COMPOSITEUR | Jean-Joseph Cassanéa de MONDONVILLE |
LIBRETTISTE | Abbé de La Marre / Abbé de Voisenon |
ENREGISTREMENT | EDITION | DIRECTION | EDITEUR | NOMBRE | LANGUE | DISPONIBLE | FICHE DETAILLEE |
1991 | 1992 | Marc Minkowski | Erato | 2 | français | oui | |
1991 | 1995 | Marc Minkowski | Erato | 1 | français | oui |
Pastorale héroïque, représentée à l’Académie royale de musique le 9 janvier 1753.
Le livret que l’abbé de La Marre avait laissé manuscrit (*) fut repris par l’abbé de Voisenon (**).
(*) Abbé de La Marre, né à Quimper en 1708, mort à Bavière en 1742
(**) Claude-Henri de Fusée, comte de Voisenon, abbé du Jard (dit aussi l’abbé de Voisenon), né le 8 juillet 1708 et mort le 22 novembre 1775 au château de Voisenon près de Melun
La distribution était la suivante : Chassé (Prométhée), Mlle Coupée (L’Amour) dans le prologue, Jélyotte (Titon), Mlle Fel (L’Aurore), Chassé (Eole), Mlle Chevalier (Palès), Mlle Coupée (L’Amour, une Nymphe de la Suite de Palès), Poirier (Un Berger), Person (Aquilon), Gelin (Borée).
Grimme raconte dans ses Mémoires historiques, littéraires et anecdotiques : Jean-Joseph Cassanéa de Mondonville, ancien maître de musique de la chapelle du roi, vient de mourir. Ce fut lui qui fit perdre aux partisans de la musique italienne et des bouffons le champ de bataille à l’Opéra, il y a tout juste vingt ans. Une mauvaise troupe de bouffons d’Italie avait fait tomber successivement avec ses intermèdes tous les opéras français qu’on avait exposés à l’admiration publique. Le péril était instant ; encore une chute et c’était fait peut-être du théâtre de l’Académie royale de musique. C’est dans cette conjoncture délicate et dangereuse que Mondonville risqua son opéra de Titon et l’Aurore, ouvrage plat et misérable s’il en fut jamais, mais que la Providence divine dont les décrets sont impénétrables choisit, pour bannir de l’Opéra de Paris le génie de Pergolesi et de tant d’autres grands hommes d’Italie. On négocia d’abord avec le Coin de la Reine : on appelait ainsi les partisans de la musique italienne, parce qu’ils s’assemblaient à l’Opéra dans le parterre sous la loge de la reine. Ce Coin était alors fort à la mode, et composé de tout ce que la nation avait de plus célèbre dans les lettres et dans les arts, et de plus aimable parmi les gens du monde. Les émissaires de Mondonville venaient en suppliants. Ils assuraient le Coin du profond respect de l’auteur pour ses oracles, et de l’admiration sincère qu’il avait pour la musique italienne. Ils promettaient en son nom et juraient dans son âme que si le Coin voulait bien laisser réussir Titon et l’Aurore, sa première marque de reconnaissance serait de composer un opéra dans le goût italien : le pauvre diable de Mondonville aurait été fort embarrassé d’être pris au mot : il ne composait que dans le goût plat. Cette négociation amusa longtemps le Coin qui était composé de fanatiques de bonne foi et de néophites aussi zélés que Polyeucte, toujours près d’abattre les idoles de l’ancienne religion, et de fanatiques gens d’esprit, passionnés à la vérité pour la musique italienne, mais prenant tout gaiement et préférant un quart-d’heure de bonne humeur à toutes les extases du monde. Le Coin se forma plus d’une fois en grand comité sur la requête de Mondonville, tantôt sous la présidence de d’Alembert, tantôt sous celle de l’abbé de Canaie. Il y eut des avis très-motivés. Les uns étaient disposés à accorder au suppliant sa demande, sans tirer à conséquence : les autres opinaient pour une chute complète, pure et simple, comme si elle eût dépendu de leur avis. Mondonville en négociant avec le Coin, ne perdit pas de vue ses autres ressources. Il se fit un puissant parti à Versailles, où sa souplesse et ses intrigues lui avaient procuré beaucoup de protecteurs. Il leur persuada que c’était moins son affaire que celle de la nation. Le patriotisme se réveilla. Madame de Pompadour crut la musique française en danger, et frémit. On résolut de faire réussir l’opéra de Titon et l’Aurore, à quelque prix que ce fût. Toute la maison du roi fut commandée. Le jour de la première représentation, dès midi le Coin de la Reine fut occupé par MM. les gendarmes de la garde du roi; MM. les chevau-légers et les mousquetaires remplissaient le reste du parterre. Lorsque MM. du Coin arrivèrent pour prendre leurs places, ils ne purent en approcher, et furent obligés de se disperser dans les corridors et au paradis où, sans rien voir, ils furent témoins des applaudissements les plus bruyants qu’on eût jamais prodigués à une première représentation. Un courrier fut dépêché à Choisy, où était le roi, pour porter la nouvelle du succès. Notre défaite fut complète. On osa bientôt aller plus loin, et congédier la troupe de bouffons, source de tant de discorde, et cela se fit si heureusement qu’on n’a pas entendu chanter une seule fois depuis sur le théâtre du Palais-Royal, et qu’on y crie jusqu’à ce jour avec une force de poumons que le patriotisme national peut seul endurer.
Castil-Blaze raconte à son tour : « La première représentation de cette pièce fut considérée comme décisive dans la guerre des bouffons ; de part et d’autre on se prépara pour soutenir vaillamment les intérêts de l’une et l’autre musique. Le jour de cette exhibition solennelle, les chevau-légers, les gendarmes, les mousquetaires, les carabiniers, remplissaient le parterre de l’Opéra. Les partisans des Italiens, nommés le coin de la reine, refoulés hors de la salle, ne purent trouver place que dans les corridors. Grâce à de telles précautions, Titon et l’Aurore réussit convenablement. Le Voyer d’Argenson, ministre du département de Paris, dépêchait au roi des courriers de quart d’heure en quart d’heure pour l’avertir des chances de la représentation. Louis XV était à Choisy. « Nous avons gagné notre procès ! dit-il à sa favorite, en recevant la nouvelle de ce triomphe. Bien qu’il ne fût pas brillant, ses résultats ne se firent point attendre : le renvoi des Italiens fut décidé le lendemain. »
Le succès fut tel que trente-cinq représentations furent données d’affilée de janvier à juin 1753, et que l’oeuvre fut reprise à l’automne.
Le rôle d’Éole fut le dernier tenu par Claude Chassé à l’Opéra.
Titon et l’Aurore fut repris le 22 février 1763. Bachaumont se lamente : Quelle douleur pour ceux qui ont vu Jeliotte, de le voir remplacé par l’infame (sic) Pillot (*) ; Rien de si ignoble que cet acteur, il n’a bien chanté qu’une ariette en duo, où il s’est trouvé soutenu par Mlle Le Mierre, qui fait l’Aurore. Il a été faux, mal sonnant, gauche dans tout le reste ; il est détestable dès qu’il veut donner dans le haut. Mlle le Mierre est toujours délicieuse. Mlle Chevalier joue le rôle de Pallas, et Geloin celui d’Eole; tout le reste irait bien sans le malheureux Titon. Mlle Dubois chante plusieurs ariettes avec goût.
(*) Jean-Pierre Pillot, haute-contre, était entré à l’Opéra en 1755, avait alors trente ans. Il assura la transition entre Jélyotte, qui avait pris sa retraite la même année, et Joseph Legros, qui n’entra à l’Opéra qu’en 1764.
L’oeuvre fut reprise également en février/mars 1763, de février à mai 1764, puis de janvier à mars 1768.
Bachaumont commente la première représentation du 9 février 1764 : Cet agréable spectacle n’a pas eu l’affluence qu’il mérite. Mlle Le Mierre continue d’y faire le plus grand plaisir. Muguet soutient la bienveillance que le public lui avait déjà témoignée dans ce rôle il y a un an.
Titon et l’Aurore fut représenté à Fontainebleau, devant le roi, le 18 octobre 1764, reprise le 27. Papillon de la Ferté, Intendant des Menus Plaisirs, nota dans son Journal : on a été , en général, très satisfait, surtout de la partie des habits et ds décorations, et principalement du char de l’Aurore, qui traversait les airs, et dont les roues mouvantes étaient garnies de diamants. Le trône de l’Amour, dans la gloire, était aussi tout en pierreries, recouvert par un baldaquin enrichi de même, avec des rideaux relevés et soutenus par des Amours. La cour de l’Amour était composée de différentes divinités groupées sur des nuages, le tout avec de petits Amours répandus dans les différentes parties de la décoration. Cette machine descendit du cintre avec justesse et précision.
Le Prologue (Prométhée) est attribué à Houdar de la Motte, le livret de la pastorale à l’Abbé de la Marre, poète breton, auteur des paroles de Zaïde de Royer (d’après le livret Erato)
Plusieurs parodies parurent :
Totinet, de Portelance (*) et Poinsinet (**), donnée à l’Opéra-Comique le 23 février l753, dont les Annales dramatiques donnent l’argument : Totinet aime la bouquetière Tricolor, qui le paie du plus tendre retour. Leur bonheur est traversé par un marchand de soufflets, qui, furieux des mépris de la bouquetière, veut s’en venger sur Totinet. Mais une charbonnière, qui aime ce dernier, se charge de la vengeance, dans l’espoir que, lorsqu’elle l’aura en sa puissance , elle pourra gagner son cœur. Soins superflus ! inutile tendresse ! Totinet est insensible à son ardeur. Dans sa rage, elle lui noircit tout le visage avec du charbon. Totinet se présente en cet état devant Tricolor, qui est d’abord effrayée, ainsi que la nourrice de ce jeune garçon ; mais celle-ci, s’apercevant que ce n’est qu’un peu de charbon qui le rend si noir, le mène près d’un puits, et lui lave le visage. Enfin Totinet, bien débarbouillé, revient trouver sa chère Tricolor, qui sent pour lui accroître son ardeur ;
(*) Charles Louis de Portelance, seigneur de Toury (1753 – 1821), vit sa première oeuvre, une tragédie en cinq actes, Antipater, copieusement huée. Il se tourna ensuite vers la Foire.
(**) Antoine-Alexandre-Henri Poinsinet (1735 – 1769). Sa naïveté en fit la victime d’une société de persifleurs, sd’où son surnom de « Poinsinet le mystifié ». Il se noya dans le Guadalquivir.
Raton et Rosette, ou la Vengeance inutile, en un acte chanté, avec des divertissements, par Favart, donnée au Théâtre Italien, le 28 mars 1753, avec succès ; le Rien, par Vadé, donnée avec succès à l’Opéra-Comique, à la Foire S. Germain le 10 avril 1753.
Pasto. héroïq. en 3 Ac. avec un Prolog. Les paroles de la Pastorale sont de l’Abbé de La Marre, & la musiq. de M. Mondonville. Cet Opéra est le 166me, & fut donné pour la premiere fois le 9 Janvier 1753 : il eut beaucoup de succès, & est gravé partition in-fol. Le sujet du Prolog. est le feu du Ciel ravi par Promethée pour animer les hommes : les paroles de ce Prolog. sont de Houdart de La Motte. (de Léris – Dictionnaire des Théâtres)
Argument
Furieux de voir qu’elle lui préfère un simple berger, Eole veut se venger sur Titon des mépris de l’Aurore. Bientôt Pales, déesse des bergers, vient le trouver, et, le voyant en proie à la douleur, lui en demande la cause. Elle apprend qu’il veut faire périr Titon ; mais comme elle aime Titon , autant qu’Eole peut aimer l’Aurore, la déesse le conjure de lui laisser le soin de le débarrasser de son rival : il y consent. Alors Palès fait tous ses efforts pour vaincre l’indifférence de Titon : indignée de sa résistance, elle se venge à son tour, en vieillissant l’ingrat; mais l’Amour le rajeunit., et le rend encore plus aimable aux yeux de son amante. (Annales dramatiques – 1812)
Synopsis
Prologue
Dans le palais de Prométhée, orné de statues d’hommes et de femmes.
Prométhée, le Titan qui s’est opposé à Zeus en montrant son vif amour de l’humanité, donne vie aux statues qui ornent son palais. L’Amour apprend à ces nouveaux humains les délices, les félicités et tous les pouvoirs qu’il peut leur apporter.
Acte I
La nuit, des bois d’un côté, un hameau de l’autre.
Titon attend la venue d’Aurore. Lui, le berger mortel, attend la déesse dont il est épris, mais il ne peut s’empêcher de s’alarmer et d’être jaloux, malgré la fidélité d’Aurore. Titon et Aurore chantent l’amour jusqu’à l’arrivée d’Eole. Celui-ci, épris d’Aurore, ne peut admettre de voir un mortel l’outrager de la sorte. Il jure le trépas du berger. Palès, elle-même éprise de Titon, intervient, demandant à Eole de lui remettre ce rival redoutable, tandis qu’il pourra consoler Aurore. Eole invoque alors les légions d’Aquilons et leur ordonne d’enlever Titon.
Acte II
Une vallée agréable, le palais d’Aurore dans le lointain.
Eole n’obtient d’Aurore aucune autre réponse que celle de renoncer à son immortalité, pour rester fidèle à son amant. Eole exhorte les vents furieux :« sur les pâles humains que le tonnerre gronde ! ». Palès ouvre alors son coeur à Eole et propose d’essayer de briser la chaîne de Titon. L’intervention d’une nymphe chargée de divertir le berger, ainsi qu’une fête mettant en scène faunes et silvains, ne peuvent dissiper l’ennui qui dévore le coeur de Titon. Palès, après une dernière tentative, feignant une générosité qui est bien loin de son coeur, le laisse partir. Restée seule, elle donne libre cours à sa rage.
Acte III
Le hameau natal de Titon, une fontaine.
Palès apprend à Eole qu’elle a échoué dans sa tentative. Elle voue Titon à une vieillesse prématurée. Palès et Eoile s’unissent dans leurs malheurs et trouvent à la vengeance beaucoup de charmes. Titon, blanchi, courbe, se regarde dans la fontaine : cette vision l’effraie. Aurore lui reste pourtant fidèle. Le puissant Dieu des amours, alors imploré par Aurore, fait cesser le maléfice. Titon et Aurore, chantent la gloire et la puissance du Dieu qui règne sur les coeurs.
(livret Erato)
Livret disponible sur livretsbaroques.fr
Représentations :
Château de Versailles – Chapelle Royale – 22 mars 1991 – Théâtre des Champs Elysées – 23 mars 1991 – Reims – Grand Théâtre – 4 septembre 1991 – version de concert – Les Musiciens du Louvre – dir. Marc Minkowski