COMPOSITEUR | Jean-Baptiste LULLY |
LIBRETTISTE | Philippe Quinault, d’après les Métamorphoses d’Ovide |
ENREGISTREMENT | ÉDITION | DIRECTION | ÉDITEUR | NOMBRE | LANGUE | FICHE DÉTAILLÉE |
2001 | 2002 | Christophe Rousset | Astrée | 3 | français |
DVD
ENREGISTREMENT | ÉDITION | DIRECTION | ÉDITEUR | FICHE DÉTAILLÉE |
2004 | 2005 | Hervé Niquet | EuroArts |
Tragédie en musique, en un prologue et cinq actes, sur un livret de Philippe Quinault d’après les Métamorphoses d’Ovide, créée à l’Académie royale de musique, le 17 avril 1682.
Elle fut reprise à Versailles le 21 juillet 1682. Prévue pour être donnée dans la Cour de Marbre – comme Alceste en 1674 – elle fut transportée au dernier moment, en raison de la pluie, dans le Manège de la Grande Ecurie faisant face au château, que Carlo Vigarani avait transformée en salle de spectacle, à la grande satisfaction du roi.
Le Mercure galant de juillet 1682 commenta : Théâtre, orchestre, haut dais, rien n’y manquait. Un très grand nombre d’orangers, d’une grosseur extraordinaire, très difficiles à remuer, et encore plus à faire monter sur le théâtre, s’y trouvèrent placés. Tout le fond était une feuillée, composée de véritables branches de verdure coupées dans la forêt. Il y avait dans le fond et parmi les orangers quantité de figures de faunes et de divinités, et un fort grand nombre de girandoles. Beaucoup de personnes qui savaient de quelle manière était ce lieu quelques heures auparavant eurent peine à croire ce qu’elles voyaient.
La distribution réunissait : Mlle Bluquette (Cassiope), Mlle Le Rochois (Mérope), Mlle Aubry (Andromède), Beaumavielle (Phinée), Dumesny (Persée), Desvoyes (Méduse).
La partition fut éditée chez Christophe Ballard en 1682.
Elle fut reprise :
le 19 août 1682, à Paris, pour célébrer la naissance du duc de Bourgogne, intervenue le 6 août. La représentation était gratuite et Lully avait fait installer une fontaine de vin qui coula pendant six heures ;
Marie-Louise Desmatins fit alors ses débuts comme danseuse, à l’âge de douze ans. Sur les conseils de Marthe Le Rochois, elle abandonna la danse et devint chanteuse dès 1684, carrière qu’elle poursuivit jusqu’en 1707, pour mourir un an après, atteinte d’embonpoint.
Georges Touchard-Lafosse raconte dans ses Chroniques secrètes et galantes : En 1682, Quinault et Lully firent jouer Persée, tragédie-opéra; toutes les places étaient retenues trois jours d’avance On comptait donc sur un spectacle hors ligne, sur des beautés qu’on n’avait point encore vues ? Mon Dieu, non, tout cet empressement était provoqué par l’apparition annoncée d’un acteur peu ordinaire. En effet, le jour de la première représentation, le jeune prince de Ditrichtein, fils du grand-maître de l’impératrice d’Allemagne, dansa une entrée avec mademoiselle Desoeillets la jeune : ce pas lui coûta, dit-on, dix milles, pistoles… Mademoiselle Desoeillets (*) faisait payer cher ses leçons.
(*) Claude de Vin-des-Oeillets, dite Mademoiselle des Oeillets (1637 – 1687), fille de comédiens, dame de compagnie de Madame de Montespan, et maîtresse occasionnelle du roi
Georges Touchard-Lafosse poursuit : Un soir que l’on jouait Persée , un grand tumulte, auquel se mêlaient des cris de vive le roi ! se fit entendre tout-à-coup sur la place du Palais-Royal, et bientôt on apprit dans la salle que madame la daupbine venait d’accoucher d’un fils : c’était le duc de Bourgogne…. « Il n’y a plus dans notre capitale, dit à cette occasion un mémorialiste, qui a écrit sous l’impression des événements, il n’y a plus de jours de travail ni de nuits ; on danse, on boit, on mange, on chante, on s’embrasse ; voilà tout. Les rues sont pleines de tables toujours servies; le peuple déjeune, dîne, soupe partout et ne paye nulle part. » Bon temps que celui où, malgré les guerres incessantes, les impôts accablants et les prodigalités de la cour, c’était une bonne fortune publique que la naissance d’un prince. À ces époques , les peuples, sans trop s’expliquer pourquoi, se créaient une perspective de prospérités qui ne se réalisaient jannais; n’importe, ils ne se désespéraient pointa espérer toujours. Le lendemain de la naissance du prince, Lully fit au public la galanterie d’une repré sentalion gratis. Ce jour-là on entrait dans la salle par un arc de triomphe formé d’une charmante combinaison de feux; et bientôt l’on vit un soleil ( toujours l’allégorie du grand roi), se lever lentement derrière cet arc, et embraser l’air de ses mille lumières étincelantes. Au pied de cette resplendissante décoration, coulèrent jusqu’à minuit, deux fontaines de vin, et les spectateurs sortant de l’Opéra purent fouler aux pieds bon nombre d’honnêtes parisiens, qui roulaient dans le ruisseau leur trop expansive allégresse.
le 10 avril 1687, avec Dun (Céphée), Mlle Desmatins (Mérope), Mlle Moreau (Andromède), Beaumavielle (Phinée), Dumesny (Persée), Desvoyes (Méduse) ;
le 11 janvier 1695, avec Dumesny (Persée), Fanchon Moreau (Andromède), Marthe le Rochois (Mérope), Thévenard (Céphée), Mlle Renaut (Cassiope), Mlle Charier (la Fortune), Mlle Perier (la Vertu).
Louis Ladvocat évoque cette reprise dans deux lettres à l’abbé Dubos :
– lettre du lundi 3 janvier 1695 : On cessa hier les représentations de Circé. Mr Foissin m’a dit qu’on espérait être prêt de Persée d’aujourd’hui en huit.
– lettre du jeudi 13 janvier : On a joué, mardi dernier, Persée, ou plutôt on en a donné une répétition avec quelques machines pour notre argent. Les décorations sont belles. Il n’y a que celle du dernier acte, dont l’enfoncement est nouveau et assez bien exécuté. Il y a l’habit de Phinée, qui est nouvellement imaginé, mais fort peu propre à un Éthiopien. Mais il faut espérer qu’il le sera à quelque autre, aussi bien que celui de Mlle Renaut qui est neuf, et en innocente, elle représente la reine. F. Moreau fait Andromède en habit d’Éolie, la Rochois en habit de Médée celui de Mérope, Thévenart avec celui d’Elphénor et ses bas de soie reteints Céphée. La Fortune est représentée par Mlle Charier et la Vertu par la Perier, toutes deux en bleu. Létang y est magnifiquement vêtu. Enfin, c’est le spectacle qui est le plus magnifique que celui de Bellérophon ou de Circé. Les airs de violon en sont beaux. Les choeurs en sont admirables. Le sujet n’est pas à imiter. Le Persée est plutôt un bourreau de Méduse qu’un héros, et dans le dernier acte, le garçon menuisier, qui n’alla pas délivrer Andromède, aurait aussi bien changé en pierre ses ennemis que Dumesnil qui fait le personnage de Persée. Mais je crois que vous n’avez pas oublié cette remarque, non plus que les incidents tumultueusement fourrés pour rendre le spectacle plus agréable aux badauds et provinciaux de votre critique, et moi, je n’oublierai pas non plus que vous que Mr Quinaut n’est pas impeccable et que les sujets des Métamorphoses ne font pas de bons opéras.
– lettre du jeudi 27 janvier 1695 : Monseigneur vint dimanche à Persée. Jamais je n’ai vu tant de monde. Il se soutient fort bien, et le monde y serait plus nombreux si le froid et le mauvais temppss ne s’y opposaient pas. On a répét les choeurs et airs de Théagène. On commence à souhaiter que Persée occupe le théâtre jusques à la mi-carême, et en ce temps-là, on fera en sorte de le continuer jusques à la semaine de la Passion et qu’on ait tout le temps nécessaire pour les habits, les décorations et des répétitions moins précipitées que par le passé.
le 9 février 1703, avec Mlle Clément L. (La Vertu), Cochereau (Phronyme), Chopelet (Mégathyme), Mlle Lallemand (La Fortune), Mlle Dupeyré (La Magnificence) et Mlle Loignon (L’Abondance) dans le prologue, Hardouin (Céphée, roi d’Ethiopie), Mlle Maupin (Cassiope, reine d’Ethiopie), Mlle Desmatins (Mérope), Mlle Sallé (Andromède), Courteil (Amphimédon), Le Bel (Corite), Drot (Proténor), Cochereau (Persée), Chopelet (Mercure), Labé (Un Cyclope), Mlle Lallemand (Une Guerrière), Bertrand (Une Divinité infernale), Desvoyes (Méduse), Prunier (Euriale), Marianval (Sthétone), Boutelou (Un Matelot), Desvoyes (Le Grand-Prêtre de l’Hyménée), Mlle Dupeyré (Vénus), Drot (Un Triton) ;
le 20 novembre 1710, avec Mlle Milon (La Vertu), Le Bel (Phronyme), Buseau (Mégathyme), Mlle Hucqueville (La Fortune), Mlle Boisé (La Magnificence) et Mlle Laurent (L’Abondance) dans le prologue, Hardouin (Céphée), Mlle Milon (Cassiope), Mlle Pestel (Mérope), Mlle Journet (Andromède), Le Mire (Amphimédon), Guesdon (Corite), Morand (Proténor), Cochereau (Persée), Guesdon (Mercure), Dun (Un Cyclope), Mlle Hucqueville (Une Guerrière), Le Mire (Une Divinité infernale), Mantienne (Méduse), Buseau (Euriale), Dun (Sthétone), Guesdon (Un Matelot), Duplessis (Le Grand-Prêtre de l’Hyménée), Mlle Hucqueville (Vénus), Courteil (Un Triton) ;
le 8 novembre 1722, avec Mlle Le Maure (La Vertu), Grenet (Phronyme), Chartene (Mégathyme), Mlle Livarde (La Fortune), Mlle Julie (Suivante de la Fortune) dans le prologue, Du Bourg (Céphée), Mlle Antier (Cassiope), Mlle Antier (Mérope), Mlle Tulou (Andromède), Thévenard (Phinée), Murayre (Persée), Tribou (Mercure), Dun (Un Cyclope), Mlle Minier (Une Guerrière), Chassé (Un Dieu infernal), Mantienne (Méduse), Guesdon (Euriale), Dun (Sthétone), Mlle Catin (Néréide, l’Hymen), Le Mire (Le Grand-Prêtre), Mlle Antier (Vénus) ;
Cette reprise donna lieu à une réédition par Jean-Baptiste Christophe Ballard.
le 14 février 1737, avec Mlle Julie (La Vertu), Cuvillier (Phronyme), Dumast (Mégathyme), Mlle Petitpas (La Fortune), Mlle De Lorge (Suivante de la Fortune) dans le prologue, Dun (Céphée), Mlle Eremans (Cassiope), Mlle Antier (Mérope), Mlle Pélissier (Andromède), Chassé (Phinée), Person (Amphimédon), Bérard (Corite), Louette (Proténor), Tribou (Persée), Jélyotte (Mercure), Le Febvre (Un Cyclope), Mlle Duplessis (Une Guerrière), Le Page (Une Divinité infernale, un Triton), Cuvillier (Méduse), Dumast (Euriale), Fontenay (Sthétone), Person (Le Grand-Prêtre), Mlle De Lorge (Vénus) ;
le 15 novembre 1746, Mlle Coupée (La Vertu), Poirier (Mégathyme), Mlle Jacquet (La Fortune) dans le prologue, Le Page (Céphée), Mlle Romainville (Cassiope), Mlle Chevalier (Mérope), Mlle Fel (Andromède), Chassé (Phinée), Jélyotte (Persée), Poirier (Mercure, un Matelot), La Mare (Un Cyclope), Mlle Coupée (Une Guerrière), Armand (Une Divinité infernale), Mlle Metz (Méduse), La Tour (Euriale), Person (Sthétone), Albert (Le Grand-Prêtre), Mlle Rollet (Vénus).
L’œuvre fut également jouée à Lyon, en 1695, dans la salle de la Place Bellecour, et au théâtre de la Monnaie, à Bruxelles, le 28 décembre 1706.
Une parodie fut jouée à la Foire St Germain en 1709 sous le titre Persée le Cadet.
Des exécutions eurent également lieu le 26 octobre 1746 et le 7 octobre 1748, au château de Fontainebleau, et le 1er mars 1747 au château de Versailles.
Bernard de Bury avait été chargé d’écrire un Prologue, qui connut un vif succès, comme l’écrivit le Mercure de France : L’Ouverture, qui est dans le goût moderne, passe, avec raison, pour une des plus belles du genre. Toutes les paroles sont fort bien exprimées, il y a un Chœur très-beau, et les symphonies sont agréaables, mélodieuses, pleines de tours de chant heureux, et faciles à danser.
L’œuvre, réduite à quatre actes, pour donner plus d’étendue aux divertissements et profiter de tous les progrès de la danse, fut exécutée en 1770 pour l’inauguration de l’Opéra Gabriel, à l’occasion du mariage de Louis XVI et Marie-Antoinette. C’est en 1748 que Louis XV avait repris le projet de Louis XIV de créer un véritable théâtre au château de Versailles, et en avait chargé Ange-Jacques Gabriel, premier architecte des Bâtiments du Roi. La décision ne fut toutefois prise qu’en 1768, dans l’optique des fêtes destinées à accompagner le mariage du Dauphin, futur Louis XVI, fixé au 16 mai 1770. Augustin Pajou, d’une famille de sculpteurs, fut chargé de la décoration sculptée de la salle et du foyer, Louis Jacques Durameau de la décoration picturale de la salle. La salle fut conçue par Gabriel de façon à servir successivement de salle de théâtre, salle de concert, salle de bal et de festin, avec un plancher mobile qui pouvait élever le parterre jusqu’à hauteur de la scène.
C’est le lendemain du « festin », le 17 mai, que fut donné Persée, devant la famille royale, avec une distribution réunissant Sophie Arnould, soprano, Henri Larrivée, basse-taille, une machinerie préparée par Arnoult, et des danses où se produisirent Mlle Heinel, Mlle Guimard, Mlle Dervieux, et Vestris, danseur aérien dont on disait qu’il ne touchait le sol que par déférence pour ses camarades.
La musique de Lully avait été remaniée par Rebel, Francoeur, Bury et Dauvergne, le livret par Joliveau. Les décors étaient au nombre de cinq : une place publique, les jardins du palais de Céphée, l’antre des Gorgones, la mer et le rocher d’Andromède, la Gloire finale avec l’autel de l’hymen et de l’Amour. Durant cette scène, un aigle vint allumer le feu sur l’autel de l’hymen pendant que des chants appropriés célébraient le mariage du Dauphin et de l’archiduchesse d’Autriche. On avait réuni quatre-vingt-dix instrumentistes, cent choristes, dix solistes et trois cents figurants. Louis-René Boquet (*) avait réalisé les costumes. Les décors furent très longs à changer, car la machinerie n’était pas encore au point, et Marie-Antoinette ne parvint pas à dissimuler son ennui.
Bachaumont commente dans ses Mémoires secrets : L’Opéra de Persée, joué avec toute la pompe et toute la magnificence du spectacle, n’a point eu de succès. On a trouvé mauvais que le sieur Joliveau se fût avisé de changer le poème de Quinault, ou plutôt de le profaner par ses corrections sacrilèges… On a déjà observé que le genre de la musique ne pouvait affecter que désagréablement les oreilles de Madame la Dauphine, accoutumées jusqu’à présent seulement à la vivacité et à la légèreté de la musique italienne… En tout l’exécution a été plus que médiocre.
(*) Louis-René Boquet (1717 – 1814). Entre aux Menus Plaisirs en 1751 comme dessinateur de costumes et entrepreneur de décorations. Nommé dessinateur en chef des costumes, des fêtes et des cérémonies en 1764.
Robert Baschet, dans « Mademoiselle Dervieux, fille d’opéra », raconte le succès obtenu par Anne-Victoire Dervieux :
…C’est au cinquième acte seulement, en pleine somnolence, qu’apparaît la Dervieux. Le rideau s’ouvre sur une vision de féerie d’une conception audacieuse : un vol d’amours et de zéphyirs chevauchant des nuages argentés folâtre à quelques mètres du sol en lançant des fleurs, tandis que dans une déchirure du ciel surgit le palais de l’Amour en grandeur naturelle, avec double colonnade, coupole et revêtement de rubis, de diamants et d’argent… Alors, par la force des poignets d’une armée de machinistes, la danseuse descend sur une nuée avec trois autres belles filles groupées en des poses alanguies. C’est l’Hymen en compagnie de l’Amour, de Vénus et d’Hébé ; mais c’est surtout une femme jeune et séduisante, osant pour la première fois se montrer nue sous une veste et une culotte de taffetas « chair tendre ».
Un grand brouhaha d’étonnement agite la salle ; les hommes cessent brusquement de s’entretenir à mi-voix d’affaires personnelles ; les femmes cachent leur mécontentement sous des mines effarouchées ; mais tous sont fascinés par le charmant tableau que forment Aune-Victoire et Mlle Lafond : l’une porte « un collier chair, des gants, bas et souliers chair avec lassure rose et argent » ; l’autre est vêtue « du costume voluptueux de l’amour ». Et leurs beaux corps, dévoilés sans pudeur, les rendent en une soirée plus célèbres que n’avait pu le faire leur talent en plusieurs années.
Dans le palais de rubis, les Plaisirs, les Ris, les Grâces et les Jeux dansent indéfiniment autour d’un trône où l’Amour et Hébé, couronnés de fleurs, attendent d’être unis par Hymen.
Dès que le rideau est tombé, les hommes se précipitent vers les loges des artistes, mais n’y trouvent qu’un désordre, inanimé, de taffetas déjà les vedettes, engoncées à nouveau dans leurs robes de ville, remontent en carrosse pour regagner Paris où elles doivent jouer le lendemain. Mais elles laissent une traînée d’hommages qui vaut sans doute mieux que les habituelles suites d’un tel succès. »
Favart raconte que, le jour de la première représentation, le sieur Corby (ou Corbie), ancien valet de chambre du marquis de Chatel, qui avait repris à Jean Monnet la direction de l’Opéra-Comique, se présenta à la porte du spectacle, avec plusieurs dames de sa compagnie qu’il prétendait faire entrer de préférence à d’autres dames conduites par un seigneur étranger de la plus haute distinction. Pour prix de son obstination, Corbi fut traité sans ménagement par ce seigneur qui le menaça de lui faire donner des coups de canne. Il ajoute que c’est à la suite de cet incident que Corbi devint fou à tel point que le duc de Choiseul, malgré les faveurs dont il le comblait, se crut obligé de le faire mettre à Charenton. Là, Corbi, très content, se prenait pour un contrôleur général et ministre d’État chargé de négociations secrètes pour la Russie.
Une nouvelle représentation eut lieu le 26 mai, avec de nouvelles coupures opérées par Nicolas-René Joliveau, secrétaire perpétuel de l’Académie royale.
À Bruxelles, l’œuvre fut représentée en 1682, 1685 et 1706, à Amsterdam le 21 août 1688, à Lyon pendant l’hiver 1696/97.
Persée fut remis en musique par François-André Danican Philidor, sur un livret en trois actes, adapté de Philippe Quinault par Jean-François Marmontel, et représenté dans la seconde salle du Palais Royal, le 27 octobre 1780.
Le 15 novembre 1780, Bachaumont notait : Malgré le froid accueil que l’on fait de la refonte du poème de Persée, malgré la force avec laquelle on s’est élevé dans le plus grand nombre des papiers publics contre la témérité de M. Marmontel, de profaner par ses mutilations et interpellations notre prince des poètes lyriques malgré les éloges ironiques des autres, malgré les calembours de toute espèce, les épigrammes qui l’accablent de toutes parts, le savetier de l’opéra soutient tout cela avec une insolence sans exemple ; il répond que s’il y a de mauvais vers dans Persée, ce sont ceux de Quinault, qu’il a conservés. Entre diverses plaisanteries qu’occasionne la guerre qu’on lui fait, voici la plus saillante :
Quinault par la douceur de ses aimables vers,
Suspendait le tourment des ombres malheureuses ;
Cherchons, pour l’en punir, des peines rigoureuses
S’écria le Dieu des enfers.
Il invente aussitôt le mal le plus horrible,
Dont au Tartare même on se fût avisé.
Je veux faire, dit-il, un exemple terrible ;
J’ordonne que Quinault soit Marmontélisé.
De son côté, l’abbé Arnaud disait de Marmontel, que sur les perles de Quinault, le vilain a fait son ordure.
Persée inspira quatre parodies. La première, intitulée Persée le Cadet, en trois actes en monologue, représentée à la Foire S. Germain 1709, par la Troupe de Dolet & La Place ; la seconde, de Fuzelier, en trois actes presque toute en vaudevilles, donnée aux Italiens sous le titre d’Arlequin ersée, le 18 décembre 1722 ; la troisième, intitulée le Mariage en l’air, jouée à l’Opéra-Comique en 1737 ; la quatrième donnée aux Marionnettes de Bienfait, par un anonyme, à la Foire St Germain de la même année, sous le titre de Polichinelle Persée, parodie en trois actes en forme de dialogues et de vaudevilles.
Le livret fut repris par Joliveau et remis en musique par Philidor (création à l’opéra le 24 octobre 1789).
Décryptage…
En filigrane de la tragédie en musique de Persée, on peut voir derrière les trois Gorgones : la triple alliance qui se formait contre Louis XIV (les Pays Bas, la Suède et l’Empereur d’Autriche) ; derrière le monstre marin : l’Espagne ; derrière Persée, aimé et protégé des dieux : Louis XIV ; derrière « le lieu champêtre » où s’installe la Vertu et où sortent de terre les fleurs, les statues, etc. : Versailles où le roi venait de s’installer, loin de Paris.
Synopsis détaillé
Prologue
Un bocage
Phronime et Mégathyme annoncent l’arrivée de la Vertu. La Vertu s’avance avec sa suite, accompagnée de l’Innocence et des Plaisirs innocents. La Vertu rappelle que la Fortune est toujours redoutable, puis chante le bonheur d’une vie innocente. Danses. Phronime et Mégathyme chantent leur dédain pour la Fortune. Tout à coup, des fleurs sortent de terre, ainsi que des statues, des berceaux dorés et des fontaines. La Fortune s’avance avec sa suite au son de nombreux instruments, accompagnée de l’Abondance et de la Magnificence. La Fortune indique à la Vertu qu’elle vient faire la paix, sur ordre d’un auguste héros, le seul qui pouvait vaincre sa haine. La Vertu et la Fortune et leurs suites célèbrent le héros glorieux, par des danses et des chants.
Acte I
Une place publique magnifiquement ornée, et disposée pour y célébrer des jeux en l’honneur de Junon
(1) Céphée, roi des Céphiens, aux confins de l’Ethiopie, exprime à son épouse Cassiope ses craintes que la haine de Junon contre elle ne soit pas apaisée, et qu’il ne puisse défendre son peuple contre Méduse. Cassiope regrette d’avoir comparé sa gloire à celle de Junon, et espère que les jeux qu’elle prépare en son honneur apaiseront sa colère. Céphée compte sur Persée, fils de Jupiter, pour obtenir son assistance. (2) Cassiope explique à sa soeur Mérope qu’elle la destinait à Persée, mais que celui-ci est épris de sa fille. Mérope est jalouse, mais bien décidée à le cacher à Persée. (3) Restée seule, Mérope sait qu’elle ne peut échapper à l’amour. (4) Andromède, fille du couple royal, et Phinée, frère de Cassiope, arrivent. Phinée ne croit pas à l’amour d’Andromède, à cause de Persée, dont il l’accuse d’être éprise. Andromède s’en défend, assurant qu’elle fuit Persée et qu’elle se fait un devoir de l’aimer, lui Phinée. (5) Les Jeux Junoniens vont commencer. On apporte les prix. Cassiope invoque Junon et fait amende honorable. Les jeux commencent par un concours de danse. Mais trois Ethiopiens surviennent, dont un, Amphimédor, annonce que nouveaux malheureux ont été transformés en rochers par Méduse. Le chœur ne pense qu’à se sauver.
Acte II
Les jardins du palais de Céphée
(1) Persée a ramené le roi au palais, et Méduse s’est retirée. Cassiope désespère de calmer la colère de Junon. (2) Phinée réclame à Céphée la main d’Andromède, et met en doutes que Persée soit le fils de Jupiter. Céphée lui annonce que Persée a offert de tuer Méduse, mais réclame Andromède en contrepartie. (3) Céphée reprend espoir. (4) Mérope exprime ses craintes pour Persée. (5) Andromède arrive et, en rêvant, et laisse entendre à Mérope qu’elle ne peut résister aux mérites et à l’amour de Persée. Mérope et Andromède reconnaissent qu’elles sont toutes deux éprises de Persée. Toutes deux craignent pour sa vie. (6) Persée, avant de combattre Méduse, vient dire son amour à Andromède. Celle-ci répond qu’elle est promise à Phinée, mais se trahit. Craignant l’issue du combat, elle essaye en vain de retenir Persée. (7) Mercure, sortant des Enfers, annonce à Persée que les dieux vont lui prêter assistance, en dépit de Junon. (8) Des Cyclopes viennent, en dansant, et l’un donne à Persée, de la part de Vulcain, une épée et des talonnières ailées, semblables à celles de Mercure. (9) Des Nymphes guerrières entrent, dont une présente à Persée, de la part de Pallas, un bouclier de diamants. (10) Les divinités infernales sortent des enfers, et l’une apporte à Persée le casque de Pluton. Mercure et les choeurs souhaitent la victoire à Persée.
Acte III
L’antre des Gorgones, Méduse, Eutyale et Sténone
(1) Méduse se lamente sur sa beauté perdue, à cause de la jalousie de Pallas. Elle se console toutefois par la puissance de son regard. Une douce musique se fait entendre. Mercure survient. Méduse pense que les dieux ont besoin d’elle, mais Mercure lui annonce qu’il vient lui offrir un sommeil paisible. Les trois Méduses se récrient, mais, touchées par le caducée de Mercure, s’endorment. (2) Mercure conseille à Persée de surpendre Méduse pendant son sommeil, en évitant de la regarder. persée tenant son bouclier devant ses yeux, approche de Méduse, lui coupe la tête et la cache dans une écharpe pour l’emporter. (4) Eutyale et sténone s’éveillent et veulent venger Méduse, mais ne peuvent voir Persée, grâce à son casque. Des fantômes, dont Chysaor, Pégase, et des monstres se forment du sang de Méduse. Certains s’élèvent dans les airs, d’autres rampent, les autres courent, mais Persée leur reste invisible. (5) Mercure renvoit Persée, et contraint les deux Gorgones ainsi que les monstres à descendre aux Enfers.
Acte IV
La mer, un rivage bordé de rochers
(1) Le chœur des Ethiopiens accueille le vainqueur de la Méduse. (2) Phinée et Mérope sont les seuls à ne pas s’en réjouir. Mérope se plaint de l’indifférence de Persée, et Phinée est jaloux de son triomphe. La mer lève, les flots envahissent le rivage. Phinée et Mérope comparent la tempête à leur trouble. (3) Le choeur des Ethiopiens se lamente, et Idas annonce que Junon a fait sortir de la mer un monstre qui viendra dévorer Andromède. Celle-ci a été emmenée par les Tritons, aux ordres de Thétis, pour être exposée sur un rocher et offerte au monstre. Les Ethiopiens se lamentent, même si Persée est décidée à la sauver, et se placent sur les rochers en bordure du rivage. Phinée se réjouit, préférant voir Andromède dévorée que dans les bras de Persée. (4) Céphée et Cassiope se lamentent, Cassiope s’accusant à nouveau d’avoir provoqué la colère de Junon. (5) Cassiope supplie en vain les Tritons et Néréïdes qu’on la laisse prendre la place d’Andromède. Andromède chante que c’est à elle d’apaiser les dieux. Les Tritons rappelle à Cassiope que la grandeur des mortels est vaine. Cassiope et Céphée, désepérés, appellent en vain Andromède. Le monstre apparaît. mais Persée apparaît également dans l’air. (6) Persée combat le monstre et le tue. Les Tritons redescendent cacher leur honte dans la mer qui s’apaise. (7) Le choeur des Ethiopiens chantent la victoire de Persée. Les ethiopiens descendent des rochers, et témoignent leur joie par des chants et danses. Des matelots et leurs femmes se joignent à eux. Un Ethiopien chante leur soulagement après une telle frayeur, puis le bonheur de l’amour. Tous célèbrent le héros.
Acte V
Le lieu préparé pour les noces de Persée et Andromède
(1) Mérope appelle la mort pour mettre fin à sa douleur. (2) Phinée lui annonce qu’Iris lui a transmis la volonté de vengeance de Junon, et qu’il entend bien soustraire par la force Andromède à Persée. (3) Les noces commencent, devant les courtisans de Céphée, magnifiquement parés. Le Grand Prêtre de l’Hyménée appelle le bonheur sur les fiancés. (4) Mérope interrompt la cérémonie en avertissant Persée que Phinée et ses soldats est en marche contre lui. Persée refuse de s’enfuir et s’apprête à l’affronter. (5) Phinée arrive avec ses combattants, et s’attaque à Persée. (6) Pendant le combat, Andromède et Cassiope invoquent les dieux. (7) Céphée annonce à Cassiope que sa soeur a été mortellement blessée, et qu’il craint la défaite de Persée. (8) Les suivants de Phinée appellent à la mort de Persée, mais celui-ci rassure ses partisans. Il sort la tête de Méduse et pétrifie Phinée. Persée chante le secours de Vénus. (8) Vénus descend dans son palais, elle annonce que les maheurs des Ethiopiens sont finis, et que même Junon est apaisée. Céphée, Cassiope, Persée et Andromède sont élevés au ciel pour être toujours environnés de feux éclatants. Les Ethiopiens témoignent leur joie par des chants et des danses.
Livret disponible sur livretsbaroques.fr
CMBV – notice détaillée
La légende de Persée : http://fbecuwe.free.fr/persee.htm
Représentations :
Cité de la Musique – 2006 – dir. Hervé Niquet
Toronto – Elgin Theatre – 23, 24, 28, 30 avril, 1er, 2 mai 2004 – Tafelmusik Baroque Orchestra – dir. Hervé Niquet – mise en scène Marshall Pynkowsi – chorégraphie Jeannette Zingg – décors Gerard Gauci – costumes Dora Rust-D’Eye – lumières Kevin Fraser – avec Cyril Auvity (Persée), Alain Coulombe (Phinée), Olivier Laquerre (Céphée), Marie LeNormand (Andromède), Thomas Meglioranza (Méduse), Stephanie Novacek (Cassiope), Michiel Schrey, Curtis Sullivan, Monica Whicher (Mérope)
La Cité de la Musique – 15 septembre 2001 – Chantres de la Chapelle Royale de Versailles – Orchestre des Talens Lyriques – dir. Christophe Rousset, clavecin – avec Paul Agnew, haute-contre (Persée), Anna Maria Panzarella, soprano (Andromède, Nymphe guerrière), Olivier Lallouette, basse baryton (Céphée, Ethiopien, Cyclope, Idas), Monique Simon, mezzo-soprano (Cassiope, Imène), Salomé Haller, soprano (Mérope, Fortune), Jérôme Corréas, basse baryton (Phinée, Ethiopien), Robert Getchell, haute-contre (Mercure, Megathyme), Béatrice Mayo, soprano (La Vertu, Vénus, Amour), Bruno Rostand, baryton basse (Sténone, Triton)
Festival International de Musique Baroque de Beaune – Cour des Hospices – Recréation en première européenne – version de concert – 13 juillet 2001 – Choeur de la Chapelle Royale de Versailles – Les Talens Lyriques – dir. Christophe Rousset – avec Paul Agnew (Persée), ténor , Anna-Maria Panzarella (Andromède), soprano, Olivier Lallouette (Céphée), baryton basse, Monique Simon (Cassiope), soprano, Salomé Haller (Mérope) soprano, Jérôme Correas (Phinée), baryton basse, Béatrice Mayo (La Vertu) soprano.
Diapason – septembre 2001 – « Persée retrouvé »
« L’incomparable Quinault déroule ici l’un de ses plus riches poèmes »… »Lully déborde d’une imagination toute classique »… »Christophe Rousset…sa conduite est vive et naturelle »… »Jérôme Corréas n’a jamais mieux chanté, Salomé Haller détaille avec amour accents et ornements, Anne Marie Panzarella marie la noblesse à l’affectation…De Paul Agnew on comprend chaque mot… »
Altamusica – Christophe Rousset réussit une percée lullyste
« Y aurait-il deux Christophe Rousset, celui qui, dans Haendel ou Mozart, n’est pas toujours convaincant ; et celui qui trouve son terrain d’élection dans la musique française ? Assurément, sa vision de Lully est vivante et distinguée, sans pompe ni emphase. Des divertissements chorégraphiques, le chef sait souligner le lien organique qui les intègre vraiment à la partition et n’en fait pas des épisodes rajoutés sans nécessité et simplement décoratifs. S’il souligne raisonnablement l’intensité des récitatifs, Rousset aborde les airs avec une volonté expressive identique. Sans doute pourrait-il aller encore plus loin dans l’imagination et la fantaisie, dans la diversité des couleurs et des contrastes. Il est, néanmoins, sur la bonne voie.
Homogène, équilibrée, la distribution qu’il a réunie a pour premier atout de laisser entendre les mots, et de trouver le ton pour déclamer sans artifice et sans surjouer ; de plus, tout le monde a fait sienne la perspective du concert, dont l’éclairage est moins cru que celle de la scène. Si l’on perçoit, chez Monique Simon et Bruno Rostand, des ressources qui pourraient être mieux exploitées, Laurent Slaars, Béatrice Mayo, Robert Getchell Vincent Billier sont convaincants autant pas leurs qualités vocales intrinsèques que par leur style et leur engagement. Le duo Persée/Andromède, Paul Agnew et Anna Maria Panzarella, partage la même vibration, la même fraîcheur de timbre. Salomé Haller ajoute à un timbre soyeux et opulent une sensibilité à fleur de peau qui la rend troublante ; il est vrai que les airs de Mérope comptent parmi les plus beaux de la partition. »
Toronto – The Elgin and Winter Garden Theatre Centre – novembre 2000 – Opéra Atelier de Toronto – Choeur de chambre et Orchestre baroque Tafelmusik, membres du Concert Spirituel – dir. Hervé Niquet – mise en scène Marshall Pynkoski – chorégraphie Jeannette Zingg – avec Rufus Müller (Persée), Mark Stone (Céphée), Laura Pudwell (Cassiope), Nathalie Paulin (Andromède), Michael Chioldi (Méduse)
Ambronay – Espace Polyvalent – 27 septembre 1997 – Polichinelle-Persée, parodie de la tragédie lyrique, avec marionnettes baroques – mise en scène Yves Hunstad – manipulateurs Michel Keyaerts et Cécile van Seymortier – marionnettes José Maquet, Paul Tignée, Barbara Mélois – avec Jean-Luc Impe, théorbe, Catherine Daron, traverso, Mireille Podeur, clavecin, Valérie Gabail (Mérope), Manuela Ammoun (Andromède), Patrick Waleffe (Dame Cigogne – Persée – Méduse – Idas), Pierre Bodson (Céphée – Mercure), Patrick Ringal-Daxhelet (Sacaramouche)
ConcertoNet
« La parodie, parfaitement rodée, ne mérite par contre que louanges. La virtuosité de jeu et d’invention des acteurs-chanteurs se révélait très heureuse. La mise en scène soulignait avec intelligence les rapports avec le modèle sérieux et acclimatait la pièce, avec l’aide d’éléments contemporains, à un public d’aujourd’hui. Jean-Luc Impe est, de toute évidence, plus à l’aise dans la parodie que dans une tragédie demandant une plus grosse infrastructure. »
Ambronay – Chapelle des usines Bonnet – Festival d’Ambronay – 26 septembre 1997 – Les Menus Plaisirs du Roy – dir. Jean-Luc Impe/ Mireille Podeur – dramaturgie Bruno Cohen – gestuelle et prononciation restituée Nicole Rouillé – costumes Dominique Louis – Compagnie de danse » Talon et pointe » – avec Howard Crook (Persée – Méduse), Julie Hassler (Andromède), Valérie Gabail (Mérope), Anne Horbach (Cassiope – la Vertu), Stéphane Van Dyck (Mercure), Patrick Ringal-Daxhelet (Phinée – Steone), Gilles Wiernik (Céphée), Jean-François Lombard (Euriale), Myriam Piguet (Vénus), Lise Berardo (Amour), Elisabeth Goethals (Hymen), Nicolas Bauchau (Le grand prêtre) – Alain Carré, comédien
ConcertoNet
« La mise en scène d’une tragédie lyrique est toujours un événement, ne serait-ce que par la trop rare apparition de ce genre dans les théâtres. Il s’agissait ici d’une pièce écrite par Lully sur un livret de son plus grand collaborateur, Philippe Quinault et représentée pour la première fois en avril 1682 au Palais-Royal. Aujourd’hui, cette opération était d’autant plus passionnante que son ‘double’ parodique était présenté par les mêmes musiciens dans le même temps. Plusieurs intérêts renforçaient l’attrait lullyste : une » machinerie optique » et l’utilisation d’un théâtre de marionnettes pour le complément comique. Un effet de miroirs se faisait jour : à l’intérieur de la scène, entre l’opéra et son reflet comique, et à l’intérieur du théâtre de marionnettes qui donne à voir un double transformé et moqué du héros. C’est bien sur une machine de vision que s’articulaient les deux spectacles.
Le premier dispositif mécaniste, se comportait, dans sa fonction, comme un véritable automate spirituel. Le merveilleux, le ‘divin’ de la mythologie se cachait derrière ce montage catoptrique : on aboutit ainsi au chavirement de l’image, comme des sens. Idée fabuleuse : l’ » en haut » est montré par une autre optique, un reflet, une légèreté. » Le mythe est un discours mensongé qui exprime la vérité en images » prévient le récitant.
On pourra toutefois regretter le lieu choisi (en raison bien sûr du peu de salle de la région), qui ne se prêtait pas forcément au montage d’une scène, et en diminuait l’impact. On louera quand même le festival d’Ambronay qui n’a pas ménagé ses efforts pour arriver au terme de cette manifestation. On a également pu apprécier l’investissement de chaque musicien et chanteur, même si une véritable direction d’ensemble faisait défaut dans cette version de chambre (2 violons, 2 altos, 2 traversos et 3 continuistes). Si l’acte III souffrait d’un certain statisme, ailleurs, la mise en scène accompagnait sans gêne les chanteurs, certains étant habillés magnifiquement. Il manquait malheureusement une caractérisation des évolutions du livret, et de ce fait, la progression ne s’imposait pas. »
Paris – Société des Concerts du Conservatoire – 10 novembre 1929 – air de Méduse – dir. Philippe Gaubert – avec Lina Falk, Professeur Supérieur au Conservatoire Royal de Bruxelles