COMPOSITEUR | Antonio VIVALDI |
LIBRETTISTE | Grazio Braccioli, d’après L’Arioste |
DVD
ENREGISTREMENT | ÉDITION | DIRECTION | ÉDITEUR | FICHE DÉTAILLÉE |
1990 | 2000 | Randall Behr | Arthaus | |
2011 | 2011 | Jean-Christophe Spinosi | Naïve |
Drame musical, opéra héroïco-magique, en trois actes (RV 728), créé au Teatro Sant’Angelo de Venise, à l’automne 1727.
Vivaldi réutilisa le livret écrit par le poète ferrarais Grazio Braccioli pour l’Orlando finto pazzo en 1714.
Distribution : la contralto Lucia Lancetti (Orlando), spécialiste des rôles travestis, qui avait déjà chanté dans Ipermestra, la soprano vénitienne Benedetta Serosina (Angelica), Anna Giro (Alcina), la contralto Maria Caterina Negri (Bradamante), Casimiro Pignotti (Medoro), jeune castrat alto romain, le castrat alto Giovanni Andrea Tassi (Ruggiero), la basse Gaetano Pinetti (Astolfo), originaire de Brescia.
Reprise à Bergame pendant le carnaval 1738.
Synopsis détaillé (version Claudio Scimone)
La perfide magicienne Alcina règne sur une île enchantée dont elle a chassé sa soeur, Logistilla, symbole de la raison. Vieille et horrible, elle peut, grâce à ses artifices, sembler jeune et belle, et séduire tout homme qui pénètre en son royaume. Elle y donne l’hospitalité à la princesse Angelica dont sont épris le preux Orlando et le guerrier Medoro. L’amour de la princesse va à ce dernier.
Acte I
(1) Orlando (mezzo-soprano) proclame sa confiance dans sa valeur et l’amour que ne peut lui refuser Angelica.
Un jardin délicieux dans lequel on voit les deux fontaines, une qui éteint, l’autre qui fait naître l’amour. La mer agitée au loin.
(2) Angelica pleure son amour devant la mer tempétueuse. On entend appeler au secours. Angelica reconnaît Medoro qui est jeté, blessé, sur le rivage. (3) Alors qu’elle désespère de pouvoir le guérir, Alcina survient qui, par l’effet de sa magie, guérit Medoro. celui-ci revient à la vie et raconte qu’il était parti à la recherche d’Angelica, et qu’il a été blessé et fait prisonnier quand son navire a été attaqué par des ennemis. Une tempête l’a jeté par dessus bord et il a pu s’accrocher à une barque. (4) Orlando entend les dernières paroles de son rival, et entre en fureur contre Angelica. Alcina sauve la situation en affirmant que Medoro est le frère d’Angelica. Celle-ci, entrant dans le jeu, feint de répondre aux soupirs d’Orlando, provoquant ainsi la jalousie de Medoro qu’il lui faut à son tour rassurer. (5) Restée seule, Alcina voit apparaître Ruggiero sur un cheval ailé. Elle s’éprend immédiatement du jeune homme à qui elle fait boire un breuvage ensorcelé ; l’effet en est immédiat et Ruggiero oublie qu’il est l’époux fidèle et aimant de Bradamante. (6) Celle-ci arrive sur ces entrefaites ; Ruggiero ne la reconnaît même pas et elle le voit avec douleur faire la cour à Alcina. Par prudence, elle feint de s’appeler Olimpia et d’être à la recherche de Bireno, un amant infidèle.
Acte II
(1) Les époux se rencontrent à nouveau, mais Ruggiero ne reconnaît toujours pas Bradamante. Celle-ci essaye de raviver les souvenirs de Ruggiero, en lui montrant un anneau reçu de lui en gage de foi. L’anneau – enchanté – rompt le sortilège dont Ruggiero est victime, et celui-ci reconnaît enfin son épouse qui le punit de son égarement en le repoussant avec des paroles hautaines. (2) Orlando cherche à réconforter Ruggiero.
Un bosquet délicieux avec des havres de verdure
(3) Le preux Astolfo, autre paladin chrétien, s’éprend d’Alcina qui se rit de ses avances. (4) Réconciliés, Ruggiero et Bradamante chantent en duo leur amour.
Une montagne alpestre, avec un grand rocher abrupt
(5) Angelica prépare son mariage avec Medoro et rassure ce dernier, inquiet de la réaction d’Orlando. (6) Pour se débarrasser d’Orlando qui vient l’importuner, elle l’envoie chercher une eau de jouvence qu’il trouvera, gardée par un monstre, au sommet d’une colline. Orlando commence à escalader le rocher. (7) Seul dans la caverne, Orlando défie le monstre. Une voix lui répond qu’il est prisonnier d’Alcina. Effectivement, Orlando s’aperçoit qu’il est enfermé dans une grotte sans issue. Il tente d’arracher les pierres, et tout en faisant de nouveaux efforts, il se rend compte qu’Angelica l’a trompée.
Une campagne aux pieds d’une colline avec un bosquet de chaque côté, à l’ombre desquels on voit le couvert dressé et la tasse nuptiale d’Angelica et Medoro
(8) On célèbre le mariage d’Angelica et Medoro, devant Alcina et sa suite. (9) Restés seuls, les époux échangent des paroles d’amour, et gravent leurs noms sur l’écorce des arbres. (10) Orlando, qu’un tremblement de terre a libéré, arrive alors que les époux partent. Découvrant les inscriptions « Angelica et Medoro, amants et époux », il devient furieux et, perdant la raison, détruit dans se colère l’arbre sur lequel les jeunes époux ont gravé leurs noms ainsi que toute la végétation environnante.
Acte III
Vestibule, devant le temple d’Hécate Infernale, avec un mur d’acier en perspective, qui ferme le temple
(1) Ruggiero croit Orlando mort. Astolfo lui conseille toutefois de prendre leur revanche sur la perfide Alcina, en se faisant aider par une magicienne vertueuse, Melissa. (2) Bradamante également, portant des vêtements masculins, souhaite se venger, et dérober l’urne d’où Alcina tire ses pouvoirs. (3) Alcina survient, dévorée par l’amour., dont elle souhaite se rendre maître. Le Ciel et l’Enfer restant sourds, elle se décide à consulter le sage Merlin l’Enchanteur. Le mur d’acier se fend en deux, et on découvre le temple d’Hécate Infernale. On y voit la statue de Merlin l’Enchanteur posée contre une urne contenant ses cendres. Elle est gardée par l’invulnérable Aronte qui tient une massue au poing. Alcina implore Merlin. Bradamante, sous le nom d’Aldarico, l’interrompt en lui révélant que Ruggiero est l’amant infidèle d’une de ses soeurs. Alcina s’éprend immédiatement du nouveau venu à qui elle prodigue les avances. (4) Orlando réapparaît, tenant, à la stupéfaction de ses compagnons, des propos incompréhensibles. Il raconte que son amour a été contrarié par « madame la Cruauté » et « monsieur la Rigueur », effectue des pas de danse. (5) Il oblige Alcina à chanter une chanson. Le délire du héros devient tel qu’il frappe de pitié tous les témoins de la scène. Il se saisit d’Angelica à l’improviste, en la prenant pour madame la Cruauté, puis la laisse aller. (6) Resté seul, il s’attaque au monstre qui défend la statue de Merlin en qui il croit voir la cruelle qui l’a fait souffrir. Au terme d’un affreux combat, statue et monstre s’écroulent ; l’île est libérée des maléfices d’Alcina et devient déserte avec tous ses escarpements, tous ses rochers, avec l’arbre auquel sont pendues les armes d’Orlando. Epuisé, Orlando s’endort. (7) Alcina se lamente sur son sort. Elle aperçoit Orlando endormi, et se jette sur lui avec un poignard. Elle est retenue par Ruggiero, et découvre qu’Aldarico n’est autre que Bradamante. (8) Bradamante arrête Angelica qui cherche à fuir, et l’accuse d’avoir provoqué la folie d’Orlando. (9) Astolfo arrive avec les soldats de Logistilla, et veut faire arrêter Alcina et Angelica. Orlando finit par sortir de son sommeil, et pardonne à Angelica et Medoro, leur souhaitant une union heureuse.
(livret Erato)
Synopsis détaillé (version Jean-Christophe Spinosi)
L’action se déroule sur l’île enchantée de la magicienne Alcina, qui a établi son pouvoir en dérobant les cendres de Merlin l’Enchanteur. Celles-ci, précieusement déposées dans une urne, sont enfermées dans le Temple d’Hécate Infernale, sous la garde de l’invulnérable Aronte. Alcina a accueilli en son château la belle Angelica, fille du Roi de Cathay. Eprise de Medoro, et passionnément aimée du paladin Orlando, Angelica a fui son adorateur, perdant en route son amant bien-aimé. Au moment où débute le drame, Orlando, chargé par son mentor Malagigi de reprendre possession des cendres de Merlin afin de détruire le pouvoir d’Alcina, arrive sur l’île. Astolfo, fidèle compagnon d’Orlando, s’y trouve déjà, victime de l’amour pervers de la magicienne. Ruggiero et sa maîtresse Bradamante, autres fidèles du paladin, s’apprêtent à y poser le pied.
Acte I
Une cour dans le palais d’Alcina
(1) Angelica confie à Alcina son désespoir d’avoir perdu Medoro. La magicienne lui promet de lui rendre son amant et de la protéger contre la passion d’Orlando. Air d’Angelica (Un raggio di speme). (2) Orlando rencontre Astolfo et le combat avant de reconnaître. Alcina décide de s’attacher Orlando qui ne pense qu’à Angelica. Astolfo, de son côté, est jaloux qu’Alcina n’ait d’yeux que pour Orlando. Air d’Alcina (Alza in quegl’occhi). (3) Astolfo révèle à Orlando qui est Alcina et quels sont ses pouvoirs. (4) Orlando invoque Angelica, mais c’est Bradamante qu’il retrouve, lancée à la recherche de Ruggiero. La fière amazone, ayant appris que son bien-aimé avait été attiré sur l’île par un sortilège d’Alcina, affirme sa détermination à braver la magicienne grâce à l’anneau magique que lui a confié la fée Melissa. Air de Bradamante (Generoso è’l consiglio). (5) Orlando, resté seul, médite sur sa mission et affirme sa résolution dans une solennelle déclaration. Air d’Orlando (Nel profondo).
Un jardin délicieux où l’on peut voir deux fontaines, l’une qui éteint, l’autre qui fait naître l’amour. Mer agitée au loin.
(6) Angelica voit s’échouer une barque sur le rivage, avec un naufragé. C’est Medoro blessé. Angelica appelle à l’aide. (7) Alcina, par des paroles magiques, rétablit Medoro. les deux amants s’étreignent et Medoro raconte comment son navire a été attaqué, comment il a été blessé et fait prisonnier, et comment il a été englouti par une tempête. (8) Orlando survient à cet instant, mais sa jalousie s’estompe après que la magicienne lui ait présenté Medoro comme le cousin d’Angelica. La belle achève de tromper son adorateur par une déclaration langoureuse qui plonge à son tour Medoro dans les affres de la jalousie. Air d’Angelica (Tu sei degl’occhi miei). Orlando, rassuré, se répand en excuses. Air d’Orlando (Troppo è fiero). Medoro confie ses doutes à Alcina. Air de Medoro (Rompo i ceppi).
(10) Restée seule, Alcina voit descendre du ciel un hippogriffe, monté par le chevalier Ruggiero. Charmée par le nouveau venu, elle le séduit en lui faisant boire l’eau de la fontaine d’amour. (11) Bradamante, qui survient peu après, et que Ruggiero envoûté ne reconnaît pas, se fait passer pour Olimpia délaissée par Bireno. Ruggiero la prend pour une folle. Air de Ruggiero (Sol da te, mio dolce amore). (12) Alcina assure Bradamnte que Ruggiero n’est pas celui qu’elle cherche. Désespéré, Bradamante s’enfuit. (13) Seule, Alcina savourerla capture de sa nouvelle proie. Air d’Alcina (Amorose ai rai sel sole).
Acte II
Un bosquet délicieux avec des havres de verdure
(1) Alcina poursuit avec Astolfo un jeu de séduction pervers. Air d’Alcina (Vorresti amor da me). (2) Pour se venger de la magicienne, Astolfo à se ranger aux côtés de Bradamante. Air d’Astolfo (Benché nasconda). (3) Survient Ruggiero qui, toujours envoûté, ne reconnaît pas Bradamnte. Celle-ci donne à Ruggiero l’anneau magique qui rompt l’enchantement. Ruggiero implore son pardon, mais Bradamante l’abandonne cependant à son désespoir. Air de Bradamante (Taci, non ti lagnar). (4) Orlando tente vainement de le consoler. Air d’Orlando (Sorge l’irato nembo).
Un sommet alpestre, avec un rocher élevé et abrupt
(5) Angelica retrouve Medoro auquel elle promet un proche hymen, faisant son affaire d’Orlando. Medoro s’éloigne, plein d’inquiétude. Air de Medoro (Qual candido flore). (6) De fait, aidée par les enchantements d’Alcina, la perfide convainc son adorateur de pénétrer dans une montagne ensorcelée, au prétexte d’y recueillir pour elle une eau de jouvence ardemment convoitée. Air d’Angelica (Chiara al pari lucida stella). Orlando se laisse facilement abuser et commence à gravir le rocher. (7) Astolfo tente de le retenir, mais Orlando se fâche contre lui, et continue. (8) Il est bientôt emprisonné dans une caverne sans issue. (9) Orlando croit toujours devoir affronter un monstre, mais une voix lui indique qu’il est prisonnier d’Alcina. Il tente de se délivrer. (10) Pendant ce temps, Bradamante et Ruggiero se retrouvent et se réconcilient. Air de Ruggiero (Che bel morirti in sen). Air de Bradamante (Se cresce un torrente).
Une campagne aux pieds d’une colline, avec des bosquets de part et d’autre, à l’ombre desquels on voit le couvert mis, et la coupe nuptiale d’Angelica et Medoro
(11) Angelica et Medoro célèbrent avec faste leur hyménée dans une vaste clairière, sous le regard protecteur mais envieux d’Alcina. Air d’Alcina (Cosi potessi anch’io). Les époux gravent leur serment d’amour sur le tronc d’un laurier et d’un myrte. Duo (Belle pinaticelle). (13) Ils s’éloignent au moment où Orlando, parvenu à s’extraire de la caverne enchantée, arrive dans le sous-bois. La vue des époux et la découverte des inscriptions sur le tronc des arbres le fait basculer dans la folie.
Acte III
Vestibule devant le temple d’Hécate Infernale avec un mur d’acier en perspective qui ferme le temple
(1) Astolfo est convaincu de la mort d’Orlando et propose à Ruggiero d’honorer sa dépouille et de se venger d’Alcina, grâce à l’aide de Melissa. Air d’Astolfo (Dove il valor s’abbatte). (2) Rejoints par Bradamante en habits masculins, bien décidée à braver la magicienne, ils la surprennent alors qu’elle se présente devant le mur d’acier qui protège le Temple d’Hécate Infernale. (3) Air d’Alcina (L’arco vuo frangerti). Ses incantations sont mises en échec par l’anneau de Melissa. Invoquant le sage Merlin, elle parvient à faire ouvrir le mur d’acier, dévoilant les portes du Temple où apparaît la statue du fameux enchanteur, appuyée à une urne à l’intérieur de laquelle sont conservées ses cendres : elle est entoourée d’une balustrade formant une clôture, et gardée par l’invulénrable Aronte qui tient une massue au poing. Sur un côté, l’autel d’Hécate. Bradamante s’avance, seule, et dit à Alcina que Ruggiero s’est enfui sur un destrier ailé. Alcina tombe aussitôt amoureuse de Bradamante qui se fait nommer Aldarico. (4) Orlando, toujours en proie à la démence, survient alors. Bradamante et Alcina, ainsi que Ruggiero caché assistent aux divagations d’ormando et méditent sur les maux de l’amour. (5) Angelica se joint à eux. Orlando, sans sa folie, l’oblige à chanter. Air d’Angelica (Che dolce piu). Orlando s’en prend à Angelica. Air d’Angelica (Poveri affetti miei). (5) Alcina dévoile certains de ses secrets à Bradamante/Aldarico. Air de Bradamante (Io son ne’ lacci tuoi). Alcina séduite par la beauté de Bradamante/Adalrico, la suit. (7) Ruggiero s’inquiète pour Bradamante. Survient Medoro. (8) Angelica, cachée, assiste à leur affrontement. Elle se découvre lorque Ruggiero enlève son épée à Medoro. Ruggiero cède et les laisse partir. Air de Ruggiero (Come l’onda). (9) Air de Medoro (Vorrebbe amando il cor). (10) Orlando, resté seul, découvre la statue de Merlin, qu’il prend pour Angelica. Air d’Orlando (Scendi nel Tartaro). Il affronte victorieusement le gardien Aronte et sa redoutable massue, se saisit de la statue et l’embrasse, avant de sombrer dans le sommeil. A cet instant, l’enchantement qui entourait l’île d’Alcina est rompu, le Temple s’écroule et l’île redevient déserte. On ne voit plus que des escarpements, des rochers à perte de vue, et un arbre auquel sont suspendues, en trophée, les armes d’Orlando. (11) Alcina ne sait où s’enfuir. Elle découvre Orlando endormi et s’apprête à le poignarder, lorsque Ruggiero l’arrête, avec Bradamante qui se fait reconnaître. (12) Angelica et Medoro ne savent non plus où fuir. Bradamante dénonce Angelica pour avoir trompé Orlando. (13) Survient enfin Astolfo, accompagné de soldats de Logistilla. Ils parviennent à réveiller Orlando. Alcina se lamente sur son sort, mais promet de se venger. Air d’Alcina (Andero, chiamero dal profondo). Orlando pardonne à Angelica, et bénit son hymen avec Medoro. Choeur final.
Livret (en italien) : http://www.radio.rai.it:80/radio3/radio3_suite/archivio_2002/eventi/2002_10_12_orlando_furioso/libretto.htm
Représentations :
Brême, Theater am Goetheplatz – 12, 20, 23, 26 octobre, 8, 17, 30 novembre, 8, 22, 25 décembre 2013 – dir. Olof Boman – mise en scène Anna-Sophie Mahler – décors Duri Bischoff – costumes Geraldine Arnold – lumières Christopher Moos – dramaturgie Sylvia Roth – avec Martin Kronthaler (Orlando), Alexandra Scherrmann (Angelica), Nadja Stefanoff (Alcina), Marysol Schalit / Cristina Piccardi (Bradamante), Christoph Heinrich (Medoro), Hyo Jong Kim (Ruggiero), Patrick Zielke (Astolfo) – nouvelle production
Ferrare, Teatro Comunale – 6 mars 2013 – version de concert – Orchestra Barocca Lorenzo Da Ponte – Coro Polifonico di Santo Spirito – dir. Roberto Zarpellon – chef de choeur Francesco Pinamonti – avec Luciana Mancini, Patrizia Cigna, Daria Telyatnikova, Barbara Di Castri, Ana Häsler, Luca Tittoto
Theater an der Wien – Vienne – Autriche – 22 octobre 2011 – Madrid – Auditorium National – 30 octobre 2011 – Ensemble Matheus – dir. Jean-Christophe Spinosi – avec Delphine Galou (Orlando), Renata Pokupic (Alcina), David DQ Lee (Ruggiero), Daniela Pini (Medoro), Veronica Cangemi (Angelica), Christian Senn (Astolfo), Kristina Hammarström (Bradamante)
Gut Imlming – Allemagne – 21, 29 juillet 2011 – Akademie-Produktion – dir. Cornelia von Kerssenbrock – mise en scène Isabel Ostermann – nouvelle production
Beaune, Cour des Hospices – 16 juillet 2011 – version de concert – Ensemble Matheus – Choeur de chambre de Namur – dir. Jean-Christophe Spinosi – avec Delphine Galou (Orlando), Mary-Ellen Nesi (Alcina), Gaëlle Arquez (Angelica), David DQ Lee (Ruggiero), Daniela Pini (Bradamante), Blandine Staskiewicz (Medoro), Aimery Lefèvre (Astolfo)
Budapest – Palais des Arts – Salle de concert nationale Béla Bartók – 24 mars 2011 – Festival de Printemps de Budapest – version de concert – Ensemble Matheus – dir. Jean-Christophe Spinosi – avec Sonia Prina (Orlando), Franziska Gottwald (Alcina), Veronica Cangemi (Angelica), Max Emanuel Cencic (Ruggiero), Christian Senn (Astolfo), Kristina Hammarström (Bradamante), Daniela Pini (Medoro)
Théâtre des Champs Élysées – 12, 14, 16, 18, 20, 22 mars 2011 – London, Barbican Hall – 26 mars 2011 – version de concert – Opéra de Nice – 30 mars, 1er, 3, 5 avril 2011 – Opéra de Nancy – 22, 24, 26, 28, 30 juin 2011 – Ensemble Matheus – Choeur de l’Opéra de Nice – dir. Jean-Christophe Spinosi – mise en scène Pierre Audi – dramaturgie Willem Bruls – décors et costumes Patrick Kinmonth – lumières Peter van Praet – avec Marie-Nicole Lemieux (Orlando), Jennifer Larmore (Alcina), Verónica Cangemi (Angelica), Philippe Jaroussky (Ruggiero), Christian Senn (Astolfo), Christianne Stotijn (Bradamante), Romina Basso (Medoro)
L’air du jour – Musikzen – 15 mars 2011
« Hier soir, au Théâtre des Champs-Elysées, Marie-Nicole Lemieux, aphone, a joué l’Orlando Furioso de Vivaldi, tandis qu’une inconnue nommé Delphine Galou lui fournissait le son en play-back. Ce n’est pas la première fois que cela arrive. On se souvient, jadis à Bayreuth, de Patrice Chéreau dans la peau de Siegfried, tandis que René Kollo, le pied dans le plâtre, chantait depuis la fosse, ou naguère au Châtelet d’Anna Caterina Antonacci mimant les fureurs de Médée, pendant qu’à l’avant-scène, une dame en tailleur, sac à main posé au pied du pupitre, se chargeait des imprécations chérubiniennes. Cela pose le problème, crucial dans le cas d’un opera seria, du son et de l’image. Il y a sept ans, déjà au TCE mais en version de concert, Jean-Christophe Spinosi s’est fait le croisé de l’ouvrage de Vivaldi, que l’on ne connaissait que dans une version musicologiquement douteuse mais vocalement somptueuse (Marilyn Horne) et théâtralement esthétique (Pier Luigi Pizzi), donnée au Châtelet au début des années 1980. Aujourd’hui, l’affiche est sensiblement la même qu’en concert (Lemieux, Philippe Jaroussky, Jennifer Larmore), mais c’est d’une version scénique, signée Pierre Audi, qu’il s’agit. On voit les héros de l’Arioste, en pourpoints et bas noirs, errer dans la pénombre d’un palais design. Cela n’apporte pas grand-chose, mais le seul fait que le personnage principal soit – si l’on ose dire – coupé en deux, donne à l’ensemble un aspect brechtien assez inattendu. Delphine Galou a eu droit à une ovation méritée, et les autres ont fait comme si de rien n’était, fort bien d’ailleurs, même si certains flottent, dramatiquement autant que vocalement, dans des habits un peu grands pour eux. Moralité : si vous ne pouvez pas avoir de places (c’est complet), ne regrettez rien, écoutez le disque, très réussi (3 CD Naïve), ou regardez la retransmission sur Mezzo, pour laquelle, on l’espère, la Lemieux aura retrouvé sa voix. »
Altamusica
« Loin des monstres, du dragon, des rochers de l’île enchantée de la sorcière Alcina, ce sont les ombres et les sortilèges de la légende tirée de l’Arioste que Pierre Audi a métamorphosés. Né au Liban, de nationalité anglaise et de culture française, le directeur de l’Opéra d’Amsterdam a fui la magie traditionnelle pour se réfugier dans une magie noire bien plus percutante.
Le décor est un palais vénitien de l’époque de Vivaldi. Les héros sont tous vêtus de noir. Les cieux lointains sont pourfendus d’éclats lumineux. Noir sur noir, cette tragédie vise l’essentiel : des personnages et des âmes qui se cherchent, se lassent, s’abandonnent. Devant l’uniformité des costumes, quelques spectateurs, à l’entracte, s’interrogent : qui est qui ?
Sans doute le metteur en scène, engoncé dans les certitudes d’une démonstration éblouissante, n’a-t-il pas songé à ces mélomanes avides qui, sortant de leur bureau, pour se précipiter dans Vivaldi, ne disposent pas des clés d’une compréhension immédiate ? C’est là que le bât blesse.
En outre, Pierre Audi ne renonce pas à quelques facilités comme les sièges renversés trop grands pour les acteurs : on a vu cela mille fois, signifiant que les personnages sont dépassés par les événements.
En dehors de ces complaisances à la mode, la direction des chanteurs est remarquable. Ne serait-ce qu’en faisant bouger enfin le merveilleux Jaroussky, à la voix immatérielle. Voici le contre-ténor du siècle qui vit réellement et s’impose dans une dimension presque autant charnelle que vocale.
Autre prodige que le magnifique enregistrement chez Naïve ne pouvait illustrer : la performance inouïe de Marie-Nicole Lemieux. Dire qu’elle brûle les planches est un euphémisme. Elle est fulgurante. Vocalement, on le savait. Scéniquement, dans ce rôle travesti de Roland, paladin de Charlemagne, elle s’impose dans la si longue folie d’Orlando comme l’une des grandes tragédiennes du lyrique. Et quand les applaudissements frénétiques la saluent, elle sort de scène en esquissant quelques pas de danse et stupéfie encore par son aisance, sa malice et son intelligence. Elle est une star. Ce n’est pas si fréquent dans le lyrique.
Quant à Jean-Christophe Spinosi, ce maestro mi-corse mi-breton qui s’était révélé sur cette même scène dans cette même œuvre en 2003, alors en version de concert, il a heureusement vieilli et s’est peaufiné. Il a transformé son agitation en énergie, sa frénésie en analyse. Il est plus discret, moins fanfaron et plus explicatif avec sa formidable folie musicale qui exalte ces personnages qui se désirent, se déchirent, s’aiment, se jalousent, se trahissent.
Entre plaintes, passions et douleurs, à coups de serments et de sortilèges, ils errent sans autre but que d’assumer les pulsions de leur âme et la sensualité exacerbée de leur corps. L’existentialisme n’est pas loin. Rarement les tourments de l’homme et de la femme modernes autour d’amours contrariées ont été aussi magnifiquement sublimés, la constance et la fidélité aussi puissamment exaltées. »
L’Atelier du chanteur
« Il ne manquait que la scène à l’Orlando Furioso dirigé par Jean-Christophe Spinosi en octobre 2003 au festival d’Ambronay puis au TCE – et non l’inverse comme l’indique le programme de salle page 39, même si c’était déjà courageux de la part de Jeanine Roze et Michel Franck (maintenant directeur du TCE) d’inviter cette production à Paris. Sept années ont pourtant été nécessaires pour franchir le pas. L’oeuvre y a gagné en profondeur et en cohérence, grâce aux récits qui relient intelligemment des airs contrastés, qui sans eux semblent disparates. La scène apporte aussi à l’ouvrage – on en doute au premier acte, mais on en est convaincu en quittant le théâtre après l’intense troisième acte.
Pierre Audi et son décorateur Patrick Kinmonth ont situé l’action dans un salon vénitien en noir et blanc, aux « dorures noires » en quelque sorte. C’est sombre et lugubre d’un bout à l’autre, au point de susciter du soulagement quand le décor de fond se soulève pour libérer un vague extérieur nu et gris mais un peu plus lumineux. Le troisième acte est lui superbe. Il aurait pu être le seul acte sombre, mais il contraste cependant par le dépouillement du plateau nu au fond duquel l’on découvre Orlando assis au pied d’un mur de briques. Les personnages sont alors tous sculptés par la lumière dans des poses « tragiques », jusqu’à la pietà d’Orlando dans les bras d’Angelica, image forte qui contredit la logique du texte à ce moment-là mais image « à faire » cependant.
C’est d’ailleurs tout au long de l’opéra que Pierre Audi aime à faire rester en scène ses personnages. C’est une des solutions classiques aux éternelles questions « que montrer pendant les airs? », « que faire faire aux chanteurs pendant les da capo? », sujet sur lequel on pourrait rédiger une fois pour toutes un « Que Sais-Je? » ou un « L’opera seria pour les [metteurs en scène] nuls ». Pierre Audi est loin d’être nul, mais il fait quand même renverser des chaises pendant tout le premier acte, ce qui est un des clichés récurrents chez les metteurs en scène en panne d’inspiration, presque au niveau du cliché de l’accrochage de la lessive ! »
Dès l’entrée de Ruggiero au premier acte, nous avons donc nos sept personnages sur scène. À part encombrer le plateau et renverser des chaises (en douceur et en les retenant, pour ne pas faire trop de bruit ?), ils n’y font cependant pas grand chose. Du moins témoignent-ils du génie boulimique de Vivaldi et de son librettiste Grazio Braccioli, qui nous offrent Alcina et Orlando dans la même soirée, deux opéras pour le prix d’un! La plupart des compositeurs ont en effet, comme Haendel, jugé que les aventures d’Orlando avec Medoro et Angelica suffisaient à emplir un programme, tandis qu’une autre oeuvre nous fait fantasmer sur Alcina, Ruggiero et Bradamante.
Le premier acte étant comme il se doit un acte d’exposition, il est normal que la présentation des personnages à la fois d’Alcina et d’Orlando, tous issus du même Roland furieux de l’Arioste, puisse tourner à la confusion. Si la mise en scène et les costumes ne nous éclairent guère, les récits susmentionnés et la distribution bien contrastée nous rendent la situation étonnamment claire.
Au deuxième acte, les situations de décantent, les personnages interagissent sur scène deux par deux, sur des fonds un peu moins sombres, avec un jeu d’acteurs plus développé. Ce serait un acte « dramatique », avant le dernier acte « tragique ». Plus qu’une seule chaise, mais géante, comme tous les accessoires. Les gestes sont lents et les poses sont calculées. Philippe Jaroussky, habillé par Patrick Kinmonth, excelle d’ailleurs à construire et contraster son personnage par sa seule démarche et son port de tête. « Beau ténébreux » pour Vogue au premier acte, il s’humanise, perd quelques centimètres et noircit sa garde-robe quand Bradamante lui ouvre les yeux sur son parjure.
Qualifiée de « bête de scène » avant même que quiconque l’ait vue jouer sur scène, Marie-Nicole Lemieux comble et dépasse toutes les espérances. Non seulement elle a énormément progressé vocalement, mais on ne pense même plus du tout à sa voix d’un point de vue technique, tant elle en fait un simple outil, un vecteur d’émotions qui n’a aucune existence propre mais renaît à chaque instant en fonction des exigences du mot, de la phrase, de l’instant. On regrette seulement qu’elle ait accepté de jouer ces dodelinements, cliché habituel de la folie, peut-être visibles dans tout asile qui se respecte, mais un peu trop vus déjà au théâtre. Marie-Nicole Lemieux étonne par contre dès son entrée par son maquillage masculin qui lui fait arborer une belle barbe, ce qui pour le coup n’est pas (encore) un cliché des rôles « en pantalon ».
Dans la fosse, l’ensemble Matheus est toujours fin et fondu quand il le faut, par exemple pour accompagner le Cosi potessi anch’io d’Alcina. Toujours tonique sinon, mais sans hystérie ni sécheresse. Alexis Kossenko est superbe dans son accompagnement à la flûte de l’air de Ruggiero Sol da te. Le plateau vocal ne sonne pas aussi sombre qu’en 2003, le diapason choisi à l’époque était-il plus bas? Celui de ce soir à 440 offre en tout cas aux voix une palette variée et équilibrée.
Jean-Christophe Spinosi est resté en grande partie fidèle à l’excellente distribution vocale qu’il avait réunie en 2003. Sur les quatre chanteurs conservés, on se réjouit que trois aient encore bien progressé. Veronica Cangemi affiche une émission étonnamment plus solide, dépouillée de la tendance à l’expiration anémique qui faisait certes une partie de son charme. La scène donne une vitalité et un phrasé très intéressants à son Tu sei degl’occhi miei du premier acte. Toujours transcendée par l’émotion, elle ose au troisième acte des fragilités vocales au bord de l’étranglement. Philippe Jaroussky et Marie-Nicole Lemieux, quoique lancés en pleine lumière alors qu’ils affichaient encore des faiblesses vocales, ont réussi à bien mûrir tout en ne cessant de se produire sur scène, et sont arrivés en peu d’années au sommet de leur art.
Marie-Nicole Lemieux est déjà bien furieuse dans son Nel profondo cieco mondo du premier acte, mais elle en a heureusement en réserve ! Au deuxième acte, elle profère plus qu’elle ne chante son Sorge l’irato nembo. Mais c’est pendant tout le dernier acte que son incarnation est totale, à la hauteur de la construction dramatique et de l’inspiration musicale, toutes deux d’une originalité et d’une intensité stupéfiantes.
Jennifer Larmore remonte vaillamment la pente depuis son Messie de 2009 ici-même, même si elle n’a pas encore retrouvé son brio de 2003 et 2004. Ses registres de tête et de poitrine sont très inégaux en début de soirée, avec un aigu trop pointu et un grave trop brutalement poitriné, ce qui donne à l’ensemble de sa voix une couleur assez vulgaire, qui n’aurait certes pas été déplacée si le metteur en scène avait fait d’Alcina une tenancière de bordel, mais ce n’est pas le cas. Ces deux registres semblent dissociés par une position trop haute du larynx et une absence d’ouverture du médium vers la poitrine grâce au maintien d’un torse ouvert après une inspiration suffisamment basse et à la vibration qui en résulte dans la trachée. Ces registres sont peu à peu mieux fondus, au fil de l’engagement physique et émotionnel croissant de son personnage. La plainte du récit précédant Cosi potessi anch’io unit sa voix grâce à une connexion plus viscérale et une résonance bien concentrée.
Romina Basso a une émission bien concentrée et bien conduite jusqu’au bout de ses phrases. Kristina Hammarström est une excellente Bradamante au timbre mat mais sachant vocaliser dans son air du dernier acte. Christian Senn impose son personnage avec l’autorité d’une émission un rien « brute », qui pourrait parfois gagner en harmoniques et donc en souplesse. »
ConcertClassic
« Qu’est-il arrivé à l’Orlando furioso de Vivaldi entendait-on murmurer au premier entracte par un public visiblement désarçonné. Et en effet celui-ci voit une œuvre sensiblement différente, surtout si on la compare à celle présentée par l’inusable spectacle de Pier Luigi Pizzi qui courut les scènes d’Europe et du Nouveau Monde tout au long des années quatre vingt, spectacle d’ailleurs documenté par le DVD. La science (Frédéric Delaméa) et l’art (Jean-Christophe Spinosi) sont passés par là, changeant le visage du héros de l’Arioste autant que celui de la partition de Vivaldi, ne transposant plus, ordonnant toutes les scènes, retrouvant le vrai fil du drame, rendant surtout cette progression inexorable qui conduit au chef d’œuvre de théâtre d’un troisième acte enfin révélé dans toute sa singularité. Suivant Orlando dans sa folie, Vivaldi y détruit l’opéra séria avec une touche de génie qui place son ouvrage à part dans l’histoire du genre.
Pouvoir en prendre la mesure est une chance inespérée que l’on attendait depuis 2004, lorsque Jean-Christophe Spinosi et sa vaillante équipe avaient révélé le nouveau visage de la partition en concert à la Halle aux grains de Toulouse. Avant, vierges de toute vérité, puis après, peu ou prou inspirées par leurs travaux, quelques productions ont tenté de réinscrire l’œuvre au répertoire – de la transposition moderne (et guerrière) selon Holk Freytag (Wuppertal, 1996), aux élucubrations flower-power de David Bosch (Francfort 2010) en passant par les costumes de Carnaval de Gilbert Blin pour l’Opéra de Prague (2001), ou le postmodernisme sensuel et assez bien vu de Barrie Koski (Bâle 2009) – mais toutes ont encore plus péché par leurs plateaux souvent improbables que par leurs propositions scéniques.
Le spectacle au deux tiers vides de Pierre Audi, Willem Bruls (dont les notes d’intention sur Juliette des esprits et autour de l’enferment paraissent tirées par les cheveux) et Patrick Kinmonth , n’est pas non plus une réussite. Son constant milieu du guet – costumes pseudo d’époque, faux décors à coulisses, obsession mobiliaire à la puissance carrée – déserté durant les deux premiers actes par la moindre velléité de direction d’acteur n’aide ni le spectateur, qui préfère regarder le théâtre, ni les chanteurs, laissés seuls dans les pièges redoutables du Séria. Abandon et fuite. Avec cela un très moche décors de palais d’Alcina en photo noir et blanc, des trucs mobiliers –un lustre qui se prend pour un monstre, une table pour une grotte, un embarras de chaises qui donne du fil à retordre aux chanteurs – et quelques effets appuyés : que signifie ce fauteuil atteint de gigantisme ? Par contre on a bien compris le lustre à l’envers avant le III : Orlando est fou et Alcina a perdu ses pouvoirs.
Oui, et pourquoi d’ailleurs ne pas céder à la facilité ? Heureusement, Pierre Audi revient à lui lorsqu’il retrouve Orlando prisonnier du donjon et de sa démence , Patrice Kinmonth le délivre de ses chromos, le décor n’est plus que mur de brique, et alors le théâtre – scène et jeu – s’impose. Tout devient fulgurant, efficace, pénétrant. Il aura fallu seulement attendre deux heures un quart.
Si l’Ensemble Matheus rayonne, porté avec art par la direction vif argent et poétique de Jean-Christophe Spinosi, le plateau est singulièrement dépareillé. De jeu d’abord : malade, Marie-Nicole Lemieux ne chante pas, et hagarde joue comme elle peut malgré sa forte fièvre. Elle est doublée de la fosse par Delphine Galou dont on avait tant aimé la Lucrèce nantaise, admirable de présence, une des rares interprètes du rôle de par le monde. Dommage qu’elle n’ait pas eu le temps de donner vie au chevalier en scène. La voix est idéale, corsée, virtuose, le style impeccable, et l’interprète ose au III, de l’orchestre, un portait délirant et touchant à la fois. Chapeau bas devant tant d’art qu’on aimerait voir rapidement documenté.
Dieu sait si l’on aime Veronica Cangemi, mais sa voix à la trame, son timbre désuni, sa vocalise improbable, ses couleurs élimées rendent son Angelica impossible, même si elle sauve avec tout l’art qu’on lui connaît son dernier air. Méforme qu’on espère passagère et qu’elle compense par une touchante présence en scène.
A ce jeu là, Jennifer Larmore emporte la palme : Alcina vipérine mais détruite, séductrice mais empoisonnée, elle fait sortir le personnage de son cadre au point même que l’opéra devrait s’appeler Alcina et non plus Orlando. Et peu importe la vocalise guère orthodoxe, les sons tubés où les couleurs incertaines, devant tant de présence, devant une si grande chanteuse on savoure chaque instant de cet art : une telle présence est rarissime.
Pure poésie, le Ruggiero de Philippe Jaroussky transporte aussi par son élégance en scène, malgré une spectatrice cacochyme qui lui a avec application ruiné son premier air – le plus beau. Goujaterie ou malveillance ? La dame n’a pas toussé pour les autres.
Les nouveaux venus excellent tous, du Medoro au style impeccable et au timbre somptueux de Romina Basso au Bradamante passionné de Kristina Hammarström, chanteuse transcendante, actrice inspirée, en passant par l’Astolfo superbe, de timbre, de ligne, campé par Christian Senn, qui sauve le rôle des utilités, y dessinant un vrai personnage.
On sortait du Théâtre des Champs-Élysées heureux d’avoir vu le projet de Jean-Christophe Spinosi trouver les chemins de la scène, mais en songeant qu’il mérite une production d’une toute autre qualité, à la mesure de son art et de l’enjeu d’une telle résurrection. »
Anaclase
Trop souvent occulté par les opéras de Haendel que les programmateurs semblent préférer aux siens, trop rares sur nos scènes, cela faisait longtemps que nous guettions un chef-d’œuvre de Vivaldi. Et c’est certainement son plus bel ouvrage qui nous est offert : Orlando Furioso. À Paris depuis six jours, grâce à une coproduction du Théâtre des Champs-Élysées et de l’Opéra de Nice (jusqu’au 5 avril), les avis divergent sur la scénographie.
Inspiré directement par l’Arioste, le livret de Grazio Bracciolo sur lequel Vivaldi compose sa musique en 1727 est de toute beauté. Tous deux vont transcender leur sujet, faisant de la folie d’Orlando la raison d’être de cet opéra. Et si les airs y sont magnifiques, les récitatifs accompagnés ne cessent encore aujourd’hui d’émerveiller par leur richesse, leur subtilité, leur audace.
Sept personnages y partagent la douleur d’aimer. La magicienne Alcina attire les hommes sur son île afin de les séduire et de les enchaîner. Orlando, preux chevalier chargé de la détruire, tombe amoureux d’Angelica dont il a sauvé la vie. Mais cette dernière s’éprend de Medoro et, avec la complicité de la magicienne, trahit Orlando avec rouerie. Il en devient fou de douleur. Alcina séduit Ruggiero grâce à ses pouvoirs magiques. Mais l’épouse de ce dernier, Bradamante, usant d’un anneau enchanté, parvient à le libérer de l’envoûtement. Quant au dernier personnage, Altolfo, d’abord amoureux d’Alcina il découvre bien vite sa perversité, finissant par la combattre en compagnie de Bradamante et de Ruggiero. Tous trois sauvent Orlando qui, après avoir détruit dans un moment de folie la statue de Merlin, source des pouvoirs magiques d’Alcina, retrouve la raison et béni l’union d’Angelica et de Medoro.
Ce que l’on retiendra de cette nouvelle production, c’est d’abord tout le noir qui s’est emparé de la scène. Il est certain que certains auront été indisposés par un tel choix. Par sa sombre beauté, la mise en scène de Pierre Audi ne fait pourtant que souligner la présence de cette étoile noire de la mélancolie qui habite l’œuvre. Tous les personnages possèdent en eux des démons qui les rongent, les asservissent et les rendent cruels. Les décors de Patrick Kinmonth sont extrêmement épurés. Par des photographies en noir et blanc aux Actes I et II, ils évoquent un palais de la Cité des Doges où se joue des jeux féroces sur fond de carnaval. Ils se referment progressivement sur la déraison au point de devenir au III des murs de briques sombres étouffant des âmes rongées de passion. Le plancher laqué laisse se refléter la noirceur des sentiments comme les eaux troubles de la lagune. Les lumières étranges et fascinantes de Peter van Praet créent un théâtre d’ombres où les protagonistes deviennent marionnettes, silhouettes sans corps, dévorés par l’amour et la haine. Les magnifiques costumes de Patrick Kinmonth passent de l’argenté de la lune (la robe d’Alcina au premier acte) au blanc qui se veut virginal (celle d’Angelica à l’Acte II), au noir le plus sombre de tous pour finir. Par leur noble raffinement, ils évoquent l’élégance du XVIIIe siècle, dissimulant par la beauté cette mélancolie qui déchire et détruit. Et dans les jeux de masque d’un carnaval qui s’agite et danse pour s’enivrer, jamais on ne peut savoir qui d’Alcina à Angelica, de Ruggiero à Medoro, d’Astolfo à Orlando est le plus fou, le plus dangereux, le plus monstrueux.
La distribution de cet Orlando Furioso se révèle exceptionnelle. Tous les chanteurs subjuguent. Jennifer Larmor habite son personnage totalement. Son timbre mat et rauque fait d’Alcina une Mme de Merteuil machiavélique, malfaisante et pourtant tragique. Seule sa diction durant les deux premiers actes manque parfois de précision. Le timbre clair et gracile de Veronica Gangemi donne à son Angelica une fausse fragilité dissimulant une jeune femme extrêmement rouée. Par un phrasé noble et un timbre d’airain, Christian Senn est un Astolfo convaincant. Si Kristina Hammarström ne projette pas suffisamment sa voix, elle n’en demeure pas moins une Bradamante combattive. Romina Basso se montre un superbe Medoro au timbre ambré et épicé.
Mais ce sont Philippe Jaroussky dans le rôle de Ruggiero et Marie-Nicole Lemieux dans celui d’Orlando qui donnent le plus d’épaisseur à leurs rôles. Le premier offre avec Sol da te, mio dolce amore un instant à l’étrangeté tétanisante, magnifié par une scénographie hypnotisanteet l’accompagnement par la flûte enivrante d’Alexis Kossenko. La voix d’une pureté et d’une souplesse renversante du contre-ténor ensorcelle le public. Marie-Nicole Lemieux, dont la performance est, plus qu’éblouissante, véritablement époustouflante, donné corps et âme aux frustrations et à la souffrance d’Orlando, puis au monstre qui ne demandait qu’à s’éveiller. Elle dévoile un chevalier égaré dans le labyrinthe des passions. Son aisance scénique et vocale bouleversante fait vaciller, son timbre unique est une splendeur sans égale.
Si la nuit est sur scène et dans les cœurs, la lumière nait de la fosse. Sous la direction fougueuse, sensuelle et précise de Jean-Christophe Spinosi, l’Ensemble Matheus fait vibrer les reflets ensorcelants de la musique du Prete Rosso. La virtuosité des musiciens révèle toutes les facettes de ce véritable diamant noir qu’est Orlando Furioso. Ils captivent le public de l’avenue Montaigne au point de faire taire les habituels tousseurs pendant toute la durée du spectacle. Voici donc une production à ne manquer sous aucun prétexte. La mélancolie qui plane sur le livret et la musique s’y libère et dans son apparente laideur ou froideur accuse une beauté rare. »
ClassiqueInfo
« Oublions donc la mise en scène, transposant l’action à époque de la création, dans la Venise du XVIIIe siècle, un poncif appliqué à toutes les œuvres du répertoire désormais, à la direction d’acteurs parfois presque inexistante, où tout semble de résumer aux entrées et sorties des personnages, ou encore à un lancer de chaises sur le plateau. Quelques moments sont cependant passionnants comme l’attention portée aux sentiments vrais ou feints des personnages, aux non-dits (regards échangés pendant l’air de Ruggiero, « Sol da te mio dolce amore », acte I).
Malgré la vacuité du propos scénique, on ne peut que saluer l’entreprise de tenter d’imposer le retour d’un tel chef-d’œuvre au répertoire. L’Orlando Furioso de Vivaldi traîne certes une réputation des plus flatteuses depuis l’enregistrement, comportant quelques coupures et « aménagements », de Claudio Scimone [1], mais est encore trop rare sur les plateaux, quand les opéras et oratorios de Haendel occupent les scènes les plus prestigieuses, et à juste titre, depuis plusieurs décennies. Le spectateur aurait donc tort de bouder cette entreprise qui témoigne du regain de faveur des œuvres lyriques du Prêtre roux orchestré par des concerts annuels au Théâtre des Champs Elysées et une collection discographique indépendante chez Naïve qui fait désormais des émules chez des firmes concurrentes.
Avec Orlando Furioso, Vivaldi tentait un retour au premier plan de la scène vénitienne et choisit un thème qu’il avait déjà abordé à deux reprises, l’une dès 1713 en participant d’assez près à l’élaboration d’un Orlando furioso attribué longtemps à un certain Ristori, et l’autre avec son Orlando finto pazzo (1714) qui ne connut pourtant pas un grand succès. L’Orlando furioso de 1727 obtint cependant un succès triomphal sur la scène du théâtre Sant’Angelo, au point de rester dans l’histoire de la musique comme l’une des plus grandes œuvres du compositeur. De fait, l’opéra explore un large éventail d’émotions, propose des airs de toute beauté, des récitatifs expressifs et une variété musicale extraordinaire, tout en fournissant aux chanteurs un magnifique écrin permettant de mettre en valeur leurs capacités techniques, leur sens poétique ou leur expressivité.
Le plateau réuni sur la scène sur Théâtre des Champs-Elysées est assez proche de celui qui avait déjà défendu l’œuvre avec panache en 2003 et que l’on retrouve dans l’enregistrement publié chez Naïve en 2004 [2]. On retrouve dans l’équipe dirigée par Jean-Christophe Spinosi les mêmes qualités et les mêmes défauts que ce dont témoignait le disque, avec une direction vive, variée et contrastée du chef d’orchestre, toujours attentif aux chanteurs que ce soit pour les récitatifs ou les airs (air de Ruggiero « Sol da te », acte I, par exemple).
La distribution était particulièrement homogène mais comportait deux personnalités hors normes. Jennifer Larmore dessine une Alcina sarcastique (« Alza in quegl’occhi », acte I) et séductrice dont chaque intervention capte l’attention du spectateur. Prenant garde à ne pas rester cantonnée dans un portrait « négatif » de la magicienne, l’interprète sait aussi dresser le portrait convaincant d’une femme amoureuse (« Amorose ai rai del sole », acte I) qui sait pourtant qu’elle ne pourra triompher. Tour à tour provocante (« Vorresti amor da me ? », acte II) et ardente (« Cosi potessi anch’io », acte II), Jennifer Larmore traduit de façon impressionnante la fureur d’Alcina à l’acte III. Ce tempérament hors normes efface toutes les incertitudes vocales, les changements de registres parfois abrupts et le recours épisodique à un parlando expressif.
Son adversaire, la victime pitoyable de l’opéra, Orlando, avait valu à Marie-Nicole Lemieux un légitime succès en 2003. On se réjouissait donc de pouvoir goûter à cette incarnation dans une production scénique et non plus une version de concert, mais malheureusement la chanteuse, annoncée souffrante à la représentation précédente, était encore en sensible méforme quelques jours plus tard. Après un magnifique d’air d’entrée (« Nel profondo cieco mondo », acte I), l’interprète montra une légère tendance à relâcher son attention sur les récitatifs (graves peu soutenus, reprises de souffle très audibles, accents peut-être trop expressifs). Aux prises avec un rôle aux difficultés techniques redoutables (« Sorge l’irato nembo », acte II), la voix perdit hélas son assise et son timbre alors que Jean-Christophe Spinosi galvanisait son orchestre et lui opposait une superbe tempête. Passé cet écueil, la chanteuse boucla avec brio l’ultime scène du second acte, remarquablement secondée par le chef d’orchestre, et imposa une interprétation très émouvante de la folie d’Orlando au cours des deux longues scènes du dernier acte.
L’Angelica de Veronica Cangemi paraissait presque éteinte au début de l’acte I, mais retrouva son mordant et son caractère dès son second air, face à Medoro et Orlando (« Tu sei degl’occhi miei », acte I), puis une sensualité remarquable pour « Chiara al pari di lucida stella » (acte II), magnifiquement accompagnée par l’orchestre. Elle parvient à émouvoir, dans un rôle pourtant antipathique, avec la plainte du troisième acte superbement chantée (« Poverite affetti miei », acte III).
Philippe Jaroussky retrouvait le rôle de Ruggiero dont il possède l’élégance naturelle et proposa une exécution mémorable de « Sol da te mio dolce amore » (acte I). Dans une atmosphère complètement différente, « Come l’onda » (acte III) mit en valeur la sûreté et le mordant des vocalises de l’interprète traduisant ainsi la détermination du personnage. Romira Basso (Medoro), au timbre moins exceptionnel, a fait valoir une voix aux vocalises aisées, très véloces (acte I). La Bradamante de Kristina Hammarström s’est distinguée par une voix corsée, une autorité naturelle séant bien au rôle dont elle exprimait aussi toute la colère (acte II). Christian Senn (Astolfo) enfin, disposait d’une voix ample aux vocalises assurées, particulièrement impressionnant à l’acte II. Les chœurs étaient irréprochables. »
Le Figaro
« Certaines grandes œuvres du répertoire baroque valent avant tout pour la vaillance de leurs interprètes. Ainsi Orlando Furioso d’Antonio Vivaldi (1727), opéra-fleuve au livret statique et à la dramaturgie bancale, mais qui réserve quelques joyaux de musique pure. On était donc heureux de retrouver le contralto québécois Marie-Nicole Lemieux au Théâtre des Champs-Élysées, dans le rôle-titre (personnage qui lui avait valu des débuts flamboyants en 2003). Las, victime d’un rhume vicieux, la chanteuse a dû laisser sa voix en coulisse, mimant son rôle, tandis que la remarquable Delphine Galou, arrivée en urgence, chantait sa partie depuis l’orchestre.
Performance étrange autant que valeureuse pour ces deux artistes qui ont sans doute donné un sursaut de tension à cette production du fameux opéra de Vivaldi. Les autres chanteurs ont joué le jeu, bons camarades. La distribution était dominée par le Ruggiero du contre-ténor Philippe Jaroussky, dont le premier air (sans doute le plus beau de l’œuvre) était une apparition quasi séraphique (et cela en dépit des nombreux tousseurs !). Quelle ligne, quelle aisance, quel raffinement ! L’entendant, les esprits les plus rétifs à cette musique ne peuvent que rendre les armes. À ses côtés, la soprano américaine Jennifer Larmore a fait preuve d’un remarquable engagement scénique dans le rôle d’Alcina, incarnant son personnage jusqu’au bout des ongles. Emportée, hystérique, parfois enjôleuse, parfois vulgaire, elle exploitait toute la gamme des sentiments sans jamais abdiquer le timbre au profit du drame. On sera plus réservé sur l’Angelica de Veronica Cangemi, belle artiste mais parfois à bout de voix, dansant sur le fil du rasoir, avec de vrais problèmes d’émission et de justesse.
Dans la fosse, Jean-Christophe Spinosi dirige cette musique qu’il aime et connaît avec une passion d’amant comblé. Vif-argent, tonique, langoureux, il sait l’animer, la révéler, l’emporter. Sobre et discrète, la mise en scène de Pierre Audi campe dans les gris bleus (superbes lumières de Peter Van Praet), ne cherchant jamais les fanfaronnades, malgré l’emploi chic et toc de chaises géantes, de hauts lustres et de bureaux Louis XVI. »
Webthea
On l’attendait avec impatience ce singulier opéra qu’Antonio Vivaldi (1678-1741) tira du célèbre Roland Furieux de l’Arioste, un sujet, un thème que le « Prêtre roux » travailla et peaufina en diverses versions durant une quinzaine d’années jusqu’à celle créée en 1727 considérée comme définitive. S’inspirant de La Chanson de Roland, chanson de geste et poème épique de la fin du XIème siècle, l’Arioste en fit une parodie poétique où son héros échoué sur une île enchantée est manipulé par une magicienne jusqu’à en devenir fou.
C’est un conte dont la fée est une Carabosse folle de son corps et de ses pouvoirs qui organise le chaos des relations amoureuses des couples qu’elle tient sous sa coupe, jette des sorts, prépare des philtres d’amour pour s’approprier des hommes unis à d’autres femmes. Elle s’appelle Alcina, elle règne sur son île et sur les cœurs. Orlando est épris d’Angelica qui aime Medoro, Ruggiero, le gentil chevalier fiancé à Bradamante, devient la cible de la magicienne qui lui fait perdre la mémoire pour le garder sous sa coupe. Intrigues et cabales, mensonges et illusions, vengeances et subterfuges : les courses poursuites des amoureux s’étirent sur trois actes, jusqu’au délire d’Orlando trompé et bafoué par celle qu’il aime. Happy end : Alcina vaincue, la paix revient dans l’île et la raison aux âmes qui y séjournent.
Depuis une légendaire production signée Pier Luigi Pizzi datée de 1981 qui fit pratiquement le tour du monde, cet Orlando Furioso n’avait plus eu les honneurs d’une scène parisienne alors que fleurissaient des productions, à Francfort, à Bonn, à Prague, à Dallas ou Athènes… En octobre 2003 Jean-Christophe Spinosi et son Ensemble Matheus en présentait au théâtre des Champs Elysées une version de concert dont le label Naïve enregistra un superbe CD. Avec dans les principaux rôles : le contralto canadienne Marie-Nicole Lemieux, la mezzo soprano américaine Jennifer Larmore, la soprano Veronica Cangémi et le contre ténor Philippe Jaroussky, pas encore à l’époque sacré incontournable star des répertoires baroques. Les mêmes se retrouvent dans la fosse et sur la scène du Théâtre des Champs Elysées en ce printemps 2011 et le moins qu’on puisse dire, c’est qu’ils ne déçoivent pas.
On n’en dira pas autant de la mise en scène. D’un Orlando à l’autre, celui de Haendel, vu dans ce même Théâtre des Champs Elysées l’automne dernier avait, entre autres atouts, la fantaisie poétique u metteur en scène David McVicar (voir webthea du 8 novembre 2010). Un parti pris de charme diamétralement opposé à celui de Pierre Audi, 54 ans, directeur depuis 23 ans de l’Opéra d’Amsterdam, qui met au rancart le merveilleux de la fable, ses dragons et son imaginaire et réduit l’ensemble à une veillée funèbre qui se conjugue noir sur noir.. Au premier acte, des panneaux de photographies en négatif représentent l’intérieur d’un improbable palais, au deuxième un lustre géant orné de pendeloques de verre, descend des cintres pour se substituer aux lieux de l’action. Une armée de chaises à tout faire occupent l’espace, un fauteuil surdimensionné est posé à l’envers, des tables couchées-debout sont censés devenir lits ou grottes… Les costumes, également gris et noirs, sont interchangeables. Le troisième acte offre enfin un espace neutre, un grand mur de briques nues qui remplace le donjon où Orlando peut laisser éclater sa folie. Les images ternes et sans relief contredisent l’histoire, et surtout contredisent cette musique si riche en couleurs.
Le plaisir pourtant est au rendez-vous, grâce à Jean Christophe Spinosi et à ses musiciens qu’il fait vibrer en poésie. Trop retenue peut-être, il lui manque le petit grain de folie qui traverse la partition, mais elle est de bout en, bout attentive aux voix et au moral des interprètes. A l’actif de Pierre Audi, la direction d’acteur est impeccable. Violence des sentiments contre morbidité des décors, ils et elles flambent leurs passions et embrasent le plateau. Les nouveaux venus s’intègrent superbement à la magnificence de la distribution d’origine : Romina Basso, mezzo italienne donne à Medoro, l’amant d’Angelica, un timbre généreux et un phrasé impeccable, la Suédoise Kristina Hammarström incarne une Bradamante tout feu tout flamme, Christian Senn, baryton chilien est parfait en Astolfo noble et bienveillant.
Jennifer Larmore, en méchante reine hystérique, est la reine du bal. Elle vocalise, roule, et déroule un chant explosif, tout à la fois en force et en beauté. Elle fait peur, on y croit. Voix d’ange et port de prince, Philippe Jaroussky porte Ruggerio au paradis des amoureux, Veronica Cangemi a la souplesse, le legato et le charme troublé d’une Angelica. Quant à Marie-Nicole Lemieux, ex-lauréate du Concours Reine Elisabeth de Belgique qui nous a plus d’une fois conquis (voir webthea des 5 mars 2007 – Giulio Cesare à Nancy -,19 octobre 2008 – Œdipe d’Enescu à Toulouse – 30 octobre 2010 – Les Troyens à Strasbourg), atteint ici une sorte d’apogée : par l’incroyable richesse de sa voix en ombres et lumières, par son époustouflante performance d’actrice, habitée, hallucinée. Une grande décidément qui, de rôle en rôle, s’offre le luxe de grandir encore à chaque nouvelle prise de rôle. »
Opéra Magazine – avril 2011
« Il y eut d’abord un concert, en 2003 – Michel Franck etJeanine Roze en étaient les producteurs -, suivi d’un enregistrement dans l’Édition Vivaldi voulue par Naïve. Aujourd’hui, Orlando furioso revient, mis en scène, dans une coproduction unissant le Théâtre des Champs- Élysées, dont Michel Franck est devenu le directeur, aux Opéras de Nancy et Nice. Un spectacle élégant, très chic, dont le goût exquis ne risquera pas de froisser les mélomanes n’aimant guère l’aventure. Une fois levé un rideau évoquant les frémissements aquatiques de la lagune vénitienne, Pierre Audi inscrit son travail dans des décors qui, pour les deux premiers actes, utilisent des éléments de gravures dont les noirs et blancs laissent à penser qu’ils ont été tirés en négatifs. Intérieur de riche palais, meubles Louis XV (certains plus grands que nature), parfois renversés, dont la fragilité fait certainement écho au psychisme perturbé des prootagonistes – car, sous ces dehors des plus civilisés, coeurs et esprits sont en émoi.
Au dernier acte, de sinistres murs de briques abritent les dérangements et les dérèglements des personnages, avant de laisser place, une fois la paix revenue, à un fond beige rosé aux nuances chaleureuses. Sans doute Audi a-t-il peaufiné sa direction d’acteurs ; mais sa vision, très esthétisante, peine à faire vivre des héros auxquels on a du mal à s’attacher.
Trois chanteurs ne faisaient pas partie de la distribution originale. Si Christian Senn, baryton stylé et autoritaire, impose aisément son Astolfo, et si le Medoro de Romina Basso a des accents touchants, la Bradamante de Kristina Hammarström devrait être, musicalement, plus disciplinée. Point commun entre les deux cantatrices : une justesse parfois relative.
Fine musicienne, Veronica Cangemi pourrait donner davantage de relief à son Angelica. Envers Jennifer Larmore, le temps s’est montré cruel : la voix, pourtant mieux placée que d’ordinaire, s’est amincie, certaines notes accrochent ; heureusement, l’interprète peut compter sur son charisme pour que son Alcina rayonne. Philippe Jaroussky est la musique même : merveilleuseement épanoui, le timbre est enchanteur, et son « Che bel morirti » de l’acte II est un moment de grâce.
Orlando, c’est Marie-Nicole Lemieux, étonnante, stupéfiante même, et pas seulement parce que le héros, ici, arbore fièrement une barbe. Magistralement contrôlé, le chant affronte toutes les difficultés, virtuosité, legato, dynamique, avec une justesse expressive qui va bien au delà de la simple démonstration. Les souffrances de ce « furioso » attendriraient les pierres ; la scène fmale, proche de l’hallucination, est l’un des moments les plus forts de la saison lyrique en cours.
Au pupitre de son Ensemble Matheus, Jean-Christophe Spinosi retrouve avec enthousiasme son compositeur d’élection, celui qui l’a fait connaître, qui s’harmonise si bien à son tempérament et à son ardeur. Mais le discours, toujours aussi fluide, semble s’être assagi ; le son orchestral s’est lissé, les cordes sont soyeuses, l’homogénéité rassurante. Un brin de naturel en moins, un soupçon de luxe et de volupté en plus. L’âge de raison ? »
Diapason – mai 2011 – Orlando baisse la garde
« L’Orlando furioso de Vivaldi mené par Jean-Christophe Spinosi se voit enfin mis en scène … sans convaincre. 7 octobre 2003, Théâtre des .. Champs-Elysées : en concert, le chef Jean-Christophe Spinosi ravivait la fureur jusqu’alors tronquée d’Orlando devant un public euphorique. Et non content de restituer la partition de l’Orlando furioso de Vivaldi telle qu’elle fut créée au Teatro Sant’Angelo, le fondateur de l’Ensemble Matheus révélait des chanteurs aujourd’hui devenus stars. Rapidement consacré par le disque, ce plateau de rêve a enfin les honneurs de la scène … encore aux Champs-Elysées. Sans renouveler le miracle.
C’est que le spectacle de Pierre Audi, par un cuisant paradoxe, amoindrit l’impact dramatique de l’ouvrage. L’île de la magicienne Alcina se voit circonscrite à un palais vénitien froidement figuré par des clichés en noir et blanc, où le mobilier prend en charge le merveilleux. Cet espace métaphorique opacifie les rapports labyrinthiques entre les personnnages. Surtout, le traitement de la folie du paladin selon un schéma psychologique moderne, donc anachronique, désamorce les audaces de l’écriture, qui enfreint les lois de l’opera seria dans une succession aussi instable qu’inquiétante de récitatifs secs. Habitée bien au-delà d’un chant à la virtuosité aléatoire, ce que le rôle-titre en somme réclame, Marie-Nicole Lemieux y atteignait en concert une dimension hallucinée dont la direction d’acteurs la prive, à force de démence feinte.
Si Veronica Cangemi surjoue et sous-chante son Angelica, Philippe Jaroussky demeure, Ruggiero d’une plénitude limpide, hypnotique même. Mais sur l’équipe initiale, l’Alcina de Jennifer Larmore a, malgré ces bizarreries d’émission que le temps n’a pu qu’accentuer, l’avantage d’un abattage ensorcelant, d’une enjôleuse perfidie. Nouvelles venues à la couleur quasiment interchangeable, Kristina Hammarström et Romina Basso s’opposent : l’une, Bradamante dont la ligne parfaitement lisse peine à s’animer, l’autre sculptant savamment la matière sans relief de Medoro. Mais il aurait fallu, pour que les planches brûlent, que la fosse s’ennflamme. Jean-Christophe Spinosi maintient les couleurs, les galbes de son Ensemble Matheus dans une sorte de flou dramatique séduiisant mais lointain, ponctué d’effets dynamiques à la vitalité émoussée. Un comble pour le chantre de la stravaganza vivaldienne ! «
Opéra de Francfort – 14, 19, 27 novembre, 3, 9 décembre 2010 – dir. Felice Venanzoni – mise en scène David Bösch – décors Dirk Becker – costumes Meentje Nielsen – lumières Olaf Winter – dramaturgie Zsolt Horpácsy – lumières Olaf Winter – avec Daniela Pini (Alcina), Brenda Rae (Angelica), Simon Bailey (Astolfo), Katharina Magiera (Bradamante), Paula Murrihy (Medoro), Mary-Ellen Nesi (Orlando), Valer Barna-Sabadus (Ruggiero)
Opéra de Francfort – 14, 18, 21, 26 février, 6, 12, 14, 20, 31 mars 2010 – dir. Andrea Marcon – mise en scène David Bösch – décors Dirk Becker – costumes Meentje Nielsen – dramaturgie Zsolt Horpácsy – lumières Olaf Winter – avec Daniela Pini (Alcina), Brenda Rae (Angelica), Florian Plock (Astolfo), Katharina Magiera (Bradamante), Paula Murrihy (Medoro), Sonia Prina (Orlando), William Towers (Ruggiero) – nouvelle production
Théâtre de Bâle – 29 mai, 1er, 4, 7, 13, 15, 17, 19 juin 2009 – Barockorchester Basel La Cetra – Schola Cantorum Basiliensis – dir. Andrea Marcon – mise en scène Barrie Kosky – décors, costumes Esther Bialas – lumières Guido Hölzer – dramaturgie Ute Vollmar – avec Delphine Galou (Orlando), Franziska Gottwald (Alcina), Susanne Blattert, Maya Boog (Angelica), David DQ Lee (Ruggiero), Andrew Murphy (Astolfo), Stephanie Hampl (Bradamante), Iestyn Morris (Medoro)
Opéra de Bonn – 19 octobre 2008 – dir. Rubén Dubrovsky – mise en scène Werner Schroeter – décors, costumes Alberte Barsacq – chef de choeur Sibylle Wagner – avec Mariselle Martinez (Orlando), Anna Virovlansky (Angelica), Susanne Blattert (Alcina), Katrin Wundsam (Bradamante), Julia Kamenik (Medoro), Terry Wey (Ruggiero), Martin Tzonev /Lee Poulis (Astolfo) – nouvelle production
Rome – Auditorium du Parco della Musica – 16 octobre 2008 – version de concert – Accademia Nazionale di Santa Cecilia – Orchestra Barocca di Venezia – dir. Andrea Marcon – avec Romina Basso (Orlando), Manuela Custer (Alcina), Sylva Pozzer (Angelica), Anna Rita Gemmabella (Bradamante), Jordi Domenech (Medoro), Xavier Sabata (Ruggiero), Lorenzo Regazzo (Astolfo)
Amsterdam – Het Concertgebouw – 3 mai 2008 – version de concert – Venice Baroque Orchestra – dir. Andrea Marcon – avec Marie-Nicole Lemieux (Orlando), Manuela Custer, Inga Kalna, Anna Rita Gemmabella, Stéphanie d’Oustrac, David DQ Lee, Lorenzo Regazzo
Edimbourg – Usher Hall – 12 août 2007 – version de concert – Scottish Chamber Orchestra Chorus – chef des choeurs Mark Hindley – Scottish Chamber Orchestra – dir. Jean-Christophe Spinosi – avec Sonia Prina (Orlando), Jennifer Larmore (Alcina), Veronica Cangemi (Angelica), Philippe Jaroussky (Ruggiero), Christian Senn (Astolfo), Barbara Di Castri (Bradamante), Daniela Pini (Medoro)
Magdebourg – Theater der Landeshauptstadt – 5, 14 avril, 25 mai 2007- dir. Jan Michael Horstmann – mise en scène Sebastian Hartmann – décors Sebastian Hartmann – costumes Kristin Hassel – avec Ulrike Mayer, Denise Pelletier, Peter Diebschlag, Roland Fenes, Ulf Dirk Mädler, Paul Sketris
Brême – BLG-Forum Überseestadt – 5 septembre 2006 – version de concert – Ensemble Matheus – dir. Jean-Christophe Spinosi – avec Marijana Mijanovic, Maria Riccarda Wesseling, Veronica Cangemi, Franco Fagioli, Anna Bonitatibus, Blandine Staskiewicz, Barbara di Castri, Christian Senn, Max Emanuel Cencic
Gênes – Teatro Carlo Felice – 9, 11 décembre 2005 – en version de concert – dir. Alan Curtis – avec Sara Mingardo (Orlando), Laura Aikin (Angelica), Annarita Gemmabella (Bradamante), Christophe Doumaux (Medoro), Vito Priante (Astolfo), Franco Faggioli (Ruggiero)
Toulouse – Halle aux Grains – 6 novembre 2004 – Bruxelles – 9 novembre 2004 – en version de concert – Ensemble Matheus – Choeur Les Éléments – dir. Jean-Christophe Spinosi – avec Veronica Cangemi (Angelica), Jennifer Larmore (Alcina), Marie-Nicole Lemieux (Orlando), Lorenzo Regazzo (Astolfo), Philipe Jaroussky (Ruggiero), Ann Hallenberg (Bradamante), Blandine Staskiewicz (Medoro)
Festival d’Ambronay – Abbaye d’Ambronay – 4 octobre 2003 – Théâtre des Champs Elysées – 7 octobre 2003 – version de concert – Ensemble Matheus – dir. Jean-Christophe Spinosi – avec Marie-Nicole Lemieux (Orlando), Veronica Cangemi (Angelica), Jennifer Larmore (Alcina), Maria Pizzolato (Bradamante), Philippe Jaroussky (Ruggiero), Lorenzo Regazzo (Astolfo), Guillemette Laurens (Medoro)
Opéra International – février 2004 – 17 décembre 2003
« …un Orlando furioso magistralement interprété par Jean-Christophe Spinosi et son ensemble Matheus. La distribution, perfectible, en avait pourtant été souvent exceptionnelle, de l’intelligence et de la finesse de l’Alcina de Jennifer Larmore aux sommets d’émotion pure atteints par Philippe Jaroussky – divin Ruggiero -, en passant par la prestation étonnante et tonitruante de Marie-Nicole Lemieux dans le rôle-titre. »
Diapason – décembre 2003
« Il était une fois une Belle au bois dormant, ou un paladin furieux, peu importe, qui se réveilla d’une léthargie incompréhensible de vingt ans. Le prince d’hier était un Padouan fantasque, illusionniste superbe sautant sans vergogne une page sur deux du conte, pour plaire àsa belle. Le prince d’aujourd’hui a l’âge du rôle, la fougue de la jeunesse, ses emportements et sa foi, un charisme irrésistible et un respect intransigeant du texte récité. Le public du TCE, livret Erato à la main, flottait dans la perplexité devant l’étrange prologue restauré, jusqu’à ce que retentisse enfin «Nel profondo cieco mondo », la bouée tant attendue à laquelle se raccrocher. Ni Home, ni Stutzmann, ni Podles. Mais Marie-Nicole Lemieux, paladin fissuré par un abyssal besoin de tendresse, que l’Arioste, qui imaginait son héros tout d’un bloc, eût méprisé, mais que le public, lui, demandait. Ovation chaleureuse. Qu’importe si le métal de la cuirasse aux rondeurs généreusement offertes, restait trop tendre. La folie orlandienne des derniers actes gagna en humanité – fabuleux récits – ce qu’elle perdit de tragédie. Dans la queste d’amour, Spinosi et le contralto canadien se sont reconnus. Temps forts inoubliables le « Solda te » délicat, magique, de Philippe Jaroussky (Ruggiero) et les airs de Lorenzo Regazzo (Astolfo), merveilles d’intelligence et de souffle. Jennifer Larmore (Alcina), perdue au bout d’un plateau trop étalé, dans un immense « Vorresti amor da me », compenser par son jeu et un timbre somptueux, les fatigues du temps, son choix de tempos étirés et les décalages avec l’orchestre. Veronica Cangemi (Angelica) et Guillemette Laurens (Medoro) franchirent subtilement l’obstacle de rôles trop graves pour elles. Craquant soprano argentin dans « Chiara alpari di lucida stella ». Habile et poétiquement habité «Vorrebe amando » de Medoro, en difficulté cependant dans les vocalises napolitaines de « Rampa i ceppi ». De Mariana Pizzolato, Bradamante peu typée, mais timbre intéressant, ne retenons que l’expressif «Taci non ti lagnar ». Matheus et son mentor, ce soir-là, ont quitté les promesses de l’aube. Conquête triomphale. Les fâcheux guettaient, dans l’orchestre, le tic convulsif, le soubresaut rageur. Frustration. La ligne précise, claire mais frémissante des archets et des vents pointait, à tout moment, le niveau d’excellence, malgré quelques distorsions de mise en place, surtout dans les récits. Seule vraie faute de béotien : la césure interminable entre récits et airs, immobilisant l’action. Spinosi-le-preux mérite les lauriers qui ceignent désormais son front. »
Operabase – 4 octobre 2003
« La distribution est d’autant plus remarquable qu’il s’agit d’un « opéra de mezzos ». Même Veronica Cangemi, étrangement présentée comme soprano, chante en voix de poitrine une bonne partie du rôle d’Angelica, que l’on ne saurait qualifier d’aigu ! On peut même se demander si le diapason choisi n’est pas nettement plus bas que celui de la création, tant il est étonnant que toutes les voix soient confinées dans des tessitures graves. Le problème était dès lors de réunir des voix graves aux timbres suffisamment contrastés, et que ces chanteuses soient disponibles en même temps ! Cette brillante distribution est magnifiquement entraînée et soutenue par l’ensemble Matheus, composé d’excellents instrumentistes menés avec tonicité et souplesse par Jean-Christophe Spinosi, qui semble avoir repris le flambeau de la direction bondissante de Marc Minkowski. Les cordes sont suffisamment étoffées, et ni la précision ni la tendresse des mouvements lents ne sont sacrifiées sur l’autel de la virtuosité. La cohésion du groupe et le plaisir à jouer ensemble ne semblent jamais empêcher chaque musicien de s’exprimer et de donner le meilleur de lui-même.
Si le cadre de l’abbatiale n’est pas idéalement adapté à une telle oeuvre, la chaleureuse ambiance du festival compense cet inconvénient et le public a généreusement manifesté son enthousiasme à la fin du concert. L’acoustique de l’abbatiale est meilleure et moins réverbérante que d’autres comme Beaune, où les productions lyriques du festival de Beaune sont transférées en cas de mauvais temps. Certes, la réverbération ramollit quelque peu l’interprétation, mais elle flatte par contre les voix. Marie-Nicole Lemieux, lauréate du concours Reine Élisabeth de Belgique en 2000, « explose » littéralement dans ce rôle, où elle manifeste une énergie et une folie (à peine !) contrôlées. Peut-être lui reste-t-il à peaufiner l’homogénéité de ses registres et de sa ligne vocale. Les contrastes sont naturellement bienvenus dans ce répertoire, mais certaines notes sonnent un peu creux, tandis que du souffle s’échappe parfois dans les passages d’agilité, souvent émis trop larges. La voix est par contre spontanément belle et pleine dans les passages lents et sur les valeurs longues.
Marianna Pizzolato possède une voix d’un beau métal, soutenue par une technique solide. Jennifer Larmore, que l’on aurait attendue en Orlando en tant qu’héritière de Marilyn Horne, est une excellente et sonore Alcina, qui pourrait sans doute encore donner plus de variété d’accents à son personnage. La voix de Philippe Jaroussky semble avoir enfin acquis un peu de corps. Le merveilleux flûtiste (Jean-Marc Goujon) qui accompagne son air de la fin du premier acte ajoute encore au plaisir de sa musicalité et l’acoustique le met bien en valeur. Lorenzo Regazzo serait un idéal Emireno d’Ottone de Haendel, avec son timbre sombre sans trop d’artifices (malgré ses mimiques très expressives !) et ses vocalises implacables. Veronica Cangemi a une voix très séduisante mais qui semble se chercher un peu, en direction de graves qu’elle ne possède peut-être pas intrinsèquement. Dans son rôle d’Angelica, elle abuse de sons trop ouverts, notamment en finales et dans le grave sur des voyelles ouvertes. Ses ouvertures buccales sont alors excessives et trop en « pavillon ». L’ouverture de la mâchoire est encore accentuée par la tête qu’elle penche simultanément en arrière. Elle émet ainsi de nombreux sons graves en poitrine brute, de telle sorte qu’ils semblent en-dehors de sa voix et presque non chantés. Sans doute gagnerait-elle à maintenir une certaine impédance à son émission, grâce à un ajustement phono-résonantiel plus efficace, ou autrement dit une certaine rondeur de timbre et un équilibre de ses harmoniques. Le seul défaut de cette production est finalement l’absence de mise en scène, que l’on regrette d’autant plus que Marie-Nicole Lemieux a un tempérament scénique indéniable! Les récitatifs ont du coup été largement amputés, ce qui améliore peut-être la densité musicale de l’ensemble mais rend les situations encore plus difficiles à comprendre. L’absence de mise en scène aurait peut-être rendu les récitatifs ennuyeux pour une partie du public, mais elle les rendait aussi d’autant plus nécessaires pour donner au public le temps de rentrer dans chaque situation et de se préparer au traitement musical de chaque affect. Un enchaînement trop rapide des airs risque de traduire une certaine gratuité et superficialité. Espérons que ces récitatifs seront rétablis dans la version discographique à venir. »
ConcertoNet
« Avec la recréation de l’Orlando Furioso s’ouvre au Théâtre des Champs-Elysées un nouveau cycle consacré à Antonio Vivaldi. Ce projet qui s’étendra sur plusieurs saisons a pour vocation de faire connaître et redécouvrir des oeuvres inexplorées, voire perdues, du compositeur vénitien. Pour cette partition, Jean-Christophe Spinosi et le musicologue Frédéric Delaméa se sont appuyés sur un manuscrit autographe turinois et ont tenté de restituer la sinfonia manquante et deux airs (de Ruggiero et d’Alcina).
La distribution est de haut vol et contribue à rendre toutes ses lettres de noblesse à cette oeuvre trop peu connue. Dans le rôle-titre qui a échu à la canadienne Marie-Nicole Lemieux (à la suite de l’annulation de Nathalie Stutzmann), cette jeune chanteuse, découverte et reconnue grâce à sa triomphale victoire au concours Reine Elisabeth de Belgique, est époustouflante de virtuosité et d’intensité dramatique. Elle conquiert immédiatement la salle avec son premier air très vif et très difficile dans lequel elle se donne au maximum. Mais c’est surtout dans la scène de folie du 3ème acte qu’elle se montre le plus extraordinaire. De connivence avec le chef, elle installe une petite mise en scène puisqu’elle évolue sur la scène du théâtre, danse, fait déplacer des personnages et entraîne Jean-Christophe Spinosi à reprendre son violon pour en jouer quelques notes. Le rôle d’Orlando lui convient parfaitement et sa voix étonne par sa puissance, sa clarté et sa parfaite diction. En outre, en tant que véritable contralto, ses graves sont soutenus et imposants. Une grande comédienne et une grande chanteuse !
Veronica Cangemi ne commence pas très bien le concert mais se rattrape dès son deuxième air. La partition est peut-être un petit peu trop grave pour elle et ce n’est qu’au moment de la scène de la folie d’Orlando où elle chante un passage bref mais charmant que l’on retrouve la clarté et la brillance de sa voix et surtout son timbre propre. Elle ne cherche pas à faire des effets et reste très respectueuse de la partition de Vivaldi et, comme toujours, séduit par la plénitude de sa voix.
Guillemette Laurens campe un amoureux attentionné et délicat. Sa voix, certes, n’est plus celle de Cybèle d’Atys mais elle garde cette musicalité et cette intériorité qui font reconnaître cette chanteuse parmi tant d’autres. Là aussi, le rôle semble trop grave pour elle et parfois on éprouve quelques difficultés à distinguer ses notes à travers l’orchestre. Mais ces minces réserves s’évanouissent en entendant toute la puissance dramatique qu’elle prodigue à certains sons.
Philippe Jaroussky, qui avait triomphé il y a deux ans dans La Verita in Cimento, trouve dans le rôle de Ruggiero de très beaux airs qui permettent d’entendre sa voix suave et éthérée. Elle ne cesse, d’ailleurs, d’évoluer et ses graves commencent à se développer, au détriment peut-être de ses aigus qui restent toutefois toujours aussi impressionnants. En revanche sa musicalité continue à mûrir et à chaque concert il enrichit son approche de la musique et les personnages commencent à prendre forme dans sa voix. Vivaldi est un compositeur qu’il chante très souvent et qui lui convient parfaitement car il se montre tout aussi à l’aise dans les arias di tempesta que dans les airs plus dramatiques et donc plus lents, mais aussi plus beaux.
Lorenzo Regazzo, Claude récemment dans Agrippina sur cette même scène, confirme l’excellence de sa voix et de son interprétation. Il semble ne faire aucun effort pour chanter et se joue de toutes les difficultés de son texte. Vivaldi demande beaucoup au niveau du souffle et le chanteur arrive à couper au milieu d’une vocalise mais sur un decrescendo et reprend ensuite sur un crescendo, ce qui atténue fortement cette coupure : il en ressort un effet dramatique. Jennifer Larmore, au contraire, n’hésite pas à arrêter net la vocalise et à reprendre sur un fortissimo, ce qui est assez inaudible et de mauvais goût.
Mariana Pizzolato, appelée à la rescousse pour interpréter Bradamante, se sort très honorablement de son rôle. Sa voix n’est pas très typée mais elle a un beau duo avec Philippe Jaroussky.
Reste le problème que pose la participation de Jennifer Larmore dans ce concert. Elle semble très mal à l’aise et cela se ressent sur son interprétation. Même si la mezzo a déjà chanté dans quelques productions baroques comme Jules César, elle n’est pas forcément une chanteuse typiquement baroque. Sa voix est trop lourde et pas assez souple pour dégager une émotion propre dans le répertoire vivaldien. Dans le premier air qu’elle chante, elle manque de souffle et son interprétation ne mène nulle part. Elle semble aussi assez étrangère à la grammaire baroque notamment dans les cadences puisqu’elle se trouve constamment en décalage avec l’orchestre, soit trop tôt, soit trop tard.
Jean-Christophe Spinosi et son ensemble Matheus sont en passe de devenir de grands spécialistes de Vivaldi et leur triomphe à l’issue de la soirée était à la hauteur du plaisir ressenti par les spectateurs. Le chef est toujours aussi vigoureux et vif et il fait merveille dans les passages qui demandent de l’énergie. Certes, mais son contact prolongé avec Vivaldi lui permet de développer de nouvelles harmonies et surtout de nouveaux tempi et il sait donner de magnifiques pianissimi, comme dans la sinfonia. Les différents pupitres sont excellents et principalement les violons. A noter le solo du flûtiste Jean-Marc Goujon, modèle de pureté et d’intelligence. »
Le Monde de la Musique – novembre 2003
« une distribution de haut vol. L’alto québecquoise Marie-Nicole Lemieux incarne le rôle-titre avec une insolente aisance dramatique. Même ivre de fureur et de jalousie (impressionnante scène de la folie), son personnage maintient une ligne vocale colorée et souple. Le paladin s’oppose au Medoro vaillant de Guillemette Laurens qu’aime passionnément la douce et palpitante Angelica de Veronica Cangemi. L’Astolfo truculent de Lorenzo Regazzo et le Ruggiero aérien de Philippe Jaroussky accompagnent l’infortuné chevalier . Ensemble ils tentent de déjouer les pièges de la magicienne Alcina (Jennifer Larmore bien discrète). L’Ensemble Matheus répond au doigt et à l’oeil à son énergique chef. Sautillant comme un boxeur sur un ring, n’hésitant pas à se déhancher ou à caresser la courbe musicale, Jean-Christophe Spinosi, tel un Bernstein du baroque, ne ménage pas sa peine. On regrette qu’une interprétation qui soigne autant la nuance ne bénéficie pas d’une acoustique mieux adaptée et plus généreuse que celle du TCE. »
ConcertClassic
« Représenté pour la première fois au Théâtre San Angelo de Venise, l’Orlando Furioso d’Antonio Vivaldi illustre le sommet de la production du compositeur. Dans cette « Capitale du nord » déjà artistiquement gagnée par la veine napolitaine et dont le public s’enthousiasme devant des Farinellis, l’ouvrage du Prêtre roux, est relativement accueilli. Et pourtant, en un certain sens, l’art vivaldien, celui du théâtre vénitien par excellence, y est plus vif et plus abouti que jamais.
Les Productions Jeanine Roze se devaient donc d’inscrire en figure de proue de leur « Cycle Vivaldi » cet opéra à la construction audacieuse. Et force est de constater que s’il y a de cela plus de deux siècles la réception de l’œuvre ne fut pas à la hauteur des attentes du compositeur, l’entreprise d’aujourd’hui a littéralement fait lever tous les auditeurs du concert. Pour ceux qui connaissaient déjà l’enregistrement que Jean-Christophe Spinosi et son Ensemble Matheus avaient dédié à La Verita in cimento (disque Naïve), il ont pu ce soir là retrouver en live la même finesse et précision orchestrale, le même geste si précis, la même qualité dans la distribution vocale. Il faut dire que Spinosi ne lésine pas dans son choix quand il convoque sur scène parmi les plus hautes pointures du chant.
S’il était originalement prévu pour Nathalie Stutzmann (désistée peu avant les représentations), le rôle d’Orlando a fait ici toute la surprise ! Elle était remplacée au pied levé par la contralto québécoise Marie-Nicole Lemieux, et le public n’a pas perdu au change… Véritable révélation parisienne (et française), la jeune artiste a d’emblée séduit toute la salle, par son exceptionnelle présence, son timbre aussi coloré que vocalement parfait, par son expressivité à toute épreuve. Au moment où Orlando devient fou (démesurément plus d’ailleurs que la « Folie » platéienne de Rameau), au moment où il danse et délire, Lemieux n’est plus une interprète. Elle EST le personnage. Et elle fascine.
Ajoutons à cette belle incarnation la remarquable assise vocale de Jennifer Larmore qui, en diabolique magicienne, émeut jusque dans la pure virtuosité, ou Veronica Cangemi dont la fragilité et la douceur se calquent sur des modèles d’éloquence… Et c’est sans compter les « seconds » rôles comme ceux tenus par un ingénu et touchant Philippe Jaroussky, par une Guillemette Laurens au faîte de sa forme vocale (à la fois expressive et dans le souffle) , ou un Lorenzo Regazzo dont la lucidité scénique et musicale donnait à son personnage (en réalité de peu d’importance) une incroyable consistance. Exception faite de Marianna Pizzolato (techniquement médiocre), on ne pouvait pas ne pas adorer… »
Jeanine Roze Production – A propos de la restitution
« La partition d’Orlando (furioso), préservée sous forme autographe dans le fonds Giordano 39 bis de la Bibliothèque Nationale de Turin, requiert des forces instrumentales et vocales d’un niveau exceptionnel, tant en nombre qu’en qualité. La riche orchestration de l’oeuvre fait en effet appel à l’orchestre à cordes à quatre parties, auquel se joignent ponctuellement une flûte traversière, deux cors de chasse et deux trompettes, tandis que la distribution vocale, minutieusement élaborée par Vivaldi, exige la réunion de sept chanteurs présentant non seulement de grandes capacités techniques et expressives, mais également une subtile variété de timbre et de couleur pour nuancer chacun des quatre rôles écrits dans les tessitures de mezzo-soprano et de contralto. Toutes ces exigences ont été respectées de manière scrupuleuse lors de la préparation de cette production. L’orchestration originale a été intégralement rétablie et l’élaboration de la distribution a été opérée dans le plus strict respect des caractéristiques musicales et dramatiques spécifiques conférées par Vivaldi à chacun de ses personnages, Un important travail préparatoire a été opéré sur les sources manuscrites, afin de rétablir la version originale de l’oeuvre. Le manuscrit turinois constitue en effet une source particulièrement complexe, mêlant des feuillets soigneusement calligraphiés à des feuillets griffonnés à la hâte et comportant de multiples insertions, fragments ou retranchements, ainsi qu’une numérotation irrégulière des scènes. La sinfonia initiale ainsi que deux airs mentionnés dans le livret imprimé sont de surcroit absents du manuscrit. Ce n’est donc qu’au terme d’une patiente analyse de cette source composite qu’il a été possible de rétablir le texte musical original dans son intégrité. L’absence de sinfonia a été comblée selon une pratique attestée de Vivaldi et de ses contemporains, en procédant a son emplacement au moyen d’une oeuvre du compositeur présentant les même caractéristiques structurelles que ses ouvertures d’opéra et appartenant à la même période créatrice qu’Orlando (furioso). L’air manquant de Ruggiero au 3ème acte a pu être retrouvé dans une autre partition de Vivaldi tandis que l’air manquant d’Alcina dans le même acte a été remplacé par un air contemporain composé par Vivaldi pour Anna Giro, interprète d’Alcina, et dont les caractéristiques musicales et expressives s’adaptent idéalement au contexte dramatique de l’air perdu. Ainsi reconstituée, et sous réserve des coupures de récitatifs rendues nécessaires pour tenir compte des conditions d’écoute dans le cadre d’un concert, la partition interprétée se rapproche au plus près de la version complète de l’Orlando (furioso) de Vivaldi, telle qu’elle fut jouée pour la première fois en 1727, et telle qu’elle n’a plus jamais été entendue depuis. »
Athènes – 10, 12, 15, 17, 19 janvier 2003 – nouvelle production – dir. Vassilis Christopoulos – mise en scsène Maria Giparaki – décors et costumes Francesco Zito – avec Marina Fideli (Alcina), Maria Katsouli (Angelica), Marita Paparizou (Orlando), Nikos Spanos (Ruggiero), Margarita Sigeniotou (Medoro), Mary-Elen Nezi (Bradamante), Petros Magoulas (Astolfo)
« Une salle comble, un public jeune et enthousiaste, l’Orlando furioso de Vivaldi n’a pas raté sa première apparition sur une scene grecque…Le jeune chef Vassilis Chrisstopoulos a le sens des couleurs, du rythme théâtral à donner à une telle oeuvre…La vie du spectacle repose en grande partie sur son intelligente et brillante direction. Installé à Athènes, Aris Christofellis a joué ici le rôle de conseiller stylistique, ce qui donne une belle homogénéité à l’interprétation vocale. Même si l’Orlando de Marita Paparizou n’est qu’une assez lointaine image de celui de Marilyn Home, même si l’Astolfo de Petros Magoulas a la voix un peu droite et raide, l’ensemble de la distribution est tout l’honneur de l’école de chant grecque, qui est pourtant considérée comme l’une des plus médiocres en Europe. Le jeune Nikos Spanos est un Ruggiero sensible, dont le jeu scénique est porté spontanément par la musique…Marta Katsouli, voix claire, colorée, émise avec franchise, est aussi une excellente Angelica et Marina Fideli campe une bien belle Alcina. Aucun reproche à adresser au Medoro de Margarita Sigeniotou, ni à la Bradamante de Mary-Elen Nezi…Reconnaissons que la direction d’acteurs de Maria Giparaki est minimaliste, chacun semblant livré à lui-même, sans aucune vraie tentative de caractérisation des personnages, autrement que par quelques gestes et mouvements convenus…En outre, les costumes de Francesco Zito sont d’un goût parfait, dans l’esprit d’un XVIIIe siècle orientalisant et féerique du meilleur effet. (Opéra International – mars 2003)
Darmstadt – Staatstheater – 15, 29 septembre 2002, 3, 29 octobre 2002, 12, 24, 30 novembre 2002 – dir. Raoul Grüneis – mise en scène Rosamunde Gilmore – décors, costumes Carl Friedrich Oberle – avec Hans Christoph Begemann (Orlando), Lauren Francis (Angelica), Susanne Reinhard (Alcina), Katrin Gerstenberger (Bradamante), Fred Hoffmann (Medoro), Arno Raunig (Ruggiero), Werner Volker Meyer (Astolfo)
Festival d’Opéra de Barga – 21, 23, 25 juillet 2002 – Ensemble Modo Antiquo – Federico Maria Sardelli – mise en scène Francesco Micheli – décors Nicolas Bovey – en collaboration avec Istituto Italiano Antonio Vivaldi, la Westdeutscher Rundfunk, la Rivista Amadeus. avec Anne Desler (Orlando), Marina De Liso (Alcina), Luca Dordolo (Medoro), Thierry Grégoire (Ruggiero), Nicki Kennedy (Angelica), Lucia Sciannimanico (Bradamante), Martin Kronthaler (Astolfo)
Opéra de Prague – 18, 22, 25, 28 octobre, 1er, 4, 7, 11, 15, 18 novembre 2001 – Orchestre e Coro Camerata Nova – dir. Jiri Kotouc – mise en scène et décors Gilbert Blin – costumes Josef Jelinek – avec Jana Sykorova, mezzo-soprano (Orlando), Ludmilla Vernerova, soprano, Pavla Vykopalova, contralto, Virginia Correa Dupuy, contralto, Tomas Cerny, ténor, Roman Janal, ténor, Ales Hendrych, basse
Lauf (Pegnitz) – Dehnberger Hoftheater – mai 2001 – coproduction avec l’Opéra de Nuremberg – Nürnberger Philharmoniker – dir. Wolfgang Riedelbach – mise en scène Susanne Frey – avec Frances Pappas (Alcina), Jutta Böhnert (Angelica), Rebecca Martin (Orlando), Dariusz Siedlik (Ruggiero), Albertus Engelbrecht (Medoro), Marina Prudenskaya (Bradamante)
Wuppertaler Opernhaus – 1996 – avec Veronika Waldner (Alcina), Melba Ramos (Angelica), Annette Jahns (Bradamante), Tom Erik Lee (Ruggiero)
San Francisco – 19, 24 et 30 novembre, 3, 6 et 9 décembre 1989 – dir. Randall Behr – mise en scène Pier Luigi Pizzi – avec Marilyn Horne (Orlando), Susan Pattterson (Angelica), Kathleen Kuhlmann (Alcina), Sandra Walker (Bradamante), Jeffrey Gall (Ruggero), William Matteuzi (Medoro), Kevin Langan (Astolf)
Paris – T.M.P. – Festival de France – 20 mai 1981 – dir. Claudio Scimone – avec Marilyn Horne (Orlando), E. Pruett, Browne, Hovasse, Raffanti, James Bowman (Ruggiero), Nicolas Zaccaria
Nancy – 8 mai 1981 – dir. Amaducci – avec Wallis, E. Pruett, Browne, Raffanti, james Bowman, Hubert
Vérone – Teatro Filarmonico – 15 juin 1978 – adaptation et dir. Claudio Scimone – avec Marilyn Horne (Orlando), Tomaszewska Schepis, Browne, Gallmetzer, Raffanti, James Bowman (Ruggiero), Nicolas Zaccaria