Pomone (Robert CAMBERT)

COMPOSITEUR Robert CAMBERT
LIBRETTISTE Pierre Perrin
DATE DIRECTION EDITEUR NOMBRE LANGUE FICHE DETAILLEE
2004 Hugo Reyne Accord 2 français

Pomone, opéra ou représentation en musique, Pastorale en cinq actes et un prologue, sur un livret de Pierre Perrin, premier « opera » français représenté, avec grand succès, pour l’inauguration de l’Académie royale des opéra, dans le théâtre du Jeu de paume de la Bouteille, le 3 mars 1671.

Perrin, détenteur du privilège d’Académie d’opéra (*) depuis le 28 juin 1669, s’était associé avec Alexandre de Rieux, marquis de Sourdéac (mort en 1695), machiniste, et son inséparable Laurent Bersac, qui se faisait appeler sieur de Champeron. Les répétitions eurent à l’hôtel de Nevers, dans la grande galerie, partie du palais construit par le cardinal Mazarin, mis à disposition par le marquis de Mancini. C’est là qu’eut lieu une représentation privée, le 12 juin 1670, puis une autre, le 24 juin, dans la salle du Jeu de paume du Béquet (**) ou de Bel-Air (***), rue de Vaugirard, que Perrin avait louée pour les représentations, le 13 mai précédent.
(*) « Privilège accordé au sieur Pierre Perrin pour l’establissement des Académies d’opéra, ou représentations en musique, en vers françois, à Paris et dans les autres villes du Royaume, pendant l’espace de douze années. » voir texte intégral infra

(**) le nom de Béquet est celui de la famille qui était propriétaire des terrains, rachetés plus tard par la famille Patru.

(***) Le Jeu de paume du Béquet était appelé aussi de Bel-Air, nom donné au territoire situé de l’autre côté de la rue de Vaugirard. Un cabaret de Bel-Air se tenait dans le voisinage, tenu par le beau-père de Michel Lambert.

Les représentations publiques ne purent avoir lieu du fait des deffenses verbales faites de la part du lieutenant de police La Reynie, ce qui obligea les associés à rechercher une autre salle, celle du jeu de paume de la Bouteille, rue des Fossés de Nesles, entre les actuelles rue de Seine et la rue Mazarine (actuel n° 42). La salle fut louée – cette fois par Sourdéac et Champeron, se prévalant du privilège qu’ils considéraient avoir obtenu sous le nom de Pierre Perrin – le 8 octobre 1670, et dut être aménagée en salle de spectacle, ce qui fut fait en cinq mois.
Jeu de Paume de la Bouteille, détruit en 1688
Le succès – surtout des décors et des machines – fut immense, et l’oeuvre ne connut pas moins de cent-quarante-six représentations, sur treize mois. D’après Saint-Évremond : Les représentations en furent si bien goûtées qu’elles durèrent un temps très considérable sans discontinuation, avec un fort grand concours… Ce même Saint-Évremond rapporte que la poésie en était fort méchante, la musique belle. Monsieur de Soiurdéac en avait fait les machines. C’est assez dire, pour nous donner une grande idée de leur beauté : on voyait les machines avec surprise, les danses avec plaisir, on entendait le chant avec agrément, mais les paroles avec dégoût.
Le succès fut tel que l’affluence entraîna des désordres graves, le personnel de la Maison du roi ayant l’habitude d’assister aux représentations théâtrales sans payer. Des archers furent installés aux portes de la salle, qui durent affronter pages, laquais et gens de livrée. Une ordonnance de police dut être prise le 23 mai 1671 menaçant des galères les contrevenants.
Le prix des places allait, selon Castil-Blaze, d’un louis d’or (11 livres et 10 sous) pour une place aux balcons, à 7 livres et 4 sous pour une première loge, 3 livres et 12 sous pour une seconde loge, et 1 livre et 16 sous pour une troisième loge ou au parterre. Le jour de la première représentation, les billest se vendirent jusqu’à 15 livres.
La distribution comprenait cinq chanteurs, quatre chanteuses, quinze choristes et treize « symphonistes ».
Parmi les chanteurs et chanteuses, Mlle Cartilly (*) (Pomone), grande, bien faite, mais assez laide ; la basse-taille (baryton) Beaumavielle (Vertumne), languedocien, grand, laid, mais ayant l’air noble au théâtre, bon chanteur et aussi premier acteur de son temps, qui chanta jusqu’à sa mort en 1688 ; la basse-taille Rossignol (Faune) ; le haute-contre Clédière, qui chanta à l’Académie royale jusqu’en 1680, et Pierre Taulet (ou Tholet) (haute-contre) ; Jean Bourel-Miracle ou Borel de Miracle (taille), qui quitta l’Opéra après un petit rôle dans Cadmus et Hermione. D’autres chanteurs faisaient partie de la troupe : Tranquille Le Tellier, Anthoine Lemercier, Marie Hardy, âgée de seize ans, Marie-Elisabeth Boüet. Les ballets étaient réglés par Des Brosses, puis par Beauchamps, avec parmi les danseurs – tous masculins – Saint-André, Favier et Lapierre ; les machines étaient imaginées par le marquis de Sourdéac.
(*) Marie-Madeleine Jossier (vers 1650 – 1717), épousa Christophe Cartillier, un des valets de pied de Louis XIV, dit Cartilly, puis en 1695 Sylvestre de la Roch, officier de la chambre de Charles-Henri de Lorraine ; elle tint par la suite le rôle de Charite dans Cadmus et Hermione avant de quitter l’Opéra.


Le roi ne répondit pas aux voeux de Perrin en allant voir Pomone, mais Monsieur s’y rendit plusieurs fois avec sa fille Marie-Louise, future épouse de Charles II d’Espagne.
Pierre Perrin se décida à porter plainte. De leur côté, les artistes, n’étant pas payés, assignèrent Sourdéac et Champeron en paiement de leurs gages, et refusèrent de chanter. Le théâtre ferma ses portes, et l’on s’exclama :

Le Grand Opéra plus n’opère
Dont maint ici désespère…
Les Indendans et les Autheurs,
Les Musiciens et les Acteurs,
Tous sont tombés en guerre atroce…

Toujours empêtré dans ses affaires personnelles, et en dépit de Lettres de répit obtenues du roi, Perrin fut à nouveau incarcéré le 15 juin 1671. Il en sortit le 17 août, non sans avoir revendu le privilège à Sablières, puis au fils de son épouse décédée. Il retourna en prison le 29 août 1671, et ne devait pas en sortir avant la revente définitive du privilège à Jean-Baptiste Lully, vente entérinée par les lettres patentes du 29 mars 1672. Il mourut trois après, le 26 avril 1675.
Lully fit aussitôt interdire les représentations dès le 1er avril. Le 12 août, il fut de plus interdit aux associés de louer la salle pour des spectacles.
L’œuvrefut reprise au Jeu de paume de la rue St Léonard, à Nantes, en 1687, par la troupe du sieur d’Aumont, et au Théâtre de la Monnaie à Bruxelles, le 29 septembre 1753.
L’œuvrecomportait une ouverture « à la Lully » (mais antérieure de deux ans à celle de Cadmus et Hermione), puis un prologue chanté par la Nymphe de la Seine (soprano) et Vertumne (haute-contre) dans un décor représentant « la vue de Paris à l’endroit du Louvre ».
L’opéra lui-même se passe « en Albanie, au pays latin, dans la maison de Pomone ». La scène représente successivement ; les Vergers de Pomone (acte I), un Parc de chesnes (acte II), des Rochers et verdures, puis le Palais de Pluton (acte III), le Jardin et berceau de Pomone (acte IV), le Palais de Vertumne (acte V).
Sur les deux manuscrits conservés (Bibliothèque nationale, Conservatoire), la partition s’arrête à la quarantième page. Il ne reste que le Prologue, le 1er acte et le début du second. On suppose que les menées de Lully ne permirent pas à Cambert d’achever l’impression, et que ce dernier emporta l’original à Londres où il fut perdu.

Personnages (selon l’édition originale de 1671) : Pomone, déesse des fruicts ; Flore, soeur de Pomone, déesse des fleurs ; Vertune, dieu des lares ou follets, amoureux de Pomone ; Faune ou Fat, dieu des villageois, amoureux de Pomone ; le Dieu des Jardins, amoureux de Pomone ; Juturne, Venilie, nymphes de Pomone ; Beroé, nourrisse de Pomone ; Choeur des Jardiniers
Vertune se transforme : en Bergère de Lampsace, ville de Grèce, où naquit le Dieu des Jardins ; en Pluton, dieu des trésors, en Bacchus, en Beroé. Les Follets se tranforment : en Bergères de Lapsace, en Satyres, en Amours, Muses et Dieux.
A cela s’ajoutent les danseurs : Bouviers, Cueilleurs de fruicts, Follets transformés en Fantômes, en Démons, en Esclaves, ainsi que des personnages muets : troupe de Follets, Vertune transformé en Dragon, en Buisson d’épines, Follets transformés en Buissons d’épines, en joueurs d’instruments.

Argument
Vertumne, dieu des Follets, souhaite conquérir Pomone, déesse des Fruits. Il est lui-même poursuivi par Beroé, la vieille nourrice de la déesse. Afin d’y parvenir, il prend toute sorte de déguisements : dragon, Pluton, Bacchus et Beroé elle-même. Il parvient à ses fins sous ce dernier déguisement, Pomone ne pouvant refuser un baiser à sa nourrice. Devant l’ardeur de Vertumne, Pomone finit par succomber.

« En avril 1659, Cambert et son librettiste Perrin donnèrent à Issy, en la maison de campagne de M. de la Haye, orfèvre du Roi, une Pastorale. Sous le titre de Première comédie française en Musique représentée en France, Perrin publia le livret qu’il avait conçu, en effet, pour une totale continuité musicale. Le succès de cette première éveilla la curiosité de la cour qui la fit redonner à Vincennes le mois suivant. Et l’été 1662, Cambert devint Maître et compositeur de la Musique de la Reine Mère Anne d’Autriche.
Dans l’émulation des fêtes de la première décennie de son règne, les plus grands artistes rivalisaient d’invention pour le Roi Soleil. La collaboration avec Cambert conduisit Perrin à obtenir de Colbert le 28 juin 1669 un privilège pour l’établissement des Académies d’Opéra,  » pour y représenter et chanter en public des opéras et représentations en musique et vers françois, pareilles et semblables à celles d’Italie « .

« L’Abbé Perrin ayant, en 1669, obtenu des Lettres-patentes du Roi pour l’établissement des Opéra en France, après les essais d’Orphée, d’Ercole amante, & de quelques petites pieces de sa façon, donna au Public cet Opé. qui est le premier qui ait paru en langue Françoise, & celui par lequel on a cru naturel de commencer à compter dans ce Dictionnaire le nombre des Opéra. Les vers étoient du même Abbé Perrin, & la musiq. de Cambert (cette musique n’a pas été imprimée). Les danses étoient de la composition de Beauchamps, Surintendant des Ballets du Roi. Les machines furent conduites par le Marquis de Sourdeac, fort entendu dans ces sortes de choses, & associé avec l’Abbé Perrin dans ce nouvel établissement des Opéra.
Les répétitions de cette Pastorale furent faites dans la gallerie de l’hôtel de Nevers, où étoit auparavant la Bibliotheque du Cardinal Mazarin, & où est à présent celle du Roi. Les représentations publiques en commencerent le 19 Mars 1671, sur le théatre qu’on avoit fait dresser dans un Jeu de paume de la rue Mazarine, vis-à-vis celle de Guénégaud, & durerent treize mois entiers. Pour remplir les rôles on avoit fait venir de Languedoc plusieurs Musiciens, entr’autres Beaumavielle & Rossignol, Basse-tailles ; Clediere & Tollet, Haute-contres, & Miraille, Taille. La Dlle de Cartilly, qui ne parut pas depuis, y représentoit Pomone. » (de Léris)

Synopsis
(partie dont la musique a été conservée)
Prologue
La Nymphe de la Seine et Vertumne, dieu champêtre, admirent la puissance de Louis XIV et rendent hommage à la beauté de Paris et de la Seine.

Acte I
Les vergers de Pomone
Scène 1 : Pomone, déesse des fruits, chante les peines de l’amour en compagnie de Vénilie et de Juturne, et les invite à se tenir loin des amours et des bergers.
Scène 2 : Flore, sa sœur, l’invite au contraire à goûter les plaisirs de l’amour. Elle est contredite par Beroé, la nourrice de Pomone.
Scène 3 : Le Dieu des Jardins invite Pomone à s’unir à lui, pour ajouter les herbes des potagers aux fruits des vergers.
Scène 4 : Faune et le Dieu des Jardins, tous les deux amoureux de Pomone, s’affrontent dans une joute vocale pour conquérir leur bien-aimée. Flore propose au Dieu des Jardins de faire chanter la troupe des Jardiniers, puis danser la troupe des Bouviers. Faune se rend et invite Pomone à couronner le vainqueur. Celle-ci en confie le soin à Flore.
Scène 5 : les nymphes de Pomone apportent à Flore une corbeille dans laquelle se trouvent une couronne d’épine et une autre de chardons. Flore donne la première au Dieu des Jardins, et la seconde à Faune.
Scène 6 : Faune et le Dieu des Jardins se lamentent de la dérision dont ils ont été l’objet de la part de Pomone.
Scène 7 : Vertumne se lamente que celle qui l’aime reste insensible, et appelle la troupe des follets.

Acte II
Un parc de chênes
Scène 1 : Beroé, en dépit de son âge, est éprise de Vertumne, et se cache en le voyant arriver.
Scène 2 : Vertumne se décide à user de ruse pour surprendre celle qu’il aime sans retour.
Scène 3 : Beroé interpelle Vertumne qui, pour s’en défaire, se transforme en dragon et fait mine de la dévorer.
Scène 4 : Beroé n’est pas dupe et affronte le dragon.
Le ciel brille d’éclairs et gronde de tonnerres, la terre tremble, et douze follets, par ordre de leur dieu, transformés en fantômes, armés de foudres et de griffes de fer, tombent du ciel dans un nuage enflammé, et dansent à ses yeux une danse terrible.
Scène 5 : Beroé fait taire sa peur et apostrophe les follets.
L’ouvrage, dont l’impression n’a pas été achevée, s’interrompt brusquement pendant le monologue de Beroé.
(suite – extraits de la partie perdue)
Quatre fantômes saisissent Beroé et l’emportent en l’air, cinq autres restant sur scène. La troupe du dieu des jardins se venge sur les fantômes qui restent, mais ils s’aperçoivent que ce sont leurs femmes ; elles se changent en buissons d’épines.

Acte III
Rochers et verdure
Pomone et Venilie chantent les oiseaux. Vertumne est transformé en Pluton, il fait apparaître un palais et offre ses trésors à Pomone, qui les repousse. Juturne, Vénilie et Pomone méprisent la richesse. Vertumne se transforme en Bacchus. Il offre sa couronne à Pomone ; Pomone et ses nymphes préfèrent le cidre au vin. Le faune réclame du vin, Vertumne ordonne à sa troupe de l’enivrer. Les follets placent Faune sur un gazon, et mettent autour de lui trois flacons et trois bouteilles. Lorsqu’il veut saisir une bouteille, elle s’enfuit et traverse le théâtre. Il s’attaque à la seconde qui fuit de même. Il veut saisir la troisième : elle s’élève en l’air où un follet la vient prendre. Il croit s’emparer de la quatrième, elle fond en terre et la cinquième après elle ; il prend la sixième et boit à même ; il trouve que c’est de l’eau et crache.

Acte IV
Jardin et berceau de Pomone
Beroé maudit les sentiments de colère et de jalousie qui l’envahissent : Sors de mon coeur, folle fureur ! Vertumne prend l’apparence dc Beroé et va à la rencontre de Pomone. Pomone invite la fausse Beroé à un divertissement. La fausse Beroé vante les charmes de Vertumne à Pomone. La vraie Beroé se montre et accuse Vertumne, qui reprend sa forme. Vertumne se jette aux genoux de Pomone, qui est séduite. Tous : Puissance d’amour, ô divin changement.

Acte V
Palais de Vertumne
Pomone avoue son amour à Vertumne. Flore présente aux amants le chapeau de l’Amour. Le dieu des jardins présente son offrande. Vertumne commande de bâtir un palais merveilleus dans lequel les noces de Vertumne et Pomone sont célébrées. Dix-huit follets tranformés paraissent en différentes nues brillantes, six au fond du théâtre dans une grande nue, six sur le côté droit en trois petites nues diverses, et autant sur la gauche, sous des formes de Dieux, de Muses et d’Amours, parties chantants, partie jouant des instruments ; à la fin, les six petites nues se retirent et la grande vole du fond du théâtre sur le centre.

Lettres patentes du Roy, pour establir, par tout le royaume, des Académies d’Opéra ou représentations en musique en langue françoise, sur le pied de celles d’Italie.
LOUIS, par la grâce de Dieu, Roy de France et de Navarre, à tous ceux qui ces présentes Lettres verront, Salut. Nôtre amé et féal Pierre Perrin, conseiller en nos conseils, et introducteur des ambassadeurs près la personne de feu nostre très-cher et bien-amé oncle le duc d’Orléans, nous a très-humblement fait remonstrer, que depuis quelques années les Italiens ont estably diverses Académies, dans lesquelles il se fait des représentations en musique, qu’on nomme opera ; que ces Académies estans composées des plus excellens musiciens du Pape et autres princes, mesme de personnes d’honneste famille, nobles et gentils-hommes de naissance, très-sçavans et expérimentez en l’art de la musique, qui y vont chanter, font à présent les plus beaux spectacles et les plus agréables divertissemens, non-seulement des villes de Rome, Venise, et autres cours d’italie; mais encore ceux des villes et cours d’Allemagne et Angleterre, où lesdites Académies ont esté pareillement establies à l’imitation des Italiens; que ceux qui font les frais nécessaires pour lesdites représentations se remboursent de leurs avances sur ce qui se prend du public à la porte des lieux où elles se font. Enfin que s’il nous plaisoit luy accorder la permission d’establir dans nostre royaume de pareilles Académies, pour y faire chanter en public de pareils opera, on représentations en musique en langue françoise, il espère que non-seulement ces choses contribuëroient à nostre divertissement et à celuv du public, mais encore que nos sujets s’accoustumans au goust de la musique, se porteroient insensiblent à se perfectionner en cet art, l’un des plus nobles des libéraux.
A ces causes, désirant contribuer à l’avancement des arts dans nostre royaume, et traitter favorablent ledit exposant, tant en considération des services quil a rendus à feu nostre très cher et bien—-amé oncle le ducd’Orléans,quede ceux qu’il nous rend depuis plusieurs années en la composition des paroles de musique qui se chantent tant en nostre chapelle qu’en nostre chambre : nous avons audit Perrin accordé et octroyé, accordons et octroyons, par ces présentes signées de nôtre main, la permission d’establir en nostre bonne ville de Paris et autres de nostre royaume, des Académies composées de tel nombre et qualité de personnes qu’il avisera, pour y représenter et chanter en public des opera et representations en musique en vers françois, pareilles et. semblables à celles d’Italie. Et pour dédommager l’exposant des grands frais qu’il conviendra faire pour lesdites représentations, tant pour les théâtres, machines, décorations, habits, qu’autres choses nécessaires; nous luy permettons de prendre du public telles sommes qu’il avisera, et à cette fin d’establir des gardes et autres gens nécessaires à la porte (les lieux où se feront lesdites représentations ; faisant très-expresses inhibitions et deffences à toutes personnes de quelque qualité et condition qu’elles soient, mesme aux officiers de nostre maison, d’y entrer sans payer, et de faire chanter de pareilles opera ou représentations en musique en vers françois, dans toute l’étenduë de nostre royaume pendant douze années, sans le consentement et permission dudit exposant; à peine de dix mil livres d’amende, confiscation des théâtres, machines et habits, applicables un tiers à nous, un tiers à l’hospital général, et l’autre tiers audit exposant. Et attendu que lesdits opera et représentations sont des ouvrages de musique tous différents des comédies récitées, et que nous les érigeons par cesdites présentes sur le pied de celles des Académies d’Italie, où les gentilshommes chantent sans déroger ;
Voulons et Nous plaist, que tous gentilshommes, damoiselles, et autres personnes, puissent chanter ausdits opera, sans que pour ce ils dérogent au tiltre de noblesse, ny à leurs priviléges, charges. droits et immunitez. Révoquons par ces présentes toutes permissions et privilèges que Nous pourrions avoir ci-devant donnez et accordez, tant pour raison desdits opera que pour réciter des comédies en musique, sous quelques noms, qualitez, conditions et prétextes que ce puisse estre. Si donnons en mandement à nos amez et féaux conseillers les gens tenans nostre cour de Parlement à Paris, et autres nos justiciers et officiers qu’il appartiendra, que ces présentes ils ayent à faire lire, publier et enregistrer, et du contenu en icelles, faire joùir et user ledit exposant pleinement et paisiblement, cessant et faisant cesser tous troubles et empéchemens an contraire. Car tel est nostre plaisir.
Donné à S. Germain en Laye le 28e jour de Juin 1669, et de nostre règne le vingt-septième. Signé LOUIS, et sur le reply, par le roy, COLBERT. Et scellé du grand sceau de cire jaune.

 

Partition : Editions Minkoff – Pomone, pastorale mise en musique, partition et livret de Pierre Perrin suivi de Les Peines et les plaisirs de l’amour, pastorale, partition et livret de Gabriel Gilbert. Introduction. Réimpression des éditions de Paris, Ballard, 1672. Genève, 1980. 2 volumes in-4 – en 1 volume – de 120 pages, broché.



Représentations :

Festival Musique Baroque en Vendée, Logis de La Chabotterie – 13 et 14 août 2003 – Saint-Germain-en-Laye – Théâtre Alexandre Dumas – 4 novembre 2003 – Fontainebleau – Halle de Villars – 7 novembre 2003 – Versailles – Opéra Royal du Château – 11 novembre 2003 – Automne Musical du Centre du Musique Baroque de Versailles – Le Ballet du Marais, Le Choeur du Marais et La Simphonie du Marais – conception et direction Hugo Reyne – mise en scène et costumes Stefan Früh – chorégraphie Gilles Poirier – avec Françoise Masset, Isabelle Desrochers, Renaud Tripathi, Vincent Lièvre-Picard, Howard Crook, Jean-Louis Georgel, Bruno Rostand

Conservatoire de Paris – fin des années 1870 – exécution de l’Ouverture à l’initiative de M. Sauzay