, associés à un timbre plutôt sec, l’empêchent de donner un quelconque relief au personnage. Excellent, en revanche, le reste de la distribution, avec une mention spéciale pour Sara Mingardo et Roberta Invernizzi. »

Théâtre de Perm – Russie – 15, 16 septembre 2009

 

Düsseldorf – Opernhaus – 20, 25 février, 17 juin 2009 – Neue Düsseldorfer Hofmusik – dir. Andreas Stoehr – mise en scène Christof Loy – décors Dirk Becker – costumes Michaela Barth – avec Ludwig Grabmeier (Orfeo), Sylvia Hamvasi (Euridice), Carol Wilson (La Musica/La Speranza), Markus Müller, Fabrice Farina, Peter Bárány, Rolf Broman (Pastore), Marianne Folkestad Jahren (Ninfa), Marta Marquez (Messagiera), Thorsten Grümbel (Caronte), Laura Nykänen (Proserpina), Sami Luttinen (Plutone), Bruce Rankin (Eco/Apollo)

 

Kaiserslautern – Pfalztheater – 28 février, 4, 13, 24 mars, 3, 8, 25 avril, 2 mai 2009 – instrumentation Samuel Bächli


Théâtre de Bâle – 21, 26, 30 janvier 2009 – Barockorchester La Cetra Basel – dir. Andrea Marcon – mise en scène Jan Bosse – décors Stéphane Laimé – costumes Kathrin Plath – lumières Hermann Münzer – avec Yeree Suh (La Musica), Nikolay Borchev (Orfeo), Agata Wilewska (Euridice/Echo), Rita Ahonen (Messagiera), Svetlana Ignatovich (Speranza), Ismael González (Caronte), Rosa Dominguez (Proserpina), Andrew Murphy (Plutone), Karl-Heinz Brandt (Apollo/1. Pastore), Heike Heilmann (Ninfa) David Bates (2. Pastore), Michael Pflumm (3. Pastore/1. Spirito), Hee-Do An (4. Pastore/3. Spirito), Markus Moritz (2. Spirito)

Dernières Nouvelles d’Alsace

« Orfeo superstar – Mettre en scène L’Orfeo de Monteverdi n’est pas chose facile, et Jan Bosse s’y casse les dents au Théâtre de Bâle – Les idées du metteur en scène y partent cependant d’intuitions fondées : démarrer le prologue au coeur du public massé debout à l’entrée du théâtre promet approche originale et séduisante. La Musica de Yeree Suh et l’Orfeo du baryton Nikolay Borchev y émergent nettement d’un plateau vocalement certes assez peu reluisant, et à ce début de soirée, les étudiants instrumentistes de la Schola Cantorum Basiliensis, sous la houlette de leur professeur, le claveciniste Andrea Marcon, apportent … »

Scènes Magazine

« L’Orfeo de Monteverdi est actuellement l’objet d’une transcription visuelle radicale au Théâtre de Bâle. En lieu et place des bergers arcadiens du livret, le metteur en scène Jan Bosse invite les spectateurs à assister au mariage d’un personnage fêté du show business entouré de ses amis très ‘pipoles’ …
Dès l’entrée dans le foyer, le spectateur est frappé par une décoration clinquante qui transforme l’antichambre du théâtre en salle de fête richement décorée. Dans le coin d’une galerie, un orchestre égrène quelques mélodies de danse alors que des serveurs offrent à chaque spectateur un verre de champagne. Puis les musiciens prennent place de part et d’autre du grand escalier qui, d’ordinaire, mène aux galeries et entonnent la fanfare d’ouverture. Des invités (en fait des membres du chœur) se répartissent dans le public, alors qu’apparaît La Musica du Prologue en robe du soir brillant de tous se feux. Puis arrive une mariée voilée – tout droit issue d’un magazine de mode – vêtue d’une superbe robe d’un blanc immaculé comme il se doit ; elle esrt rejointe ensuite par son époux dans une tenue époustouflante : escarpins argentés, costume et chemise rouge sur un pull à col roulé noir, coiffure rétro qui le fait ressembler aux stars du rock des années 60. Pendant la première heure du spectacle, tout se joue dans ce foyer avec un chœur disséminé en divers endroits de la salle, des acteurs qui montent sur des tables ou prennent l’escalier d’assaut tandis que des cameramen et des photographes, flash au clair, mitraillent l’assemblée de leurs armes de prédilection pour ensuite faire projeter leurs images sur un écran géant… Après l’arrivée de La Messagère annonçant la mort d’Eurydice, les portes du théâtre s’ouvrent mystérieusement. Les acteurs du drame se dirigent alors lentement vers la salle, suivi d’un public de plus en plus étonné.
Sur la scène, aucun décor, mais un vaste rideau noir sur lequel se détache un projecteur éclairant la salle a giorno. La fosse est un trou béant symbolisant le fleuve sur lequel Charon convoie ses victimes ; l’orchestre s’installe donc dans les premiers rangs du théâtre alors que le chœur prend place un peu partout, dans les rares sièges restés vides. L’enfer se présente ensuite comme un trou noir béant, enrichi d’un grand miroir dans lequel le public, plongé dans un éclairage ‘noir’ fantasmagorique qui fait scintiller le blanc des habits et des bijoux, assume involontairement le rôle des âmes en peine à la recherche d’un hypothétique salut. Une constante utilisation de la vidéo oblige le spectateur à assister à ce qui se passe derrière lui, voire dans le foyer du théâtre tandis que le spectacle continue sur le plateau. Dans cette transcription scénique fascinante, qui pose ouvertement la question du rapport du public au spectacle qui lui est offert sous cette forme aussi éclatée, la seule faute de goût se trouve à la fin, lorsque dans une parodie d’une mauvaise réalisation cinématographique des aventures de Superman on assiste à l’envol d’Apollon et Orphée sur les toits de Bâle avant de se perdre dans un ciel étoilé du plus bel effet kitsch…
La réussite ne serait bien sûr pas aussi aboutie sans la présence des instrumentistes de la Schola Cantorum Basiliensis, dont l’orchestre baroque est plus connu sous le nom La Cetra. En vrais virtuoses, ces musiciens savent donner corps à chaque inflexion du commentaire orchestral, hissant par là même les instrumentistes au rang de protagonistes établissant un dialogue sans cesse renouvelé avec les chanteurs. On peut cependant regretter que le chef, Andrea Marcon, s’intéresse plus à obtenir des musiciens une plasticité exemplaire qu’à soigner la mise en perspective dramatique du parlar cantando, souvent réduit ici à une déclamation un rien monotone faute d’une articulation trop peu soignée du texte ; ainsi, les fautes de prononciation italienne, avec notamment un Euridice prononcé avec un ‘k’ à l’allemande, sont tout simplement impardonnables dans une soirée lyrique où la perception parfaite du mot, comme le souhaitait d’ailleurs Monteverdi, devait passer avant la jouissance purement musicale…
La distribution fascine plus par sa cohésion que par les mérites intrinsèques de chaque interprétation. De fait, aucun chanteur ne sort du lot, à commencer par l’Orfeo sonore mais peu différencié de Nikolay Borchev ou La Musica uniformément bien chantante de Yeree Suh. Dans une troupe infectée par un méchant virus grippal qui avait attaqué ce soir-là trois des chanteurs principaux (la Messagiera, la Speranza et Euridice elle-même), il est donc difficile de mettre en exergue telle ou telle contribution ; on se contentera de dire que, dans son ensemble, ce spectacle appartient sans conteste à cette catégorie d’événement musical qui justifie amplement un déplacement dans la capitale rhénane de la Suisse allemande. »

Château de Chantilly – Salle du Jeu de Paume – 18 octobre 2008 – Festival des Cathédrales de Picardie – La Venexiana – dir. Claudio Cavina – version semi-scénique – avec Emanuela Galli (La Musica, Euridice), Mirko Guadagnini (Orfeo), José Maria Lo Monaco (Messagiera, Speranza), Francesca Cassinari (Proserpina), Matteo Belloto (Plutone), Salvo Vitale (Carone), Raffaele Giordani (Apollo), Annamaria Calciolari (Ninfa), Giovanni Caccamo (Pastore I), Gianluca Zoccatelli (Pastore II, Spirito I), Claudio Cavina (Pastore III), Tony Corradini (Pastore IV, Spirito II), Francesca Cassinari, Paola Reggiani, Yeztabel Arias Fernandez, Nadia Engheben, Gianluca Zoccatelli, Davide Galassi, Andrea Favari (Ninfe e Pastori)

ClassiqueInfo.com – Un Orfeo uniquement pour les oreilles

« Du point de vue musical, ce fut une belle prestation. Point de surprise de noter les chœurs et ensembles comme l’un des points forts de la soirée. La Venexiana, même si sa composition a évolué au cours des dernières années, sait respecter l’équilibre des voix et des timbres. Il est seulement dommage que les options prises en matière de « mise en scène » aient quelques fois mis en péril cet équilibre. Mais nous reviendrons plus loin sur ces aspects visuels et acoustiques.
D’une façon générale, les principaux rôles ont été bien tenus, à commencer, par ordre d’entrée, par la formidable Emanuela Galli en Musica, puis en Euridice, au timbre superbe, à la technique et à la diction absolument parfaites. L’autre très belle performance de la soirée fut celle de José Maria Lo Monaco, dans le double rôle de la Messagère (acte II), puis de la Speranza (III). Timbre très prenant, grande émotion, digne mise dans la funeste annonce. Mirko Guadagnini nous a donné un bel Orfeo à la belle technique de recitar cantando. Avec de tels moyens vocaux, peut être aurait-il pu se lâcher un peu plus. Un physique avantageux et de visibles qualités d’acteur auraient mérité un tout autre traitement scénique que celui auquel nous eûmes droit.
Excellent Caronte de Salvo Vitale à la voix bien posée, au jeu raisonnablement sobre (ce rôle est trop souvent sur-joué). Quelques réserves sur l’Apollon de Raffaele Giordani, au très beau timbre mais à la technique encore vacillante. Proserpine de Francesca Cassinari et Pluton de Matteo Belloto assez quelconques.
Pour compléter cette belle prestation vocale, il eût été souhaitable d’avoir un ensemble instrumental du même niveau. Ce ne fut pas tout à fait le cas, la réserve principale venant de l’utilisation d’une basse continue fournie et surtout très pesante et du peu d’efficacité des effets d’écho (cornets à bouquin ou violons) voulus par le compositeur. Cette remarque est sans doute à mettre en relation avec la salle dans laquelle était donnée ce spectacle, lieu à notre sens tout à fait inadéquat tant sur le plan visuel qu’acoustique. En tout cas, nous attendront le Couronnement de Poppée, que le même ensemble doit donner à la Cité de la Musique en juin prochain pour nous prononcer sur les qualités de chef de Claudio Cavina. Sur le seul spectacle de samedi, nous restons sur une impression assez semblable à celle donnée par Rinaldo Alessandrini (l’autre grand spécialiste des madrigaux de Monteverdi) au festival de Beaune, puis au disque, dans ce même Orfeo. Le passage du madrigal à l’opéra ne se fait pas tout seul pour les chefs concernés.
Le gros problème de cet Orfeo, c’est la prétention à avoir voulu le scénariser dans un lieu qui ne s’y prêtait pas. Nous avouons ne pas aimer ces versions semi-scéniques qui n’apportent rien à l’œuvre et qui tombent trop souvent dans l’utilisation de gadgets gratuits. Le lieu ? Une boîte à chaussure, sans la moindre pente. Une scène à laquelle seuls les musiciens (sauf à de rares moments) ont accès, les chanteurs demeurant de plain-pied. Visibilité au-delà du cinquième rang : de nulle à quasi-nulle. Problème aggravé par le choix du metteur en scène de faire chanter les deux plus beaux airs d’Orfeo (« Possente spirto » au III et « Questi i campi di Tracia » au V) assis. Sur le plan acoustique, une salle très mate, réduisant à néant les nombreux effets d’écho que comporte la partition.
Au-delà de ces choix assez problématiques, il faut bien se montrer très critique sur ce qui a été le seul autre élément de scénarisation : les costumes. Transformer les deux premiers actes en noces de nouveaux riches et affubler les bergers de Striggio et Monteverdi de robes et costumes criards, voilà le seul propos du metteur en scène. Aux actes III et IV, des spots rouges pour figurer les enfers, un costume de la même couleur pour Caron, de vagues éléments « gore » pour que chaque spectateur comprenne bien qu’Orfeo va chercher sa belle dans des lieux peu avenants, voilà toute la subtilité de Paola Reggiani, auteur des costumes et de la « mise en scène.
En conclusion, un Orfeo pour les seules oreilles et quelques chanteurs que l’on prendra plaisir à retrouver dans le développement de leurs carrières. »

Sablé – Centre culturel – Festival de Sablé – 23 août 2008 – en version de concert – La Venexiana -dir. Claudio Cavina – avec Mirko Guadagnini (Orfeo), Jose Lo Monaco (La Messagère, L’Espérance), Emanuela Galli (Euridice, la Musique)

 

Opéra de Halle – 9 juin 2008 – Chor der Oper Halle – Musiker des Händelfestspielorchesters Halle und der Lautten Compagney Berlin – dir. Wolfgang Katschner – mise en scène Kobie van Rensburg – décors Claudia Doderer

 

Salle Pleyel – 31 mai 2008 – en version de concert – Les Arts Florissants – Les Sacqueboutiers de Toulouse – dir. William Christie – avec Maria Grazia Schiavo, soprano (La Musica, Euridice), Dietrich Henschel, baryton (Orfeo), Sonia Prina, alto (La Messaggiera, Proserpina), Luigi De Donato, basse (Caronte), Antonio Abete, baryton (Plutone), Agustín Prunell-Friend, ténor (Apollo)

 

Oslo – Den Norske Opera – 29, 31 mai, 3, 5, 08, 10, 11, 13 juin 2008 – dir. Rinaldo Alessandrini – mise en scène Christopher Alden – chorégraphie Claire Glaskin – scénographie Paul Steinberg – costumes Doey Luethi – lumières Adam Silverman – avec Furio Zanasi (Orfeo), Anna Simboli (La Musica), Marianne Kielland (Messageria/Proserpina), Isa Gericke (Euridice/ Speranza), Nils Harald Sødal (Apollo), Njål Sparbo (Caronte), Johannes Weisser (Plutone/ Pastore 4), Fredrik Akselberg (Pastore 1/ Spirito 1), Petter U. Johansen (Pastore 2/ Spirito 2), Luca Dordolo (Pastore 3), Signe Sannem (Lund Ninfa), Matteo Bellotto (Spirito)


Opéra de Zagreb – 13 juin 2008 et sq. – dir. Hervé Niquet – mise en scène Ozren Prohic – décors Ozren Prohic, Marta Crnobrnja – costumes Julie Scobeltzine – lumières Deni Šesnic – chorégraphie Blaženka Kovac Caric – avec Kresimir Spicer, Ana Jembrek, Ivana Kladarin, Dejan Vrbacik, Marko Cvetko, Alen Rusko, Helena Lucic, Ante Jerkunica




Madrid – Teatro Real – 13, 15, 17, 19, 21, 23, 25, 26, 28 mai 2008 – Les Arts Florissants – dir. William Christie – mise en scène et scénographie Pier Luigi Pizzi – lumières Sergio Rossi – avec Dietrich Henschel (Orfeo), Maria Grazia Schiavo (Euridice, La Música, Proserpina), Sonia Prina (La Mensajera, La Esperanza), Luigi De Donato (Caronte), Antonio Abete (Plutone), Hanna Bayodi (Ninfa), Xavier Sabata (Pastor I), Cyril Auvity (Pastor II, Espíritu I), Juan Sancho (Pastor III, Espíritu II), Jonathan Sells (Pastor IV, Espíritu III), Ludovic Provost (Eco), Agustín Prunell-Friend (Apollo)


Opéra Magazine – juillet/août 2008 – 28 mai 2008

Pièce maîtresse du mini-festival consacré au mythe d’Orphée par le Teatro Real, cette nouvelle production de L’Orfeo est également le premier volet du cycle Monteverdi confié à William Christie, Les Arts Florissants et Pier Luigi Pizzi, qui se poursuivra avec Il ritorno d’Ulisse in patria au cours de la saison 2008-2009, avant L’incoronazione di Poppea en 2009-2010.
Quand le spectateur entre dans la salle, il découvre les instruments installés au niveau du parterre, sur un plancher recouvrant la fosse d’orchestre. Quelques marches permettent d’accéder au plateau, que les musiciens descendent, suivis de leur chef. Tous habillés en costumes d’époque (l’idée n’a plus rien d’original mais elle produit toujours son petit effet !), ils prennent place et la représentation commence. Le rideau noir se lève sur une scène plongée dans l’obscurité. Sur les premiers roulements de tambour de la fameuse toccata, un décor entier commence à surgir des dessous jusqu’à occuper tout l’espace la cour d’un palais en brique rouge très nettement inspiré par le Palazzo Ducale de Mantoue (où L’Orfeo fut joué pour la première fois en 1607), avec ses balcons, ses ouvertures en arc et les colonnes torves de son cortile. L’impact visuel est d’autant plus étourdissant que Les Sacqueboutiers, eux aussi vêtus comme au début du XVIIe siècle et placés au milieu, jouent extraordinairement bien.
Ainsi mis dans l’ambiance, on s’attend à passer une grande soirée de théâtre… sauf qu’il faut rapidement déchanter. Dans ce dispositif unique, que Sergio Rossi se contente de plonger dans la pénombre pour les deux actes aux Enfers, Pier Luigi Pizzi illustre en effet joliment le livret sans jamais impliquer le spectateur dans les affects de la favola in musica montéverdienne. L’Orfeo est certes un ouvrage à part qui, tout en ouvrant des pistes pour la construction du genre lyrique, n’est pas encore un opéra au sens où nous l’entendons aujourd’hui. Mais il est quand même possible d’y insuffler de l’influx dramatique Pendant les deux premiers actes, le metteur en scène se borne à faire entrer et sortir des personnages fort bien habillés de vêtements d’époque aux couleurs vives et parfaitement assorties (on connaît depuis longtemps le talent de costumier de Pizzi). Tout ce petit monde gambade, folâtre, joue à cache­cache derrière les colonnes, se mêle occasionnellement aux mstrumentistes, sans créer un seul instant le sentiment de la vie. La grâce et l’artifice règnent en maîtres, y compris dans l’expression de la douleur – quand Orfeo apprend la mort de son épouse.
On se dit que les choses vont peut-être s’arranger après l’entr’acte. Las, les poses savamment étudiées de figurants au corps livide dans le char funèbre de Caronte, que l’on croirait échappées d’un tableau classique, aggravent la sensation d’artifice, malgré le choix de revenir pour les instrumentistes et Orfeo, à des vêtements d’aujourd’hui (pantalon et chemise noirs), censés rapprocher la fable des préoccupations des spectateurs du XXIe siècle. Orfeo s’agite tellement – et sans raison apparente — aux quatre coins du plateau en brandissant sa lyre pendant «Possente spirito », qu’on en vient à souhaiter qu’il reste immobile et se contente de chanter! Quant aux espèces de dames blanches, tout droit sorties d’un roman gothique, qui se mettent à tournoyer lentement, la tête recouverte d’un long voile, au moment où Orfeo s’apprête à retrouver Euridice, elles paraissent tellement anachroniques qu’elles privent ce moment crucial de son impact. A cette musique rude, âpre, violente, Pizzi et son chorégraphe n’apportent pour toute réponse que de gracieux mouvements de bras et ondulations de tissu. Certains ont sans doute trouvé cela ravissant. Personnellement, nous sommes restés sur notre faim.
Par chance, le théâtre a quand même surgi par la grâce de William Christie et de son ensemble. Pour cette neuvième et dernière représentation de la série, Les Arts Florissants se sont littéralement surpassés, délivrant une exécution d’une perfection instrumentale absolue et d’une variété infinie dans les couleurs. Dirigeant une nouvelle édition critique signée Jonathan Cable, le chef franco-américain a pris l’exact contre-pied de la démarche du metteur en scène : rien de décoratif dans sa lecture mais du drame, de l’émotion, du rire et des larmes, que l’on a retrouvés dans le chant puissamment habité de Dietrich Henschel, Orfeo d’une noblesse et d’une éloquence exemplaires. Le reste de la distribution est parfois inégal (le Caronte privé de graves de Luigi De Donato) mais globalement satisfaisant, avec une mention pour la Messaggiera expressive de Sonia Prina. Le plus remarquable reste le Choeur des Arts Florissants, d’une telle beauté dans les passages directement inspirés par l’esthétique du madrigal que nous nous sommes surpris à en fermer les yeux de plaisir.
Salle comble et triomphe aux saluts grâce aux efforts menés par le Teatro Real, l’opéra « baroque» a décidément de beaux jours devant lui. »

Classic Toulouse

« Le quatrième centenaire du réputé premier opéra de l’histoire a entraîné la multiplication des nouvelles productions de L’Orfeo. Celle que réalise Pier Luigi pour le Teatro Real et pour le théâtre de La Fenice de Venise marquera l’ouvrage. Certes Orfeo n’y apparaît pas juché sur un scooter comme un ragazzino. Il ne tente pas d’enlever Euridice de l’asile d’aliéné où elle aurait été enfermée… Pizzi replace l’œuvre au temps de Monteverdi. Dans un très beau décor unique renaissance, les acteurs-chanteurs évoluent dans de somptueux costumes qui habillent également les musiciens, lesquels se mêlent habilement à l’action. La mise-en-scène, soignée, raffinée et intelligemment agencée, réalise une double intégration de la danse et du chant, du plateau et de la fosse entre lesquels n’existe aucune barrière. Détail subtil, Pizzi donne à voir, dans la dernière scène, les deux fins possibles : celle de la légende originale qui voit Orphée dévoré par les Bacchantes, et celle, plus heureuse, choisie par Monteverdi dans laquelle Apollon console son fils et l’emporte dans les cieux. Ce final est d’ailleurs l’occasion d’un éblouissant désordre chorégraphique qui voit les musiciens, les danseurs et les chanteurs emportés par une même folie, avec moonwalk digne d’un Michael Jackson !
L’exécution musicale n’est pas en reste. William Christie, maître en la matière, manie dynamique et raffinement extrême, sens des nuances et du phrasé, permettant à ses musiciens aguerris une ornementation parfaitement en situation. L’opulent continuo (deux clavecins, orgue, deux théorbes, violes et harpe) déploie des sonorités d’une suave beauté. Le chœur des Arts Florissants y fait merveille, évitant toute systématisation des nuances, comme dans le final de l’acte II qui s’achève par l’inhabituelle reprise du « Ahi caso acerbo… » sur un émouvant decrescendo.
La participation des cuivres des Sacqueboutiers revêt ici un double aspect musical et scénique. Apparaissant des tréfonds de la scène lors de la toccata d’ouverture, jouée avec éclat et sûreté, ils se mêlent aux esprits dans les ritournelles infernales impeccablement déclamées, à la fois rutilantes et inquiétantes.
Dans la distribution vocale, d’un excellent niveau, on ne peut qu’admirer l’étroite conjonction entre les qualités vocales et scéniques des acteurs-chanteurs. Maria Grazia Schiavo incarne les trois rôles d’Euridice, de Proserpina et de La Musica de son chant raffiné, clair et dramatiquement caractérisé. Sonia Prina est une Messaggiera émouvante et une chaleureuse Speranza. Le personnage d’Apollo est joliment chanté par le ténor Agustín Prunell-Friend. Quant aux deux basses, Luigi De Donato(Caronte) et Antonio Abete (Plutone), elles impressionnent par la solidité de leur déclamation, alors que tous les rôles de nymphes, bergers et esprits sont parfaitement tenus. Mention spéciale pour le ténor Cyril Auvity, particulièrement impliqué et Juan Sancho au timbre plein de charme.
Le cas de Dietrich Henschel, bouillant Orfeo, est un peu particulier. Sa voix de baryton corsé (il vient d’incarner Wozzeck) ne se plie pas aisément au phrasé raffiné que réclame le chant monteverdien et les notes aiguës lui posent quelques problèmes. Le timbre un peu ingrat, un peu rude pour ce rôle, ne l’empêche pourtant pas de vocaliser très correctement le redoutable « Possente spirto… ». Scéniquement toujours juste, il incarne, tout au long de l’œuvre, un véritable personnage, dramatique, convaincant et émouvant. »

Halle, Kammertheater – 9 mai, 9 juin 2008 – Fürth – 21 juin 2008 – dir. Wolfgang Katschner – mise en scène Kobie van Rensburg – décors, costumes Claudia Doderer – chef de choeur Jens Petereit – avec Gesine Nowakowski (La Musica), Kobie van Rensburg (Orfeo), Marlen Herzog (Messaggiera), Myrsini Margariti (Euridice), Axel Koehler (Speranza), Ki-Hyun Park (Caronte), Anke Berndt (Proserpina), Gerd Vogel (Plutone), Nils Giesecke (Apollo), Mona Deibele (Ninfa)

 

New Haven – Trinity Lutheran Church – 18, 19 avril 2008 – Yale Baroque Opera Project – production Ellen Rosand et Richard Lalli – The Yale Collegium Players – dir. Robert Mealy – mise en scène Ethan Heard – décors John Sundling – costumes Elizabeth Bolster – lumières Burke Brown




Théâtre de Bâle – 1er, 4, 8, 17, 19, 23 février, 14, 16, 30 mars, 7 avril, 5, 8, 10, 21, 23 mai 2008 – Chor des Theater Basel – Schola Cantourm Basiliensis – La Cetra Barockorchester Basel – dir. Andrea Marcon – mise en scène Jan Bosse – décors Stéphane Laimé – costumes Kathrin Plath – lumières Hermann Münzer – dramaturgie Ute Vollmar – avec Nikolay Borchev (Orfeo), Yeree Suh (La Musica), Agata Wilewska (Euridice/Echo), Rita Ahonen (Messagiera), Svetlana Ignatovich (Speranza), Ismael González (Caronte), Rosa Dominguez (Proserpina), Andrew Murphy (Plutone), Karl-Heinz Brandt (Apollo), Heike Heilmann (Ninfa), Karl-Heinz Brandt (1. Pastore), David Bates (2. Pastore), Michael Pflumm (3. Pastore), Hee-Do An (4. Pastore, 3. Spirito), Michael Pflumm (1. Spirito), Markus Moritz (2. Spirito) – nouvelle production



« L’Orfeo de Monteverdi est actuellement l’objet d’une transcription visuelle radicale au Théâtre de Bâle. En lieu et place des bergers arcadiens du livret, le metteur en scène Jan Bosse invite les spectateurs à assister au mariage d’un personnage fêté du show business entouré de ses amis très ‘pipoles’ …
Dès l’entrée dans le foyer, le spectateur est frappé par une décoration clinquante qui transforme l’antichambre du théâtre en salle de fête richement décorée. Dans le coin d’une galerie, un orchestre égrène quelques mélodies de danse alors que des serveurs offrent à chaque spectateur un verre de champagne. Puis les musiciens prennent place de part et d’autre du grand escalier qui, d’ordinaire, mène aux galeries et entonnent la fanfare d’ouverture. Des invités (en fait des membres du chœur) se répartissent dans le public, alors qu’apparaît La Musica du Prologue en robe du soir brillant de tous se feux. Puis arrive une mariée voilée – tout droit issue d’un magazine de mode – vêtue d’une superbe robe d’un blanc immaculé comme il se doit ; elle esrt rejointe ensuite par son époux dans une tenue époustouflante : escarpins argentés, costume et chemise rouge sur un pull à col roulé noir, coiffure rétro qui le fait ressembler aux stars du rock des années 60. Pendant la première heure du spectacle, tout se joue dans ce foyer avec un chœur disséminé en divers endroits de la salle, des acteurs qui montent sur des tables ou prennent l’escalier d’assaut tandis que des cameramen et des photographes, flash au clair, mitraillent l’assemblée de leurs armes de prédilection pour ensuite faire projeter leurs images sur un écran géant… Après l’arrivée de La Messagère annonçant la mort d’Eurydice, les portes du théâtre s’ouvrent mystérieusement. Les acteurs du drame se dirigent alors lentement vers la salle, suivi d’un public de plus en plus étonné.
Sur la scène, aucun décor, mais un vaste rideau noir sur lequel se détache un projecteur éclairant la salle a giorno. La fosse est un trou béant symbolisant le fleuve sur lequel Charon convoie ses victimes ; l’orchestre s’installe donc dans les premiers rangs du théâtre alors que le chœur prend place un peu partout, dans les rares sièges restés vides. L’enfer se présente ensuite comme un trou noir béant, enrichi d’un grand miroir dans lequel le public, plongé dans un éclairage ‘noir’ fantasmagorique qui fait scintiller le blanc des habits et des bijoux, assume involontairement le rôle des âmes en peine à la recherche d’un hypothétique salut. Une constante utilisation de la vidéo oblige le spectateur à assister à ce qui se passe derrière lui, voire dans le foyer du théâtre tandis que le spectacle continue sur le plateau. Dans cette transcription scénique fascinante, qui pose ouvertement la question du rapport du public au spectacle qui lui est offert sous cette forme aussi éclatée, la seule faute de goût se trouve à la fin, lorsque dans une parodie d’une mauvaise réalisation cinématographique des aventures de Superman on assiste à l’envol d’Apollon et Orphée sur les toits de Bâle avant de se perdre dans un ciel étoilé du plus bel effet kitsch…
La réussite ne serait bien sûr pas aussi aboutie sans la présence des instrumentistes de la Schola Cantorum Basiliensis, dont l’orchestre baroque est plus connu sous le nom La Cetra. En vrais virtuoses, ces musiciens savent donner corps à chaque inflexion du commentaire orchestral, hissant par là même les instrumentistes au rang de protagonistes établissant un dialogue sans cesse renouvelé avec les chanteurs. On peut cependant regretter que le chef, Andrea Marcon, s’intéresse plus à obtenir des musiciens une plasticité exemplaire qu’à soigner la mise en perspective dramatique du parlar cantando, souvent réduit ici à une déclamation un rien monotone faute d’une articulation trop peu soignée du texte ; ainsi, les fautes de prononciation italienne, avec notamment un Euridice prononcé avec un ‘k’ à l’allemande, sont tout simplement impardonnables dans une soirée lyrique où la perception parfaite du mot, comme le souhaitait d’ailleurs Monteverdi, devait passer avant la jouissance purement musicale…
La distribution fascine plus par sa cohésion que par les mérites intrinsèques de chaque interprétation. De fait, aucun chanteur ne sort du lot, à commencer par l’Orfeo sonore mais peu différencié de Nikolay Borchev ou La Musica uniformément bien chantante de Yeree Suh. Dans une troupe infectée par un méchant virus grippal qui avait attaqué ce soir-là trois des chanteurs principaux (la Messagiera, la Speranza et Euridice elle-même), il est donc difficile de mettre en exergue telle ou telle contribution ; on se contentera de dire que, dans son ensemble, ce spectacle appartient sans conteste à cette catégorie d’événement musical qui justifie amplement un déplacement dans la capitale rhénane de la Suisse allemande… » (Scènes magazine)

Opéra de Francfort – Bockenheimper Depot – 28, 30 décembre 2007, 3, 6, 9 janvier 2008 – dir. Felice Venanzoni – mise en scène David Hermann – décors, costumes Christof Hetzer – dramaturgie Zsolt Horpácsy – avec Christian Gerhaher (Orfeo), Arlene Rolph (Messagiera), Magnus Baldvinsson (Caronte), Katharina Magiera (Proserpina), Florian Plock (Plutone), Nathaniel Webster (Apollo)

 

Albacete – Teatro Circo – 1er décembre 2007 – version de concert – La Venexiana – dir. Claudio Cavina – avec Mirko Guadagnini (Orfeo), Emanuela Galli (la Musica, Euridice)

 

Theater Erfurt – 10, 17, 25 novembre, 14, 21, 26 décembre 2007, 5, 16, 20, 27 janvier 2008 – dir. Samuel Bächli – mise en scène Georg Rootering – décors, costumes Bernd Franke – chef de choeur Andreas Ketelhut – avec Marisca Mulder (La Musica/Speranza), Peter Schöne (Orfeo), Susanne Rath (Euridice/Echo), Alice Rath (Messaggera/Proserpina), Michael Tews (Caronte), Marwan Shamiyeh (Pastore/Spirito/Apollo), Denis Lakey (Pastore/Spirito), Máté Sólyom-Nagy (Pastore/Spirito/Plutone), Temi Raphael-Kamburova (Ninfa) – nouvelle production


Savone – Teatro Comunale Chiabrera – version de concert – 3 novembre 2007 – Orchestra dell’Academia Montis Regalis – Coro Filarmonico Ruggero Maghini – dir. Alessandro de Marchi – chef de choeur Claudio Chiavazza – avec Furio Zanasi (Orfeo), Gabriella Costa (Euridice), Daniele Carnovich (Caronte), Ann Hallenberg (Proserpina)

 

Manresa – Catalogne – 4 octobre 2007 – Bilbao – Théâtre Arriaga – 5 octobre 2007 – Pontoise – Cathédrale Saint-MaclouFestival Baroque de Pontoise – 7 octobre 2007 – Varsovie – 30 janvier 2008 – La Fenice – Choeur de Chambre de Namur – dir. Jean Tubéry – avec Hans-Jörg Mammel (Orfeo), Caroline Weynants (Musica), Aurore Bucher (Proserpina), Emmanuelle Halimi (Euridice), Jean-Claude Saragosse (Plutone), Luciana Mancini (Messagiera), Philippe Favette (Caronte), Benoît Giaux (Apollo), Helen Cassano (Speranza, Ninfa), Paulin Bündgen, alto (Pastore III, Spirito), Thibaut Lenaerts,Vincent Lesage, Benoît Porcherot, ténors (Pastore II, Spiriti), Etienne Debaisieux, basse (Pastore I)

Brême – Die Glocke – 23 septembre 2007 – version de concert – Hesperion XXI – La Capella Reial de Catalunya – dir. Jordi Savall

 

Rio de Janeiro – Theatro Municipal – 3, 4, 7, 8, 9 septembre 2007 – dir. Marcelo Fagerlande – mise en scène Alberto Renault – avec Luciano Botelho, ténor (Orfeo), Savio Sperando (basse)

 

Amsterdam – De Nederlandse Opera – Het Muziektheater – 31 août, 5, 13, 21, 27, 30 septembre, 2 octobre 2007 – dir. Stephen Stubbs – mise en scène Pierre Audi – décors Michael Simon – costumes Jorge Jara – lumières Jean Kalman – chef de choeur Martin Wright – avec David Cordier (La Musica), Jeremy Ovenden (Orfeo), Judith van Wanroij (Euridice), Pascal Bertin (La Speranza), Tania Kross (La Messagiera), Alan Ewing (Caronte), Wilke te Brummelstroete (Proserpina), Panajotis Iconomou (Plutone / Pastore 4), Ilse Eerens (Ninfa), Paul Agnew (Apollo / Pastore 2 / Spirito), Anders J. Dahlin (Pastore 1 / Eco / Spirito), Harry van der Kamp (Pastore 3 / Spirito)


intégrale audio – 2 CD Premiereopera

 

Edimbourg – Edinburgh Festival Theatre – 11, 13, 14 août 2007 – La Capella Reial de Catalunya – Hespèrion XXI – dir. Jordi Savall – mise en scène Gilbert Deflo – décors William Orlandi – chorégraphie Veronica Endo – avec Montserrat Figueras (La Musica), Furio Zanasi (Orfeo), Arianna Savall (Euridice), Gloria Banditelli (Messaggiera), Romina Basso (Speranza), Antonio Abete (Caronte), Adriana Fernández (Proserpina), Daniele Carnovich (Plutone), Fulvio Bettini (Apollo)


Drottningholm – Slottstheater – Suède – 28, 30 juillet, 1er, 3, 5, 7, 9, 11 août 2007 – The Drottningholm Theatre Orchestra – dir. Mark Tatlow – mise en scène Michiel Dijkema – costumes Claudia Damm – avec Susanne Rydén (La Musica), Rickard Söderberg (Orfeo), Ida Falk Winland (Euridice), Mikael Bellini (Speranza, Pastore), Lars Arvidson (Caronte), Anna Grevelius (Proserpina), Lina Markeby (Messaggera, Ninfa), Ulf Lundmark (Apollo, Pastore, Spirito), Lars Johansson Brissman (Plutone, Pastore, Spirito), Johan Christensson (Pastore, Spirito), Conny Thimander (Pastore, Spririto), Joel Annmo (Pastore, Spirito)

Opéra Magazine – novembre 2007

« Lorsque l’on sait à quelles sauces L’Orfeo de Montevcrdi a été accommodé ces dernières années par les metteurs en scène, la nouvelle production proposée dans l’écrin intimiste du Théâtre de cour de Drottningholm ne peut qu’apparaître surannée aux assoiffés de « relectures » modernes. Et pourtant, n’est pas la plus moderne celle que l’on croit! Car si ce lieu magique, par sa conception même et ses ressources techniques, impose une vision très typée des ouvrages qui y sont montés, il n’en demeure pas moins un espace prodigieusement éloquent sur l’art et la manière d’animer un opéra baroque, aussi ancien soit-il.
A Drottningholm, Orfeo ne connaît donc pas les joies du scooter, comme à Lille en 2005, les plaisirs prohibés d’un bar à entraîneuses, comme à Genève la même année, ni les courbes d’une guitare électrique façon Woodstock en guise de lyre, comme à Francfort en 2005 encore. Rien ne peut cette fois distraire ni détourner le mythique héros de sa sombre destinée, tout est d’une clarté aveuglante et d’une urgence expressive sidérante, les célèbres décors peints du petit théâtre suédois n’occultant jamais l’intemporalité de cette histoire d’amour brisée par le sort. Les noces ressemblent à des noces, l’enfer à l’enfer et, partant de ce postulat clair et direct, la réalisation de Michiel Dijkema trouve sans encombre le bon chemin.
Son travail paraît d’autant plus efficace, subtil et sensible que la machinerie si spécifique de Drottningholm n’autorise pas toujours une telle souplesse de propos. Epaulé par la créativité ébouriffante de Claudia Damm, dont les costumes sont une pure folie, le metteur en scène règle un spectacle d’un impact visuel hautement poétique, les chanteurs, intelligemment dirigés, offrant le meilleur d’eux-mêmes ou presque. Dès le prologue, la Musica sensuelle et complice de Susanne Ryden séduit sans réserve par son aisance et son tempérament. I.’Orfeo de Rickard Söderberg évolue à l’évidence sur la même longueur d’onde, son timbre ample et profond de ténor-baryton lui permettant des effets saisissants mais d’un goût toujours très sûr. Certaines accélérations dans la vocalise révèlent en plus un interprète n’ayant pas peur de prendre des risques.
L’Euridice d’Ida Falk Winland possède la grâce requise, rien de plus, rien de moins, la Messaggiera de Lina Markeby répandant en revanche la terrible nouvelle avec peu de conviction dans l’affect. Par contraste, le couple infernal affirme un fort charisme : le Plutone rageur et intraitable de Lars Johansson Brissman et la Proserpina ambiguë d’Anna Grevelius font véritablement sensation. Impressionnant de stature comme de voix, Lars Arvidson incarne magistralement le sinistre pas­ transformé en agneau par quelques notes de musique. Le reste de la distribution, avec une mention pour l’émouvant Apollo d’Ulf Lundmark, ne démérite pas. Bergers, Nymphes et Esprits rivalisent de séduction et de caractère, le chef britannique Mark Tatlow exaltant admirablement les climats de l’ouvrage à la tête du ductile Drottningholmsteaterns Orkester. »

Cooperstown – Opéra de Glimmerglass – 28, 30 juillet, 5, 11, 14, 17, 20, 23, 25 août 2007 – dir. Antony Walker – mise en scène Christopher Alden – décors Paul Steinberg – costumes Doey Lüthi – lumières Adam Silverman – chorégraphie Claire Glaskin – avec Michael Slattery (Orfeo), Megan Monaghan (Euridice, Speranza), Matthew Garrett (Apollo), Katherine Rohrer (Messagiera, Prosperina), Juliet Petrus (la Musica), Brian Thorsett (Pastore 1, Spirit 1), Katrina Thurman (Ninfa), Amanda Crider (Pastore 3), Christian Reeinert (Pastore 2, Spirit 2), Christopher Job (Caronte), Christopher Temporelli (Pastore 4, Pluto), Soon Young Park (Spirit 3) – nouvelle coproduction avec Opera North, Leeds et Norwegian Opera, Oslo



Opéra Magazine – novembre 2007

« Donné quelques heures après l’Orphée de Gluck, L’Orfeo de Monteverdi, malgré sa jeune et jolie équipe de solistes, et son excellent chef, a été littéralement laminé par la production de Christopher Alden…Le fil conducteur du spectacle est l’absence de communication : les chanteurs, le visage le plus souvent dans l’obscurité, ne se regardent jamais ou presque, ni ne regardent le public. Orfèo est une rock-star qui se dissimule derrière d’absurdes lunettes ou le capuchon d’un sweat-shirt. Entouré de sycophantes décadents, corrompu par l’argent (une pluie de dollars s’abat sur le plateau après « Possente spirto »), il évolue dans un monde où règnent la violence et l’absence d’amour. Bref, tous les ingrédients de l’histoire de Kurt Cobain, le guitariste du groupe Nirvana, sont là… sauf que Monteverdi et Striggio nous racontent tout autre chose ! Et ne parlons pas des bruitages divers qu’Alden ajoute au gré de sa fantaisie, comme il en a l’habitude…
Michael Slattery est pourtant un magnifique Orfeo, qui joint d’évidents dons artistiques à une excellente technique. Katherine Rohrer est merveilleuse en Messaggiera et Proserpina, Megan Monaghan et Juliet Petrus rivalisant de style et de qualité vocale. Mais quelle soirée éprouvante ! »

Beaune – Basilique Notre-Dame – 13 juillet 2007 – Festival International d’Opéra Baroque – version de concert – Concerto Italiano – dir. Rinaldo Alessandrini – avec Furio Zanasi, baryton (Orfeo), Anna Simboli, soprano (Euridice, Proserpina), Monica Piccinini, soprano (La Musica, Ninfa), Sergio Foresti, basse (Caronte), Antonio Abete, basse (Plutone), Luca Dordolo, ténor (Apollo, Pastore), Raffaele Giordani, alto (Pastore), Gianluca Ferrarini, ténor (Pastore), Marco Scavazza, basse (Pastore)

 

ConcertoNet

Fondateur du Concerto italiano, le chef et claveciniste Rinaldo Alessandrini est l’un des plus fins connaisseurs du madrigal italien qui fut, au tournant des XVI è et XVII è siècles, l’une des armes pour lutter contre l’hégémonie de la polyphonie de la Renaissance. Il n’est pas pour autant ce qu’on appelle un chef d’opéra. Or, si l’histoire a retenu la date de 1607 avec l’« Orfeo » de Monteverdi pour marquer l’avènement du tout nouveau genre musical, c’est parce qu’il ouvre sur l’avenir en mêlant pour la première fois de façon aussi dynamique et théâtrale parole et musique : l’opéra est né, mais Alessandrini n’en a cure. En ce vendredi 13, il réagit en musicologue, non en chef soucieux de tendre les ressorts d’une dramaturgie alors toute nouvelle.
Le chef italien accentue certains contrastes de tempo ou de dynamique, mais rate l’essentiel qui est l’arc d’ensemble unissant tous les ingrédients inventés ici par Monteverdi. Sa direction en est heurtée, mais pas émouvante pour autant. Plus surprenant, la distribution a paru brute de décoffrage et surtout bien hétérogène, certaines voix frisant l’amateurisme par la banalité du timbre et la justesse approximative. Même l’Orphée du baryton italien Furio Zanasi ne réussit pas à tenir l’assistance en permanence sous le charme de son chant : un comble ! Néanmoins la firme Naïve a décidé de garder une trace de ce travail dans un coffret de CD à paraître à la rentrée. »

Aix en Provence – Théâtre de l’Archevêché – 6, 8, 11, 12, 14, 15 juillet 2007 – Concerto Vocale – Choeur du Clare College – dir. René Jacobs – mise en scène, chorégraphie Trisha Brown – décors, costumes Roland Aeschlimann – lumières Roland Aeschlimann, Gerd Meier – avec Vittorio Prato / Stéphane Degout (Orfeo), Marie-Claude Chappuis (La Messagiera / La Musica), Alessandro Giangrande (La Speranza), Ruby Hugues (Euridice /Eco), Anouschka Lara (Ninfa), Anna Stephany (Proserpina / Ninfa), Christophe Gay (Apollo), Konstantin Wolff (Caro), Luca Tittoto (Pluto), Christophe Gay, Carl Ghazarossian (Pastori / Spiriti), Alessandro Giangrande, Nicholas Watts, Andreas Wolf (Pastori / Spiriti) – Production du Théâtre de La Monnaie


Le Monde – 6 juillet 2007 – L' »Orfeo » de Monteverdi enchante Aix de sa fable

« Avec l’Orfeo, de Monteverdi, nous avons enfin retrouvé le Festival d’Aix-en-Provence tel que nous l’aimons. Une belle soirée chaude au Théâtre de l’Archevêché, le ciel strié de martinets. Puis le violet sombre qui vient, les premières étoiles et, dans la musique, les tièdes caresses du vent de la nuit aixoise.
Cet Orfeo mis en scène par la chorégraphe américaine Trisha Brown et dirigé par le Belge René Jacobs a triomphé pour la première fois au printemps 1998 au Théâtre Royal de La Monnaie, à Bruxelles. Un succès que confirmait quelques semaines plus tard la reprise du spectacle au Festival d’Aix-en-Provence. Bernard Foccroulle était alors directeur de La Monnaie. Neuf ans plus tard, c’est à la tête d’Aix-en-Provence qu’il reprogramme cet Orfeo devenu mythique – Grand Prix du meilleur spectacle lyrique 1998, des reprises un peu partout, et un DVD bardé de récompenses paru chez Harmonia Mundi.
De fait, Orfeo n’a pas pris une ride. Le secret de cette jouvence artistique ? Trisha Brown et René Jacobs ont observé à la lettre l’esprit de ce qui, en 1607, n’est pas encore un opéra, mais se dit « fable en musique ». Un lieu fragile, où poésie, geste, musique, battent d’un même coeur. Le Prologue et les deux premiers actes sont toujours un pur enchantement. Sur fond de lune féerique, « La Musica » vole, écrivant dans les airs une partition de chair et d’os (Katrina Thompson Warren a la grâce des « putti » des églises baroques). René Jacobs spatialise les sons au sens propre (magie des instruments jouant aux fenêtres de l’Archevêché comme venus de nulle part dans le grand air d’Orphée séduisant les Enfers). Plus encore, il distille les timbres et cela crée comme une chorégraphie invisible dans l’espace.
L’histoire d’Orphée et d’Eurydice dure le temps d’une éclipse ou d’une morsure, c’est-à-dire d’un spectacle. Rhétorique du corps inscrite dans le temps musical, musique affranchie du temps pour entrer dans l’espace : Trisha Brown et René Jacobs ont réussi ce petit miracle qui s’appelle la création. Dans la fosse, les musiciens du Concerto Vocale étonnent, solistes rompus à la mise en danger, ils savent aussi se jouer les uns des autres. Le choeur des English Voices fait preuve d’une belle cohésion sans négliger une chorégraphie parfois complexe (ils réussissent à se mêler aux danseurs sans que l’on remarque leur différence). Promesses tenues aussi pour les solistes de l’Académie européeenne de musique, Eurydice en tête (gracieuse Ruby Hughes). Chantée par le chaud mezzo de Marie-Claude Chappuis, La Messagère (alias La Musica, alias l’Espérance) émeut. Ce qui n’est, hélas, guère le cas de Stéphane Degout, Orphée au baryton puissant et à la technique solide.
Mais ni dans le chant d’exaltation amoureuse (« Rosa del ciel ») ni dans l’air de déploration extrême (« Tu sei morta »), ni même dans le fameux et très virtuose « Possente spirto » destiné à attendrir les Enfers, on n’éprouve cette sublime compassion qui fait qu’on aime et qu’on souffre d’amour, qu’on rit avec les bergers pour mieux pleurer avec les nymphes, qu’on franchit les Enfers et qu’on en revient, avant de rejoindre le ciel d’Apollon. »

Montréal – 25 juin 2007 – Festival Baroque de Montreal – Bande Baroque de Montréal

 

Hanovre – Niedersächsische Staatstheater – 16, 21, 27, 30 juin, 4, 6, 8, 12 juillet 2007 – dir. Toshiaki Murakami – mise en scène Ingo Kerkhof – décors Anne Neuser – costumes Stephan von Wedel – chef de choeur Dan Ratiu – avec Lauri Vasar (Orfeo), Hinako Yoshikawa (Euridice), Khatuna Mikaberidze (Messaggiera), Dorothea Maria Marx (La Speranza), Albert Pesendorfer (Caronte), Arantxa Armentia / Alla Kravchuk (Proserpina), Tobias Schabel (Pluto), Frank Schneiders (Apollo)


Opéra de Halle – 4 juin 2007 – Chor der Oper Halle – Händelfestspielorchesters Halle – Lautten Compagney Berlin – dir. Wolfgang Katschner – mise en scène Kobie van Rensburg – décors Claudia Doderer – avec Kobie van Rensburg (Orfeo), Myrsini Margariti (Euridice), Gesine Nowakowski ( La Musica), Marlen Herzog (Messaggiera), Axel Köhler (Speranza), Ki-Hyun Park (Caronte), Anke Berndt (Proserpina), Gerd Vogel (Plutone), Nils Giesecke (Apollo)


Drottningholm – Slottstheater – 26, 28, 30 mai, 1er, 2, 6, 8, 9 juin, 30 juillet, 1er, 3, 5, 7, 9, 11 août 2007 – The Drottningholm Theatre Orchestra – dir. Mark Tatlow – mise en scène Michiel Dijkema – costumes Claudia Damm – avec Susanne Rydén (La Musica), Rickard Söderberg (Orfeo), Ida Falk Winland (Euridice), Mikael Bellini (Speranza, Pastore), Lars Arvidson (Caronte), Anna Grevelius (Proserpina), Lina Markeby (Messaggiera, Ninfa), Ulf Lundmark (Apollo, Pastore, Spirito), Johan Christensson (Pastore, Spirito), Conny Thimander (Pastore, Spririto)

 

Londres – St John’s, Smith Square – 24 mai 2007 – La Venexiana – dir. Claudio Cavina – avec Emanuela Galli (Musica / Euridice), Mirko Guadagnini (Orfeo), Gloria Banditelli (Messaggiera) – version semi-scénique en costumes

 

Pampelone – Palacio de Congresos y Auditorio de Pamplona – 21 mai 2007 – The New London Consort – dir. Philip Pickett – mise en scène Jonathan Miller – chorégraphie Sue Lefton – costumes Shirin Guild – avec Mark Tucker (Orfeo), Joanne Lunn (La Música, Proserpina), Julia Gooding (La Messaggiera), Revital Raviv (Eurídice), Faye Newton (Ninfa) , Mark Chambers (Speranza, Pastore, Spirito), Andrew King (Apollo, Pastore, Spirito), Joseph Cornwell (Pastore, Spirito), Michael George (Plutone, Pastore), Simon Grant (Caronte, Pastore, Spirito), Mark Rowlinson (Pastore, Spirito), Martin Robson (Pastore, Spirito)

 

Cremone – Teatro Amilcare Ponchielli – 12 mai 2007 – Orchestra Barocca di Venezia – Coro Costanzo Porta (chef des choeurs Antonio Greco) – dir. Andrea Marcon – mise en scène Andrea Cigni – décors et costumes Lorenzo Cutùli – lumières Fiammetta Baldiserri – avec Vittorio Prato (Orfeo), Céline Scheen (Euridice, La Musica), José Maria Lo Monaco (Messaggiera, Speranza), Giovanni Battista Parodi (Caronte), Luca Tittoto (Plutone), Gabriella Sborgi (Proserpina), Gabriella Sborgi (Ninfa), Luca Dordolo (Apollo), Luca Dordolo, Paolo Cauteruccio, Luca Tittoto, Antonio Giovannini (Pastori) – nouvelle production

 

Prague – Théâtre National – 3, 5, 6 mai 2007 – Théâtre des États – Festival de Printemps de Prague – 2, 10 juin 2007 – Roberto Gini – mise en scène Jirí Herman – décors Pavel Svoboda – costumes Lenka Polášková – avec Vincenzo Di Donato (Orfeo), Markéta Cukrová (Euridice), Petra Noskaiová (Ninfa), Salvo Vitale (Caronte), Dali Mor (Plutone), Petra Noskaiová (Proserpina), Hasan El-Dunia (Apollo), Lavinia Bertotti, Luca Cervoni, Hasan El-Dunia, Stanislav Predota, Luca Cervoni, Ivo Michl, David Jurion



Opéra de Bordeaux – 12, 14 mars 2007 – en version de concert – Le Concert des Nations – dir. Jordi Savall – Ensemble vocal Sagittarius – dir. Michel Laplénie – avec Furio Zanasi (Orfeo), Ariana Savall (Euridice), Montserrat Figueras (La Musica), Romina Basso (Speranza), Fulvio Bettini (Apollo), Antonio Abete (Caronte), Adriana Fernandez (Proserpina), Francesc Garrigosa (Pastore,2e berger), Daniele Carnovich (Plutone), Cyril Auvity (Un berger/Un esprit), Ivan Garcia (Un berger), Gloria Banditelli (La Messaggiera)

 

Baden bei Wien, Stadttheater Baden – Autriche – 25 février 2007 – Akademie für Alte Musik Berlin – dir. René Jacobs – avec Stéphane Degout (Orfeo), Sunhae Im (La Musica/Euridice), Marie-Claude Chappuis (Messaggiera/Proserpina), David DQ Lee (La Speranza), Sergio Foresti (Caronte), Antonio Abete (Plutone), Michael Slattery (Apollo/Pastore), Johannes Chum (Pastore/Spirito), Yeree Sun (Ninfa), David Hansen (Pastore/Spirito)

 

Halle – Kammertheater – 17, 18 février, 4, 24 mars, 13 avril 2007 – dir. Wolfgang Katschner – mise en scène Kobie van Rensburg – décors Claudia Doderer – chorégraphie Helmut Neumann – avec Gesine Nowakowski (La Musica), Kobie van Rensburg (Orfeo), Marlen Herzog (Messaggiera), Myrsini Margariti (Euridice), Axel Köhler (Speranza), Ki-Hyun Park (Caronte), Anke Berndt (Proserpina), Gerd Vogel (Plutone), Nils Giesecke (Apollo), Björn Christian Kuhn , Maik Gruchenberg , Hwa Young Chun (Pastori), Mona Deibele (Ninfa), Björn Christian Kuhn, Maik Gruchenberg (Spiriti) – nouvelle production


Leeds – Grand Theatre – 16 février, 13, 15, 17 mars 2007 – Nottingham Theatre Royal – 24 février 2007 – Salford Quays The Lowry – 3 mars 2007 – Newcastle Theatre Royal -10 mars 2007 – dir. Christopher Moulds – mise en scène Christopher Alden – décors Paul Steinberg – costumes Doey Luethi – lumières Adam Silverman – chorégraphie Claire Glaskin – avec Paul Nilon (Orfeo), Graeme Broadbent, Ashley Catling, Lucy Crowe, Andrew Foster-Williams, Amy Freston, James Laing, James McOran-Campbell, Nicholas Sharratt, Anna Stephany, Ann Taylor, Damian Thantrey, Jessica Walker



Berlin – Staatsoper Unter den Linden – 30 janvier, 2, 4, 5 février 2007 – Akademie für Alte Musik Berlin – dir. René Jacobs – mise en scène Barrie Kosky – décors Klaus Grünberg – costumes Miro Paternostro – avec Sunhae Im (La Musica / Euridice), Stéphane Degout (Orfeo), Marie-Claude Chappuis (Messaggiera / Proserpina), Arlene Rolph (La Speranza), Sergio Foresti (Caronte), Antonio Abete (Plutone), Michael Slattery (Apollo) – coproduction avec Innsbrucker Festwochen

Classique.news (critique de la diffusion sur Arte – 13 octobre 2007)

« D’emblée, on relève les références visuelles et picturales de la scénographie et des décors : surréalisme fantastique, à la fois épurée et d’un froideur à la Magritte qui souligne, aspect saillant de la production, le cynisme de l’oeuvre, cette épreuve de la douleur, au cours de laquelle le poète et chantre, Orphée, fait l’expérience de la perte, du renoncement, du déchirement car comme Apollon le lui rappelle en fin d’action : « Rien ici-bas ne nous réjouit ni ne dure ». La vision est terrifiante, d’une glaçante ironie.
En cela, la direction de Jacobs plus précise, nerveuse, fouettée, analytique voire tranchante et même grimaçante que jamais, renforce le réalisme sans issue ni douceur de l’intrigue. En homme du Nord, doué d’une précision médical et clinique, le chef flamand écarte toute sensualité voluptueuse, cette sensibilité aux chromatismes et à la plasticité qui fait tout le sel des versions « latines » de Jordi Savall ou de l’argentin Gabriel Garrido.
Faut-il dans ce cas défendre le choix de Stéphane Degout ? La voix est certes bien placée, l’aisance scénique du comédien évidente mais l’articulation et la projection du texte s’enlisent constamment dans un chant droit, serré, qui manque souvent d’imagination, entre la prière, le désespoir ou l’ivresse du poète amoureux puis veuf. Evidemment l’on comprend que son style détaché, désincarné qui glisse sur toute l’ornementation de la ligne vocale, s’intègre parfaitement dans l’austérité glaciale du projet. Sa voix se prête davantage au personnage de Caronte ou de Plutone (ce dernier, ici chanté, fort bien d’ailleurs, par un habitué du personnage, Antonio Abete). De leur côté, deux rôles féminins se distinguent grâce à leur engagement plus physique et charnel que cérébral, grâce aussi à davantage de subtilité et d’articulation: Musica/Euridice de Sunhae Im, et surtout la Messaggiera/Proserpina de Marie-Claude Chappuis, laquelle a chanté Ottavia dans Aggripina de Haendel sous la baguette de Jacobs (Bruxelles, La Monnaie, mars 2006).
Que l’on apprécie ensuite le style de Degout pour nous hors sujet dans le rôle-titre, est bien sûr une affaire de goût. Le cynisme à l’oeuvre dans la vision du duo Jacobs/Kosky fonctionne à merveille, avec même un superbe tableau des enfers… Par contre, la réalisation filmique n’est pas à la hauteur de la partition ni du théâtre des passions humaines de Monteverdi! Le réalisateur Georg Wübbolt a-t-il eu le temps nécessaire pour « rentrer » dans l’oeuvre et réaliser ses repérages? On peut en douter au regard du résultat à l’écran : aucun plans serrés sur l’expression des visages, des cadrages flottants, sans distinction des mouvements de scène, ni des changements de décors… dommage. »

Télérama

« …la mise en scène de Barrie Kosky, en costumes contemporains, est aussi plus sombre et plus mélodramatique. Pieds nus, feutre sur l’oreille et fleur à la boutonnière, Orphée apparaît d’abord, au milieu des invités pour ses noces avec Eurydice, en auteur-compositeur-interprète, façon « fou chantant » — « Y a d’la joie ! … » La liesse est de courte durée, la Messagère venant annoncer la mort d’Eurydice, mordue par un serpent. Suit pour Orphée une descente aux Enfers, au sens propre – un monde inquiétant et globuleux d’infra-terrestres. Le sauvetage final d’Orphée par un Apollon supra-terrestre et lémurien n’est guère plus rassurant. Ce qui est réjouissant, en revanche, c’est la réalisation musicale, toujours plus inventive et plus colorée, de René Jacobs et de ses interprètes. En particulier le baryton français Stéphane Degout dans le rôle-titre – timbre tour à tour âpre ou enjôleur – et le continuo fleuri, au clavecin, de Giorgio Paronuzzi. »

Düsseldorf – RheinOperMobil – 31 octobre, 3, 4 novembre 2006

 

Bielefeld – Theater am Alten Markt – 22, 28 octobre, 5 novembre, 1er, 30 décembre 2006 – dir. Carolin Nordmeyer – mise en scène Birgit Kronhage – décors, costumes Katrin Klinksieg – avec Kaja Plessing (Speranza), Lassi Partananen (Orfeo) – nouvelle production

 

Londres – Hackney Empire – 6 octobre 2006 – Arts Cambridge – 21 octobre 2006 – Northcott Exeter – 25 , 28 octobre 2006 – Marlowe Canterbury – 30 octobre 2006 – Theatre Royal Lincoln – 4 novembre 2006 – Maltings Concert Hall Snape – 11 novembre 2006 – Opera House Buxton – 13 novembre 2006 – Festival Malvern – 23, 25 novembre 2006 – Theatre Royal Bath – 29 novembre, 2 décembre 2006 – English Touring Opera – mise en scène James Conway – lumières Matthew Haskins – avec Hal Cazalet, Katherine Manley, David Stout, Martin Robson, Joana Thome, Huw Rhys Evans, Jane Harrington, Susan Atherton, Sean Clayton

 

Bruxelles – Palais des Beaux Arts – Klarafestival – version de concert – 6 septembre 2006 – Le Concert des Nations – Collegium Vocale Gent – dir. Jordi Savall – avec Furio Zanasi (Orfeo), Montserrat Figueras (La Musica), Arianna Savall (Euridice), Adriana Fernandez (Proserpina), Sara Mingardo (Messagiera), Fulvio Bettini (Apolo), Romina Basso (Speranza), Antonio Abete (Caronte), Daniele Carnovich (Plutone), Cyril Auvity (Pastor), Gerd Turk (Eco), Francesc Garrigosa (Pastor), Iván García (Pastor)

 

Abbatiale de Lessay – Mayenne – Les Heures Musicales de Lessay – 25 juillet 2006 – version de concert – La Fenice, les solistes du Choeur de chambre de Namur – dir. Jean Tubéry – avec Hans-Jörg Mammel (Orfeo), Claire Lefillîatre (Musica), Aurore Bucher (Messagiera), Julie Robart-Gendre (Euridice), Caroline Tarrit (Proserpine), Hubert Deny (Plutone), Philippe Favette (Caronte), Etienne Debaiseux (Apollo), Helen Cassano (Ninfa), Paulin Bündgen (Pastore, Spirito), Thibaut Lenaerts (Pastore, Spirito), Renaud Tripathi (Pastore, Spirito), Peter de Laurentiis (Pastore, Spirito), Jean-Marie Marchal (Spirito)

 

Théâtre du Châtelet – 12, 14, 16, 18 mai 2006 – Colmar – Théâtre Municipal – 9, 11 juin 2006 – Mulhouse – Théâtre de la Sinne – 17, 19, 21 juin 2006 – Opéra de Strasbourg – 27, 29 juin, 1er, 3 juillet 2006 – Concert d’Astrée – dir. Emmanuelle Haim – mise en scène Giorgio Barberio Corsetti – décors Cristian Taraborrelli, Giorgio Barberio Corsetti – costumes Cristian Taraborrelli – lumières Giorgio Foti – video Fabio Iaquone – avec Kerstin Avemo (La Musica / Euridice), Pascal Bertin, Ed Lyon, Finnur Bjarnasson (Pastore), Kimy McLaren (Ninfa), Michael Slattery / Finnur Bjarnasson (Orfeo), Renate Pokupic (Messagiera), Marina de Liso (La Speranza), Andrea Silvestrelli (Caronte), Aurelia Legay (Proserpina), Paul Gay (Plutone), Finnur Bjarnasson (Apollo, Eco) – nouvelle coproduction avec Opéra de Lille, Théâtre de Caen


Webthea – Le baroque entre hip hop et Vespa

« La Musica, divinité pivot de L’Orfeo de Claudio Monteverdi, surgit dans une sorte de boîte carrée suspendue dans le vide. En grand apparat, robe de velours grenat, broderies, bijoux et boucles brunes sagement rangées au-dessus de son front. Tandis qu’elle chante le destin d’Orphée, prologue de ce qu’il est convenu d’appeler le premier opéra de l’histoire du lyrique – ce qui n’est ni tout à fait exact, ni tout à fait erroné – son image amplifiée sur un écran géant bouge dans son dos et ses mains potelées dansent un ballet de sorcière autour du personnage réel qui flotte dans son écrin. Lumière bleutée sur le début du premier acte : un espace à ciel ouvert, des scooters et des vespas autour desquels papote un groupe de jeunes gens habillés comme vous et moi, à vingt ans… Luths, théorbes, harpes, violes, violone, cornets et sacqueboutes, les sons qui s’élèvent de l’orchestre sont du plus pur baroque. Le contraste est d’une souriante fraîcheur.
Deux personnalités du monde de la musique et du monde du théâtre signent cette juvénile production de l’Opéra de Lille, en visite au Châtelet dans le cadre de son Festival des Régions. Emmanuelle Haïm, côté musique, et Giorgio Barberio Corsetti, côté mise en scène. Claveciniste au charme communicatif, d’abord soliste au clavier puis chef d’orchestre, Emmanuelle Haïm fondait il y a six ans Le Concert d’Astrée, un ensemble de chanteurs et d’instrumentistes rompus au répertoire baroque avec lequel elle obtint quelques jolis succès tant sur disque (chez Virgin Classic) que sur scène jusqu’à enlever le prix du meilleur ensemble 2003 des Victoires de la Musique. Une distinction qui lui valut, entre autres, de s’installer en résidence à l’Opéra de Lille.
L’homme de théâtre italien Corsetti affectionne le mélange des genres, des temps, des espaces et des techniques. La vidéo lui sert souvent de fil conducteur ou plutôt de liant, à la manière des sauces dont les cuisiniers usent pour ajuster les ingrédients d’un plat. Il filme les acteurs, les chanteurs, en gros plans intimes et mouvements chorégraphiés, il fait flotter leurs images, dans toutes les poses, à l’horizontale ou la tête en bas. Reflets rêvés des actions qui se déroulent sur scène… D’autres effets de transposition sont moins heureux. A l’intérieur des Enfers Proserpine et Pluton sont transformés en petits bourgeois scotchés devant leur poste de télévision, les trois esprits en collants couleur chair (ils ont l’air tout nus) leur confectionnent des petits gâteaux qui ressemblent à des cailloux blancs. Ils serviront d’ailleurs, comme dans Le Petit Poucet, à indiquer à Euridice le chemin à suivre, derrière Orféo, pour tenter de retrouver la lumière. C’est l’éternel problème de ces transpositions radicales qui invariablement buttent en cours de route – le plus souvent en deuxième partie – sur un obstacle récalcitrant, un détail qui est de son époque et qui ne veut ni ne peut en sortir…
Usant d’un diapason élevé, Emmanuelle Haïm entraîne musiciens et chanteurs sur un rythme allègre : tout est enlevé rapide, léger, presque cristallin, même au travers des cornets, trompettes et sacqueboutes des merveilleux Sacqueboutiers de Toulouse. La moyenne d’âge des chanteurs (26 ans !) disculpe leur manque d’assurance et de maturité. Mais on y découvre quelques jolis timbres, des talents en devenir, l’aplomb de la Messagère/Renata Pokupic, la rondeur d’Aurélia Legay/Proserpine… Entre hip hop dansé par quelques acrobates du chœur, scooters rutilants et télé-réalité, Monteverdi y perd un peu la boule, mais l’enchantement de sa musique reste intact. »

Anaclase.com – 11 juin 2006

« Après les représentations lilloises et parisiennes, c’est le public d’Alsace qui pouvait découvrir L’Orfeo de Giorgio Barberio Corsetti. Ce metteur en scène imaginatif s’est principalement penché sur l’impureté définitionnelle du mythe, véhiculant certaines valeurs à travers les siècles, à la fois suffi-samment fort pour survivre au temps et ouvert pour s’en nourrir ; de ces curieux mélanges et contaminations naissent de divins monstres, en poésie, en peinture comme en musique, dont celui de Monteverdi n’est pas des moindres. Rien de plus naturel, donc, que les tréteaux croisent la vidéo ou qu’un moteur meuve la barque de Charon, et que la fête continue sous les cieux printaniers d’amours sixties qu’anime la relative vitesse d’une Vespa. Le climat reste méditerranéen, la datation nous échappe, les allégories s’y veulent Renaissance, sans oublier trois acrobates – Romain Guimard, Domingos Lecomte et Antony Lefebvre – inquiétants, tour à tour gentils satyres ou pâtissiers énigmatiques qui semblent veiller à la cristal-lisation de l’argument. Lorsqu’on aura dit qu’un certain ton habite la scène – de légèreté, d’insouciante camaraderie, de préparatifs sympathiquement fébriles pour les mortels -, on imaginera aisément le contraste des apparitions divines.
Dès le Prologue, un carré noir se dessine sur le catafalque immaculé du cadre de scène ; les images du vidéaste Fabio Iaquone seront projetées sur cet écran, des images qui jamais ne prendront de fonction exclusivement décorative, comme c’est trop souvent le cas dans ces tentatives hybrides. Ainsi la voix de la Musique, dans cet écrin savamment ciselé par la lumière – Giorgio Foti – se trouve-t-elle d’autant transcendée par son double disproportionné qui envahit peu à peu le regard qu’il enferme dans sa main, nous invitant à un rituel inattendu. Les interrogations de l’œuvre nous sautent alors au visage, sans que jamais aucune réponse n’en sourde, laissant à la vie spirituelle ses salvateurs et inaccessibles mystères. Ce n’est qu’un début… bref, Giorgio Barberio Corsetti invente des mondes joueurs qui nous ravissent dans une perspective d’émotion, grâce à une inspiration génialement iconoclaste qu’il sait assurer d’une heuristique qu’on jurerait infaillible.
Poursuivant une collaboration amorcée la saison dernière par Les Boréades de Rameau, Emmanuelle Haïm, à la tête de son Concert d’Astrée, dirige un Orfeo quelque peu brouillon, souvent capricieux, en tout cas jamais vraiment précis, qui trouve moyen, dans l’acoustique du Théâtre Municipal de Colmar, sertissant idéalement les timbres et les voix, de couvrir les chanteurs – je dis bien couvrir et non fondre instruments et voix, entendons-nous bien. Lors de la production citée ci-dessus, les parties de chœur avaient été confiées à une formation de circonstance ; de ce zygote naquit l’idée d’un chœur constitué, de sorte que l’ Ensemble Vocal du Concert d’Astrée vit tout récemment le jour, bambin dont le public goûtait aujourd’hui l’équilibre et l’efficacité. À ses forces s’associaient celles des Sacqueboutiers de Toulouse.
Cet Orfeo doit beaucoup aux chanteurs qui le défendent. Outre que les choix de distribution s’avèrent plutôt heureux, les présences scéniques paraissent évidentes, les partis-pris de mise en scène assumés par tous, chaque personnage est plus attachant que jamais, si brève que soit son rôle écrit, voire sa seule figuration. L’équipe est jeune, ce qui contribue grandement au sympathique impact du spectacle. Autour du couple mythique, incarné par l’agile Kerstin Avemo (Euridice et La Musica) et Michael Slattery (Orfeo), la Messagiera de Renata Pokupic crève l’écran, de même que la richesse de timbre d’Aurelia Legay donne son aura à Proserpina. L’on retrouve avec plaisir l’élégance vocale et la clarté de Finnur Bjarnason en Apollo, incarnant également l’un des trois Pastori, en compagnie de la voix chaudement colorée de Pascal Bertin et des cuivres épicés d’ Ed Lyon. »

Concertclassic – 14 mai 2006 – Une relecture brillante

Le Châtelet accueille la production lilloise de l’Orfeo monteverdien. Qu’elle est bien vue cette proposition aussi séduisante que risquée tentée par Giorgio Barberio Corsetti, avec son premier acte qui fait écho au West Side Story de Bernstein : Orfeo est entouré par ses amis, une bande d’adolescents tous plus séduisants les uns que les autres qui se taquinent sur le pré à peine descendus de leurs vespa.
Un fort parfum d’homo érotisme plane sur la parenthèse heureuse qui débute l’opéra, largement assumé par la silhouette crâne et la gueule de minou de Michael Slattery, assez irrésistible par son jeu dynamique, ses sourires craquants. Et lorsque que l’on sait que sa mort sera inspirée par celle de Pasolini, cet Orfeo quasi gay (sensation encore augmentée par trois acrobates musculeux portant les attributs des satyres) dont les rapports avec Eurydice paraissent souvent fantasmatiques est un sacré pied de nez aux conventions qui ont toujours corseté l’Orfeo.
L’apparition de la Messagère (médusante Renata Pokupic, admirable de peine retenue) vient défaire la magie sensuelle et entraîne le poète dans le royaume de la mort, bien plus prosaïque que celui des vivants (le palais de Pluton est un salon télé). Corsetti a recourt avec efficacité aux projections (belle image du geste de La Musica endormant Caron dans sa barque) et mêle habillement transposition moderne et référence au temps de Monteverdi (la silhouette androgyne de Kerstin Aveno prise dans un tableau imité du Poussin).
Il faudrait détailler ici toutes les inventions poétiques dont Corsetti émaille l’action des deux derniers actes : allez voir le spectacle, il est peu probable que vous ne soyez pas ébloui par la qualité de ses idées. En fosse, Emmanuel Haim distille un orchestre d’une richesse entêtante : beaucoup de couleurs qui masquent ça et là une sensualité un rien timide surtout en regard de ce qu’offre la scène, mais fait montre d’un sens dramatique affûté. Si Slattery brille dans les ensembles, Possente spirto exige trop de sa voix encore bien jeune : on y aurait plutôt entendu l’un des pastori, Finnur Bjarnason, dont chaque intervention tenait du miracle et auquel revenait également un Apollon surprenant. Le Pluton de Paul Gay, la Proserpine touchante d’Aurélie Legay, tous étaient au diapason d’une production assez exemplaire. »

Toronto – Elgin Theatre – Atelier de Toronto – 15, 18, 20, 22, 23 avril 2006 – Tafelmusik Baroque Orchestra & Choir – dir. David Fallis – mise en scène Marshall Pynkoski – costumes décors Gerard Gauci et Dora Rust D’Eye – avec Monica Whicher (La Musica), Daniel Belcher (Orfeo), Matthew White (Speranza), Olivier Laquerre (Caronte), Curtis Sullivan (Plutone), Jennie Such (Proserpina), Colin Ainsworth (Apollo), Stephanie Novacek (Messaggiera)



Londres – Coliseum – English National Opera – 15, 18, 20, 22, 26, 28 avril 2006 – dir. Laurence Cummings – mise en scène Chen Shi-Zheng – décors Tom Pye – costumes Caitlin Ward – lumières Scott Zielinski – nouvelle coproduction avec Handel and Haydn Society, Boston – en anglais – avec John Mark Ainsley (Orfeo), Ruby Philogene (Eurydice), Elizabeth Watts (Musica/Hope), Brindley Sheratt (Caronte), Stephanie Marshall (Proserpina), Tom Randle (Apollo/First Shepherd), Wendy Dawn Thompson (Messenger), Anna Dennis, Katherine Manley, Anne Bourne, Catharine Rogers, Tim Mead, Stephen Wallace, Nicholas Watts, Darren Abrahams, William Berger, Toby Stafford-Allen, Martin Robson



Atelier Lyrique de Tourcoing – 7, 8 janvier 2006 – Théâtre des Champs Elysées – 11 janvier 2006 – en version de concert – La Grande Écurie et la Chambre du Roy – dir. Jean-Claude Malgoire – avec Kobie van Rensburg (Orfeo), Cyrille Gerstenhaber ( Euridice, une Nymphe), Hjördis Thébault (La Musique), Estelle Kaïque (La Messagère, une Nymphe), Philippe Jaroussky (L’Espérance), Renaud Delaigue (Caron, un Esprit infernal), Delphine Gillot (Proserpine), Bernard Deletré (Pluton, un Pâtre), Alain Bertschy (un Pâtre, un Esprit infernal ), Vincent Bouchot (un Pâtre, un Esprit infernal), Carl Ghazarossian (un Pâtre, un Esprit infernal), Thierry Grégoire (un Pâtre), Lorraine Prigent (une Nymphe), Pierre-Yves Pruvot (un Pâtre, un Esprit infernal)

Opéra Magazine – mars 2006 – 7 janvier 2006

« Dès la rutilante fanfare qui retentit plusieurs fois dans le brouhaha du hall d’entrée, avant d’être donnée pour de bon en début de représentation, on sait que c’est à un spectacle humain et chaleureux — à l’image de tant de productions de l’Atelier Lyrique de Tourcoing qui fête cette année ses 25 ans — et non à une froide reconstitution musicologique que l’on est convié. Maître d’oeuvre à la fois musical et dramaturgique,Jean-Claude Malgoire impose son énergie, parfois un rien brouillonne, et la sincérité de son engagement à cet Orfeo créé à Orléans en octobre 2004 et déjà diffùsé en CD et en DVD, plus scénographié que véritablement mis en scène d’ailleurs.
La distribution est toujours aussi jeune et homogène, même si aucune voix exceptionnelle ne s’en détache. On remarque la touchante Euridice de Cyrille Gerstenhaber et l’émouvante Messaggiera d’Estelle Kaïque. Aux côtés d’un Caronte bonhomme mais au grave un peu tassé, d’un couple infernal sympathique et un rien parodique, et d’une Speranza un brin maniérée, Kobie van Rensburg dessine un Orfeo crédible, n’étaient quelques maladresses en scène et, ce soir-là, un vibrato parfois excessif brouillant la perception des mélismes.
Si mettre constamment sur scène le continuo — au demeurant riche, coloré et vivant — ou donner à voir les instruments solistes (violons, cornetti ou harpe) répondant au chant virtuose du Possente Spirto, constituent des idées simples et fortes, nous restons personnellement plus perplexes devant le choix dramaturgique final. Présenter Apollo en pape de la Contre-Réforme souligne déjà un peu trop lourdement ce que le lieto fine doit peut-être à la pression religieuse et s’accorde mal avec la lumineuse sérénité du duo. Mais était-il en plus nécessaire de montrer, pendant la Moresca finale, le poète lacéré par les Ménades déchaînées — scène effectivement prévue dans le livret de Striggio, mais non illustrée par le musicien ? Tant de symboles finissent par se neutraliser, en tirant le mythe dans des directions opposées. Ce surplus d’intentions ne parvient heureusement pas à gâcher notre impression favorable d’un spectacle éminemment attachant. »

Res Musica – 7 janvier 2006 – Constance de la qualité

« L’Orfeo de l’Atelier Lyrique de Tourcoing est une production sur laquelle les années passent sans laisser de traces. Créée en 2000 dans le cadre d’un triptyque monteverdien qui a été vu en de nombreux endroits, cette production avait déjà été reprise en octobre 2004 (ce sont ces représentations qui ont été captées par Dynamic et éditées en CD et DVD). Un an et quelques mois plus tard, cet Orfeo revient avec une distribution inchangée, à l’exception d’un seul rôle, belle preuve de fidélité d’une maison à ses chanteurs.
La mise en scène est signée par Jean-Claude Malgoire, assisté à la scénographie et aux lumières par Jacky Lautem. Le résultat de cette collaboration est un spectacle intelligent, dans lequel les chanteurs sont dirigés d’une manière claire et sobre. Le décor unique est très dépouillé, un plan incliné qui occupe toute la scène, sur lequel de très beaux jeux de lumière se chargent seuls de suggérer les changements de lieux. Trouvaille ingénieuse, une grande boîte noire est placée en fond de scène, derrière le plan incliné, dans laquelle les saqueboutiers viennent prendre place durant le troisième acte, belle manière de théâtraliser la musique et d’affirmer que dans cet Orfeo, c’est la musique qui triomphe. Quelques scènes fortes resteront dans les mémoires : l’affrontement entre Orphée et Charon, l’enlèvement du corps d’Eurydice, la sensualité dont fait preuve Proserpine pour arracher la grâce d’Orphée à Pluton, et bien sûr la scène finale, magnifiquement chorégraphiée, dans laquelle Orphée, qui doit rejoindre Apollon au Ciel, est retenu par une bande de mégères en furie qui lui administrent une rossée, stylisée et cruelle, qu’il n’oubliera pas de sitôt, s’il en réchappe…
Musicalement, les mérites de la soirée sont les mêmes que ceux de l’enregistrement, mais avec certaines nuances. Ainsi l’Orfeo de Kobie Van Rensburg est-il encore plus beau, plus sûr, plus fouillé, et son timbre légèrement nasal passe bien mieux à la scène, où sa projection fait merveille, qu’au disque. La situation est inverse concernant La Grande Ecurie, dont les sonorités qui ne sont pas des plus séduisantes en direct, sont comme lissées par l’enregistrement. De la distribution, composée de solistes de haut niveau, presque tous titulaires de rôles de premier plan dans d’autres productions, on note le couple sensuel formé par Delphine Gillot et Bernard Deletré en Proserpine et Pluton, la Messagiera désespérée mais à la voix un peu douloureuse d’Estelle Kaïque, la Musica au timbre rond et plein de Hjördis Thébault, et le lourd et grave Charon de Renaud Delaigue. Petite déception par contre pour Philippe Jaroussky, un des fleurons de l’enregistrement de 2004, qui pour cette reprise semble en petite forme : aigus instables, timbre manquant de luminosité, impression d’enrouement, on est loin des standards d’excellence auxquels il a habitué le public tourquennois. »

AltamusicaL’humanité d’Orphée – 11 janvier 2006

« Pour Jean-Claude Malgoire, l’Orfeo de Monteverdi est un peu l’enfant de la vieillesse. Ce pionnier de la redécouverte du répertoire baroque, monteverdien de la première heure, aura en effet attendu d’avoir atteint sa pleine maturité avant d’aborder ce monument à la scène. Depuis, il ne le quitte plus, et de cette profonde intimité naît sans doute le sentiment de naturel qui se dégage de sa lecture. Point de métaphysique dans ce travail d’une grande probité, simplement le souci constant de ne jamais entraver le verbe au profit d’une quelconque virtuosité vocale, instrumentale, pour atteindre le cœur même d’un art poétique avant d’être musical. Cette parfaite fluidité du discours ne va pourtant pas sans contrastes ni couleurs, bien au contraire : la palette du chef français n’avait pas paru aussi riche depuis bien longtemps. Bénéficiant d’un continuo fringant, où l’on distinguera les remarquables interventions du théorbiste Marco Horvat et de la harpiste Masako Fujimara, Jean-Claude Malgoire narre plus qu’il n’ordonne, en humble serviteur.
Composée de jeunes et moins jeunes fidèles du formidable vivier de chanteurs qu’est l’Atelier lyrique de Tourcoing, la distribution ne brille pas par son homogénéité. Vocalités, techniques, styles se révèlent en effet trop disparates pour prétendre à une quelconque unité, quelques voix trop glorieusement opératiques plombant les Chœurs, face à de fins madrigalistes manquant de relief sonore dans leurs interventions solistes. D’une sécheresse sépulcrale, le Caron de Renaud Delaigue n’en est que plus impressionnant, à l’instar des interventions émues et éloquentes de la Proserpine de Delphine Gillot, bien plus convaincante et maîtrisée que dans sa récente Armide haendélienne. Et si l’Espérance superbement chantante de Philippe Jaroussky aura paru peu concernée, elle est un luxe suprême comparée à la Messagère désordonnée d’Estelle Kaïque. Malgré quelques faiblesses dans le bas de la tessiture et un timbre parfois ingrat, l’Orfeo de Kobie van Rensburg sait atteindre des sommets d’intensité et d’humanité. Présence magnétique, musicalité irradiante, technique époustouflante, le ténor sud-africain maîtrise à la perfection les subtilités du langage monteverdien, alliant poésie et musique avec un art du naturel incomparable. Servi par un tel interprète, Jean-Claude Malgoire avait donc bien des raisons de jubiler, et de bisser la Moresque finale. »

Opéra de Lille – 3, 5, 8, 10, 13, 15, 17 novembre 2005 – Théâtre de Caen – 29 novembre, 1er décembre 2005 – Concert d’Astrée – Les Sacqueboutiers de Toulouse – dir. et clavecin Emmanuelle Haim – mise en scène Giorgio Barberio Corsetti – décors Cristian Taraborrelli, Giorgio Barberio Corsetti – costumes Cristian Taraborrelli – lumières Pier Giorgio Foti – video Fabio Massimo Iaquone – avec Kerstin Avemo (La Musica / Euridice), Pascal Bertin (Pastore), Ed Lyon (Pastore), Kimy McLaren (Ninfa), Michael Slattery (Orfeo), Renate Pokupic (Messagiera), Marina de Liso (Speranza), Paolo Battaglia (Caronte), Aurelia Legay (Proserpina), Paul Gay (Plutone), Finnur Bjarnasson (Pastore, Apollo, Eco), Jonathan Brown (Pastore)


Classica – février 2006

« Production inaboutie et distribution bien légère…Seule Emmanuelle Haïm sauve la mise en dirigeant avec sensualité… »

Opéra Magazine – janvier 2006 – 13 novembre 2005

« Il est toujours artificiel de dater précisément la naissance d’un genre, mais L’Orfeo de Monteverdi fait incontestablement partie de ces partitions qui ont dégagé un horizon nouveau, au tout début du XVIIe siècle, sans bien sûr avoir conscience en toute clarté du rideau qu’elles ouvraient. Et c’est bien ce qu’il y a de beau et de prenant dans la direction d’Emmanuelle Haïm, qui nous donne à entendre une musique qui naît, une forme qui se cherche et se trouve, un genre qui vient à la vie. Les couleurs instrumentales du Concert d’Astrée, augmenté ici des Sacqueboutiers de Toulouse, contribuent à un faste sonore qui emplit toute la salle et nous rappelle, de la sensualité frémissante du continuo à l’éclat des fanfares, que l’idée de luxe est inséparable de celle d’opéra.
On est frustré cependant quand les voix et le spectacle n’atteignent pas les mêmes hauteurs et précipitent l’ensemble dans la timidité ou la banalité. A priori, l’idée paraissait bonne de confier à une équipe de jeunes solistes un ouvrage qui est aussi un poème du printemps. Mais fort peu savent nous rappeler qu’il s’agit là d’une favola, et pas d’une simple récréation chantée. Parmi les rôles épisodiques, on citera Renata Pokupic, qui nous offre l’un des rares moments d’émotion de la soirée. Voix concentrée, chant suspendu, sa Messaggiera est un petit moment de tragédie à elle seule. Les brèves interventions de Caronte (Paolo Battaglia) et du couple Proserpina-Plutone (Aurélia Legay-Paul Gay), donnent elles aussi du relief à une distribution qui en manque cruellement, vocalement Kerstin Avemo est une Euridice légère, victime, effacée dès le début, mais a quelque chose qu’on attend du rôle de La Musica, qu’elle interprète également. Quant à Michael Slattery (Orfeo), il se cherche un style sans jamais le trouver et se contente d’un chant superficiel, porté par une voix plutôt fade, en s’aventurant dans des tremblés peu maîtrisés : le héros d’une pastorale et non pas une figure mythique. À tout prendre, on aurait aimé un chant moins orné mais plus engagé.
C’est par ailleurs dès le prologue que le spectacle révèle ses facilités et ses limites, avec une volonté de désenchantement devenue aujourd’hui habituelle mais terriblement lassante. La première et très belle image, représentant La Musica à son balcon vêtue d’une robe fastueuse, est tout à coup gâchée par une vidéo qui nous inflige le visage du même personnage en grande dimension. Le procédé revient à plusieurs reprises (tour à tour pour des paysages, des corps qui tombent…), mais se révèle très vite un simple pis-aller venant se superposer, tant bien que mal, à ce qui se passe sur scène. Giorgio Barberio Corsetti nous plonge d’abord dans une ambiance années 1960, avec pique-nique à la campagne, moutons amovibles et vespas. La barque de Caronte (en réalité, un canot à moteur) nous vaut un répit, quelque chose comme un intermède inquiétant, dépouillé, mais les Enfers nous entraînent dans de nouveaux poncifs : le couple infernal regarde la télévision, pendant que trois figurants nus enfournent des croissants. À la fin, pour nous signifier qu’Orfeo a renoncé à toutes les femmes sauf à Euridice, des garçons se vautrent dans des canapés — mais on les voit à travers des miroirs, pour marquer l’illusion et la distance !
Cette production, vocalement et scéniquement, a quelque chose d’une ébauche. Est-il possible qu’Emmanuelle Haïm lui communique son énergie pour qu’elle prenne corps et s’affine dans la perspective des représentations prévues au Châtelet en mai prochain, puis à l’Opéra National du Rhin en juin ? »

Le Monde de la Musique – janvier 2006 – 15 novembre 2005 – Les souffrances du jeune Orphée

« Manifeste de l’opéra baroque, L’Orfeo de Monteverdi n’en demeure pas moins imprégné des valeurs humanistes de la Renaissance. Le drame de la double mort d’Eurydice s’inscrit dans une cosmogonie antique gérée par une harmonie supérieure. Rendre visibles ces perspectives comme une architecture générale symétrique reste une gageure pour tout metteur en scène. Giorgio Barberio Corsetti présente un spectacle dont la lisibilité, en ces temps de « malscène », passerait pour de la hardiesse. S’il préfère à la Thrace préchrétienne l’Italie de La Dolce Vita, il conserve chaque élément indispensable à la compréhension du public. Une utilisation parcimonieuse de la vidéo permet de représenter le surnaturel : l’image d’Eurydice, future constellation, flottant dans le ciel, ou de la Musique endormant le nocher infernal.
Emmanuelle Haïm affirme dans le texte de présentation chercher un lien immédiat avec notre temps et avoir accordé les rôles au physique des chanteurs. La jeunesse d’Orphée et Eurydice lit sur les visages de Michael Slattery et KerstinAvemo. Le premier convainc par sa vaillance, émeut par son chant douloureux et impressionne par sa colère misogyne. La seconde, qui incarne aussi la Musique, séduit par sa douceur fragile et inquiète. Proserpine compatissante d’Aurélia Legay, Pluton magnanime de Paul Gay, Messagère charismatique de Renata Pokupic. A la tête d’un enthousiaste Concert d’Astrée, Emmanuelle Haïm est plus que jamais attentive à la narration, au poids dramatique des résolutions harmoniques et des changements de couleurs. »

Forum Opéra – 5 novembre 2005

« Au moment d’aborder la mise en scène de L’Orfeo, qui raconte la mort d’un poète, je pense à la mort d’un poète en particulier, celle de Pasolini. C’est peut-être pourquoi j’ai envie que l’univers scénique du spectacle fasse écho aux années soixante-dix. Orphée vit dans une époque qui pourrait être tout à fait la nôtre. » Il y a trente ans, le 3 novembre 1975, le corps du sulfureux poète et cinéaste italien était retrouvé sur une plage d’Ostie. Crime crapuleux ou politique ? Le mystère reste entier et le lien avec Orphée plutôt anecdotique. Quand bien même une version de la légende prétend que les Ménades ont déchiqueté le fils d’Apollon parce qu’il avait dédaigné l’amour des femmes, l’opéra de Monteverdi ignore cet avatar. En outre, rien ne prouve que l’assassin du Frioulan, ouvertement homosexuel, fût un prostitué. Toutefois, la présence de trois acrobates râblés et sexy en diable, résonne un peu comme un hommage, à moins qu’elle ne trahisse certaines affinités avec l’auteur des Ragazzi. Contrairement à ce que peuvent laisser croire les propos de Giorgio Barberio Corsetti, la mort ne hante pas cette production, ruisselante de sève et de rosée ! Orphée n’est plus un demi-dieu contemplatif, mais le héros solaire d’une bande de copains non moins fringants (on songe plus d’une fois à West Side Story). Cette jeunesse riante enfourche des solex, danse, festoie, lutine et se taquine sur l’herbette… Image parfaite du bonheur, de l’insouciance et de la joie de vivre qui baignent le premier acte (« Lasciati i monti »). Le coup de tonnerre qui frappe cet azur n’en est que plus frappant. La Messagiera de Renata Pokupic n’est pas une manière de dea ex machina tragique et grandiose, mais bien la « douce compagne » d’Eurydice, Silvia, désemparée, noble dans sa douleur, sans mélo ni cris superflus.
Si le chagrin d’amour transcende les époques et parle à tous les publics, Corsetti se montre, en revanche, moins à l’aise avec le substrat littéraire et mythologique dont se nourrit également le livret de Striggio. Il hésite entre modernisation – un salon télé tient lieu de salle du trône pour Pluton – et reconstitution comme dans ce prologue où la Musica, superbe patricienne toute de pourpre vêtue, figure au centre d’un tableau du Seicento. Le visuel éblouit, Kerstin Avemo, avec ses cheveux courts, ses traits épurés et presque androgynes, évoquant une héroïne de Greenaway ou le troublant Orlando campé par Tilda Swinton dans le film éponyme de Sally Potter. Cependant, les univers se juxtaposent, les époques et les références se télescopent sans parvenir à se fondre dans une lecture cohérente et aboutie du drame. La transposition évite du moins les contresens et les extrapolations gratuites qui gâchent volontiers ce genre d’actualisation. L’illustration du livret se fait parfois même un peu trop littérale, à l’image des Sylvains incarnés par les acrobates, ou redondante, comme dans ce geste, projeté sur un écran géant, de la Musica qui tend son bras pour assoupir Charon juché sur sa barque. Ce manque d’audace ne laisse pas d’étonner alors que le metteur en scène vante l’absence de réalisme des codes qui régissent l’opéra et se réjouit que l’imagination puisse donc y être reine… L’humour et le second degré apportent néanmoins une touche de fantaisie, un parfum de nostalgie au gré d’allusions savoureuses aux machines baroques et aux trucages du cinéma de papa. Corsetti s’émancipe aux troisième et quatrième actes, développant de belles idées, notamment cette pluie de vêtements qui s’abattent sur les eaux noires du Styx.
Les options d’Emmanuelle Haïm ont été largement commentées lors de la sortie de son disque. La controverse ne portait pas que sur le respect de la lettre et d’une illusoire authenticité historique. Pour peu que les libertés prises avec le style et les indications explicites du compositeur servent la musique, les puristes prêcheraient dans le désert, mais ici, l’infidélité ne paie guère. Si, comme l’observe la chef, « d’une expérience de laboratoire, on arrive directement à un chef-d’oeuvre », pourquoi se croit-elle autorisée à le retoucher, à l’augmenter ? Une véritable humilité devant le génie de Monteverdi nous aurait, par exemple, épargné l’inutile surenchère de ces percussions qui soulignent la tournure dramatique des événements à l’acte II. De même, si Kerstin Avemo joue moins les divas que Natalie Dessay, ses ornements dénaturent le propos de Monteverdi et tendent à réduire le pouvoir de la Musica à la virtuosité des interprètes. Ces anachronismes lorgnent trop vers l’opéra à venir et escamotent l’irréductible singularité de L’Orfeo.
Les effectifs du Concert d’Astrée sont à peu de choses près identiques à ceux de l’enregistrement – une trompette (et non quatre, hélas !) rejoint les sacqueboutes dans la toccata – et le continuo, toujours envahissant, ne se montre guère plus inspiré. Le plateau, lui, a été entièrement renouvelé. Constitué de douze chanteurs spécialement recrutés pour cette production, le chœur est le point fort, pour ne pas dire la bonne surprise de cette création. Ses interventions, vivifiantes et d’une grande souplesse expressive, rendent justice aux pages sublimes que Monteverdi lui réserve et rachètent la contre-performance des European Voices en studio. Michael Slattery (Orfeo) enthousiasme et déçoit en même temps : beau gosse, crâneur et rebelle, fiévreux, habité, le personnage est crédible, passionnant même, mais il faut admettre que vocalement la prise de rôle s’avère prématurée. Si Finnur Bjarnason (Pastore, Apollo) n’a rien à lui envier en termes de présence et de musicalité, son chant est surtout plus sûr et mieux projeté. Sinon, aucune personnalité n’émerge véritablement de la distribution, assez hétérogène et pas toujours très armée pour affronter le recitar cantando… Hormis l’émouvante Messagiera de Renata Pokupic déjà citée, il faut encore évoquer la tendre et sensuelle Proserpina d’Aurélia Legay, dont on comprend que les accents « ravivent l’ancienne blessure de l’amour ». Une mention également pour Kerstin Avemo et Marina del Liso qui retiennent l’attention dans les rôles particulièrement fugaces d’Euridice et de la Speranza, et pour le timbre frais, l’élégance so british du ténor Ed Lyon. »

La Libre Belgique – Entre vespas et Renaissance, belle mise en scène de Giorgio Barbiero Corsetti

« Quelques mois après avoir signé au disque une intégrale de «L’Orfeo» de Monteverdi (Virgin), Emmanuelle Haïm propose l’oeuvre sur la scène de l’Opéra de Lille, maison dynamique dans laquelle son Concert d’Astrée est en résidence. L’occasion de retrouver une direction musicale extrêmement dynamique, parfois un peu brouillonne mais souvent passionnante aussi dans certains de ses aspects, comme cette façon de varier l’effectif instrumental au sein d’une même scène pour créer un effet dramatique. Et si certains éléments avaient pu sembler maniérés au disque, ils prennent plus de sens ici, comme l’introduction de percussions au final du deuxième acte qui accompagnent cette fois l’image en vidéo du corps d’Eurydice qui roule vers l’abîme.
Si la claveciniste et chef française avait bénéficié pour son enregistrement d’une distribution luxueuse, presque encombrante à force d’être constituée de stars dont les affinités avec le répertoire monteverdien étaient parfois ténues (Bostridge, Gens, Dessay, Ciofi…), la démarche est ici tout autre: aucun grand nom dans ce plateau de jeunes chanteurs, à la fois plus en phase avec les moyens de la maison lilloise et idéalement intégré dans une mise en scène qui tire une de ses forces de la crédibilité scénique de ses protagonistes. On devra donc se contenter de voix bonnes sans être exceptionnelles (Kerstin Avemo, tour à tour Musica et Euridice, le Plutone de Paul Gay ou la Messagiera de Renata Pokupic, voire parfois avec certaines faiblesses – l’Orfeo de Michael Slattery), mais c’est sans doute le prix à payer pour une cohérence et une conception qui est celle d’un véritable ensemble.
La plus-value de ce spectacle tient beaucoup à la mise en scène de Giorgio Barbiero Corsetti, qui intègre habilement quelques éléments de vidéo (traitée dans un mode onirique et poétique) au théâtre traditionnel et unit deux univers temporels: l’Italie de la Renaissance pour les muses (avec un extraordinaire prologue, qui vaut à lui seul le détour, où la Musique apparaît dans une petite boîte suspendue au milieu du cadre de scène), et celle des années 60 pour Orphée, Eurydice et leurs amis (référence voulue à l’univers de Pasolini, cousin d’Orfeo selon Corsetti). S’appuyant sur une direction d’acteurs très aboutie, l’Italien signe une vision marquante d’un inépuisable chef-d’oeuvre en faisant de ces protagonistes des êtres de chair et d’os proches de chacun de nous. »

Diapason – janvier 2006

« U n an après le triste ratage de Genève, l’Opéra de Lille affronte à son tour Orfeo, avec Emmanuelle Haïm et Giorgio Barberio Corsetti, dans une production qui gagnera Paris en avril et Strasbourg fin juin. Points communs aux deux spectacles : des visions singulièrement fantasmées des Enfers (hier night-club rouge et noir, aujourd’hui boulangerie grotesque avec coin télé pour les mafieux Pluton et Proserpine) et l’économie d’un véritable travail scénique sur le mythe et ses images (trois faunes musculeux feront l’affaire). Suivant l’exemple de Genève, Corsetti substitue au mythe antique l’une de nos mythologies contemporaines, ces années 1970 idéalisées en Arcadie post-1968 et présida, avec leur lot de sourires béats, pattes d’eph’, pas de wist et imprimés acidulés. Le décor est plus modeste à Lille (mais aussi un peu moins laid) et comme animé par les projections vidéo de Fabio Massimo Iaquone, qui tentent d’entrouvrir les portes de notre imaginaire avec leurs images douces et stylisées, gros plans sur les gestes aquatiques d’une Eurydice-Ondine (hélas, Kerstin Avemo capte la lumière beaucoup mieux qu’elle ne concentre son chant). Corsetti avance une justification à ces commodités: « Au moment d’aborder Orfeo, qui raconte la mort d’un poète, je pense à la mort d’un poète en particulier, Pasolini. » L’opéra de Monteverdi ne consacre pas le pouvoir de la musique mais « raconte la mort d’un poète »? Pourquoi pas : le cinquième acte voit, en effet, le chantre de Thrace renoncer au monde (et aux femmes, ce qu’assène le dernier tableau lillois, éphèbes enlacés sur canapé) pour gagner les étoiles avec son père Apollon. Et, quel que soit son motif, l’association Pasolini­Orfeo est séduisante. Elle est censée rendre sa lumière à un mythe désormais opaque, investir le nouvel Orphée du charisme inouï de l’Italien.., et elle devrait nous épargner le numéro de Michael Slattery, non pas demi-dieu mais petite frappe en costar blanc sans noblesse, qui vomit ses tripes comme un mauvais Paillasse dans « Tu sei morta ». Sans même parler des diminutions du « Possente spirito », il manque à cet Orphée l’essentiel de la déclamation montéverdienne, la souplesse, la chaleur — la prononciation! Il n’est pas le seul, il faut attendre la Messagiera (Renata Pokupic) et Proserpina (Aurelia Legay) pour apprécier un italien savoureux, qui n’est plus le maquillage des intentions mais la matière où se forge l’expression.
La direction d’Emmanuelle Haïm appelle des réserves comparables partout des effets pour pallier l’absence de structure, des danses uniformément hystériques parce que jamais tenues par un véritable rythme (« Echo pur » frétille comme solo de claquettes), un patchwork d’idées qui ne fera jamais office de conception. Le Concert d’Astrée laisse toutes ces carences à vif, avare de couleurs et de résonances, volontiers citronné (ou résolument vinaigré quand les cordes sont à découvert). Des fils, de première qualité pour certains, mais pas encore l’étoffe. C’est peut-être le propre d’un grand chef que le tout soit supérieur à la somme des parties. »

Stuttgart – Staatstheater – 4, 6, 9, 11, 19, 21 novembre, 2 décembre 2005 – dir. Jean-Claude Malgoire – mise en scène Joachim Schlömer – décors et costumes Katrin Brack – lumières David Finn – chef de choeur Johannes Knecht – dramaturgie Juliane Votteler – avec Irena Bespalovaite / Klara Ek (La Musica), Kobie Van Rensburg (Orfeo), Helga Rós Indridadóttir (Euridice), Helene Schneiderman / Helene Ranada (Messaggiera), Frédérique Sizaret / Maria Theresa Ullrich (Speranza), Helmut Berger-Tuna (Caronte), Irena Bespalovaite / Klara Ek (Proserpina), Mark Munkittrick / Marek Gastecki (Plutone), Christoph Sökler (Apollo), Bernhard Schneider (Pastore I / Spirito I), Emma Curtis (Pastore II),Roderic Keating (Pastore III / Spirito II), Heike Beckmann / Karin Horvat (Ninfa / Pastore), Sasa Vrabac / Johannes Wieczorek (Pastore IV / Spirito V), Daniel Kaleta (Spirito III), Tommaso Hahn / Ulrich Frisch (Spirito IV)

Kobie van Rensburg

Opéra de Rennes – 18, 19 octobre 2005 – La Fenice – dir. Jean Tubéry – avec Hans Jörg Mammel (Orfeo), Caroline Weynants (Musica), Julie Robard (Euridice), Aurore Bucher (Messagiera), Elena Pozhidaeva (Speranza), Caroline Tarrit (Proserpina), Helen Cassano (Ninfa), Renaud Tripathi, Thibaut Lenaerts, Nicolas Achten (Pastore), Philippe Favette (Caronte), Benoît Giaux (Plutone), Etienne Debaisieux (Spirito)

 

Linz – Großes Haus – 15, 19, 24 octobre 2005 – Statisterie des Landestheaters – Chor des Landestheaters – Bruckner Orchester Linz – dir. Christoph Hammer – mise en scène Ingo Kerkhof – décors Anne Neuser – costumes Stephan von Wedel – chef de choeur Georg Leopold – avec Dorothea Maria Marx (La Musica 1/Euridice/La Musica 5/Proserpina), Hinako Yoshikawa (La Musica 1/Euridice), Tijana Grujic (La Musica 2/La Speranza), Jörn Eichler (La Musica 3/Pastore), Elisabeth Hornung (La Musica 4/Messaggiera), Khatuna Mikaberidze (La Musica 4/Messaggiera), Arantxa Armentia (La Musica 5/Proserpina), Lauri Vasar (Orfeo), Stefan Kocán (Caronte), Nikolai Galkin (Pluto), Franz Binder (Apollo / Eco), Danuta Leopold (Ninfa), Karin Behne, Jörn Eichler, William Mason, Jonathan Whiteley (Pastori), Franz Binder, Boris Daskalov, Seog Mann Keum (Spiriti), Susanne Kuffner / Sabine Lindner – nouvelle production


Opéra de Lille – 5, 8, 10, 13, 15, 17 octobre 2005 – Concert d’Astrée – dir. Emmanuelle Haim – mise en scène Giorgio Barberio Corsetti – décors Cristian Taraborrelli, Giorgio Barberio Corsetti – costumes Cristian Taraborrelli – lumières Giorgio Foti – video Fabio Iaquone – avec Kerstin Avemo (La Musica / Euridice), Pascal Bertin, Ed Lyon, Finnur Bjarnasson (Pastore), Kimy McLaren (Ninfa), Michael Slattery / Finnur Bjarnasson (Orfeo), Renate Pokupic (Messagiera), Marina de Liso (La Speranza), Andrea Silvestrelli (Caronte), Aurelia Legay (Proserpina), Paul Gay (Plutone), Finnur Bjarnasson (Apollo, Eco)

 

Namur – Théâtre Royal – 5 octobre 2005 – version de concert – Chœur de Chambre de Namur, Ensemble La Fenice – dir. Jean Tubéry – avec Hans-Jörg Mammel (Orfeo), Caroline Weynants (La Musica), Julie Robard (Eurydice), Aurore Bucher (Messaggiera), Elena Pozhidaeva (Speranza), Caroline Tarrit (Proserpina), Helen Cassano (Ninfa), Philippe Favette (Caronte), Etienne Debaisieux (Plutone), Benoît Giaux (Apollo), Renaud Tripathi, Paulin Bundgen, Peter de Laurentis, Thibaut Lenaerts, Nicolas Achten (Pastori)

Crescendo – octobre/novembre 2005

« Il est impressionnant de se rendre compte à quel point L’Orfeo garde, environ quatre siècles après sa création, un si grand pouvoir d’attraction. Le Théâtre de Namur était rempli pour la circonstance le 5 octobre dernier en soirée, la générale de l’après-midi ayant elle aussi rassemblé un nombreux public. La mesure de cet engouement pouvait faire croire à un événe­ment… ce qui fut confirmé par les faits car il s’agissait bel et bien d’un événement! Présentée en version concert, l’oeuvre ne perd rien de sa magie. Il est vrai que l’on avait opté pour une intelligente mise en espace et en situation, disposant par exemple deux choeurs de trombones se faisant face dans des loges du premier étage proches de la scène, jouant sur la position en scène de certains instrumentistes et chanteurs pour les mettre, comme la partition les y invitait, en évidence. Le soin porté aux éclairages était également déterminant de même que l’attention à certains détails (la tenue vestimentaire du choeur différente selon qu’il s’agissait du choeur des bergers ou du choeur des esprits, etc…). Jean Tubéry, tellement inspiré, attentif et omniprésent, virevoltait en passant de la direction au cornet ou à la flûte à bec et conduisait son petit monde dans la magie de l’union de la parole avec la musique. “Son” Choeur de Chambre de Namur était superbe, belle cohésion et rayonnante unanimité. Certains de ses membres devaient également se muer en Eurydice, Caronte, Proserpina, etc…et assumèrent ces rôles avec une belle assurance, témoignant en outre par là de leurs solides qualités individuelles. L’ensemble La Fenice, fort d’une quinzaine d’instrumentistes et dont le groupe des continuistes était somptueux, put se montrer sous son meilleur jour. Virtuose, chatoyant, sa richesse et sa générosité ont fait merveille, son énergie n’a connu aucun répit. Le personnage clé, Orphée, s’exprimait par la voix de Hans-Jörg Mammel, impérial, tant par sa virtuosité que par la véracité de l’expression des affects, il façonne un timbre chaleureux et rayonnant en fonction des passions. La magie de l’Otfeo a opéré, au magicien qui écrivit la partition il y a quatre siècles ont répondu d’autres magiciens de notre XXle siècle. Seules les grandes oeuvres permettent de tracer cette accolade dans le temps, seuls de grands interprètes nous permettent d’en bénéficier en éprouvant les plus profondes émotions. Le public namurois n’a pas manqué de le faire et il y a gros à parier que, sur ce plan tout au moins, les Catalans de Toroêlla et les Bourguignons de Sens lui auront fort ressemblé. »

ResMusica

« Il y a longtemps que le Théâtre de Namur n’avait plus accueilli d’opéra, et pour le retour de l’art lyrique dans la capitale wallonne, quoi de plus symbolique que d’avoir choisi l’Orfeo, opéra des origines, mis en œuvre par deux des principales forces vives de la vie musicale namuroise : le Chœur de chambre de Namur, et l’ensemble La Fenice, menés par Jean Tubéry. Ce concert unique a suscité un fort engouement à Namur, de sorte que pour satisfaire toutes les demandes de places, on a ouvert la répétition générale au public l’après-midi du concert. Pour des raisons budgétaires, c’est une version de concert qui a été choisie, sans que la compréhension soit gênée, car en plus d’un appareillage de surtitres mis en place pour l’occasion, la mise en espace, intelligemment réglée par Jean Tubéry, respectait scrupuleusement les indications du livret. Ce fut donc un concert qui ne manqua pas de « théâtralité », exploitant habilement les possibilités offertes par les loges placées sur les côtés de la scène, le tout dans une lumière subtilement réglée pour évoquer les changements de lieu.
Musicalement, les satisfactions sont nombreuses, à commencer par un ensemble orchestral La Fenice virtuose, généreux en couleurs, en accents inédits, en timbres subtils. Donnant galbe et souplesse aux phrasés de son ensemble, Jean Tubéry ose des changements de tempo vertigineux, et fait preuve d’une virtuosité ébouriffante lorsqu’il embouche son cornet ou sa flûte à bec. Autre motif de satisfaction de ce concert, l’extraordinaire Hans-Jörg Mammel, éblouissant dans le rôle-titre, par sa classe vocale, la rondeur d’un timbre plein, à la fois chaud et clair, des aigus rayonnants et un grave profond et sûr. L’émission est franche, et le ténor se jette dans son rôle avec ardeur et générosité, affrontant sans faiblir les difficultés de la partition, dont un Possente spirto anthologique, admirablement soutenu par l’orchestre. Seule petite réserve à l’endroit de ce splendide Orfeo, son italien est celui d’un allemand, et malgré ses efforts, on le sent encore un peu rugueux.
C’est le Chœur de chambre de Namur, admirable de cohésion, de souplesse rythmique et de clarté des timbres, qui fournit tous les solistes de ce concert. Performance remarquable, car chacun tient sa partie avec probité, et s’il y eut certaines faiblesses (Musica, Speranza, certains bergers), plusieurs interventions sont à tirer du lot : le Caronte teigneux de Philippe Favette, l’Apollo très en voix de Benoît Giaux, le très beau pasteur de Nicolas Achten, qui jouait en plus du théorbe, et surtout la Messagiera écorchée, brûlante de douleur d’Aurore Bucher. Le public namurois eut donc le plaisir d’entendre un concert de haute tenue, qui mériterait certainement d’être enregistré, pour préserver les mémorables prestations de l’orchestre et de Hans-Jörg Mammel. »

Le Guide.be

« Evénement en cette lancée de saison à la Philharmonique de Namur puisque le premier concert sera consacré à l’« Orfeo » de Monteverdi, une production présentée cet été au Festival de Torroëlla de Montgri, en Catalogne. Un opéra, et qui plus est, le premier des opéras, même si l’« Euridice » de Peri lui était antérieur. Mais, attention, l’événement fait foule. Face à la prise d’assaut de la location, les organisateurs ont décidé d’ouvrir au public la générale de la veille.
Une chose est certaine : cet « Orfeo » ne sera pas vraiment comme les autres. Selon Jean Tubéry qui le dirigera à Namur l’oeuvre était à l’origine davantage conçue pour une mise en espace dans une salle du château de Mantoue. La démarche se voulait essentiellement humaniste : « Orfeo » était l’oeuvre d’un lettré pour des lettrés qui fait appel à toutes les ressources de la rhétorique. Le résultat : une superbe couleur qui vient des mots qui fournissent selon l’expression de Tubéry « la peinture des oreilles ». C’est aussi celle des sentiments dans une musique qui vit des affects, traités naturellement comme en réponse au texte, précise Tubéry. Nous voilà très loin des règles savantes de la « prima prattica » en usage jusque-là. Monteverdi est sorti des querelles avec Artuzzi. Il a compris qu’il ne faut pas nécessairement cinq chanteurs pour exprimer les sentiments d’un seul être. Penser cela, c’est se déclarer libre pour l’expressivité à l’opéra. Mais une expressivité qui reste le support d’un texte, non l’alibi d’une démonstration virtuose.
L’exiguïté du lieu de création a aussi une conséquence dans le choix des solistes. A l’exception du rôle-titre confié à son complice habituel, le ténor Hans-Jörg Hammel, tous les protagonistes de cette « favola in musica » sortiront du Choeur de chambre de Namur. Il est impensable que l’on n’ait pas utilisé pour la création l’essentiel des effectifs de la chapelle princière, dit Tubéry. C’est ce climat que nous avons voulu reconstituer : la distribution des rôles est le résultat d’auditions précises, conduites avec les membres du choeur. Nos choristes sont des individualités qui travaillent ensemble. Les choeurs de l’époque étaient souvent des choeurs de solistes.
Faut-il pour autant parler d’une reconstitution historique ? Bien sûr que non, répond Tubéry. L’esprit est plus important que la lettre : ce que nous recherchons, c’est de livrer un Monteverdi tel qu’on peut le reproduire en 2005. Une démarche qui n’a rien de nouveau : après tout, les peintres n’habillaient-ils pas les personnages de la Bible avec les vêtements de leur temps ?
La symbolique joue évidemment un rôle très important. Ainsi du rôle de l’écho fourni par le cornet qui évoque la grotte des enfers. Dans la recherche de son pouvoir d’évocation, cette musique repose considérablement sur la basse continue et sa capacité d’improvisation : Sa présence est très mobile, souligne Tubéry. L’accompagnement d’Orfeo évolue de un à sept instruments quand il est emporté dans les tourments de la violence. En répétition, on essaie beaucoup de choses, chacun apportant sa touche personnelle : c’est ainsi que des équilibres s’élaborent. A partir d’eux, on vit au concert sur le canevas que nous avons sélectionné. »

Forum Opéra

« Privée de trompettes, l’ouverture perd en éclat, en solennité ce qu’elle gagne en vivacité et en légèreté : le ton est donné, c’est celui de la pastorale, au début riante, mais qui vire au drame. Point de sacré, de mythologie ni de cosmogonie, car cette version de concert privilégie l’humanité des personnages au gré d’une lecture presque intimiste par moments, loin du somptueux spectacle de cour imaginé par René Jacobs (les amateurs de ritournelles fleuries et de violons diserts en seront pour leurs frais) et que certains jugeront réductrice, mais qui assure aujourd’hui encore le succès de l’ouvrage et parle au public le plus divers. En l’occurrence, L’Orfeo semble couler de source, avec un naturel époustouflant, et se livre dans une étonnante immédiateté. « 

Darmstadt – Staatstheater – Kleines Haus – 3, 29 octobre, 4 novembre 2005 – dir. Stefan Blunier – mise en scène John Dew – décors Heinz Balthes – costumes José Manuel Vazquez


Cité de la Musique – 24, 25 septembre 2005 – New London Consort – dir. Philip Pickett – mise en scène Jonathan Miller – chorégraphie Sue Lefton – costumes Shirin Guild – avec Mark Tucker (Orphée), Joanne Lunn soprano (la Musique, Proserpine), Julia Gooding soprano (la Messagère), Revital Raviv soprano (Eurydice), Faye Newton soprano (une Nymphe), Mark Chambers contre-ténor (l’Espérance), Andrew King ténor (Apollon, un Berger, un Esprit), Michael George basse (Pluton, un Berger), Simon Grant basse (Charon, un Berger, un Esprit), Joseph Cornwell ténor (Berger, Esprit), Martin Robson basse (un Berger, un Esprit), Mark Rowlinson basse (un Berger, un Esprit)

ConcertClassic – 25 septembre 2005

« Philip Pickett est un habitué de l’Orfeo monteverdien : sa gravure de l’œuvre pour L’Oiseau-Lyre (1992 déjà) avait fait grincer quelques dents. Treize ans plus tard le flûtiste n’a pas revu sa copie : direction impavide, peu soucieuse de lyrisme, ornementation minimaliste, bref une économie qui si elle a l’avantage de ne pas surcharger le texte finit par passer à coté du drame. Il faut avouer que la mise en espace quasi janséniste de Jonathan Miller, peu inspirée, n’aidait pas cette lecture assez grise, dépareillées par d’incessants problèmes de justesse, non chez les instrumentistes, mais chez les chanteurs : l’Euridyce de Revital Raviv, le Charon de Simon Grant n’ont jamais trouvé leurs marques. Même Mark Tucker, Orfeo ardent mais à la vocalise trop mécanique dans Possente spirto, souffrait de quelques incertitudes qui ne suffirent pas à gâcher son incarnation plus dramatique qu’à l’accoutumée. Belle messagère de Julia Gooding, une Musica fruitée – et presque au terme de sa grossesse – Joanne Lunn qu’il faut garder en mémoire. Pluton désarmant de sens pratique de Michael George.
La palme revenait certainement à l’Apollon d’Andrew King, dont le ténor brillant était également omniprésent dans les madrigaux des bergers. Attendons la production de l’Opéra de Lille et espérons d’Emmanuelle Haim une lecture plus enthousiasmante que cette morne représentation. »

Webthea

« Favola con musica : une fable en musique. Et quelle musique ! Tellement troublante qu’elle se suffit à elle-même, sans décors ni tralala, comme viennent de le démontrer les joueurs de sacqueboutes, de cornet, de harpe, de théorbe, de luth, d‘orgue et de clavecin du New London Consort sous les doigts discrets mais inspirés de leur chef Philip Picket. Avec Marc Tucker, en Orphée magnétique, Julia Gooding en Messagère bouleversante, le mythe rejoignit les étoiles, le temps d’un soupir. »

Stuttgart – Staatstheater – 3, 5, 7 juillet 2005 – dir. Jean-Claude Malgoire – mise en scène Joachim Schlömer – décors, costumes Katrin Brack – lumières David Finn – chef de choeur Johannes Knecht – dramaturgie Juliane Votteler – avec Klara Ek (La Musica/Proserpina), Kobie van Rensburg (Orfeo), Helga Rós Indridadóttir (Euridice), Helene Ranada (Messaggiera), Maria Theresa Ullrich (Speranza), Helmut Berger-Tuna (Caronte), Mark Munkittrick (Plutone), Christoph Sökler (Apollo), Bernhard Schneider (Pastore I/Spirito I), Emma Curtis (Pastore II), Roderic Keating (Pastore III/Spirito II), Heike Beckmann /Katrin Horvat (Ninfa/Pastore), Sasa Vrabac /Johannes Wieczorek (Pastore IV/Spirito V), Daniel Kaleta (Spirito III), Thomas Hahn /Ulrich Fritsch (Spirito IV)

 

Zwolle – Hollande – Odeon,Van der Reijd Schouwburgzaal – 29 avril 2005 – adaptation Christoph Cech – Amadeus Ensemble-Wien – dir. Walter Kobéra – mise en scène Gian Gianotti – décors et costumes Christof Cremer – solistes et choeur du Neue Oper Wien

 

Budapest – Palais des Arts – 16 mars 2005 – dir. György Vashegyi – mise en scène Csaba Kael – décors Andrea T. Haamer – avec Timothy Bentch (Orfeo), Dora Ersek (Euridice), Judit Nemeth (messagiera), Zsolt Nagyvati (Speranza), Maria Zadori (La Musica), Istvan Kovacs (Caronte), Szabolcs Hamori (Plutone), Noemi Kiss (Proserpina), Zoltan Megyesi (Apollo, Pastore I)

« Inauguré en grande pompe le 14 mars, le flamboyant Palais des Arts de Budapest a pour objectif de conférer un nouveau lustre à la vie musicale de la capitale hongroise, en offrant un lieu de résidence à l’Orchestre Philharmonique National, tout en accueillant dignement les musiciens du pays comme les tournées d’orchestres étrangers (Riccardo Chailly et sa phalange milanaise sont, entre autres, au programme du mois de mai dans le Requiem de Verdi). Le Palais s’organise autour de trois éléments une vaste salle de concert (1 700 places), un musée d’art contemporain et un théâtre de 460 places, réservé à la danse, l’opéra baroque, le théâtre parlé et les récitals. Admirablement recouvert de bois de noyer de Transylvanie, ce théâtre dit « du Festival » a été inauguré le 16 mars avec une représentation de L’Orfeo de Monteverdi, dans une mise en scène de Csaba Kael, connu pour son adaptation filmique de l’opéra Bank ban. La soirée, en rien festivalière, a surtout permis de mesurer le fossé que la Hongrie, comme d’autres pays de cette région de l’Europe, doit encore combler en matière de compréhension et de traduction musicale et théâtrale des oeuvres baroques.
Le dispositif scénique est plutôt astucieux : la sphère du premier tableau se sépare en deux, dévoilant une coupole dorée et un plan inférieur couvert de hautes herbes à l’acte III, ce plan bascule et dévoile les Enfers (des chaînes de métal accrochées à son socle). Le procédé est minimaliste, mais acceptable. La soirée est marquée par deux belles images : le Styx (matière verte semi-transparente extensible, poussée par des visages grimaçants) et l’ascension d’Orphée et Apollon dans la coupole dorée, pourvue d’une banquette. La scène finale, où bergers et bergères sautillent en agitant des tambourins et des maracas, est, hélas, symbolique du tournant purement grotesque que prend ailleurs le spectacle. L’idée de Csaba Kael d’affubler Orphée et Eurydice de doubles (des danseurs mimant leurs sentiments) semble la resucée de nombreuses tentatives en ce domaine. Au passif de la partie scénique, on ajoutera encore quatre paramètres terrifiants : un surtitrage rouge ébloui­sant où l’on s’attend à tout moment à voir apparaître les cours du NASDAQ, un bruit de fond épouvantable venant de la scène, des éclairages indignes et des costumes hideux (veste d’Orphée empruntée à Papageno, avec pantalon et chaussures de ville, et accoutrements des actes III et IV apparemment récupérés dans une production trash de Platée).
Musicalement, la distribution est dominée par le digne Zoltan Megyesi en Premier Berger et Apollon, ainsi que par l’Orphée de Timothy Bentch, très bon ténor barytonnant au tempéra­ment dramatique malheureu­sement inexistant. Les autres interprètes n’ont souvent aucu­ne idée du style, voire s’enfon­cent dans le ridicule. György Vashegyi dirige en chef de choeur (un choeur qui s’avère le meilleur élément musical de la soirée) une suite de tableaux sans continuité dramaturgique, à la tête d’un orchestre au continuo laid et envahissant. Le lieu est superbe. Espérons qu’il incitera les protagonistes de la vie musicale dans la capitale hongroise à relever le niveau. » (Opéra International – mai 2005 – 16 mars 2005)

Opéra de Francfort – 13, 14, 16, 17, 18, 19, 20, 21, 23, 25, 27, 28 mars 2005 – Konzertchor Darmstadt – Frankfurter Museumsorchesters – Bläser von « Ecco la musica » und « Vivi Felice Barockmusikprojekte » – Continuo-Gruppe « Echo du Danube » – dir. Paolo Carignani / Felice Venanzoni – mise en scène David Hermann – décors Christof Hetzer – lumières Jürgen Koß – dramaturgie Zsolt Horpácsy – avec Christian Gerhaher / Giorgio Caoduro (Orfeo), Arlene Rolph (Messagiera, Speranza), Magnus Baldvinsson (Caronte), Konstanze Schlaud (Euridice, Echo), Florian Plock (Plutone), Nidia Palacios (Proserpina), Anna Ryberg (Ninfa), Nathaniel Webster (Apollo), Britta Stallmeister (Musica)


intégrale audio 2 CD Premiereopera

 

Düsseldorf – 11, 17 mars 2005

 

Genève – Bâtiment des Forces Motrices – 20, 21, 23, 25, 27, 29, 31 janvier, 2, 3 février 2005 – Il Giardino Armonico – dir. Giovanni Antonini / Luca Pianca – mise en scène Philippe Arlaud – décors Philippe Arlaud – costumes Andrea Uhmann – lumières Philippe Arlaud – chorégraphie Anne-Marie Gros – avec Victor Torres (Orfeo), Katia Velletaz (Musica/Euridice), Marie-Claude Chappuis (Speranza), Carlo Lepore (Caronte), Marisa Martins (Proserpina), Luigi De Donato (Plutone), Valentina Kutzarova (Messaggera), Fulvio Bettini (Apollo), Emiliano Gonzalez-Toro (Pastore I/Spirito I), Pascal Bertin (Pastore II), Leif Aruhn-Solen (Pastore III/Spirito II), Phillip Casperd (Pastore IV/Spirito III), Fosca Aquaro (Ninfa)



Opéra International – mars/avril 2005 – 27 janvier 2005

« En guise de (pré) prologue, un frêle enfant à la démarche hésitante traverse la scène oblique en débitant un texte français aux formules surréalistes. D’inquiétantes danseuses aux allures de pin-up psychopathes, enlisées dans une gestuelle névrotique, lui emboîtent le pas avant de s’évanouir à l’autre bout du plateau. Un lourd et long silence s’installe… Puis la tonitruante toccata retentit de part et d’autre de la salle, nous rappelant à la réalité, du moins à celle de la musique de Monteverdi. Ainsi, l’allégorique Musica (sensible Katia Velietaz, qui est aussi Euridice) peut-elle faire son entrée. Sur fond de vidéo annonçant les protagonistes à la manière d’un générique de film hollywoodien, elle s’adresse au public et entame son récit, Apparemment, la favola in musica ne débute pas selon le goût de Philippe Arlaud pour que ce dernier ose nous gratifier d’une telle introduction ! Passé ce faux départ en forme de happening, le travail du scénographe français retrouve sa cohérence. La longue scène du mariage tranche d’ailleurs par sa bonhomie et son côté fèstif, où l’on découvre les futurs époux séparés par une montagne de paquets cadeaux multicolores. Heureux mortels ! On danse, beaucoup et de manière très suggestive sur des chorégraphies d’Anne-MarieGros, on chante assez bien et fort, surtout les trois Bergers, on rit à gorge déployée (bravo aux choristes du Grand Théâtre) jusqu’à ce que la Messaggiera (touchante Valentina Kutzarova), oiseau de mauvais augure, ne vienne troubler la fête avec sa terrible nouvelle. Aussitôt lynchée par les invités qui lui jettent le reste des victuailles à la figure, elle préfère s’enfuir, laissant tout ce petit monde enétat de choc. Rideau.
Inconsolable, Orfeo (magistral VictorTorres) trouve à peine le temps de s’apitoyer sur son triste sort qu’il est déjà conduit sous influence occulte aux portes d’un enfer que l’on pressent, au regard de l’éprouvante introduction, un rien tourmenté et lubrique. Effectivement, l’antre de Plutone (épatant Luigi Di Donato) est un bar américain où grouillent les créatures les plus louches. Les démons sont ici des entraîneuses nymphomanes aux charmes douteux (toujours les danseuses, plus un travesti), qui n’ont de cesse de vouloir pervertir le pieux visiteur venu du monde des vivants. Proserpina (sensuelle Marisa Martins), très occupée à satisfaire son homme vautré au centre de ce lupanar infernal, est la seule à vraiment compatir à la douleur du pauvre Orfeo. Et si Euridice semble au finale à tout jamais perdue, c’est parce qu’elle se montre froide, lointaine, sceptique, presque résignée. Curieusement, la mise en scène d’Arlaud, même si elle n’est pas un modèle d’efficacité et de raffinement (l’apparition du charismatique Apollo de Fulvio Bettini dans des cimes enneigées arrive comme un cheveu sur la soupe), finit par trouver un équilibre dans ses excès, son imagerie souvent insensée. De leur côté enfin, les instrumentistes d’Il Giardino Armonico, dirigés par Giovanni Antonini et Luca Pianca, n’appellent que des louanges. Inébranlables face aux dérives de la régie, constamment à l’affût de la moindre nuance, de la moindre ressource expressive, ils offrent une fois de plus le meilleur d’eux-mêmes. »

ConcertoNet – 20 janvier 2005

« C’est un fait entendu, plus aucun metteur en scène ne songerait aujourd’hui à imaginer « L’Orfeo » dans un décor de verts pâturages remplis de nymphes et de bergers jouant du pipeau. De là pourtant à vouloir transposer l’action du chef-d’œuvre de Monteverdi dans les années 1950, avec force couleurs vives, accessoires kitsch et danses endiablées, il y a un fossé énorme. Que n’a pas hésité à franchir Philippe Arlaud, s’attirant les foudres du public genevois, à en juger par les huées qui ont accueilli le Français le soir de la première ou par le nombre de spectateurs quittant la salle à l’entracte lors des représentations suivantes. Dès le départ, le ton est donné, si on peut dire, puisque le spectacle débute par un étrange prologue, sorti tout droit de l’imagination d’Arlaud, mais apparemment sans aucun rapport avec le livret. En première partie, les noces d’Orphée et d’Eurydice sont le prétexte à une fête campagnarde au cours de laquelle un nombre impressionnant de personnages s’agitent sur scène. Si la transposition peut sembler incongrue (on ne voit pas en tout cas ce qu’elle peut apporter à la compréhension de l’ouvrage), force est néanmoins de constater que le parti pris est cohérent dans ses extravagances. Les choses se gâtent après la pause, laissant au spectateur la désagréable impression que cette fois le metteur en scène n’a pas réussi à calmer ses délires : le décor s’est transformé en cabaret aux lumières crues, dans lequel de sublimes entraîneuses rivalisent de séduction devant des mafieux de service. Pour percevoir ne serait-ce qu’une once de la poésie de l’ouvrage, il faudra repasser!
La distribution vocale est d’un niveau très moyen, en tout cas pour les standards genevois. Seuls se détachent l’Orfeo de Victor Torres, dont la prestance vocale est éblouissante, même si son inadéquation stylistique lui a valu quelques manifestations de réprobation de la part du public, ainsi que l’Apollon de Fulvio Bettini, au grave sonore et chaud. Reste la musique, heureusement. Dirigés avec beaucoup de sensibilité par Giovanni Antonini, les instrumentistes du Giardino Armonico rendent parfaitement justice à la partition de Monteverdi, en en rendant rythmes et couleurs. A près de 400 ans, cette musique garde toute sa force d’évocation. »

Altamusica – 23 janvier 2005

« Pour sa nouvelle production de l’Orfeo, le Grand Théâtre de Genève a choisi une équipe contrastée, entre la mise en scène de Philippe Arlaud et la partie musicale confiée à Il Giardino Armonico dirigé par Giovanni Antonini. Quelques touches de surréalisme qui ne remettent globalement pas en cause une vision tout à fait intéressante.
« L’auteur propose – le lecteur, l’interprète, le metteur en scène dispose » Cette affirmation de Pierre Boulez qui date de 1979, à l’occasion de la création de la version intégrale de Lulu mise en scène par Patrice Chéreau, est plus que jamais d’actualité. Aujourd’hui, les metteurs en scène les plus décalés travaillent de concert avec les héritiers des apôtres de la fidélité. Ce que les baroqueux refusaient jadis d’un Karajan ou d’un Mengelberg au plan musical au nom d’une authenticité qui n’a jamais vraiment existé, ils l’acceptent aujourd’hui sur scène, tout en continuant d’œuvrer plus ou moins pour leur idéal. Il faut dire que l’irrévérence scénique est aujourd’hui passée dans les mœurs, elle serait créativité ; peu amène en revanche à l’égard de l’irrévérence musicale, on la qualifie régulièrement de trahison. N’y a-t-il pas là manque de cohérence ? Après tout, qu’est-ce qui nous oblige à systématiquement choisir un camp contre un autre ?
Aux côtés des garants de l’orthodoxie musicale, brillamment défendue par Antonini et Il Giardino Armonico, on trouvera donc dans cet Orfeo genevois une mise en scène à l’esthétique résolument décalée : Orphée en costard cravate blanc, Eurydice en aristocrate façon XVIIIe, Apollon en lunettes de soleil prêt à embarquer sur des skis, les enfers dans le style cabaret des années folles… Une foison de références que l’on appréciera diversement. Au-delà de ces considérations esthétiques, la vision de Philippe Arlaud contient des éléments intéressants. Essentiellement cynique, le ton est donné dès le départ : un monologue glauque, mettant en scène une fillette ingénue, présente le texte délibérément cru d’un rapport d’autopsie. Probable description clinique d’un Orphée lapidé et décapité par les Bacchantes, ce texte se situe de manière très pertinente dans la tradition des vanités à l’ancienne, plaçant le thème de la mort au centre de la vision d’Arlaud. Le metteur en scène s’écarte ici de la transcription à coloration chrétienne de Monteverdi, qui veut qu’Orphée goûte l’éternité des cieux auprès de son père Apollon. Par un habile compromis, l’opéra s’achèvera par un transfert de la lapidation sur le personnage d’Eurydice.
Ce cynisme se confirme dans le portrait psychologique fort convaincant que brosse le metteur en scène d’Orphée. Au milieu d’une fête de mariage médiocre, agrémentée de tangos et de dandinements de popotins en tous genres, Orphée apparaît comme un tragico-romantique dépressif, cherchant à s’isoler volontairement dès le départ d’un monde extérieur qu’il considère comme vulgaire. Cultivant en son for intérieur – comme tout âme romantique qui se respecte – une nostalgie de l’âme soeur à laquelle il confère une valeur quasi esthétique, Orphée apparaît plus comme un être délaissé à tendance masochiste que comme un être véritablement aimant.
La mâle beauté de l’Orfeo de Victor Torres – Au plan musical, le niveau apparaît également contrasté. Alors que les chœurs du Grand Théâtre, sourds malgré leur grand effectif, se révèlent insipides, le plateau bénéficie de quelques atouts non négligeables. En premier lieu, Victor Torres, spécialiste du rôle-titre, dont la mâle beauté du timbre sied particulièrement au personnage. Si le ténor paraît un peu éteint et fatigué dans les deux premiers actes, il faut admettre que cela corrobore au mieux la lecture désenchantée d’Arlaud. La suite de l’ouvrage lui réussit cependant mieux ; il s’y révèle en effet à la hauteur de sa réputation. On remarquera aussi l’interprétation intelligente et sensible en Eurydice de Katia Velletaz, malgré un vibrato plutôt gênant au premier abord. Quant à Marie-Claude Chappuis, elle ne démérite pas dans ce trio de tête qui réserve de très beaux moments. Le tout, sous la direction sûre de Giovanni Antonini, compose donc un spectacle quelquefois surréaliste, mais souvent pertinent. On ira par conséquent voir cet Orfeo sur un air de tango avec curiosité, pour cette vision tout à fait valable et cohérente du mythe le plus musical qui soit. »

ResMusica – 24 janvier 2005

« Les premiers instants de la mise en scène de Philippe Arlaud ont de quoi nourrir maintes inquiétudes. Tout d’abord, un jeune enfant lit avec empressement et impétuosité juvénile un texte qui, en l’état, doit être parfaitement inintelligible au-delà du dixième rang. S’ensuit la projection de la distribution sur le rideau de scène rigide à la façon d’un générique de péplum hollywoodien avec sur le devant les mouvements de danses convulsifs de quelques danseuses en costumes de Lolita américaine des fifties. Une fois la devanture du générique reculée en fond de scène, place aux noces d’Orphée et Eurydice. Les cadeaux affluent ; bergers et nymphes, ou plus exactement leurs transmutations en invité(e)s smart, s’activent alentour, au milieu de ballets plutôt mécaniques mêlant parfois des pirouettes tout droit issues des prémisses du Rock’n’roll. Orphée arbore-t-il une banane et une chemise à jabot de dentelles pour autant ? Fort heureusement non ! La transposition paraît hardie, certes, mais n’entame pas la compréhension des faits consignés dans le livret. Tout au plus peut-on voir dans cette adaptation modernisante une tentative de divertir le public par le truchement d’un décorum différent. Mais différent de quoi ? Différente d’une version compassée pouvant être transportée directement au Musée de Cire après le dernier tomber de rideau ? Oui, sans conteste. Toutefois, cette production demeure complètement conforme à ce qui est devenu une convention en soi, à savoir doter coûte que coûte l’ouvrage abordé d’un contexte contemporain – ou presque – sans que le souci d’apposer une plus grande acuité de regard ne soit pour autant manifeste. On ne comprend pas bien, somme toute, l’intérêt de poser ce prisme déformant entre le livret et la scène. La vision des enfers, un vaste bar à hôtesses tenu par un despotique Pluton que vampirise sa favorite Proserpine et quelques autres filles, outre le fait de prêter à sourire, n’offre pas une grande plus-value … S’amuse-t-on dès lors à découvrir ces idées incongrues ? Pas vraiment. Par contre, le climat, trop rarement méditatif, ne laisse que peu de place à la poétique de l’ouvrage et se révèle frustrant.
Musicalement, la prestation du plateau et des musiciens de l’émérite Giardino Armonico justifie à elle seule le déplacement. Le rôle-titre est porté de bout en bout avec brio et élégance par un Victor Torres irrésistible vocalement. Son chant, large et souple laisse une place de choix à des couleurs barytonales et chaudes dans les graves alors que sa portance naturelle lui permet de projeter des aigus solaires tout en vocalisant avec agilité. Cette dernière qualité est très marquée, également, chez son père (Carlo Lepore). Du côté féminin, l’Eurydice et la Musica de Katia Velletaz ont l’heur de plaire par leur ductilité et leur précision. Plus expressive, la Messagère de Valentina Kutzarova enchante, à l’instar de Marie-Laure Chappuis, déterminée dans son rôle de Speranza qu’elle sert avec une très bonne diction. Certains personnages secondaires proposent une émission vocale parfois un peu confidentielle. Une menue réserve qui ne concerne aucunement l’excellent haute-contre Pascal Bertin, qui remplaçait un collègue malade, ni Emiliano Gonzalez-Toro, dont la saveur du timbre ne se dément pas au fil des productions romandes auxquelles il participe. Le Chœur du Grand Théâtre, peut-être un peu massif par moment, livre pour sa part une prestation sans failles. Si l’art du chant est plutôt bien servi, celui de la musique instrumentale l’est tout autant. Il Giardino Armonico brille de mille feux dans cette partition qu’il pratique à Genève comme une langue maternelle. Articulée avec finesse et dynamisme, la musique de Monteverdi demeure toujours souple, sans effets outranciers, mais avec force ornements et couleurs. Une mention particulière peut être adressée aux vents – d’époque eux aussi, bien sûr, donc des plus difficiles à manier – qui donnent à entendre une fusion des timbres et une précision d’attaque de tous les instants. En quittant le Bâtiment des Forces Motrices, il est permis de se retourner sur ce qu’il y a de meilleur dans cette production genevoise : La Musique. »

Diapason – mars 2005 – 29 janvier 2005

« Entre Orphée et Eurydice, ça ne va pas du tout, et quand il descend la sortir des enfers, elle préfère y rester. La trame du chef-d’oeuvre d’Offenbach et Halévy est aussi la matière du spectacle genevois pensé par Philippe Arlaud… pour celui de Monteverdi. Orfeo s’ouvre sur le monologue de Musica – laisser d’emblée la parole à la musique, quelle angoisse pour un metteur en scène ! Philippe Arlaud aura le premier mot, faisant précéder le prologue d’un texte hermétique récité par un gamin suivi de six méchantes hystéros qui se tordent quand résonne le premier accord de la Toccata.
Après un générique filmé, Victor Torres entre en scène dans une guinguette fifties, fait la tête à Euridice laquelle est peu à peu emmurée par les gros cadeaux flashy que lui offrent les invités à la noce, au beau milieu des ballets convulsifs réglés par Anne-Marie Gros ; Orfeo soudain se lève, envoie valser les paquets et s’écroule sur le sol tandis que le choeur s’exclame : « Orfeo est si heureux qu’il n’a plus rien à désirer… » On attend des rires dans la salle, quelques soupirs d’indignation, n’importe quoi, une réaction. Rien. Le public est soumis, il a retenu la leçon que lui infligent des metteurs en scène bien plus malins que les librettistes et les compositeurs : il ne cherche plus à faire le lien entre ce qu’il voit et ce qu’il entend (ou lit dans les surtitres). Il regarde le poste d’opéra.
Le générique l’avait promis, la musique est devenue bande-son – cette musique dont Striggio et Monteverdi désiraient chanter le pouvoir infini. Entre autres délicatesses, Caron devient un videur armé d’un revolver, et Proserpine une vamp qui se caresse sous son vison en écoutant « Possente spirto » avant de rouler un patin au gardien du night-club infernal. Dans sa robe lamée rouge (tiens tiens, elle ressemble sacrément à la Musica du Prologue…), Euridice ne veut pas suivre Orfeo dans l’escalier qui mène au monde des vivants ; il s’en doute malgré ses yeux bandés, se retourne.., et abracadabra, voici le mystère levé, la mythologie ramenée à la crise conjugale. On reste béat devant tant de prétention, même s’il faut dire que tout cela est assez bien fait, rythmé sinon élégant, ponctué par quelques jolies images (le plan  » lynchien » de l’arrivée aux enfers). Et ce n’est qu’un début, le premier volet d’une trilogie Monteverdi…
Pour finir, il faut bien parler de la musique, envers et contre le spectacle, de l’Orfeo de Victor Torres que l’on a connu plus épanoui qu’ici, engoncé dans un costume beige et une mise en scène qui lui refuse tout charisme, du Pastore superbement chanté par Emiliano Gonzalez-Toro et de l’Apollon impressionnant de Fulvio Bettini. Déception en revanche pour l’Euridice et la Musica sans velours de Katia Velletaz, pour la texture élimée du Giardino Armonico et la direction précise, efficace, intelligente, mais tout en angles de Giovanni Antonini – assez proche, en fait, de l’esthétique de Parrott et de Pickett dans ce répertoire. « 

Classica – mars 2005 – 23 janvier 2005

« Avec le Giardino Armonico, l’épure est ravissante, colorée, sonore, avec cette virtuosité d’instruments, mais aussi cette réécriture inventive (signée Antonini et Luca Pianca) qui inscrivent bien Monteverdi dans un foisonnement très en phase avec le concept majoritairement accepté aujourd’hui… Philippe Arlaud va à peine moins loin dans la distance avec le propos musical, mais se trompe de sujet, en imposant une scénographie si lourde et simpliste (une boîte de nuit snob pour les Enfers), une direction d’acteurs si surchargée (un mariage campagnard si détaillé, si anecdotique qu’on en oublie l’arrivée de la Messagiera), mais un personnage central si peu défini en fait (le sublime chanteur qu’est Victor Torres, piètre présence hélas) qu’on s’égare à fermer les yeux pour écouter, se détachant d’une vision contemporaine sans saveur, où des Bacchantes ramenées d’un hypothétique final non écrit n’apportent rien de neuf. »

Sydney, Pinchgut Opera – 1er, 3, 5, 6 décembre 2004 – Orchestra of the Antipodes – Cantillation – dir. Antony Walker – mise en scène Mark Gaal – décors, costumes Mark Gaal, Alice Lau – lumières Bernie Tan – avec Mark Tucker (Orfeo), Sara Macliver (La Musica, Prosperpina, Messagiera), Damian Whitely (Pluto, Charon), Paul McMahon (Apollo, Eco), Penelope Mills (Euridice), Josie Ryan (Ninfa), Anna Fraser (Speranza)


Penelope Mills en Euridice

Harvard Early Music Society – The Horner Room of the Agassiz Theatre – 18, 20 novembre 2004 – en anglais – dir. Thomas Forrest Kelly – mise en scène Zoë VanderWolk – décors Maggie Cao – costumes Jane Van Cleef – lumières John Noss – avec Erica Brookhyser (Musica), Aaron Sheehan (Orfeo), Mary Gerbi (Euridice), Teresa Wakim (Ninfa), Jeff Barnett, James Capobianco, Blake Hunter (Shepherds; Infernal Spirits), Allison Mondel (Silvia), Amy Stebbins (Speranza), Paul Guttry (Caronte), Steven Serpa (Infernal Spirit), Samantha Franklin (Proserpina), Nicholas Vines (Plutone), Bradford Gleim (Apollo; Infernal Spirit)


Orléans – Le Carré Saint-Vincent – 12 octobre 2004 – Théâtre Municipal de Tourcoing – Atelier lyrique de Tourcoing – 15, 17, 19 octobre 2004 – La Grande Ecurie et la Chambre du Roy – dir. Jean-Claude Malgoire – dramaturgie Jean Claude Malgoire – scénogaphie, lumières Jacky Lautem – assistant à la mise en scène: Pierre Thirion Vallet – chorégraphie Roser Montllo, Brigitte Seth – costumes Christine Rabot Pinson – avec Kobie van Rensburg (Orfeo), Cyrille Gerstenhaber, Delphine Gillot, Estelle Kaïque (Messagiera), Marie Planinsek, Lorraine Prigent, Hjordis Thébault, Alain Bertschy , Vincent Bouchot, Renaud Delaigue (Caronte), Bernard Deletré, Thierry Grégoire, Philippe Jaroussky (Speranza), Pierre Yves Pruvot, Philippe Rabier – actrices-danseuses Roser Montllo, Brigitte Seth


Opéra International – novembre 2004 – 12 octobre 2004

« Salle comble au Carré d’Orléans pour ce nouveau retour de l’équipe de Jean-Claude Malgoire vers L’Orfeo. Le chef, si gourmand de jeunes voix, a découvert en Kobie van Rensburg, ténor sud-africain, un poète de belle tenue, rayonnant dès les premiers actes, puis joliment fracturé dans les épisodes infernaux. Un peu plus de legato aurait cependant agrémenté les charmes adressés à Caronte. Il était accompagné par l’élégante Speranza de Philippe Jaroussky, avant d’être arrêté par la basse caverneuse de Renaud Delaigue en passeur d’âmes. Avec les chanteuses et les chanteurs de l’Atelier lyrique de Tourcoing, le travail d’ensemble où chaque soliste se fait choeur atteint une tenue remarquable, notamment dans les psaumes chtoniens encadrant les interventions de Proserpina et Plutone. C’est le fruit d’un long travail mené conjointement sur les Vespro della beata Vergine et Combattimento di Tancredi e Clorinda, au pro-gramme de cette saison de l’Atelier lyrique.
Dramaturge de la production, Malgoire a choisi de mettre en scène le continuo (régale, clavecin, théorbe, harpe) sur le côté d’un plan incliné assorti d’un praticable s’enfonçant dans les premiers rangs. Cette scénographie a minima, plus réussie dans la partie infernale que dans la divertissante, pèche par quelques contre-sens. Partager la Musica du prologue entre trois voix ou confondre Apollo avec un pape de la Contre-Réforme intervenant pour l’élévation d’Orfeo tandis que les Ménades le démembrent tient du grand écart signifiant. Tout cela ne serait rien si les costumes, bric-à-brac de couleurs et d’époques diverses trahissant le manque de moyens, n’avaient rabaissé l’inventivité du spectacle au niveau d’une kermesse paroissiale. Tant qu’à jouer le minimal, un « arte povera » du costume ici s’imposait. Mais que l’on ferme les yeux et aussitôt Malgoire, avec la Grande Ecurie et la Chambre du Roy, s’avère toujours le sensible interprète de Claudia, dansant quand il le faut et d’un planant ténébreux jusqu’au fond des cordes. »

Le Monde de la Musique – décembre 2004 – Monteverdi version tragique – 23 octobre 2004

« Qui n’a rêvé d’entendre la première version, tra-gique, que Monteverdi et son librettiste Striggio conçurent pour la conclusion de l’Orfeo en 1607 ? Orphée y était montré, fidèlement à la leçon du mythe, déchiré par les Bacchantes, alors que dans la fin heureuse qui lui a été substituée, c’est Apollon qui mène Orphée à une apothéose céleste. Ici, les Bacchantes envahissent bel et bien la scène et Orphée est mis en pièces sur la danse finale, une Moresca originellement conçue pour figurer l’harmonie des sphères. Conclusion digne d’un spectacle qui aura multiplié les intuitions visuelles.
Sur un dispositif d’une grande simplicité comportant un promontoire en avancée vers l’orchestre, l’essentiel se joue par des jeux de lumières, les costumes volontairement dépareillés et surtout de très beaux mouvements : une Messagère (Emmanuelle Kaïque) gracile et agitée, dépassée par l’ampleur du désastre qu’elle annonce, l’Espérance (excellent Philippe Jaroussky) magistrale mais fuyante, le choeur décontracté des bergers, de superbes intrusions dansées ou mimées. Une éclipse totale de lumière accompagne la transgression d’Orphée à sa sortie des Enfers. Le continuo plein de vie est mis au service de chanteurs résolus. L’Orfeo de Kobie van Rensburg, superbe de nuances dans son gigantesque air « Possente Spirto », colore le monologue final d’un ton désabusé et amer. Unique fausse note, mais bien perceptible en revanche, cet Apollon grimé en évêque qui introduit un second degré que démentent le reste du spectacle et surtout la musique, dont la profondeur constante n’offre aucune prise réelle à cet-te interprétation hors sujet. La partition, comme souvent avec Jean-Claude Malgoire, parait se mettre en scène elle-même, dans les tempos souvent rapides des interludes et des choeurs portés par un sens du théâtre infaillible dès que le récit est amorcé. »

Varsovie – Opéra de Chambre de Varsovie – 29 septembre 2004 – Musicae Antiquae Collegium Varsoviense – dir. Wladyslaw Kloziewicz – mise en scène et décors Ryszard Peryt – scénographie Andrzej Sadowski – avec Jacek Laszczkowski (Orfeo), Marta Boberska (Euridice, La Musica), Urszula Palonka (Speranza), Agnieszka Lipska (Messaggera), Marzanna Rudnicka (Proserpina), Piotr Lykowski (Pastore, alto), Krzysztof Kur (Pastore, tenore), Zdzislaw Kordyjalik (Pastore, tenore), Urszula Jankowska (Ninfa), Zbigniew Debko (Caronte), Dariusz Górski (Plutone), Jerzy Knetig (Apollo, Eco)



Darmstadt – Staatstheater – Kleines Haus – 25, 26, 28, 30 septembre, 2, 8, 10, 17, 29 octobre, 7, 24 novembre 2004- dir. Stefan Blunier – mise en scène John Dew – décors Heinz Balthes – costumes José Manuel Vazquez – avec Sven Ehrke (Orfeo), Stephanie Maria Ott, Gerson Luiz Sales, Mary Anne Kruger, Andreas Daum – nouvelle production



Opéra de Lyon – 14, 15, 16, 17, 19, 20, 21 avril 2004 – Chanteurs et Orchestre du Nouveau Studio de l’Opéra de Lyon – dir. Philip Pickett – mise en scène Antonio Latella – décors, costumes Emanuela Pischedda – lumières Giorgio Cervesi Ripa – chorégraphie Deda Cristina Colonna – avec Tama Kleinberger / Daphné Touchais (Musica), Vittorio Prato / Nicolas Rouault (Orfeo), Anne-Sophie Durand / Cecilia Arellano (Euridice), Emmanuelle Fruchard / Claire Babel (Ninfa), Jeroen de Vaal (Pastore I/Spirito II), David Lefort (Pastore II/Spirito I), Ivan Geissler / Pierrick Boisseau (Pastore III/Spirito III/Apollo), François Lis / Pawel Lawreszuk (Pastore IV/Plutone), Laura Alibrando / Caroline Gesret (la Messagiera), Julie Pasturaud / Diana Axentii (Speranza), Shadi Torbey (Caronte), François Lis (Spirito IV), Ariana Vafadari / Emmanuelle Halimi (Proserpina), Vittorio Prato (Echo), Tamar Kleinberger, Anne-Sophie Durand, Emmanuelle Fruchard, Laura Alibrando, Julie Pasturaud, Ariana Vafadari, Ivan Geissler (ninfe, pastori e spiriti)

Opéra International – mai 2004 – 14 avril 2004

« Une fois encore, la scène lyonnaise marque son atta-chement indéfectible à L’Orfeo de Monteverdi. Depuis la mémorable production de Gaston Benhaim (1973), dirigée en alternance par Theodor Guschlbauer et Claire Gibault (avec Eric Tappy et Colette Alliot-Lugaz), la pathétique destinée du héros de Thrace ne cesse au fil des ans (1988, Corboz-Goretta, 1998, Gibault-Erlo) de croiser un public assidu, toujours plus réceptif. En guise de baptême du feu, c’est à la jeune troupe du Nouveau Studio de l’Opéra de Lyon qu’échoit le privilège de faire revivre l’envoûtante favola in musica. Pour ces tout jeunes chanteurs et musiciens à peine sortis du cocon estudiantin, inutile de dire que l’enjeu est de taille. L’ouvrage, éprouvant sur le plan dramatique et technique, autant vocal et instrumental, recèle de nombreuses splendeurs, souvent difficiles à transcrire, même pour des artistes d’expérience.
Sous la direction éclairante de Philip Pickett, remplaçant de Christophe Coin, souffrant, et dont les affinités avec le compositeur ne sont plus à démontrer (travail épatant avec les sacqueboutes, cornets et trompettes ainsi que sur le continuo), certains savent tirer leur épingle du jeu avec une aisance très prometteuse : excellent groupe de Bergers-Esprits, très convaincant couple Pluton-Proserpine de François Lis et Ariana Vafadari, impressionnant Charon de Shadi Torbey, émouvante Messagère de Laura Alibrando. Les autres, malheureusement, n’ont, en dépit d’une vitalité indéniable, ni les couleurs ni les fulgurances caractéristiques de leurs personnages. L’Orphée de Vittorio Prato (baryton) n’est pas parvenu à émouvoir plus d’une minute d’affilée est-ce son timbre engorgé et nasal, sa diction pâteuse ou son souffle court qui en sont responsables? Probablement tout à la fois. Son « Possente spirto » hoqueté et laborieux en est une pénible illustration. L’Eurydice pâlotte d’Anne-Sophie Durand, la Musique, plus actrice que chanteuse, de Tamar Kleinberger et l’Espérance trop opulente de Julie Pasturaud complètent une galerie allégorique bancale. Enfin, la scénographie d’Antonio Latella, conçue comme une mise en abyme (la fable est contée dans l’enceinte d’un théâtre), n’évite pas toujours la surcharge, évoquant, par certains aspects excessifs dus aux décors et costumes d’Emanuela Pischedda, le cinéma le plus baroque de Peter Greenaway. »

Res Musica

« Le spectacle était à la hauteur des espérances et du travail investi, chapeauté par le nouvel enfant terrible du théâtre italien Antonio Latella. La Musique, bien que présente uniquement dans le prologue, est présentée comme la maîtresse du drame à venir par ses apparitions constantes et silencieuses sur le plateau. Orphée, Eurydice, les nymphes et les bergers sont des jeunes gens de l’Ottocento s’égayant dans une partie de campagne et s’amusant de divers jeux de potaches, rapprochant ainsi l’intrigue des Scènes de la vie de Bohème d’Henri Murger. La scène aux enfers s’inspire des derniers tableaux de Francisco Goya, prétexte à démontrer la décadence de ce royaume dont le gardien s’endort et les souverains manquent à leurs devoirs en libérant une morte. Proserpine est représentée en star sur le retour alcoolique et accrochée au tabac, Pluton est nonchalant et débraillé, les esprits par leur démarche saccadée et hésitante font penser à la ménagerie de Freaks ou à l’avant dernière scène du Rake’s Progress dans l’asile de Bedlam. Dans l’apothéose finale Apollon apparaît coiffé d’une perruque du XVIIIème siècle, symbole du Deus ex machina et figure du souverain mécène et protecteur.
La direction d’acteurs est remarquable. L’ensemble des jeunes chanteurs se meut sur scène avec une facilité quasi naturelle, parfois dans le plus simple appareil — comme pour la seconde mort d’Eurydice. Coté vocal on émettra quelques réserves toutes relatives. Nicolas Rouault se sort avec les honneurs de la tessiture impossible du rôle-titre, trop grave pour être confié à un ténor mais trop tendue pour un baryton. Il semble peiner sur son dernier air dont les aigus, tous situés dans le passage, sont tirés et poussifs. Qu’importe, sa prestation n’en reste pas moins exemplaire et l’on regrette de ne pas avoir assisté à une autre représentation, l’ensemble de la troupe alternant premiers et second rôle (dans l’autre distribution Orphée est chanté par Vittorio Prato, dont le reportage sur Mezzo tend à faire croire à un grand talent tout aussi prometteur). Cecilia Arellano plafonne aussi dans ses aigus, souvent trop bas. Mais ces défauts mineurs, loin d’être gênants ou rédhibitoires, n’ont pas empêché la réussite totale de cette production dont les chanteurs-acteurs, pour l’instant peu connus du grand public, se sont littéralement révélés sur scène, aidés en cela d’un orchestre composé essentiellement d’étudiants du CNSM voisin, emmené d’une main de maître par Philip Pickett dont l’excellence dans ce répertoire n’est plus à prouver. » (Res Musica)

Düsseldorf – 10, 17 avril 2004 – dir. Andreas Stoehr – mise en scène Christof Loy – décors Dirk Becker – costumes Michaela Barth – avec Ludwig Grabmeier (Orfeo), Sylvia Hamvasi (Euridice), Carol Wilson (La Musica/La Speranza), Jung-Hwan Lee, Torsten Hofmann, Martin Wölfel, Wippich (Pastori), Francisca Devos (Ninfa), Marta Marquez (Messagiera), Thorsten Grümbel (Caronte), Monique Simon (Proserpina), Sami Luttinen (Plutone), Bruce Rankin (Apollo)


Berlin – Unter den Linden – 17, 19, 21, 23, 25, 27, 28 janvier 2004 – Akademie für Alte Musik Berlin – Concerto Vocale – Vocalconsort Berlin dir. René Jacobs – mise en scène Barrie Kosky – décors Klaus Grünberg – costumes Miro Paternostro – lumières Nigel Levings – dramaturgie Andras Siebold – avec Nuria Rial (La Musica, Euridice), Stéphane Degout (Orfeo), Marie-Claude Chappuis (Messagiera, Proserpina), Matthias Lucht (Pastore, Spirito), Carlos Mena (Speranza, Pastore, Spirito), Antonio Abete (Plutone, Pastore), Paolo Battaglia (Caronte, Spirito) – nouvelle coproduction avec Innsbrucker Festwochen


Pavie – Teatro Fraschini – 9, 11 janvier 2004 – dir. Ottavio Dantone – mise en scène Massimo Gasparon – décors, costumes Massimo Gasparon – avec Furio Zanasi (Orfeo), Elisabetta Scano (Euridice/La Musica), Sonia Prina (Messaggera/Speranza), Paolo Buttol (Caronte), Sergio Foresti (Plutone/Pastore IV), Gloria Banditelli (Proserpina/Ninfa), Mirko Guadagnini (Apollo/Pastore I), Riccardo Barattia (Pastore II), Nicola Marchesini (Pastore III ), José Daniel Ramirez (Spirito I), Gianluca Zoccatelli (Spirito II) – Coproduction Teatro Fraschini di Pavia, Teatro A. Ponchielli di Cremona, Teatro Grande di Brescia, Teatro Sociale di Como – Aslico

 

Londres – Queen Elizabeth Hall – novembre 2003 – South Bank’s Inside Monteverdi – version semi-scénique – New London Consort – dir. Philip Pickett – mise en scène Jonathan Miller – costumes Shirin Guild – chorégraphie Sue Lefton – avec Mark Tucker (Orfeo), Revital Raviv (Euridice), Joanne Lunn (Musica), Michael George (Plutone), Simon Grant (Caronte), Andrew King (Berger, Apollo)

 

Cremone – Teatro Ponchielli – Festival Claudio Monteverdi – 10, 12 octobre 2003 – Côme – Teatro Sociale – 29, 30 novembre 2003 – Brescia – Teatro Grande – 5, 7 décembre 2003 – Pavie – Teatro Fraschini – 9, 11 janvier 2004 – Accademia Bizantina – dir. Ottavio Dantone – mise en scène Massimo Gasparon – décors, costumes Massimo Gasparon – choeur Costanzo Porta – chef de choeur Antonio Greco – avec Furio Zanasi (Orfeo), Elisabetta Scano (Euridice,La Musica), Sonia Prina (Messaggiera,Speranza), Paolo Buttol (Caronte), Sergio Foresti (Plutone,Pastore IV), Gloria Banditelli (Proserpina,Ninfa), Mirko Guadagnini (Apollo,Pastore I), Ricardo Barattia (Pastore II), Roberto Balconi (Pastore III), José Daniel Ramirez (Spirito I), Gianluca Zoccatelli (Spirito II)

 

Stuttgart Staatstheater – 26, 28 septembre, 4, 15, 23, 26 octobre, 20 novembre 2003 – dir. Jean-Claude Malgoire – mise en scène Joachim Schlömer – décors, costumes Kathrin Brack – avec Irena Bespalovaite (La Musica / Proserpina), Kobie van Rensburg (Orfeo), Helga Rós Indridadóttir (Euridice), Helene Ranada (Messaggiera), Maria Theresa Ullrich (Speranza), Helmut Berger-Tuna (Caronte), Mark Munkittrick (Plutone), Christoph Sökler (Apollo), Daniel Ohlmann (Pastore / Spirito I), Emma Curtis (Pastore II), Roderic Keating (Pastore III / Spirito II), Heike Beckmann / Karin Horvat (Ninfa / Pastore), Sasa Vrabac / Johannes Wieczorek (Pastore IV / Spirito V), Daniel Kaleta (Spirito III), Thomas Hahn / Ulrich Fritsch (Spirito IV)

 

Baltimore Museum of Art – 2003 – Early and Baroque Opera


Innsbruck – Festival de Musique Ancienne – Tiroler Landestheater – 12, 14, 17, 19 août 2003 – Coproduction avec Deutschen Staatsoper, Berlin – Akademie für Alte Musik Berlin – Concerto Vocale – dir. René Jacobs – mise en scène Barry Kosky – décors Klaus Grünberg – costumes Miro Paternostro – avec Stéphane Degout (Orfeo), Nuria Rial (Euridice, La Musica), Carlos Mena (Speranza, Pastore, Spirito), Topi Lehtipuu (Apollo), Finnur Bjarnason (Pastore, Spirito, Apollo, Eco), Antonio Abete (Pastore, Plutone)


Philarmonie de Munich – 16, 18 février 2003 – version de concert – version de Bruno Maderna – Chor des Bayrischen Rundfunks – Münchner Rundfunkorchester – dir. Steven Sloane – avec William Dazeley (Orfeo), Veronica Cangemi (Euridice / La Musica / Eco), Stella Doufexis (Messaggiera / La Speranza / Proserpina / Ninfa), Paolo Battaglia (Caronte / Plutone / Spirito), Mark Tucker (Apollo / Pastore / Spirito), Simone Schneider (Ninfa / Spirito), Stefan Genz (Pastore)
intégrale audio – 2 CD Premiereopera

 

Londres – Barbican Theatre – dir. Emmanuelle Haïm – janvier 2003 – avec Ian Bostridge (Orfeo), Christopher Maltman (Pastore, Apollo), Alice Coote (Messagiera), Sonia Prina (Speranza), Carolyn Sampson (Musica, Euridice), Pascal Bertin, Paul Agnew

« En dirigeant son premier Orfeo de Monteverdi au Barbican Center, avec, en vedette, la prise de rôle du ténor anglais Ian Bostridge, Emmanuelle Haïm est en train de réaliser ce petit miracle que Simon Rattle pressentait lorsqu’il lui demanda, en 2001, de diriger Rodelinda, d’Haendel, au Glyndebourne Touring Opera : une carrière de chef d’orchestre en Angleterre. Les 2 500 spectateurs n’ont pas dissimulé leur enthousiasme – visiblement partagé par le chef d’orchestre John Elliot Gardiner, venu complimenter dans les coulisses sa jeune consoeur française. » (Le Monde – 19 janvier 2003)

Stuttgart – Staatstheater – 9, 12, 14, 16, 20, 23 novembre, 4 décembre 2002, 11 janvier, 18, 21 mai 2003 – Staatsopernchor Stuttgart – Staatsorchester Stuttgart dir. Jean-Claude Malgoire – mise en scène Joachim Schlömer – décors, costumes Katrin Brack – lumières David Finn – dramaturgie Juliane Votteler – avec Irena Bespalovaite (La Musica), Kobie van Rensburg (Orfeo), Jaquelyn Familant (Euridice), Helene Ranada (Messagiera), Frédérique Sizaret (Speranza), Helmut Berger-Tuna (Caronte), Irena Bespalovaite (Proserpina), Marek Gasztecki (Plutone), Christoph Sökler (Apollo), Jaquelyn Familant (Eco), Daniel Ohlmann (Pastore I / Spirito I ), Frédérique Sizaret (Pastore II ), Roderic Keating (Pastore II / Spirito II), Daniel Kaleta (Spirito III), Karin Horvat (Ninfa / Pastore), Johannes Wieczorek (Pastore IV / Spirito V), Ulrich Frisch (Spirito IV)


Reims – Grand Théâtre – 8, 10 novembre 2002 – Théâtre de Metz – 15, 17 novembre 2002 Tours – Grand Théâtre – 11, 12 janvier 2003 – Akadêmia – chanté en français – dir. Françoise Lasserre – mise en scène Christian Gangneron – décors Thierry Leproust – costumes Claude Masson – lumières Marion Hewlett – avec Béatrice Mayo-Felipe (Musica, Euridice), Sylvie Althaparro (Messaggiera), Emmanuelle Halimi (Prosperpina), Hervé Lamy (Orfeo), Els Janssens (Speranza), Philippe Roche/Jean-Claude Saragosse (Caronte, Plutone), Patricia Gonzales (Ninfa), Emmanuel Vistorky (Spirito 3), Serge Goubioud (Pastore 1), Stéphane Lévy (Pastore 2), Philippe Froeliger (Pastore 3, Spirito 1), Bernard Arrieta (Pastore 4), Benoît Haller (Apollo, Spirito 2) – production de Arcal en résidence au Grand Théâtre de Reims

Hervé Lamy dans Orfeo
« …une production déjà relativement ancienne de l’Orfeo de Monteverdi, datant de 1998…cette réalisation de l’Arcal a été présentée en tournée dans de nombreuses villes françaises…Françoise Lasserre est évidemment à son aise dans Monteverdi, dont elle fréquente l’oeuvre depuis de nombreuses années. Toutefois, sa gestique, qui est celle d’un chef de choeur, lui joue quelques tours, et les interventions des cuivres et des cornets n’avaient pas toujours la propreté souhaitable. L’accompagnement des ariosi aurait également gagné à un peu plus de fermeté, çà et là. En revanche, toutes les scènes de ballet ont été remarquablement bien dirigées. Par l’ampleur de ses moyens, Hervé Lamy se détachait nettement du reste de la distribution ; son Orfeo quasi bel-cantiste relevait d’un parti pris tout à fait acceptable en soi, mais contrastait un peu brutalement avec les autres rôles, tenus par des chanteurs formés à l’école baroque. L’on a par ailleurs apprécié Béatrice Mayo-Felip, qui a campé une Musica et une Euridice d’excellente tenue. Très vive sur scène, elle possède cette pointe de vibrato qui sied à la mu-sique italienne, et qui nous change agréablement des voix blanches et atones que l’on nous impose trop souvent dans ce répertoire. Si Emmanuelle Halimi (Proserpina) et Jean-Claude Sarragosse (Plutone et Caronte) se sont avérés convenables, le reste du plateau se cantonnait malheureusement entre le médiocre et le franchement mauvais, avec notamment une Messaggiera à l’émission très instable. » (Metz – 17 novembre 2002 – Opéra International – janvier 2003)

Stuttgart – Staatstheater – 9, 12, 14, 16, 20, 23 novembre 2002, 4 décembre 2002, 11 janvier, 18 et 21 mai 2003 – dir. Jean-Claude Malgoire – mise en scène Joachim Schlömer – décors, costumes Katrin Brack – lumières David Finn – dramaturgie Juliane Votteler – avec Irena Bespalovaite (La Musica), Kobie van Rensburg (Orfeo), Jaquelyn Familant (Euridice), Helene Ranada (Messagiera), Frédérique Sizaret (Speranza), Helmut Berger-Tuna (Caronte), Irena Bespalovaite (Proserpina), Marek Gasztecki (Plutone), Christoph Sökler (Apollo), Jaquelyn Familant (Echo), Daniel Ohlmann (Pastore I / Spirito I), Frédérique Sizaret (Pastore II), Roderic Keating (Pastore II / Spirito II), Daniel Kaleta (Spirito III), Karin Horvat (Ninfa / Pastore), Johannes Wieczorek (Pastore IV / Spirito V), Ulrich Frisch (Spirito IV)


Festival de Baden-Baden – 5 et 6 octobre 2002 – Balthasar Neumann Ensemble – Balthasar Neumann Choir – dir. Thomas Hengelbrock – mise en scène Philipp Himmelmann – décors Johannes Leiacker – costumes Marie-Thérèse Jossen – avec Funo Zanasi (Orfeo), Camilla Nylund (Euridice), Gloria Banditelli (Messaggiera), Constanze Backes (Proserpina), Marek Rzepka (Caronte, Plutone)
Orfeo à Baden-Baden

« Une succession de bonnes idées vient rythmer la soirée, donnée sans entracte. Pas de rideau, l’orchestre aligné à l’avant-scène derrière une rangée de chaises vides : le spectacle commence comme une version de concert, ambiguïté entretenue tout au long du Pro-logue, qui de ce fait paraît encore plus longuet que nature, mais qui confère une force toute particulière au début réel de l’action. Car tout change quand Orphée et Eurydice entrent en scène : l’orchestre s’enfonce alors doucement dans sa fosse et le très beau décor de Johannes Leiacker gagne progressivement en ampleur, grâce à un jeu subtil de coulisses imbriquées. Dans le tableau des Enfers, ce dispositif finit par ressembler à un très long souterrain, sorte de passage piétonnier intermi-nable et oppressant, qui vient égarer la vision du spectateur jusqu’au fond d’une scène exploitée dans toute sa profondeur…Dans Monteverdi, le Balthasar-Neumann-Ensemhle et Thomas Hengelbrock retrouvent une pertinence et une crédibilité que l’on avait fini par oublier…Quant à la distribution, particulièrement soignée, elle réunit des voix dotées à la fois d’un vrai potentiel de projection (dimensions de la salle obligent) et d’une solide habitude du répertoire baroque. L’Orphée de Furio Zanasi réussit un parcours d’une probité exemplaire, Camilla Nylund est une Eurydice très touchante, et Gloria Banditelli reste une Messagère toujours émouvante, en dépit d’une certaine usure du timbre. Belles prestations, enfin, de Constanze Backes et Marek Rzepka, Proserpine et Pluton sortis des rangs du Choeur Balthasar-Neumann, et remarquablement en situation. » (Opéra International – décembre 2002)

Deutsche Oper am Rhein – Duisbourg – 14, 17, 19, 21 septembre 2002 – Düsseldorf – 26, 28 septembre 2002

 

Bruges – août 2002 – Koor van de Italiaans-Zwitserse Radio Lugano I Barrocchisti – dir. Diego Fasolis – avec Roberta Invernizzi (La Musica, Proserpina), Christophe Prégardien (Orfeo), Claudine Ansermet (Euridice), Guillemette Laurens (Messagiera, Speranza), Claudia Cavina, Sandro Naglia, Giuseppe Maletto, Harry Van der Kamp (Pastore), Lorenzo Muzzi (Caronte), Harry Van der Kamp Plutone, Alfredo Grandini (Apollo)

 

Festival de Beaune – Cour des Hospices – 3 août 2002 – version de concert – Choeur et Orchestre Elyma – dir. Gabriel Garrido – avec Furio Zanasi (Orfeo), Graciela Oddone (Euridice), Adriana Fernandez (La Musica), Gloria Banditelli (La Messagiera), Alicia Borges (Proserpine), Liliana Ruggiero (La Speranza), Francesc Garrigosa (Apollo), Ivan Garcia (Caronte)

 

Dresde – Semper-Oper – 16 mai 2002 – version de concert – Collegium vocale Gent – Concerto vocale – dir. René Jacobs – avec John Mark Ainsley (Orfeo), Sophie Karthäuser (Euridice / La Musica / Eco), Bernarda Fink (Messaggiera), Marisa Martins (Proserpina), Stephen Wallace (La Speranza / Pastore / Spirito), Antonio Abete (Caronte), Henry Waddington (Plutone), Topi Lehtipuu (Apollo / Pastore), Suzie LeBlanc (Ninfa), John Bowen / René Linnenbank (Pastori / Spiriti)

 

Bruxelles – Théâtre de la Monnaie – 2, 3, 4, 5, 7, 8, 9, 10, 11, 12 mai 2002 – Théâtre de Poissy – 14 mai 2002 – Coproduction avec Kunstenfestival desArts, Festival International d’Art Lyrique d’Aix-en-Provence – Concerto Vocale – Collegium Vocale – dir. René Jacobs – mise en scène Trisha Brown – décors, costumes Roland Aeschlimann – chorégraphie Trisha Brown – lumières Roland Aeschlimann – avec John Mark Ainsley / Stéphane Degout (Orfeo), Sophie Karthäuser (Euridice/La Musica/Eco), Laura Polverelli (Messaggiera), Marissa Martins (Proserpina), Stephen Wallace (La Speranza), Henry Waddington (Plutone), Paolo Battaglia (Caronte), Palle Knudsen (Apollo), Anne Cambier / Nuria Rial (Ninfa), Topi Letipu, René Linnenbank, Stephen Wallace, Lorenzo Caròla (Pastori,Spiriti)

Crescendo – été 2002

« Lors de sa création en 1998, cette production avait enthousiasmé et divisé : la réalisation musicale de René Jacobs d’une vitalité et d’un raffinement inouïs, ralliait tous les suffrages, mais la mise en scène abstraite et dépouillée de Trisha Brown a laissé perplexe plus d’un spectateur…La chorégraphie répétitive et la gestuelle ésotérique finissent par agacer et créer une distanciation…Stéphane Degout a tout pour incarner à merveille l’arrogance et l’impétuosité d’Orphée…l’Eurydice sensible et spectrale de Sophie Karthäuser…Marissa Martins campe une Proserpine au visage étonnament humain et aux accents passionnés…Le continuo subjugue par sa finesse et par sa beauté…René Jacobs soigne le moindre détail…et signe l’une des interprétations les plus abouties du chef d’oeuvre fondateur. »

Libre Belgique – 5 mai 2002

« Reprise très attendue que celle de cet `Orfeo´ de Monteverdi, traversé par la vision de la chorégraphe américaine Trisha Brown, du chef d’orchestre René Jacobs à la tête du Concerto Vocale, et du décorateur Roland Aeschlimann. Pas de doute, la production garde tout son impact, elle gagne même à être vue et revue, ceux qui ont eu l’occasion de la suivre sur la Deux, jeudi soir, n’auront que mieux reçu le message. Un message d’une simplicité radicale, évoqué dans une récente interview de René Jacobs et énoncé par les choeurs: `Que seul soit digne de la gloire éternelle, celui qui se vaincra lui-même´. Avec un corollaire d’actualité: `la musique n’octroie pas la toute-puissance sur l’ordre du monde, elle est là pour témoigner de la beauté et émouvoir le coeur des hommes´.
On saura gré, une fois encore, aux maîtres d’oeuvre d’avoir cristallisé la force du poème (de Striggio) et la splendeur de la musique, dans une mise en forme totalement épurée, intemporelle pour ce qui concerne le regard, et d’autant plus agissante. Avec le concours du Collegium Vocale, dont chaque chanteur devient ici danseur, fondu parmi ceux de la Trisha Brown Company, tout le plateau est intégré dans un visuel tour à tour de lumière ou d’ombre, dominé par le bleu des sphères et traversé, à chaque étape, par l’apparition de la `musica´. Tous les mouvements sont chorégraphiés, rien n’est laissé au hasard (c’est-à-dire au quotidien), chaque attitude est celle du corps et de l’âme.
La nouvelle distribution fait la part belle à des chanteurs jeunes et parfois de chez nous, notamment Sophie Karthäuser (voir le portrait dans `La Libre Culture´ du 30 avril), dans le rôle d’Eurydice (et, hors scène, de la Musica et d’Echo), mené avec une grâce fragile, étrange même, et une musicalité raffinée, et le ténor Lorenzo Carola (un berger) sensible et stylé. Dans le rôle titre, John Mark Ainsley, un des maîtres du rôle aujourd’hui – du moins du point de vue vocal car l’adhésion scénique était moins convaincante-, alterne avec le jeune baryton français Stéphane Degout*, dont les répétitions, et les antécédents, présagent des merveilles. La mezzo italienne Laura Polverelli est, par la voix et la présence scénique, une `Messageria´ bouleversante. On retiendra encore, parmi les nouveaux venus, le ténor finlandais Topi Lehtipuu, tour à tour berger, esprit des enfers, et Apollon – voix puissante et claire, au timbre lumineux, et admirablement projetée, une des révélations de la production-, ainsi qu’Henry Waddington (Pluton), Paolo Battaglia (Caronte) et Marisa Martins (Proserpina), ces derniers ne déméritant nullement mais manquant globalement de cet éclat, de ce `métal´ si précieux dans la musique de Monteverdi. Enfin, déjà présent à la production de 1998, le contre ténor Stephen Wallace se révèle à nouveau une Speranza issue des tréfonds de l’âme, sévère et tendre à la fois, ambiguë – mais favorable – comme la voix qui l’incarne. »

ConcertoNet – 12 mai 2002

« Désormais bien connue, cette belle production de l’Orfeo de Monteverdi vue par Trisha Brown et inaugurée à la Monnaie le 13 mai 1998 avant de tourner dans plusieurs autres lieux, dont le Festival d’Aix-en-Provence, se laisse voir et revoir avec un immense plaisir. A sa mise en scène fine, légère, bien caractérisée, parfaitement en adéquation avec la musique, soutenue par des décors splendides et d’une simplicité touchante répond sa chorégraphie esthétiquement et émotionellement exemplaire. Comme il en est d’usage à la Monnaie (et qui en fait une des plus grandes Maisons d’Opéra), cette reprise a bénéficié des mêmes soins que ceux accordés à une nouvelle production, la distribution, complètement renouvelée, ayant parfaitement assimilé le langage corporel si personnel de Trisha Brown.
Stéphane Degout (en alternance avec le ténor John Mark Ainsley) est plus qu’une révélation. Ce jeune baryton français connu par son Papageno aixois et ses prestations remarquées au sein de la troupe de l’Opéra de Lyon, maîtrise le rôle-titre de façon magistrale. La voix bien timbrée, solide et souple fait preuve d’une grande rigueur sur le plan du style monteverdien. Laura Polverelli (déjà prévue en 1998 mais remplacée à l’époque par Graciela Oddone) aborde enfin la Messaggiera et le fait de manière bouleversante ; son mezzo homogène et fruité nous enchante et nous fait regretter la brièveté de son rôle. La plupart des autres interprètes convainquent sans véritablement enthousiasmer, même si l’on distinguera la prometteuse Sophie Karthäuser qui chante trois rôles (dont La Musica depuis la fosse d’orchestre et doublée dans les airs par la magnifique danseuse Katrina Thompson, scène d’ouverture proprement inoubliable de poésie) et Topi Lehtipuu dans le rôle d’Apollo. Par contre, on peut regretter le Caronte de Paolo Battaglia, irrésistible scéniquement mais vocalement peu audible. Quant à la direction de René Jacobs, toujours à la tête du Concerto Vocale, elle continue à susciter l’admiration par sa précision, sa rigueur stylistique, son inventivité sans limites et un sens des contrastes si importants ce répertoire. »

Salamanque – Teatro Liceo – Ciclo de Opera Barocca – 27 avril 2002 – version de concert – Vienne – Konzerthaus – mai 2002 – version de concert – La Capella Reial de Catalunya – Le Concert des Nations – dir. Jordi Savall – avec Furio Zanasi (Orfeo), Arianna Savall (Euridice), Montserrat Figueras (La Musica), Gloria Banditelli (Messaggiera), Adriana Fernández (La Speranza / Proserpina), Antonio Abete (Caronte), Daniele Carnovich (Plutone), Francesc Garrigosa (Apollo / Pastore), Mercedes Hernandez (Ninfa), Lambert Climent / Carlos Mena / José Antonio Carril (Pastori)

 

Brooklyn Music Association – 26 avril 2002 – Chicago Opera Theater – dir. Jane Glover – mise en scène Diane Paulus

 

Philippe BeaussantLe chant d’Orphée – mars 2002


Barcelone – Teatro de Liceu – 2, 4, 6, 8, 10, 12, 14, 16 février 2002 – La Capella Reial de Catalunya / Le Concert des Nations – dir. Jordi Savall – mise en scène Gilbert Deflo – costumes William Orlandi – chorégraphie Anna Casas – lumières Albert Faura – avec Furio Zanasi (Orfeo), Arianna Savall (Euridice), Montserrat Figueras (La Musica), Sara Mingardo (Messagiera), Cécile van de Sant (Speranza), Antonio Abete (Caronte), Adriana Fernández (Proserpina), Daniele Carnovich (Plutone), Fulvio Bettini (Apollo), Marília Vargas (Ninfa), Gerd Türk (Eco/Pastor 3/ Spirito 1), Francesc Garrigosa (Pastor 1/Spirito 2), Carlos Mena (Pastor 2), Ivan Garcia (Pastor 4/Spirito 3)

Buenos Aires – Teatro Colon – 2001 – dir. Gabriel Garrido – mise en scène Gilbert Deflo – scénographie William Orlandi – avec Victor Torres (Orfeo),, Graciela Oddone (Euridice), Gloria Banditelli / S. Moncayo (Messagiera), Adriana Fernandez (Musica), Maria Crisrina Kiehr / L. Rugiero (Speranza), Ivan Garcia (Caronte), Luciano Garay (Plutone), Alicia Borges (Proserpina), Furio Zanasi (Apollo)

L'Orfeo à Buenos Aires

Opéra de Düsseldorf – 19, 23, 26, 29, 31 octobre 2001 – Ensemble NRW für Alte Musik – Neue Düsseldorfer Hofmusik – dir. Christoph Spering – mise en scène Christoph Loy – décors Dirk Becker – costumes Michaela Barth – lumières Hans-Joachim Haas – avec Carol Wilson (La Musica, Speranza), Ludwig Grabmeier (Orfeo), Sylvia Hamvasi (Euridice), Netta Or (Ninfa), Fernando Aguilera (Pastore 1),Torsten Hofmann (Pastore 2), Martin Wölfel (Pastore 3), Jörn E. Werner (Pastore 4), Marta Marquez (Messagiera), Thorsten Grümbel (Caronte), Laura Nykänen (Proserpina), Sami Luttinen (Plutone), Bruce Rankin (Eco / Apollo)

Orfeo à Düsseldorf

Périgueux – XIe Festival International Sinfonia 2001 – Eglise de la Cité – 25 août 2001 – Opéra de Lyon – 3 octobre 2001 – Co-réalisation Festival d’Ambronay – Opéra de Lyon – version de concert – Ensemble Elyma – Coro Madrigalia – dir. Gabriel Garrido – avec Furio Zanasi (Orfeo), Gloria Banditelli (Messagiera), Betsabée Haas (Euridice), Adriana Fernandez (Musica Speranza), Ivan Garcia (Caron), Mario Ceccheti (Pastore I), Bertrand Chuberre (Pluton, Pastore IV), Alicia Borges (Proserpina), Francesco Garrigosa (Apollo, Pastore III), Fabian Schofrin (Pastore II), Bandine Staskiewicz (Ninfa), Maurizio Rossano (Spirito I), Paul-Henry Vila (Spirito II)

« Gabriel Garrido donnait quelques jours plus tard un honorable Orfeo. Si la mise en espace et la première partie, malgré de belles sinfonias, laissaient à désirer, l’enthousiasme du chef a emporté la fin vers les beautés légendaires que recèle la partition de Monteverdi. Furio Zanasi est un grand Orfeo, son dialogue avec Caron, des troisième et quatrième actes, de même que sa longue complainte finale ( Questi i campi di Tracia …), sont saisissants. » (ConcertoNet)

Buenos Aires – Teatro Colon – 28, 29 juin, 1er, 3, 5 juillet 2001 – dir. Gabriel Garrido – mise en scène Gilbert Deflo – avec Graciela Oddone (Euridice), Gloria Banditelli (Messagiera), Alicia Borges, Victor Torres (Orfeo), Garcia


Arsenal de Metz – 13 janvier 2001 – dir. Jordi Savall

 

Théâtre des Champs Elysées – 12 et 13 janvier 2001 – Les Musiciens de La Grande Ecurie et la Chambre du Roy – dir. Jean-Claude Malgoire – mise en scène Jean-Claude Malgoire, Nicolas Rivenq, Jacky Lautem – décors Nicolas Rivenq – costumes Christine Rabot Pinson – lumières Jacky Lautem – avec Chantal Perraud, Sandrine Rondot (Musica), Nicolas Rivenq (Orfeo), Hjördis Thebault (Eurydice), Sylvie Althaparro, Geneviève Kaemmerlen (Messagiera), Stéphanie d’Oustrac (Speranza), Renaud Delaigue, Bruno Rostand (Caronte), Stéphanie d’Oustrac, Laurence François (Proserpina), Bruno Rostand, Pierre Thirion-Vallet (Plutone), François Piolino, Jean-François Chiama (Apollo), Olga Pitarch (Ninfa), Rachid Ben Abdeslam, Jean-François Chiama, Pierre Evreux, Serge Goubioud, Luca Dordolo (Pastore)

 

La Hague – 6 janvier 2001 – National Reis Opera – Orfeo-koor – chef de choeur Piers Maxim – Combattimenti Consort Amsterdam – dir. Jan Willem de Vriend – mise en scène Erik Vos – décor Tom Schenk – costumes Elena Mannini – lumières Fredy Deisenroth – avec Laurence Dale (Orfeo), Johannette Zomer (Euridice, la Musica), Cécile van de Sant (Messagiera), Paul Gérimon (Caronte), Hubert Claessens (Plutone), Xenia Meijer (Proserpina), Piers Maxim (Speranza), Maarten Koningsberger (Apollo), Annelie Brinkhof (Ninfa), Piers Maxim, Bernard Loonen, Leo van der Plas, Maarten Koningsberger (Pastori, Spiriti)


Vancouver Playhouse – août 2000 – Fstival de Vancouver – dir. Paul O’Dette and Stephen Stubbs – mise en scène Steven Adby et Roger Hyams – lumières Alan Brodie – avec Suzie Le Blanc (la Musica)

Suzie Le Blanc

Chicago – Opera Theater – 2000 – dir. Jane Glover – mise en scène Diane Paulus – décors S. pask – costumes M. Neville – avec Laurence Dale Orfeo), Valérie McCarthy (Euridice), Kathleen Flynn (Messagiera), Thea Tullman (Musica), Maia Surace (Speranza), Judd Ernster (Caronte), Andrea Funk (Plutone), Jacqueline Zander (Proserpina), William Watson (Apollo)


Festival Baroque de Beaune – 1er juillet 2000 – Capella Reial – Le Concert des Nations – direction Jordi Savall – version de concert – avec Furio Zanasi (Orfeo), Ariana Savall (Euridice), Gloria Banditelli (Messagiera), Montserrat Figueras (Musica), Sylvie Althaparro (Speranza), Antonio Abete (Caronte), Daniele Carnovitch (Plutone), Francesc Garrigosa (Apollo)

 

Munich – Prinzregententheater – 14, 18, 25, 27, 30 avril 2000 – dir. Ivor Bolton – mise en scsène Freyer – avec Sophie daneman, van de Sant, Risley, Workman, Gantner

 

Théâtre de St Quentin en Yvelines21 et 22 janvier 2000 – Théâtre Municipal de Tourcoing – 8, 9 février 2000 – Dunkerque – Le Bateau Feu – 29 février 2000 – Martigues – Théâtre des Salins – 10 mars 2000 – Théâtre de Clermont-Ferrand – 16 mars 2000 – Opéra Théâtre de Besançon – 26 mars 2000 – Les Musiciens de La Grande Ecurie et la Chambre du Roy – Choeur de l’Atelier Lyrique de Tourcoing – dir. Jean-Claude Malgoire – mise en scène Jean-Claude Malgoire, Nicolas Rivenq, Jacky Lautem – décors Nicolas Rivenq – costumes Christine Rabot Pinson – lumières Jacky Lautem – avec Sandrine Rondot/Chantal Perraud (Musica), Nicolas Rivenq/François Piolino (Orfeo), Valérie Gabail/Olga Pitarch (Euridice), Sylvie Althaparro/Geneviève Kaemmerlen (Messagiera), Geneviève Kaemmerlen/Stéphanie d’Oustrac (Speranza), Renaud Delaigue/Bruno Rostand (Caronte), Stéphanie d’Oustrac/Laurence François (Proserpina), Bruno Rostand/Pierre Thirion-Vallet (Plutone), François Piolino/Jean-François Chiama (Apollo), Olga Pitarch/Valérie Gabail (Ninfa), Rachid Benabdeslam, Serge Goubioud, Laurent Slaars, Pierre Thirion-Vallet/Pierre Evreux, Jean-François Chiama, Renaud Delaigue (Pastore), Pierre Evreux (Eco), Laurence François, Jean-François Chiama/Sandrine Rondot, Sylvie Althaparro, Rachid Benabdeslam, Laurent Slaars (Ninfe)

Concertonet – 22 mars 2000

« Saluons tout d’abord l’initiative plutôt risquée : monter les trois principaux opéras de Monteverdi lors de la même saison en version scénique avec les moyens financiers limités que l’on sait (et que l’on déplore). S’il n’est pas entièrement réussi – loin s’en faut -, ce pari aura permis de montrer le dynamisme qui anime (et sauve) cette unique institution qu’est l’Atelier Lyrique de Tourcoing (en coproduction avec le Théâtre de Saint-Quentin-en-Yvelines). Le problème principal est cependant de taille : aussi agréable à regarder soit-il, le décor conçu par le chanteur Nicolas Rivenq (une nouvelle corde à son arc ?), unique et commun pour les trois spectacles finit par lasser et empêche surtout la différenciation nécessaire entre les trois opéras, annoncés à tort par l’équipe comme une trilogie, alors qu’une évolution stylistique les sépare.
Le plus grand mérite de ce projet aura été de retrouver un esprit de troupe autour de ces spectacles avec des chanteurs pour la plupart jeunes et ayant travaillé longuement avec Jean-Claude Malgoire non seulement pendant les répétitions mais aussi au cours de sessions d’études à l’Abbaye de Royaumont quelques mois plus tôt. Le résultat est tout simplement stupéfiant, permettant à la fois l’homogénéité d’une équipe et l’émergence de certains talents individuels très prometteurs.
Nicolas Rivenq se situe un peu à part dans ce contexte d’autant qu’il a pris part à la genèse de la production. Il aborde Orfeo avec une voix d’une éclatante santé avec projection et virtuosité. Il est autant convaincant en Ulysse, sombre et émouvant. Deux prises de rôle mémorables pour un chanteur à son zénith. Dans Orfeo, le rôle-titre prime sur les autres personnages, présents que sporadiquement : on notera alors certains talents qui s’imposent tout de même dans ces figures secondaires mais importantes : Olga Pitarch, musicale Eurydice, Geneviève Kaemmerlen, Messagère poignante, Stéphanie d’Oustrac, au timbre somptueux ou François Piolino, spirituel Apollon à la voix plein de promesses (il tiendra d’ailleurs le rôle d’Orfeo, le lendemain). »

Opéra International – mars 2000 – St Quentin en Yvelines – 22 janvier 2000

« Au milieu des années 1980, le tandem Jean-Claude Malgoire-Jean-Louis Martinoty avait, pour la première fois en France, proposé les trois opéras montéverdiens parvenus jusqu’à nous. En un dispositif scénographique unique, puisque transporté et tout aussitôt remonté dans des salles non vouées à l’art lyrique, cette trilogie avait permis à des publics de découvrir l’opéra, et à une jeune génération de chanteurs français de s’aguerrir dans ces répertoires alors totalement exclus de leur enseignement. Quinze ans après, le même Atelier Lyrique de Tourcoing, mais en coproduction avec le Théâtre de Saint-Quentin-en-Yvelines, remet les trois ouvrages sur le métier. Associé à Jacky Lautem et Nicolas Rivenq, Malgoire se fait également metteur en scène et poursuit le même pari scénographique itinérant : un dispositif scénique identique aux trois ouvrages, avec de simples éléments mobiles sur le plateau. L’unique décor assume donc une mission contradictoire : être suffisamment généraliste pour convenir aux trois ouvrages, et être caractérisable pour convenir à un lieu privé, à un espace public, ou aux Enfers. Ce judicieux décor consiste en deux superstructures blanches, l’une à cour et l’autre jardin, à moitié articulées, dont les découpages sont inspirés de l’Orient et qui peuvent se rejoindre pour occuper toute la largeur du plateau…La mise en scène ne s’est pas embarrassée de recherches conceptuelles sur l’Antiquité. Profondément musicale et cherchant à toucher des publics méconnaissant Monteverdi et la mythologie, elle s’est, avant tout, souciée de rendre lisible chaque intrigue, notamment grâce à des choix dramaturgiques limpides. Ces buts sont atteints.
L’autre point fort de ces soirées tient en l’attentive et pertinente direction musicale. Situé au pied de la scène (alternativement tourné vers les chanteurs, puis vers ses instrumentistes qui, tous, regardent le plateau), Jean-Claude Malgoire agit plus en coordinateur qu’en chef, suscitant les énergies improvisatoires d’un excellent continuo et portant chaque chanteur à son meilleur, tan-tôt en le conduisant,tantôt en le laissant tout à sa liberté déclamatoire. Enfin, rares sont ceux qui, comme lui, maîtrisent le parcours énergétique de chacun de ces ouvrages. Tout juste regretterons-nous que, dans Orfeo et Poppea, il ait été jugé bon de sonoriser – même très légèrement – les cordes aiguës.
Dans Orfeo, la différence entre les deux premiers actes, majoritairement madrigalesques, et les trois derniers, beaucoup plus solistiques et déclamatoires, a été bien marquée. La représentation à laquelle nous étions présentait, non l’Orfeo du baryton Nicolas Rivenq, mais celui du ténor François Piolino. De ce rôle, il a la silhouette, mais pas les notes graves (le chanteur n’est pas en cause, ses autres prestations dans les deux ouvrages le prouvent) ; sa projection vocale et son autorité scénique en souffrent. Ses meilleurs partenaires sont les deux basses infernales, Bruno Rostand (Caronte) et Pierre Thirion-Vallet (Plutone), Geneviève Kaemmerlen, émouvante Messaggiera, et un ensemble de Bergers et de Nymphes soudé et homogène. »

Amsterdama – Théâtre Carré – décembre 1999 – avec Laurence Dale (Orfeo)

 

Opéra de Houston – 1999 – dir. David Fallis – mise en scène Marshall Pynkovski – décors K. Fraser – costumes D. Rust-D’Eye – avec Daniel Belcher (Orfeo), Leslie Johnson (Euridice), Stephanie Novacek (Messagiera), Jessica James (Musica)

 

Madrid – Teatro Real – 2, 4, 5, 6, 8, 9, 11, 12, 13 octobre 1999 – dir. Jordi Savall – mise en scène Gilbert Deflo – décors, costumes William Orlandi – chorégraphie Ana Casas – production du Gran Teatre del Liceu de Barcelona – avec Pietro Spagnoli / Fulvio Bettini (Orfeo), Rosa Domínguez (Euridice), Montserrat Figueras (La Musica), Sara Mingardo (La Messagiera), Maite Arruabarrena (Speranza), Daniele Carnovich (Caronte), Gloria Banditelli (Proserpina), Alessandro Guerzoni (Plutone), Mauro Utzeri (Apollo), Gerd Türk (Pastor I), Carlos Mena (Pastor II), Francesc Garigossa (Pastor III)

Altamusica : « Savall revisite l’Orfeo à Madrid » – critique de la représentation au Teatro Reial de Madrid – 11 octobre 1999

« Les représentations vibrantes que Jordi Savall vient de diriger à Madrid, avec la complicité très agissante du metteur en scène Gilbert Deflo, compteront dans l’histoire de l’opéra montéverdien. Un choc qu’on n’espérait plus en ces temps où les lois de la mode sont tyranniques et qui rend l' »opéra des Commencements  » à son double projet musical et dramatique et au spectateur comme une virginité, dans le regard et dans l’écoute. C’est le superbe site (entièrement rénové) du Teatro Real qui accueillait cet Orfeo à hauteur d’homme, à hauteur d’âme. Un Orfeo immergé dans le paysage culturel, pictural, de son siècle (dans ce bonheur visuel, la très belle imagerie du décorateur William Orlandi a sa part) et où Deflo dilate jusqu’à l’incantation le message allégorique, magique, christique. Mais surtout, associé à cet exaltant travail sur le geste et le signe (gage d’une théâtralité qui, tout autant, questionne notre modernité), il y a le formidable engagement musical de Savall qui le complète, le parachève. À l’écoute d’un son habité qui libère le mot avec l’affetto et se fait respiration du dramma per musica ; et, également, d’un rythme primordial inspiré, tout au long de la partition et jusqu’à l’orchestre (un Concert des Nations virtuose, ému, coloré), de la parole.Sous l’autorité d’un tel intercesseur, le chœur de la Capella Reial et le concert des voix solistes sont portés à embrasement. S’agissant d’un travail d’équipe, on a scrupule à saluer tel (le) ou tel (le) protagoniste, au détriment du collectif. Distinguons pourtant l’Orphée de Pietro Spagnoli qui ne cesse pas d’être en phase avec le recitar cantando et décline vaillamment un Possente Spirto à risques. Et l’on ne saurait passer sous silence la Musica fervente de Montserrat Figueras, la Messagère enfiévrée de Sara Mingardo, saisissant  » double  » du Destin à l’acte II, la Proserpine extravertie de Gloria Banditelli, face au Pluton d’Alessandro Guerzoni qui impressionne moins que le Charon de Daniele Carnovitch, ténébreux, glacé, tellurique (et quelle formidable vision que cette caverne des Enfers, digne des confins hyperboréens tant redoutés du monde antique !). Aussi bien – et bis repetita – l’intuition de Savall fait le reste, jouant de tous les arguments du style  » d’époque  » (entre autres, un continuo improvisé, d’un soir à l’autre) ; pour nous rapprocher incroyablement de cette musique fondatrice qui palpite, telle un corps vivant, et dont l’urgence, l’unité secrète et l’intemporelle beauté défient, dans cette production inspirée, la froide logique et la raison. »

Londres – London National Opera – Coliseum – 17, 21, 29 septembre, 1er, 7, 14, 18 octobre 1999 – dir. Anthony Rolfe Johnson – mise en scène David Freeman – décors Hayden Griffin – avec John Mark Ainsley (Orfeo), Christine Rice (Messagiera), Sandra Ford (Musica), Keel Watson (Caronte), Suzannah Clarke (Euridice), Emer McGilloway (Speranza), Dean Robinson (Plutone), Alice Coote (Proserpina), Mark Padmore (Apollo), Mary Nelson (Ninfa), Henry Moss, Leigh Melrose (Spirito), Jeffrey Stewart, Mark Milhofer, Stephen Wallace, Leigh Melrose (Pastore), Henry Moss (Echo), William Purefoy, Leslie John Flanagan

 

Graz – Styriarte – 15, 17, 18, 20 juillet 1999 – dir. Antonini – mise en scène Pianca – avec Bettini, Torciani, Gloria Banditelli, Antonio Abete, Sergio Foresti

 

Festival de Munich – Prinzregentheater – 17, 17, 20, 22, 24 juillet 1999 – dir. Ivor Bolton – mise en scène et décors Achim Freyer – costumes E. Landertinger – avec John Mark Ainsley (Orfeo), Deborah York (Euridice), Heidi Brunner (Messagiera, Proserpina), Sophie Koch (Musica, Speranza), Phillip Ens (Caronte), Evert Sooster (Plutone), Claes H. Ahnsjö (Apollo)

L'Orfeo à Munich

intégrale audio – 2 CD Premiereopera

 

Graz – Styriarte – 15, 17, 18, 20 juillet 1999 – dir. Giovanni Antonini / Luca Pianca – mise en scène Georg Rootering – décors Uwe Belzner – costumes Gabi Rahm – avec Fulvio Bettini (Orfeo), Ilaria Torciani (Euridice), Gloria Banditelli (La Speranza), Antonio Abete (Caronte), Sergio Foresti (Plutone)

 

New York – Brooklyn Academy of Music – 10, 11, 12, 13 juin 1999 – dir. René Jacobs – mise en scène Trisha Brown – décors, costumes Roland Aeschlimann – avec Simon Keenlyside / Carlo Vincenzo Allemano (Orfeo), Patricia Biccire (Euridice), Palle Knudsen (Apollo), Graciela Oddone (La Musica, La Messagiera), Christopher Laporte (Speranza), Stephen Milling (Plutone), Marissa Martins (Proserpina), Anne Cambier (Ninfa)

 

Théâtre des Champs Elysées – 14, 15, 16, 17 avril 1999 – Concerto et Collegium Vocale – direction René Jacobs – mise en scène Trisha Brown – décors Roland Aeschlimann – costumes Gerd Meier – avec Simon Keenlyside / Carlo Vincenzo Alemano (Orfeo), Patricia Biccire (Euridice, Eco), Graciela Oddone (Musica, Messagiera), Christophe Laporte (Speranza), Marisa Martins (Proserpina, Ninfa), Toma Tomasson (Plutone), Paul Gérimon (Caronte), Palle Knudsen (Apollo), Christophe Laporte, Johannes Chum, John Bowen, René Linnenbank (Pastore, Spiriti)

« Il est des spectacles qui font l’Histoire sans totalement gagner le coeur. A maints égards, cette production demeurera exemplaire par sa cohérence, sa splendeur formelle, ses réelles innovations de langage. Les noces du geste et de la voix célébrées par la chorégraphe Trisha Brown sont parmi les plus convaincantes qu’il ait été donné de voir, avec un naturel dans les mouvements de groupe (organisation judicieuse du travail des choristes toujours suivis de leur maître à danser), une implication virtuose des chanteurs dans le geste absolument remarquables. Expression dansée et chantée entrent pourtant en conflit à quelques moments clés, comme la première intervention de la Messagère, d’un dramatisme trop superficiel. C’est aussi que Graciela Oddone, qui chante également le monologue de la Musique, reste terne dans la diction et le timbre (le corps, sans doute, a monopolisé son attention), autant que René Jacobs, après un très beau prologue « en stéréo » (les cuivres dans la salle), s’avère monotone dans les deux premiers actes. L’acoustique du Théâtre des Champs Elysées n’est évidemment pas de celles où s’épanouissent au mieux les articulations acérées mais sourdes du Concerto et du Collegium Vocale, mais tempo et dynamique gagnent en variété lors des actes infernaux, sans compter le supplément en couleurs apporté par un instrumentarium que Jacobs se décide alors à étoffer. Quelques hésitations de mises en place exceptées, la prestation du choeur, de l’orchestre et de ses excellents continuistes mérite tous les éloges.
Simon Keenlyside est dans cette production l’Orphée idéal. Beauté et présence physiques comme absorbées dans la contemplation maladive de soi, élégance et netteté du geste, il témoigne d’une grande probité vocale, sans disposer de la longueur de souffle et de la facilité dans l’aigu (d’où une intonation parfois approximative) qui le rendraient tout à fait mémorables. Ainsi s’efface-t-il derrière les images magiques dues à Brown et Aeschlimann (le vol de la Musique dans le Prologue, la descente aux Enfers, Pluton et Proserpine sur leur trône, l’apparition d’Apollon) qui figurent parmi les plus extraordinaires, les plus parfaites écloses sur une scène lyrique depuis de nombreuses années. » (ConcertoNet – 14 avril 1999)

Théâtre Municipal de Lausanne – 28 février, 2, 4, 5, 7 mars 1999 – Ensemble 415 – Ensemble La Fenice – Choeurs de l’Opéra de Lausanne – dir. Véronique Carrot – mise en scène Giorgio Marini – décors Edoardo Sanchi – costumes Elena Cicorella – avec Gilles Ragon / Robert Scaltriti (Orfeo), Gyslaine Waelchi (Euridice), Monica Bacelli (Messagiera), Laura Polverelli (Musica, Proserpina), Brigitte Fournier (Speranza, Ninfa), Antonio Abete (Caronte, Plutone), Alain Bertschy (Pastore I/Spirito I), Russell Smythe (Pastore II/Apollo/Spirito II), Pascal Bertin (Pastore III),


« Cette production s’appuie sur deux partis pris puissants. Par le premier, Giorgio Marini raconte une histoire mêlant, sur un pied d’égalité, hommes et dieux antiques, L’Or feo étant alors, à ses yeux, l’un des premiers parmi les innombrables futurs opéras mythologiques qui fleuriront pendant l’ère baroque autrement dit, le metteur en scène ne s’intéresse absolument pas aux pouvoirs opératoires de la musique et à la faculté – non symbolique mais efficace, et, depuis le XVème siècle, omniprésente en Europe dans les cercles artistes et savants – que, au temps de Monteverdi, aurait eue la musique de faire passer un être humain de trépas à vie. Par le second parti pris, les temps représentés pour manifester la geste d’Orfeo sont coprésents sur la scène de façon extensive et non conflictuelle, chaque temps se manifestant par ses signes esthétiques : les costumes et le décor. Les différents temps historicisés dans lesquels se déploie le travail dramaturgique, sont ici l’origine de l’homme (avec des singes hominidés parmi les figurants), l’antiquité gréco-romaine, le temps de Monteverdi, le XlXème siècle avec ce regard teinté d’exotisme et de colonialisme qu’il porta sur l’Orient, et l’époque actuelle. Quant à leur mise en oeuvre, ces deux partis pris s’appliquent avec bonheur dans les moments do l’opéra où Alessandro Striggio privilégia le fil narratif, c’est-à-dire entre la première et la seconde mort d’Euridice ; Marini y propose une dramaturgie où règne un réseau de simulacres représentatifs toujours captivants, le plus singulier et le plus réussi étant l’acte des Enfers. Mais le livret et la musique résistent dans les parties purement symboliques, mythologiques et décoratives de l’oeuvre, donc du prologue à l’arrivée de Messaggiera, puis durant tout l’acte V. L’ouvrage semble alors quelque peu flotter. Enfin, sur cette production, fort intéressante et réalisée avec une belle rigueur (les décors et les costumes y participent grande-ment), un second écueil pèse : Giorgio Marini a éludé les corps de ses interprètes, Inexplicablement, la totale absence de la danse -même dans les moments pastoraux – créé un réel vide scénique. En outre, faute de vraie direction d’acteurs, les chanteurs sont physiquement livrés à eux-mêmes. Ces défauts endommagent la cohérente conception générale de Marini.
La réalisation musicale est fort satisfaisante. Les deux ensembles instrumentaux – les cordes par l’Ensemble 415 et les vents par La Fenice – et les Choeurs de l’Opéra de Lausanne apportent une solide et colorée contribution. L’équipe de solistes est excellente. Roberto Scaltriti héroîcise son rôle et sollicite une couverture des sons qui, quelquefois, nuit à des phrasés souples et une finesse déclamatoire ; peu de choses toutefois, au regard d’une puissante stature vocale et d’un impeccable engagement dramatique. Dans leurs deux doubles rôles, Laura Polverelli (La Musica et Proserpina) et Brigitte Fournier (Speranza et Ninfa), auxquelles s’ajoute Monica Bacelli (dans celui de Messaggiera), Ces trois cantatrices convainquent totalement, tant par leurs qualités individuelles que par leurs timbres, parfaitement étalonnés pour représenter ces cinq figures féminines, portant les paroles de la Destinée. Prenant en charge les deux rôles de basse, Antonio Abete est toujours à propos : il allie profondeur du timbre et recitar cantando. Dans les divers emplois plus secondaires, Russel Smythe, Alain Bertschy et Pascal Bertin forment un trio fort homogène. Au seuil d’une carrière de directrice musicale (elle occupait jusque-là la seule fonction de chef des choeurs à l’Opéra de Lausanne), Véronique Carrot manifeste de réelles aptitudes. Aussi serait-il malséant de pointer les quelques moments où elle suit plutôt qu’elle n’empoigne la masse vocale et instrumentale qu’elle a charge de mener ; les encouragements doivent, au contraire, lui être prodigués. » (Opéra International – avril 1999)

Rio de Janeiro – 1998 – dir. Marcelo Fagerlande

 

Opéra de Lyon – 1998 – dir. Claire Gibault – mise en scène Louis Erlo – décors et costumes Gian Maurizio Fercioni – avec Gérard Théruel (Orfeo), Elsa Vacquin (Euridice), Marie-Belle Sandis (Messagiera), Marion Harousseau (Musica), Hjördis Thebault (Speranza), Jérôme Varnier (Caronte), Frédéric Caton (Plutone), Maryline Fallot (Proserpina), Bruno Ranc (Apollo)

L'Orfeo à Lyon

Aix en Provence – Théâtre de l’Archevêché – 14, 15, 18 19 juillet 1998 – Concerto Vocale – Collegium Vocale Gent – dir. René Jacobs – mise en scène Trisha Brown – scénographie Roland Aeschlimann – lumières Gerd Meyer – avec Simon Keenlyside (Orfeo), Juanita Lascarro (Euridice/la Musica/Eco), Graciela Oddone (Messaggiera), Mauro Utzeri (Apollo), Martina Dike (Proserpina), Stephen Wallace (La Speranza),Tomas Tomasson (Plutone), Paul Gérimon (Caronte), Anne Cambier (Ninfa), Stephen Wallace, Yann Beuron, John Bowen, Paul Gérimon, René Linnenbank (Pastori/Spiriti)

Juanita Lascarro

Opéra International – septembre 1998

« Cinq représentations, par René Jacobs, mis en scène par Trisha Brown avec ses danseurs, spectacle délicieux…dans une distribution très homogène, le remarquable Orfeo de Simon Keenlyside, habité, confondant de présence scénique et un vrai musicien ».

ConcertoNet – 14 juillet 1998

« Toute de teck vêtue, la scène du nouvel Archevêché offre un somptueux écrin aux décors bleu nuit de l’Orfeo mis en scène par la chorégraphe américaine Trisha Brown. La production créée à Bruxelles trouve sous le ciel aixois le cadre idéal à son ductile épanouissement. Acrobate, danseurs et chanteurs s’y côtoient avec fluidité, chaque geste magnifiant et accompagnant les ondoiements de la phrase monteverdienne. Car c’est bien la danse qui habite ce spectacle. Chaque geste est étudié, stylisé, comme en écho à l’extrême raffinement d’une musique ciselée et précieuse. Les costumes et les accessoires sont sobres, comme pour ne pas détourner un regard qui s’attache à la symbolique de l’espace et de son occupation. Parfois, on se surprend à contempler les mouvements, à se laisser détourner de la partition pourtant admirablement servie par le grand spécialiste qu’est René Jacobs. Son orchestre est en effet d’une richesse de coloris inépuisable, la spatialisation des timbres étonne et enchante. Les chanteurs quant à eux sont tous irréprochables à commencer par Simon Keenlyside qui endosse le rôle d’Orphée avec une grande noblesse, une touchante nostalgie du bonheur révolu. Cet Orfeo est donc un spectacle qui comble autant la vue que l’ouïe. Cela n’est pas si fréquent. Aussi peut-on justement s’en réjouir. »

Vienne – Wiener Festwochen – Theater an der Wien – 8, 10, 12, 14 juin 1998 – dir. Thomas Hengelbrock – mise en scène et décors Achim Freyer – costumes E. Landertinger – avec François le Roux (Orfeo), Dorothée Mields (Euridice), Heidi Brunner (Messagiera, Proserpina), Sophie Koch (Musica, Speranza), Phillip Ens (Caronte), Evert Sooster (Plutone), C.H. Ahnsjö / John Elwes (Apollo)

 

Dresde – Dresdner Musikfestspiele – Annenkirche – 22 mai 1998 – version de concert – Ensemble Tragicomedia

 

Bruxelles – Théâtre de la Monnaie – 13, 14, 15, 16, 17, 19, 20, 21, 22, 23 mai 1998 – Londres – Barbican Center – 3, 4, 5, 6 juin 1998 – Concerto Vocale – Collegium Vocale Gent – dir. René Jacobs – mise en scène Trisha Brown – scénographie Roland Aeschlimann – lumières Gerd Meyer – avec Simon Keenlyside / Carlo Vincenzo Alemano (Orfeo), Juanita Lascarro (la Musica, Euridice, Eco), Graciela Oddone (Messagiera), Martina Dike (Proserpina, Ninfa), Stephen Wallace (Speranza, Pastore, Spirito), Tomas Tomasson (Plutone), Paul Gérimon (Caronte), Mauro Utzeri (Apollo), Anne Cambier (Ninfa), John Bowen, Yann Beuron, René Linnenbank – coproduction Festival des Arts, Festival International d’Art Lyrique d’Aix-en-Provence, Trisha Brown Company, Brooklyn Academy of Music

L'Orfeo à la Monnaie
« Coproduction du Théâtre de la Monnaie avec le Kunstenfestival des Arts de Bruxelles. Ce spectacle a indiscutablement ouvert des voies nouvelles pour la dramaturgie opératique…Trisha Brown fait alterner deux types de moments : ceux où règne l’apesanteur et ceux marqués par la gravité…Le choix des chanteurs est d’une totale cohérence ; toutes ensemble, leus couleurs vocales forment une palette chatoyante, et même dans les rôles subalternes, la projection et l’art déclamatoire sont sans reproche…Deux titulaires alternent pour le rôle-titre : Simon Keenlyside et Carlo Vincenzo Allemano…La réalisation instrumentale est passionnante, notamment celle du continuo, réellement orchestré…La continuité dramatique est sans faille. » (Opéra International – août 1998)

Florence – Teatro Goldoni – 10, 12, 14, 15, 17, 18, 20, 21 mars 1998 – Concerto Vocale – dir. René Jacobs – mise en scène Luca Ronconi – scénographie Margherita Palli – costumes V. Marzot – avec Roberto Scaltriti (Orfeo), Cecilia Gasdia (La Musica, Euridice, Eco), Sara Mingardo (Messagiera, Speranza), Mario Luperi (Caronte), Marina Comparato (Proserpina), Antonio Abete (Plutone), Mauro Utzeri (Apollo).

L'Orfeo à Florence
« Ronconi imagine un spectacle pour le moins anti-conventionnel »… »la trouvaille qui a fait couler tant d’encre : du plancher surgisssent 40 000 litres d’eau, autour du catafalque d’Euridice »… »René Jacobs travaille un pied dans le passé, un dans le présent. D’un Concerto Vocale sur instruments d’époque, il tire une exécution percutante, aux rythmes incisifs »… »Roberto Scaltriti vocifère en Orfeo, Cecilia Gasdia réussit un assez bon équilibre entre intensité et respect du style »… »Sara Mingardo offre la plus belle incarnation, envoûtante en Messagiera et Speranza ». (Opéra International – mai 1998)

vidéo

http://www.youtube.com/watch?v=ty-TxQyWcF0&feature=related

Tournée de l’Arcal (Atelier de Recherche et de Création pour l’Art Lyrique) – Théâtre de Besançon (janvier 1998), Noisiel (16 et 17 janvier 1998) – Sceaux – Théâtre des Gémeaux (6 et 7 février 1998), Clamart (27 février 1998), Rennes, Saint-Etienne, Théâtre de St Quentin en Yvelines (5, 6 et 7 mars 1998), Villeparisis (15 mars 1998), Opéra de Massy (28 mars 1998), Sartrouville (31 mars 1998), Chelles (5 avril 1998), Le Perreux sur Marne (7 avril 1998) – dir. Christopher Jackson – mise en scène Christian Gangneron – scénographie Thierry Leproust – avec Hervé Lamy (Orfeo), Cyrille Gerstenhaber (La Musica, Euridice), Claire Brua (la Messagiera), Sylvia Marini (Speranza, Proserpina), Jean-Claude Sarragosse (Caronte, Plutone), Emmanuel Vistorsky (Apollo)

L'Orfeo de l'Arcal
« Tout est d’une cohérence sans faille : un passionnant et très intelligent décor, sorte de haut parallépipède tournant »… »de magnifiques costumes inspirés des tableaux de la Renaissance italienne »… »la prestation concentrée et émouvante d’Hervé Lamy : ténor aux chaudes couleurs barytonales, il convainc de bout en bout. Cyrille Gerstenhaber…fait éclore l’émotion, grâce à la pureté de son timbre et son art déclamatoire très varié »… »Le travail de Christopher Jackson soutient sans cesse l’intérêt. Ses tempi raisonnables, un continuo intelligemment orchestré, ainsi qu’un perpétuel souci de continuité dramatique se revélent fort convaincants. » (7 février à Sceaux – Opéra International – avril 1998)

Opéra de Lyon – 12, 14, 15, 16, 17, 18, 20 janvier 1998 – Annecy – 23 janvier 1998 – Roanne – 30 janvier 1998 – Atelier lyrique et Maîtrise de l’Opéra de Lyon – dir. Claire Gibault – mise en scène Louis Erlo – avec I. Fallot, Théruel / Alvaro, Hjördis Thébault / Sandis, Marilyne Fallot / Durand, Caton, Varnier, Etienne Lescroart / Ranc

 

Opera Theatre de Saint-Louis (E.U.) – 17, 19, 21, 25, 27 juin 1997 – dir. Anthony Rolfe-Johnson – mise en scène Colin Graham – décors David McLane – costumes M. Pakledinaz – avec Gregory Turay (Orfeo), Tonna Miller (Euridice), Julia Ann Wolf (Messagiera), Edward Russell (Plutone), Anthony Rolfe-Johnson (Apollo)

 

Londres – Queen Elizabeth Hall Opéra du Kent – mars 1997 – mise en scène Tim Caroll

 

Atelier lyrique de Tourcoing – mars 1997 – dir. Giardelli – avec Sophie Daneman, Gubisch, Patterson, Serge Goubioud, Jérôme Corréas

 

Amsterdam – De Nederlandse Opera – 4, 7, 9, 12, 14, 17, 19, 22, 25, 28 novembre 1996 – 11, 13, 15 et 16 juillet 1997 – dir. Stephen Stubbs – mise en scène Pierre Audi – avec John Mark Ainsley (Orfeo), Juanita Lascarro (Euridice), Brigitte Balleys (Messagiera), Brian Asawa/Michael Chance (Speranza), David Cordier (Musica), Mario Luperi (Caronte), Diana Montague/Bernarda Fink (Proserpina)

 

Turin – Teatro Carignano – dir. Corrado Rovaris – mise en scène Giorgio Marini – décors E. Sanchi – costumes E. Cicorella – avec Davide Livermore (Orfeo), Marianna Kulikova (Euridice, Musica), Gloria Banditelli (Messagiera), Maria Cristina Zanni (Speranza), Antonio Abete (Caronte), Alessandro Guerzoni (Plutone), Claudia N. Bandera (Proserpina), Furio Zanasi (Apollo)

 

Festival de la Chaise-Dieu – Théâtre du Puy en Velay – 27 et 28 août 1996 – La Cappella de San Petronio – dir. Sergio Vartolo – mise en scène Mancini – avec Alessandro Carmignati (Orfeo), Marinella Pennichi (Euridice, la Musica), Rosita Frisani (Ninfa, Messagiera, Proserpina), Patrizia Vaccari, (Speranza), Giovanni Pentasuglia (Apollo, Eco, Pastore III, Spirito IV), Carlo Lepore (Caronte), Gastone Sarti (Plutone, Pastore V), Michel van Goethem (Pastore I, Spirito I), Pietro Valguarnera (pastore II, Spirito III), Roberto Abbondanza (Pastore IV, Spirito V), Gian Luigi Maria Ghiringhelli (Spirito II), Marcello Vargetto (Spirito VI), Marco Perella (Spirito VII)


« Sergio Vartolo disposait d’un plateau guère mieux que médiocre, avec en particulier, en Orphée, un Alessandro Carmignani, sans doute musicien, mais dépourvu de couleur et inexpressif. Deux interprètes sortaient du lot : l’un des bergers, Giovanni Pentasuglia, et la Messagère de Rosita Frisani, voix richement timbrée et sens dramatique naturel. » (Opéra International – octobre 1996)

Coliseum de Londres – avril 1996 – dir. Nicholas Kok – mise en scène David Freeman – décors H. Griffin – costumes Hartwell – avec Guy de Mey (Orfeo), Yvonne Barclay (Euridice), Sarah Connolly (Messagiera), Brian Matthews (Caronte), Nerys Jones (Proserpina), Adrian Thompson (Apollo), Elizabeth Woollett

 

Palerme – Teatro Massimo – 1996 – dir. Gabriel Garrido – mise en scène Gilbert deflo – décors William Orlandi – avec Victor Torres (Orfeo), Marie Luce Erard (Euridice), Gloria Banditelli (Messagiera), Maria Cristina Kiehr (Musica), Antonio Abete (Caronte), Roberta Invernizzi (Proserpina)

 

Varsovie – 1995 – Festival Baroque

 

Londres – Trinity College of Music – novembre 1995

 

Pise – novembre 1995

 

Ravenne – 1995 – avec Valentina Valente (Messagiera)


Opéra de Kiel – 2, 11, 15 et 20 juin 1995

 

Amsterdam – De Nederlandsee Opera – 5, 8, 11, 13, 16, 18, 21, 24, 26, 28, 31 mai 1995 – dir. Stephen Stubbs – mise en scène Pierre Audi – décors Michael Simon – costumes Jorge Jara – avec Howard Crook (Orfeo), Agnès Mellon (Euridice), Doris Lamprecht (Messagiera), David Cordier (Musica), Brian Asawa (Speranza), Bernarda Fink (Proserpina), Mario Luperi (Caronte), John Elwes (Apollo)

Orfeo à Amsterdam
« Avec L’Orfeo, Pierre Audi termine son cycle montéverdien, avec une réussite inférieure aux deux précédents volets. La mise en scène du directeur de l’Opéra d’Amsterdam n’est pas en cause, non plus que les décors de Michael Simon ou les costumes d’un goût oriental de Jorge Jara. C’est le protagoniste, par définition essentiel ici, qui appelle des réserves. Le rôle d’Orfeo, on le sait, exige beaucoup, à commencer par une projection naturelle du récitatif et une virtuosité capable d’évoquer la figure du plus grand chanteur de la mythologie. Techniquement, scéniquement, Howard Crook se montre à la hauteur, mais son timbre est par trop dépourvu de charisme et de séduction. Autour de lui, Stephen Stubbs a réuni une équipe de spécialistes de la musique ancienne : de petites voix, donc, consciencieuses mais pauvres, dépourvues d’imagination dans le phrasé et d’émotion dans l’accent. Trois exceptions : Mario Luperi (Caronte), Doris Lamprecht (Messagiera) et Bernarda Fink (Proserpina), nettement plus intenses et plus impliqués dans le déroulement de la fa vola. Les choeurs sont également somptueux, mais Stephen Stubbs n’obtient pas de ses solistes et instrumentistes, une variété suffisante dans le tempo, les jeux de clairs-obscurs chers à Monteverdi paraissant systématiquement occultés. Trop lente, sa lecture finit par détruire la fragile unité de la partition, devenue une suite de séquences sans véritable fil conducteur. » (Opéra International – juillet/août 1995)

Bruxelles – Théâtre de la Monnaie – Tricentenaire de la Monnaie – Gala d’ouverture – 12 janvier 1995 – en version de concert – Concerto Vocale – dir. René Jacobs – avec Laurence Dale (Orfeo), Efrat Ben Nun (Musica, Euridice), Bernarda Fink (Messagiera, Proserpina), Paul Gérimon (Caronte), Gregory Reinhart (Plutone), Andreas Scholl (Speranza), Geert Smits (Apollo), Lynton Atkinson (Eco), Maria Cristina Kiehr (Ninfa)

 

Amsterdam – juin 1994 – Festival de Hollande – dir. Marc Minkowski

 

Venise – La Fenice – 18, 20 et 22 mai 1994 – dir. René Clemencic – mise en scène Gilbert Deflo – avec Titus, Donose, Banditelli, Hölle, Pertusi

 

Avignon – Opéra – 27 et 29 mars 1994 – dir. Marc Minkowski – mise en scène Pascal Paul-Harang – avec Theruel, Michel Marquez, Bernardi, Wotjtek Smilek, Smith, Cécile Eloir

 

Birmingham – Opera School – mars 1994

 

Londres – Bach Festival – 1994 – dir. Howard Williams – mise en scène Lina Lalandi – décors et costumes Peter Rice – avec Russell Smythe (Orfeo), Marylin Hill Smith (Euridice), Della Jones (Messagiera), Alan Fairs (Caronte), Graeme Broadbent (Plutone), Janet Shell (Proserpina)

 

Opéra de Nancy – 7, 9, 11 et 13 novembre 1993 – dir. Marc Minkowski – mise en scène Pascal Paul-Harang – scénographie Bernard Salfatti – costumes R. Varda – avec Anna Caterina Antonacci (la Musica, Euridice, Speranza), Russel Smythe (Orfeo), Cécile Eloir (Messagiera, Proserpina), Wotjtek Smilek (Plutone), Jérôme Varnier (Caronte), Michel Marquez, Jean-Louis Meunier (Apollo, Berger), Pascal Desaux (Berger)

L'Orfeo à Nancy
« Côté idéal Pascal Paul-Harang a rêvé d’un Orphée, héros solaire, vivant dans un Orient inlocalisable. Le dispositif scénique permanent présente un espace hémisphérique incurvé, à mi-chemin entre un amphithéâtre antique et ce lieu public où les Athéniens (ici les compagnons d’Orphée) inventèrent la démocratie et, donc, la doxa, l’opinion publique…Les lumières présentent un partage manichéen entre monde solaire et monde nocturne. Les costumes de Rosalie Varda proposent un Orient syncrétique où se télescopent les Balkans, le Tibet et le Japon, et les Incas. Cette production est une réussite convaincante. Pascal Paul-Harang fait des débuts remarquables dans l’univers lyrique. La profondeur et la cohérence de sa démarche s’imposent d’emblée…Marc Minkowski n’est pas en reste, dirigeant son premier Orfeo avec une liberté de ton, une urgence expressive et une acuité dramatique sans faille. Une distribution tres homogène est dominée par l’Orphée de Russel Smythe, jeune baryton au timbre lumineux et à l’indéniable rayonnement scénique. Quant aux autres chanteurs, ils dessinent fort opportunément leur (s) personnage (s) et sont aussi adroits vocalement que scéniquement, Anna Caterina Antonacci (la Musique / Euridice), Jean-Louis Meunier et Pascal Desaux (deuxieme et troisieme bergers) notamment. » (Opéra International – décembre 1993)

New York City – Church of St. Mary the Virgin – 4, 5, 6, 7 novembre 1993 – Ensemble Artek – dir. Gwendolyn Toth – avec Jeffery Thomas (Orfeo), Dana Hanchard (Euridice, la Musica), Jessica Tranzillo (Ninfa, Proserpina), Jennifer Lane (Messagiera, Speranza, Pastore), Timothy Leigh Evans (Pastore, Spirito), Michael Brown (Apollo, Pastore, Spirito, Eco), Paul Shipper (Caronte, Plutone, Pastore)


Festival de Salzbourg – Residenzhof – 27 et 30 juillet, 3, 5, 9, 11, 17, 22, 24 et 26 août 1993 – dir. René Jacobs – mise en scène et décors Herbert Wernicke – avec Laurence Dale (Orfeo), Monica Bacelli (Euridice), Deebora Veronesi (Messagiera, Speranza), Susan Graham/Monica Bacelli (Musica), Jules Bastin (Caronte), Reinhard Hagen (Plutone), Therese Feighan (Proserpina), Nicolas Rivenq (Apollo)

L'Orfeo à Salzbourg
« Herbert Wernicke ne résiste pas à la tentation de transposer l’Orfeo à notre époque…La référence à la cour de Mantoue impose un jeu risqué de travestissement : protagonistes en smoking, abondance de miroirs…La partition se déroule avec fluidité, servie par un plateau remarquablement homogène réuni autour de Laurence Dale, où seul Jules Bastin pourrait détoner si la mise en scène ne venait à son secours pour l’intégrer à l’ensemble. » (Opéra International – octobre 1993)

Liceu de Barcelone 20, 23, 25, 27, 29, 31 mai 1993 – Concert des Nations – La Capella Reial de Catalunya – dir. Jordi Savall – mise en scène Gilbert Deflo – décors William Orlandi – chorégraphie Nadejda Loujine – avec Mark Tucker (Orfeo), Montserrat Figueras (Euridice, la Musica), Jennifer Larmore (la Messagiera), Bernarda Fink (Speranza), Daniele Carnovitch (Caronte), Allison Browner, Inaki Fresan (Plutone)

L'Orfeo à Barcelone
« Encadré par le choeur des bergers à chaque extrémité du plateau, l’univers de l’Orfeo fait appel à des références picturales à la fois néo-classiques et romantiques….Ce spectacle sobre et élégant sert d’écrin à l’une des meilleures exécutions pusicales possibles…La prestation de Jennifer Larmore en Messagiera a soulevé l’enthousiqasme…Montserrat Figueras, dans Euridice et la Musica, déploie le type même de vocalité qu’on a pris l’habitude d’entendre dans ce type de répertoire. L’Orfeo de Marck Tucker, peu à l’aise dans le grave, n’a peut-être pas assez de chatoyance dans l’émission…L’acteur en revanche est convaincant…D’une grande efficacité le Caronte de Daniele Carnovitch, ainsi que le Plutone d’Inaki Fresan…La chorégraphie de Nadejda Loujine apporte aux danseurs la grâce et l’élégance de la gestuelle dans la grande tradition du ballet du début du XIXe siècle. » (Opéra International – juillet/août 1993)

Tours – Florilège Vocal – 25 mai 1993 – dir. Jürgens – avec John Elwes

 

Lucerne – Stadttheater – 1993 – dir. Jan-Willem de Vreind – mise en scsène Philip Himmelmann – décors et costumes Bettina Munzer – avec Jon G. Goldsworthy (Orfeo), Regina Nathan (Euridice, Musica), Irène Friedli (Speranza), Grzegorz Rozycki (Caronte), Julian Hartman (Plutone), Caroline Thomas (Proserpina), Ludovic Tézier (Apollo)

 

Opéra de Longbeach – 1993 – dir. Steven Sloane – mise en scène Christopher Alden – décors Peter Harrison, Eugenie Krager, Heather Carson – avec Leroy Villaneuva (Orfeo), Charlotte Hellekant (Euridice)


Coliseum de Londres – 1992 – dir. Harry Bicket – mise en scène David Freeman – décors H. Griffin – costumes Hartwell – avec Anthony Rolfe-Johnson (Orfeo), Sally Burgess (Messagiera), Jennifer Smith (Musica), Neil Jenkins (Apollo)

 

Londres – Elizabeth Hall – 1992 – dir. Philip Pickett – version de concert – avec John Mark Ainsley (Orfeo), Julia Gooding (Euridice), Catherine Bott (Messagiera, Musica, Proserpina), Simon Grant (Caronte), Michael George (Plutone), Andrew King (Apollo)

 

Oslo – Festival d’été – 1992 – dir. Andrew Parrott – mise en scène Simon Target – décors John Senczuk – avec Joseph Cornwell (Orfeo), Helène Jarlsrud (Euridice), Emily van Evera (Messagiera), Hanne Mari Orbaek (Musica), Mona Julsrud (Speranza), Gudjon Oskarsson (Caronte), Njal Sparbo (Plutone), Trude Cecilie Knutsen (Proserpina), Andrew King (Apollo)

 

Beaune – Festival International de Musique Baroque – 27 juin 1992 – dir. Andrew Parrott – version de concert – avec Joseph Cornwell (Orfeo), Helène Jarlsrud (Euridice), Emily van Evera (Messagiera), Hanne Mari Orbaek (Musica), Mona Julsrud (Speranza), Gudjon Oskarsson (Caronte), Njal Sparbo (Plutone), Trude Cecilie Knutsen (Proserpina), Andrew King (Apollo)

 

London Coliseum – mars 1992 – dir. Harry Bicket – mise en scène David Freeman – avec Anthony Rolfe Johnson (Orfeo), Marie Angel, Sally Burgess, Michael Druiett, Christine Botes, Neil Jenkins, Christopher Robson

 

Montpellier – Opéra Berlioz – 15 juillet 1991 – version orchestrée par Bruno Maderna en 1967 – Orchestre Philarmonique de Montpellier – dir. Ingo Metzmacher – mise en scène René Koering – décors Pace – costumes Jin Abé – avec Motti Kaston (Orfeo), Rié Harmada (Euridice, Musica), Béatrice Uria-Monzon (Messagiera), Anne-Sophie Schmidt (Speranza), Sylvie Sullé, Jean-Philippe Courtis (Caronte), Laurent Naouri (Apollo), Lionel Sarrazin (Plutone), Thierry Trégan

Orfeo à Montpellier
« Avec une formation musicale très colorée et variée, l’Orfeo retrouve son air de fête…la scénographie de René Koering sait très judicieusement conjuguer modernité et ingénuité, rigueur et délire dans un spectacle où la liberté et le plaisir reprennnent enfin leurs droits…Il est en revanche plus difficile d’accepter une distribution dans laquelle à côté d’éléments remarquable (Béatrice Uria-Monzon) ou pour le moins intéressants (Anne-Sophie Schmidt, Rié Hamada), une place de choix est laissée à des chanteurs tout à fait étrangers à ce type de répertoire…(tels) l’Orphée plus que tâcheron de Motti Kaston ou le Charon de Jean-Philippe Courtis au creux toujours aussi artificiel ».

Oviedo – 19 et 21 septembre 1990 – dir. Cleobury – mise en scène Plaza – avec Davis, Randle, Thomas, Bowman, Tucker, Robson

 

Palais Ducal de Mantoue – 1990 – dir. Claudio Gallico – mise en scène Beppe Menegatti – décors et costumes Carlo Savi – avec Mark Tucker (Orfeo), Silvia Pozzer, (Euridice), Marinella Pennichi (Musica), Paola Patti Fornasari (Speranza, Proserpina), Gregory Reinhardt (Caronte)

 

Festival de Salzbourg – 30 juillet 1990 – dir. John Eliot Gardiner – version de concert – avec Anthony Rolfe-Johnson (Orfeo), Lynne Dawson (Euridice, Musica), Alison Browner (Messagiera), Derek Lee Ragin (Speranza), Alastair Miles (Caronte), Willard White (Plutone), Guillemette Laurens (Proserpina), Edgar Fleet (Apollo)

 

Palais Garnier – 9 mars 1990 – Anvers – 17, 18, 20, 21, 23, 24 février 1990 – dir. Philippe Herreweghe – mise en scène Isabelle Pousseur – avec Gloria Banditelli (Messagiera), John Elwes (Orfeo), Agnès Mellon (Euridice), Vincent Bouchot, Jean-Louis Paya, Gianpaolo Fagotto (Apollo), David Thomas (Caronte)

 

Opéra de Montpellier – 11 mai 1989 – dir. Philippe Herreweghe – mise en scène Isabelle Pousseur – scénographie Michel Boermans – avec Monique Zanetti (Musica), Gianpaolo Fagotto (Apollo), Miriam Ruggieri (Proserpina), Martin van de Zeijst, John Elwes (Orfeo), Agnès Mellon (Euridice), Vincent Bouchot, Bernard Deletré (Plutone), Gloria Banditelli (Messagiera), Camille Crèvecoeur (Speranza), David Thomas (Caronte), Jean-Louis Paya

« Une fois passés la surprise et l’agacement du premier acte, on se prend au jeu…Du côté des chanteurs, on reste émerveillé devant leur capacité à faire vivre leur voix en dépit du carcan qui leur est imposé. John Elwes donne au rôle d’Orphée toute sa densité : la géométrie mouvante du recitar cantando n’a pas de secrets pour lui. Gloria Banditelli en Messagère est merveilleuse : son apparition au deuxième acte est le seul véritable moment de théâtre, et son beau mezzo convient parfaitement à l’univers baroque…Le travail qu’a réalisé Philippe Herreweghe est plus que convaincant…le groupe des continuistes en particulier a véritablement soutenu l’opéra. » (Opéra International – juin 1989)

Toronto – Opéra Atelier – 1989 – dir. David Fallis – mise en scène Brad Walton – décors Gerard Gauci – avec Emilio Roman (Orfeo), Julianne Baird (Euridice), Rosa Anthony (Messagiera), Allan Fast (Speranza), Gordon McLeod (Plutone)

 

Milwaukee – Skylight Opera – novembre 1988 – avec Tony Boutte, ténor (Orfeo)

 

Opéra de Lyon – Auditorium Maurice Ravel – 11, 13, 17 et 19 mars 1988 – Orléans – 25 et 27 mars 1988 – dir. Michel Corboz – mise en scène Claude Goretta – Yvon Gérault – décors Jacques Bufnoir – costumes Gabriella Pescucci – chorégraphie Maryse Delente – avec Colette Alliot-Lugaz (Euridice, Speranza), Consuelo Caroli (Proserpina), Jean-Loup Charvet, Brigitte Desnoues, Francis Dudziak (Apollo), Michel Fockenoy, François Le Roux (Orfeo), René Schirrer (Caronte, Plutone), Nathalie Stutzmann (Messagiera), Elisabeth Vidal (Musica)

 

Dresde – 1987 – Festival de Dresde

 

Londres – Proms – juillet 1986 – avec Guy de Mey (Orfeo)

 

Genève – Grand Théâtre – 1986 – dir. Michel Corboz – mise en scène Claude Goretta – décors Jacques Bufnoir – costumes Gabriella Pescucci – avec Gian Quilico (Orfeo), Audrey Michael (Euridice, Speranza), Susan Quittmeyer (Messagiera), Bernarda Fink (Musica, Proserpina), Thomas Hampson (Apollo), Alfredo Zanazzo (Caronte, Plutone)

 

Dallas – Majestic Theatre – 1986 – dir. Nicola Rescigno – mise en scène Luciana Novaro – décors Peter J. Hall – avec Patrick Wroblewski (Orfeo), Katherine Luna (Euridice), Sheila Barnes (Messagiera), Margaret Jane Wray (Musica, Speranza)

 

Londres – Whitehall – décembre 1985 – version de concert – dir. John Eliot Gardiner

 

Festival d’Aix en Provence – 15, 18, 20, 24, 27 juillet 1985 – dir. Michel Corboz – mise en scène Claude Goretta – décors Jacques Bufnoir – costumes Ph. Hutinet – chorégraphie Maryse Delente – avec Gian Quilico (Orfeo), Audrey Michael (Euridice, Speranza), Carolyn Watkinson (Messagiera), Colette Alliot-Lugaz (Musica), François Le Roux (Apollo), Frangiskos Voutsinos (Caronte, Plutone), Danièle Borst (Proserpina) – cette version a été filmée par Gaumont

L'Orfeo à Aix
« Le réalisateur Claude Goretta a choisi un décor lunaire, quelques dunes qui se déplacent de temps à autre devant un grand fond de ciel qui prendra tour à tour des couleurs violentes… Il se débarrasse des choeurs en les envoyant dans la fosse. Sur la scène évoluent gracieusement chanteurs et danseurs, tous jeunes et beaux, drapés à l’antique…On ne reconnait pas Corboz dans cete direction heurtée par instants, molle souvent dans l’articulation, avec un Orchestre de l’Opéra de Lyon emprunté…Gino Quilico a la voix d’un Orphée, mais pas celui de Monteverdi….Carolyn Watkinson, dans un mauvais jour, a déçu… » (Opéra International – septeembre 1985)

Colmar – 21 mars 1985 – reprise de l’adaptation de Luciano Berio – dir. Dini Ciacci – mise en scène Angelo Savelli – avec Mario Bolognesi (Orfeo), Margot Pares-Reyna, Sophie Marin Degor, Marie Claude Vallin, Armelle de Frondeville, Xavier Tamalet, Salas

« L’intégralité de l’Orfeo de Monteverdi, mais transcrit pour des orchestres d’harmonie, un ensemble d’instruments rock, bandes magnétiques, un ensemble de mandolines et un petit ensemble de musique ancienne…Puissament sonorisée, la musique de Monteverdi envahit l’espace, rutilante…la traduction scénique est plus laborieuse…une distribution excellente dans l’ensemble. » (Opéra International – mai 1985)

Rome – octobre 1984 – dir. Roger Norrington – avec Guy de Mey (Orfeo)

 

Bruges – juillet 1984 – Festival des Flandres – dir. Andrew Parrott

 

Florence – Palazzo Pitti – Mai Musical – 30 juin 1984 – adaptation de Luciano Berio – mise en scène Pier Luigi Pizzi – avec Peter Knapp (Orfeo), Kimball Wheeler (Euridice, Speranza), Adriana Cicogna (Messagiera), Elena Pierini (Musica), Francesco Ruta (Caronte), (Plutone), Gloria Banditelli (Proserpina)

L'Orfeo à Florence
« Ce qui nous a le plus fasciné a été le splendide final totalement inventé par Berio. Orfeo meurt déchiré par les Furies, représentées ici par une horde de motocyclistes poussiéreux, couverts de boue, qui font vrombir leurs motos sur une musique dans la lignée de John Cage » (Opéra International – septembre 1984)

Florence – Palazzo Vecchio – 18, 20, 22, 23 juin 1984 – Rome – 5 octobre 1984 – Early Opera Project – dir. Roger Norrington – mise en scène Lawrence – scénographie Terence Emery – coproduction Early Opera Project – Accademia Filarmonica Rome

« L’aspect visuel était fort réussi…Il était tout à fait évident que l’on assistait à une représentation d’un mythe archi-connu, destiné à un public raffiné…la réalisation musicale de Roger Norrington utilisait des instruments anciens. » (Opéra International – décembre 1984)

Coliseum de Londres – 6, 13, 15, 17, 20 octobre 1983 – dir. Peter Robinson – mise en scène David Freeman – avec Laurence Dale (Orfeo), Marie Angel (Euridice, Speranza), Rosanne Creffield (Messagiera, Proserpina), Richard Angas (Caronte, Plutone), Nigel Rogers (Apollo)

 

Théâtre National de Chaillot – 4 février, 10, 11, 13, 16, 17, 19, 20, 25, 27, 30, 31 mars, 2, 6, 8, 9, 16, 17, 20, 21, 23, 24 avril 1982 – dir. Charles Ravier – mise en scène Antoine Vitez – décors et costumes Claude Lemaire – chorégraphie Milko Sparemblek – avec Michel Philippe (Orfeo), Thérèse Cadelle (Euridice), Magali Damonte (Messagiera), Hélène Garetti (Musica), Martine Mahé (Speranza), Fernand Dumont (Caronte), Jean-Philippe Courtis (Plutone), Jacqueline Mayeur (Proserpina), Malcolm Walker (Apollo), Ringart, T’Hézan, Walker, Nirouet, Jean, Gautier, Ottevaere, Fithian, Quillevéré, Gardeil, Scappaciati – coproduction Teatro alla Scala de Milan – Opéra de Paris – Théâtre National de Chaillot

« Aucune vie dans cette salle circulaire »… »tout est morne et glacial »… »le rêve d’Orphée devient, hélas, le cauchemar du spectateur qui cherche à fuir…cette musique écorchée vive par un chef hésitant et des musiciens égarés, et rendue exsangue par des chanteurs ignorants de la moindre règle de l’ornementation baroque… » (Opéra International – avril 1982)

Coliseum de LondresNottingham – 1981 – dir. John Eliot Gardiner – mise en scène David Freeman – décors Griffin – costumes Hartwell – avec Anthony Rolfe-Johnson (Orfeo), Patricia O’Neill (Euridice), Della Jones (Messagiera), Jennifer Smith (Musica), John Tomlinson (Caronte), Richard Angas (Plutone), Diana Montague (Proserpina), Laurence Dale, Christopher Robson, Penelope McKay, Nigel Robson

 

Londres – 1981 – en anglais (traduction Anne Ridler)

 

Opéra de Hanovre – 1980

 

Munich – Nationaltheater – 1980

 

Opéra de Lyon – 1980 – dir. Claire Gibault – mise en scène Gaston Benhaim – décors et costumes Christine Marest – avec Lajos Kozma (Orfeo), Danielle Borst (Euridice), Mararita Zimmermann (Messagiera), Colette Alliot-Lugaz (Musica), Anne-Marie Grain (Speranza), Pali Marinov (Caronte), Alvaro Malta (Plutone), Michèle Lagrange (Proserpina), Léonard Pezzino (Apollo)

 

Wiesbaden – mai 1979 – Zurich – juin 1979 – mise en scène Jean-Pierre Ponnelle

 

New York – Juilliard School – 1er, 3, 4 février 1979 – dir. Peter Herman Adler – mise en scène Sandro Sequi

 

Opéra de Zürich – Hambourg – Vienne – Edimbourg – Berlin – Milan – 1978 – dir. Nikolaus Harnoncourt – mise en scène et décors Jean-Pierre Ponnelle – costumes P. Halmen – avec Philippe Huttenlocher (Orfeo), Reingard Didusch (Euridice), Glenys Linos (Meaasgiera, Proserpina), Trudeliese Schmidt (Musica, Speranza), Hans Franzen (Caronte), Werner Gröschel (Plutone), Roland Hermann (Apollo)

 

Buenos Aires – Teatro Colon – 1978 – dir. Bruno D’Astoli – version de concert – avec Angel Mattiello (Orfeo), Myrtha Gerbarini (Euridice), Marilu Anselmi (Messagiera), Lucia Boero (Musica, Speranza), Victor de Narke (Caronte), Mario Salomonoff (Plutone), Maria Rosa Farré (Proserpina)

 

Melbourne – Princess Theatre – en anglais – dir. Richard Divall – mise en scène Robin Lovejoy – décors Maree Menzel – avec Ian Cousins (Orfeo), Halina Nieckarz (Euridice, Musica), Janet Dawson (Messagiera), Hartley Newnham (Apollo)

 

Collegiate Theater – Kent – 1977 – en anglais – dir. Roger Norrington – mise en scène Jonathan Miller – décors Bernard Culshaw – avec Peter Knapp (Orfeo), Jean Temperley (Euridice), Rosalind Plowright (Messagiera), Rosemary Hardy (Musica), Kenneth Francis (Caronte), Gloria Jennings (Proserpina)

 

Anvers – Opéra des Flandres – 1977 – dir. José van Immerseel – mise en scène Jef van Hemmeldonck – avec Marius van Alterna (Orfeo), Maria Halasz (Euridice), Mireille Capelle (Messagiera), Liane Jespers (Musica), René Jacobs (Speranza), Francisco Vergara (Caronte), Matthias Hölle (Plutone), Maria Verhaert (Proserpina), Franz van Etvelt (Apollo)

 

Mazamet – Grand Temple – 1976 – version Edward H. Tarr – dir. Michel Corboz – avec Philippe Huttenlocher, U. Speckelsen, H. Schaer, John Elwes, M. Brodard, L. Pezzino

 

Hellbrunn – près Salzbourg – 1976 – Capella Academica – Les Ménestrels – dir. Ernst Märzendorfer – mise en scène O.-F. Schuh – décors M.-L. Walek – avec G. Hornik, M. Lambriks, N. Ihara, H. Bömches, W. Kraütler, M. Nessel

 

Bath – 1976 – Festival de Bath – dir. Roger Norrington – mise en scène Jonathan Miller – avec Peter Knapp, Rosalind Plowright, Jean Temperley, Brian Burrows, Robert King, Patricia O’Neill, Gloria Jennings, Wynford Evans, David Clyde, William Mason, Nigel Beavan, Eric Roberts

 

Opéra d’Amsterdam – 1976 – dir. et adaptation Nikolaus Harnoncourt – mise en scène Filippo Sanjust – avec Lajos Kosma, C. Harvey, L. Maxwell, B. Valente, L. Wisser, Philip Langridge, J. Veeninga, P. Bindels

 

Bruxelles – La Monnaie – Petite Salle – 23, 25, 27, 28, 30 décembre 1975, 16, 18, 21, 22 septembre 1976 – Orchestre symphonique et choeur de La Monnaie – dir. Ernest Maes – mise en scène Isa Huisman – décors et costumes Joëlle Roustan et Roger Bernard – lumières Roger Bernard – avec Guy De Mey (Orfeo), Mariette Kemmer (Euridice, Eco), Leona Gordon (Musica), Katarina Moesen (Ninfa, Proserpina), Joep Weijs (Pastore I, Spirito I), Hartmut Schmiedner (Pastore II, Spirito III), Patrick Meroni (Pastore III, Plutone), Paul Gérimon (Pastore IV, Caronte), Nuala Willis (Messagiera, Speranza), Christopher Blades (Spirito II, Apollo)


Oxford – 1975 – en anglais (traduction Anne Ridler)

 

Opéra de Zürich – 1975 – dir. et adaptation Nikolaus Harnoncourt – mise en scène Jean-Pierre Ponnelle – avec Philippe Huttenlocher (Orfeo), Reingard Didusch (Euridice), Trudeliese Schmidt (Musica, Speranza), Hans Franzen (Caronte), Werner Gröschel (Plutone), Peter Keller (Apollo), C. Berthold, M. Cousins, G. Caballero

Orfeo à Zurich

Festival de Vaison-la-Romaine – 1974 – dir. Michel Corboz – version de concert – avec Philippe Huttenlocher (Orfeo), Danielle Borst (Euridice), Béatrice Haldas (Messagiera), Wally Staempfli (Musica), Jennifer Smith (Speranza, Proserpina)

 

Lisbonne – Auditorio – 1973 – version Edward H. Tarr – dir. Michel Corboz – mise en scène Sandro Sequi – décors Alfredo Silbermann – avec Lajos Kosma, Danièle Borst, C. Perret, J. Aguiar, A. Malta, F. Serafim, J. Smith, H. Schaer

 

Opéra de Lyon – 1973 – version August Wenzinger – dir. Teodor Guschbauer / Claire Gibault – mise en scène Gaston Benhaim – décors et costumes Christine Marest – chorégraphie Roberet Thomas – avec Eric Tappy (Orfeo), Colette Alliot-Lugaz (Euridice), Emmy Greger (Messagiera), Evelyne Brunner (Musica, Proserpina), Clara Wirz (Speranza), Gerg Pappas (Caronte), François Loup (Plutone), Schuyler Hamilton (Apollo)

L'Orfeo à Lyon

San Francisco – 1972

 

Mantoue – Teatro Accademica – 1972 – mise en scène F. Crivelli – avec Claudio Desderi (Orfeo), Maria Minetto, C. Vilalta, Carlo Gaifa, G. Sarti, James Loomis, E. Fissore, C. Cadelo

 

Nantes – Maison de la Culture – 1971 – dir. Lajos Solesz – mise en scène Jean Zierrat – décors et costumes Joël Dabin – avec Jacques Herbillon (Orfeo), Simone Coudinas (Messagiera, Musica, Speranza, Proserpina), Pierre Thau (Caronte, Plutone)

 

Tokyo – 1971 – en japonais

 

Festival de Salzbourg – Manège des Rochers – 1971 – version Eric Kraack – dir. Bernhard Conz – mise en scène et chorégraphie Heinrich Wendel – décors et costumes Jan Skalicky – avec Giorgio Zancanaro (Orfeo), Maria Maddalena (Euridice), Carol Smith (Messagiera, Proserpina), Gabriella Carturan (Musica), Anton Diakov (Caronte, Plutone), Paul Esswood (Apollo)

 

Bruxelles – La Monnaie – Petite Salle – 12, 16, 19, 23, 26 juin 1970 – version Bruno Maderna – Orchestre symphonique et choeur de La Monnaie – dir. Georg Reinwald – mise en scène Lode Verstraete – décors et costumes Joëlle Roustan et Roger Bernard – lumières Roger Bernard – chorégraphie Christian Uboldi – avec Ghislaine Morèze (La Musica, Ninfa I, Spirito I ), Dolores Crivellari (Euridice, La Speranza, Eco), Christiane Lemaître (Ninfa II), Jeanne Chanoine (La Messaggiera, Proserpina), Jacques Urbain (Pastore I, Apollo, Spirito II), Peter-Christoph Runge, baryton (Orfeo), Claude Mansy (Pastore II, Plutone), Jules Bastin (Pastore III, Caronte, Spirito III)

 

Palermo – Teatro Massimo – 1969 – dir. David Machado – avec Aleardo Corbetta (Orfeo), Elisabetta Jaroszwiecz (Euridice), Elisabetta Schubert (Messagiera),

 

Bruxelles – La Monnaie – Petite Salle – 25, 26, 27, 28, 30 septembre, 1er, 2 octobre 1969 – version Bruno Maderna – dir. Bruno Maderna – mise en scène Lode Verstraete – décors et costumes Joëlle Roustan et Roger Bernard – lumières Roger Bernard – chorégraphie Christian Uboldi – avec Claudine Arnaud (La Musica, Ninfa I, Spirito I ), Dolores Crivellari (Euridice, La Speranza, Eco), Christiane Lemaître (Ninfa II), Jocelyne Taillon (La Messaggiera, Proserpina), Jacques Urbain (Pastore I, Apollo, Spirito II), Peter-Christoph Runge, baryton (Orfeo), Nicolas Christou (Pastore II, Plutone), Jules Bastin (Pastore III, Caronte, Spirito III)

 

London Coliseum – mars 1969 – dir. Raymond Leppard – mise en scène Patrick Libby – avec John Wakefield, Margaret Neville, Patricia Kern, Harold Blackburn, Anne Evans, Emile Belcourt, Gillian Knight, Francis Egerton, Stafford Dean

 

Munich – Cuvilliès Theater – 1968 – version August Wenzinger – dir. Matthias Kuntzsch – mise en scène Rudolf Hartmann – décors et costumes Thierry Bosquet – avec Adolf Dallapozza (Orfeo), Antonie Fehberg (Euridice), Gudrun Wewezow (Speranza), Hans N. Nissen (Caronte), Max Proebstl (Plutone), Hanny Steffek (Proserpina), Horst Hoffmann (Apollo)

L'Orfeo à Munich

Londres – Sadler’s Wells – 1968 – adaptation et dir. Raymond Leppard – mise en scène Frank Hauser – décors et costumes Yolanda Sonnabend – avec John Wakefield (Orfeo), Margaret Neville (Euridice), Patricia Kern (Messagiera), Anne Evans (Musica), Noël Mangin (Caronte), Stafford dean (Plutone), Ann Howard (Proserpina), Francis Egerton (Apollo)

 

Venise – Palazzo Ducale – 1968 – version Bruno Maderna – dir. Eugenio Bagnoli – avec Claudio Strudthoff, L. Marimpieri, Oralia Dominguez, R. Raimondi, M. Mazzieri, G.-L. Colmagre, F. Mattiucci

 

Duisbourg – 1967 – dir. T. Fuchs – mise en scène P. Halmen – avec P.-C. Runge, Rachel Yakar, L. Brockhaus, F. Voutsinos, R. Emili

 

Zürich – Tonhalle – 29 octobre 1967 – dir. Jakob Kobelt

 

Oxford – 1967 – version de concert – dir. et adaptation Herbert Handt

 

Victoria – Australie – 2 octobre 1967 – version de concert – Conservatoire de Victoria – dir. et adaptation Harold Badger

 

Milan – RAI – 1967 – version Valentino Bucchi – dir. Nino Sanzogno – version de concert – avec Lajos Kozma (Orfeo), Valeria Mariconda (Euridice), Franca Mattiucci (Messagiera), Nicoletta Panni (Musica), Adriana Lazzarini (Speranza), Nicola Zaccaria (Caronte), Carlo Cava (Plutone), Gloria Lane (Proserpina), Ennio Buoso (Apollo)

 

Amsterdam – T. Carré – Festival de Hollande – 17 juin 1967 – adaptation et dir. Bruno Maderna – mise en scène Raymond Rouleau – décors J.-M. Simon – costumes R. Dobujinsky – avec B. McDonald/M. Bakker (Orfeo), Halina Lukomska (Euridice), Oralia Dominguez (Messagiera), Pieter van der Burg (Caronte), Aronne Ceroni (Appllo), S. van Sante

L'Orfeo à Amsterdam

Lisbonne – Teatro San Carlos – 14 mai 1967 – version Denis Stevens – dir. Gianfranco Rivoli – mise en scène Sandro Sequi – décors Alfredo Silbermann – costumes A. Anni – avec Claudio Strudthoff, baryton (Orfeo), Maria Thérèse Boiton (Euridice), Rena Garaziotti, R. Righetti, G. Tadeo, Michel Lecocq, Gabriela Carturan, Z. Saque


Venise – Palazzo Ducale – 3 mai 1967

 

Hanovre – 1966 – version August Wenzinger

 

Londres – Sadler’s Wells – octobre/novembre 1965 – dir. Raymond Leppard – mise en scène Frank Hauser – décors et costumes Yolanda Sonnabend – avec John Wakenfield (Orfeo), Mary Gilmore (Euridice), Patricia Kern (Messagiera), Noel Mangin (Caronte), Stafford Dean (Plutone, Apollo), Ann Howard (Proserpina)

 

Mexico Madrid – Teatro de la Zarzuela – 1965 – dir. Gianfranco Rivoli – mise en scène Sandro Sequi

 

Festival d’Aix en Provence – 1965 – version Denis Stevens – dir. Gianfranco Rivoli – mise en scène Sandro Sequi – décors Alfredo Silbermann – costumes A. Anni – avec Robert Kerns (Orfeo), Christiane Eda-Pierre (Euridice), Jane Berbié (Messagiera), Claude Vierne (Musica), Roger Soyer (Caronte, Plutone), Sonja Draksler (Proserpina), Michel Lecocq (Apollo)

L'Orfeo à AixJane Berbie en Messagiera à Aix

Osaka – Festival Hall – 1965 – mise en scène Sandro Sequyi – avec Renato Capecchi (Apollo)

 

Naples – Teatro San Carlo – 1964 – dir. Peter Maag – mise en scène Margherita Wallmann

 

Salzbourg – Landestheater – 1964 – mise en scène Manfred Taubert

 

Versailles – Théâtre Montansier – 1964 – Aix en Provence (?) – 1965 – adaptation de Giulio Cesare Brero – Opera da Camera de Milan

 

Wuppertal – version Eric Kraack – février 1961 – dir. Hans-Georg Ratjen

 

New York City Center – 1960 – d’après la version August Wenzinger – dir. Leopold Stokowski – mise en scène Christopher West – décors et costumes Donald Oenslager – avec Gérard Souzay (Orfeo), Judith Raskin (Euridice), Regina Sarfaty (Messagiera), Doris Yarick (Musica), Joshua Hecht (Plutone), Evelyne Sachs (Proserpina), Frank Porretta (Apollo)

 

Bruxelles – Théâtre de la Monnaie – 1960 (1961 ?) – en français – dir. Edgar Doneux – mise en scène Jean-Marc Landier – décors J. van Nérom – costumes T. Bosquet – avec Louis Devos (Orfeo), Claudine Arnaud (Euridice), Jeanne Deroubaix (Messagiera), Françoise Ogéas (Musica), Diane Lange (Speranza), Jules Bastin (Caronte), Maurice de Groote (Plutone), Jacqueline Tolmer (Proserpina), Armand Battelle (Apollo)

 

Rome – Teatro La Cometa – 1960 – dir. Nicola Rescigno – mise en scène et décors Franco Zeffirelli – costumes Marcel Escoffier

 

Munich – Schloß Nymphenburg – 1960 – Münchener Festspiele

 

Drottningholm – mai 1959 – dir. Albert Wolff – mise en scène Lars Runsten

 

Washington – Lisner Auditorium – février 1959 – Annapolis – Julliard School – 1959 – dir. Paul Callaway – mise en scène Frederik Cohen – avec Charles Bressler (Orfeo), Hugues Cuénod (Apollo)

 

Maggio Musicale de Florence – Giardini di Boboli – 1957 – dir. Emidio Tieri – mis en scène et chorégraphie Aurelio M. Miloss – décors et costumes Attilio Colonnello – avec Giuseppe Valdengo (Orfeo), Iolanda Meneguzzer (Euridice), Irene Companeez (Messagiera, Speranza), Lucille Udovik (Musica, Proserpina), Jerzy Podsiadly (Caraonte), Paolo Washington (Plutone), Lorenzo Testi (Apollo)

L'Orfeo à Milan

Milan – Piccola Scala – 1er avril 1957 – version Alceo Toni – dir. Antonino Votto – mise en scène Riccardo Bacchelli – décors Luciano Damiani – costumes Ezio Frigerio – avec Dino Dondi (Orfeo), Gabriella Carturan (Euridice), Nicola Zaccaria (Caronte), Giuseppe Zampieri (Apollo)

 

Mannheim – Nationaltheater – – 2 juin 1956 et sq. (14 représentations) – version Carl Orff – dir. Herbert Albert

 

Aix-les-Bains – août 1955 – Festival d’Aix-les-Bains – décors et costumes de Gustave Singier – avec Giuseppe Valdengo (Orfeo)

 

Wuppertal – Munich – 1955 – version Eric Kraack

 

Hitzacker – Basse Saxe – 1955 – Sommerliche Musiktage – version August Wenzinger – dir. August Wenzinger – avec Helmut Krebs (Orfeo), Fritz Wunderlich (Apollo/Pastore II/Spirito I), Elisabeth Schmidt (Euridice), Margot Guilleaume

 

Festival de Tanglewood – 1954

 

Milan – RAI – 1954 – dir. Nino Sanzogno – version de concert – avec Renato Gavarini (Orfeo), Nicoletta Panni (Euridice), Oralia Dominguez (Messagiera, Proserpina), Jolanda Gardino (Musica), Vittoria Palombini (Speranza), Marco Stefanoni (Caronte), Jorge Algorta (Plutone)

 

Vienne – Konzerthaus – 1954 – Festival de Musique de Vienne – Choeur de Singakademie de Vienne (dir. Gillesberger) – adaptation et dir. Paul Hindemith – avec instruments anciens – mise en scène Leopold Lindtberg – avec Gino Sinimberghi (Orfeo), Uta Graf (Euridice), Norman Foster (Caronte), Fred Guthrie (Plutone), Kmentt (Apollo), Hermann (Pastore I)

L'Orfeo à Vienne en 1954

Londres – BBC – juin 1952 – dir. Walter Goehr – avec Pierre Bernac (Orfeo), Irma Kolassi (Messagiera), Alfred Deller (Musica)

 

Milan – RAI – 1951 – dir. Vittorio Gui – version de concert – avec Ebe Stignani (Orfeo), Renata Brolilo (Euridice), Miti Truccato-Pace (Messagiera, Musica), Speranza), Silvio Maionica (Caronte), Cristiano Dalamangas (Plutone), Marta Solaro (Proserpina), Elda Ribetti (Apollo)

 

Aix en Provence – Archevêché – 1950 – dir. Hans Rosbaud – version de concert – avec Renato Capecchi (Orfeo), Suzanne Danco (Euridice, Musica), Elda Ribacchi (Messagiera, Speranza, Proserpina), Raffaele Arié (Caronte, Plutone), Marcello Cortis (Apollo)

 

Cambridge – Jardins du Girton College – 8 juin 1950 – version Thurston Dart

 

Berlin – 1949 – dir. Hans Striehl

 

Maggio Musicale de Florence Vicenze – Teatro Olimpico – 1949 – adaptation de Vito Frazzi – dir. Antonio Guarnieri – mise en scène Guido Salavini – scénographie Giorgio De Chirico – avec Fedora Barbieri (Orfeo)

 

Florence – 1949 – adaptation Valentino Bucchi

 

Francfort – 1943

 

Opéra de Hambourg – 1942 – version Carl Orff – dir. Hans Schmidt-Isserstedt – mise en scène A. Noller – scénographie C. Neher – avec G. Mund, Lisa Jungkind, Maria von Ilosvay, F. Frantz, H.A. Schewe

 

Boston – 21 mars 1941

 

Dresde – Staatsoper – 4 octobre 1940 – dir. Karl Böhm – troisième version de Carl Orff, sur un texte de Dorothee Günther

 

Milan – Teatro alla Scala – décembre 1939 – version Giacomo Benvenuti – Choeur et Orchestre de la Scala – dir. Ferrucio Calusio – avec Enrico De Franceschi (Orfeo), Genevra Vivante (Musica, Euridice), Vittoria Palombini (Speranza, Prosermina), Albino Marone (Plutone, Caronte), Giuseppe Manacchini (Apollo, Pastore II), Elena Nicolai (Messagiera), Enrico Lombardi (Pastore I) – version Malipiero (1923) – adaptation Giovanni Benvenuti

 

Buenos Aires – Teatro Colon – 1937 – version Giacomo Benvenuti – dir. Tullio Serafin – mise en scène Carlo Piccinato – décors et costumes Hector Basaldua – avec Carlo Galeffi (Orfeo), Amelita Conte (Euridice), Hina Spani (Musica), Conchita Velasquez (Speranza), Gregorio Melnick (Caronte), Felipe Romito (Plutone), Sara Cesar (Proserpina), Alberto Lopez (Apollo)

 

Orange – Théâtre antique – 1937 – en français – dir. et adaptation Ruggiero Guerlin

 

Budapest – 1936 – version d’Ottorino Respighi

 

Zürich – 10 février 1936 – version Hans R. Redlich – version de concert

 

Modène – mai 1935 – version Ottorino Respighi

 

Scala de Milan – 16 mars 1935 – adaptation d’Ottorino Respighi, sur un livret adapté en trois actes par Claudio Guastalla – dir. Gino Marinuzzi – mise en scène Lothar Wallerstein – décors et costumes Oppo – avec Carlo Galeffi (Orfeo), C. Segrera (Euridice), Ebe Stignani (Messagiera, Musica), F. Zaccarini (Caronte), Baronti (Plutone), Jacchia (Proserpina), N. Ederle (Apollo), V. Palombini (Speranza), M. Merlo (Ninfa), G. Del Signore (Primo Pastore)

 

Opéra de Rome – Teatro Reale – 26 décembre 1934 – adaptation de Giacomo Benvenuti – dir. Tullio Serafin – mise en scène E. Polidori – scénographie Felice Casorati – avec B. Franci, G. Gatti, Giuseppina Cobelli, S. Ungaro, R. de Falchi, Bruno Sbalchiero, E. Dominici

 

Pérouse – Teatro Morlacchi – 19 septembre 1934 – version Gaetano Orefice – première représentation scénique en Italien – avec les décors et costumes de la représentation du Caire en 1928

 

Mantoue – Palazzo Ducale – Sala Manto – 30 avril 1933 – version Gaetano Orefice – version de concert – dir. Amilcare Zanella

 

Lisbonne – printemps 1932 – dir. Ivo Cruz – version de Vincent d’Indy, en portugais

 

Vienne – 14 janvier 1931 – version de concert – version Carl Orff

 

Buenos Aires – Teatro Odeon – 1930 – dir. et piano Raul Spivak – avec Maria Ranzow (Orfeo), Lisa G. de Hirsch (Euridice), Antonieta Silveyra (Messagiera), Magdalena Bengolea (Musica), Adolfo Sauze (Caronte)

 

Munich – Residenztheater – 10 décembre 1929 – dir. Franz Hallasch

 

Munich – Residenztheater – 13 octobre 1929 – seconde version Carl Orff

 

Northampton – Massachussets – Smith College – 11 mai 1929 – première représentation scénique aux Etats Unis, dans la version de Gian Francesco Malipiero, sans les premier et dernier actes – Music Department du Smith College – dir. Werner Josten – avec Charles Kullman (Orfeo)

 

Londres – 1929 – version de Jack Allan Westrup et William H. Harris, en anglais

 

Leningrad – 5 décembre 1928 – première exécution de la version de Gian Francesco Malipiero, dans une version « chambriste »

 

Paris – Société des Concerts du Conservatoire – 4 novembre 1928 – deux airs – dir. Philippe Gaubert – avec Lina Falk, Professeur Supérieur au Conservatoire Royal de Bruxelles

 

Cologne – été 1928 – version Vincent d’Indy – en allemand

 

Bologne – Teatro Communale – 1928 – dir. Marino Cremesini – avece T. Costa, Emilia Bonini, Matilde Marzocchi-Tavernari (soprano), Armilda Baldi-Rossi (mezzo-soprano), E. Piata

 

Le Caire – 1928 – version Gaetano Orefice – version scénique – mise en scène Vincenzzo Sorelli – décors et costumes Emanuele et Cito Filomarino – avec Spartaco Marchi, Isora Rinolfi, Matelda Ceccherini, Sergio Cocciubei

 

Londres – 1926 – version de Jack Allan Westrup et William Henry Harris, en anglais

 

Oxford – 7 et 9 décembre 1925 – Oxford University Opera Club – première version scénique en Angleterre – adaptation de Jack Allan Westrup, en anglais – dir. et continuo William H. Harris – mise en scène Walter Nugent Monck – avec Sumner Austin (Orfeo)

 

Mannheim – National Theater – 17 avril 1925 – pemière adaptation de Carl Orff, en allemand, pour instruments anciens – « Orpheus » – texte et mise en scène de Dorothee Günther – dir. Werner von Bülow

 

Londres – Institut français – 8 mars 1924 – version de concert avec piano – en français – adaptation de Vincent d’Indy – dir. Louis Bourgeois

 

1923 – révision par Gian Francesco Malipiero

 

Buenos Aires – Salon Teatro – 10 mai 1920 – version Gaetano Orefice – dir. Ferruccio Cattelani – avec Pietro Galletto (Orfeo), Anita Marzoni (Euridice, Proserpina), Blanca Maren (Messagiera), Natalia Bavio Milanesi (Musica), Umberto Lambertucci (Caronte, Plutone)

 

Paris – Salle Gaveau – 24 avril 1914 – version Vincent d’Indy – Schola Cantorum – avec Marie Pironnay (la Musique), Marthe Philipp (la Messagère), Emmy Ginnel (Eurydice), M. Trembaly (Orphée), Albert Gebelin (Caron)

 

Breslau (Wroclaw) – Stadttheater – 8 juin 1913 – en allemand – version Hans Erdmann-Guckel – Solistes de l’Opéra de Breslau – choeur d’amateurs (dir. Theodor Paul) – dir. Hans Erdmann-Guckel – avec le baryton Hecker (Orfeo), Mlle Zuska (Messagiera)

 

Paris – Théâtre Réjane – 11 avril 1913 – version de Vincent d’Indy – reprise de la représentation de 1911 – dir. Marcel Labey – avec Claire Croiza (la Messagère), Mlle Mellot-Joubert (la Musique), Mme B. Mendès, de l’Opéra (une Bergère), Suzanne Thévent ou Mme Duvernax, de l’Opéra-Comique (un Berger), Robert Le Lubez (Orphée), Tarquini d’Or, du Trianon lyrique (Caron).

 

Chicago – 5 janvier 1913 – en anglais – Solistes, choeur et orchestre de l’Opéra de Chicago – dir. Cleofonte Campanini

 

New York – Metropolitan Opera – 14 avril 1912 – première exécution en version de concert aux Etats Unis – en anglais – adaptation de Giacomo Orefice – dir. Josef Pasternack – avec Hermann Weill (Orfeo), Rita Fornia (Euridice), Maria Duchène (Messagiera, Speranza, Proserpina), B. Ruysdaël (Caronte), Herbert Whiterspoon (Plutone), A. Case, H. Wakefield

 

Paris – Théâtre Réjane – 2 mai 1911 – première représentation scénique – version de Vincent d’Indy – dir. Marcel Labey – avec Claire Croiza (la Messagère), Mlle Mellot-Joubert (la Musique), Mme B. Mendès, de l’Opéra (une Bergère), Suzanne Thévent ou Mme Duvernax, de l’Opéra-Comique (un Berger), Robert Le Lubez (Orphée), Tarquini d’Or, du Trianon lyrique (Caron).

Claire Croiza

Mantoue – Teatro Sociale – 5 avril 1910 – Venise – La Fenice – 6 avril 1910 – Bologne – Teatro Communale – 10 avril 1910 – version de concert – adaptation de Giacomo Orefice – dir. Guido Carlo Visconti di Modrone – avec Giuseppe Kaschmann (Orfeo), Chiarina Fino-Savio (Euridice, Messagiera), Maria Pozzi (Musica, Proserpina), Silvio Queirolo (Caronte, Plutone) – aussi à Monte Carlo – Casino Municipal – 16 avril 1910 – Venise, Florence, Turin

 

Bruxelles – 23 janvier 1910 – version de concert – dir. Sylvain Dupuis

 

Milan – Conservatorio Musicale Giuseppe Verdi – 30 novembre 1909 – version de concert – adaptation Giacomo Orefice (1865 – 1922 – compositeur, pédagogue et critique musical ) – à l’initiative de la Associazione Italiana di Amici della Musica – dir. Amilcare Zanella

 

Paris – Schola Cantorum – 25 février et 2 mars 1904 – version de concert, en français, avec d’importantes coupures (suppression totale des actes I et V) – adaptation de Vincent d’Indy – avec Marie Pironnet (la Musique), Marthe Legrand (la Messagère), Laure Flé (Eurydice), L. Bourgeois (Orphée), Jean David (Premier Berger), Tremblay (Second Berger, un Esprit), Claire Hugon (Troisième Berger), Tarquini d’Or (Caron, un Esprit), Alexandre Guilmant à l’orgue, Marcel Labey au clavecin, Mlle Ziélinska à la harpe, Mlle Lénars au luth, choeurs et orchestre de la Schola Cantorum. Lionel de la Laurencie avait établi une « claire et substantielle analyse » de l’ouvrage. La partition fut publiée en 1905, ainsi qu’une réduction pour chant et piano en 1916. Les deux dates de concert furent calquées sur les représentations de l’Orfeo en 1607 à Mantoue.


« Le résultat fut merveilleux. Le public parisien de 1904 vibra comme un seul homme, transporté au point d’interrompre l’exécution par des applaudissements, après le récit de de la messagère…Mlle Legrand sut chanter en tragédienne au lieu de se croire en concert. » (Jean Marnold – avril 1904 – dans « Musique d’autrefois et d’aujourd’hui »)

Allemagne – 1881 – version Robert Eitner, musicologue allemand (1832 – 1905) – première recréation

« Eitner, dans son édition, d’ailleurs incomplète, déploya une gaucherie remarquable et une circonspection harmonique idoine à réjouir plutôt un pion de conservatoire que les mânes de l’audacieux Monteverdi. » (Jean Marnold – avril 1904 – dans « Musique d’autrefois et d’aujourd’hui »)

Conservatoire de Paris – 14 avril 1832 – larges extraits en concert – à l’initiative de François-Joseph Fétis – Membres du Conservatoire (violes, basses de viole, guitares, harpes, orgue, clavecin) dirigés par François Habeneck – avec le ténor Giovanni Battista Rubini

Giovanni Battista Rubini