Berenice, Regina d’Egitto

Berenice par Bernardo Strozzi

COMPOSITEUR Georg Friedrich HAENDEL
LIBRETTISTE Antonio Salvi
ENREGISTREMENT ÉDITION DIRECTION ÉDITEUR NOMBRE LANGUE FICHE DÉTAILLÉE
1994 1999 Rudolph Palmer Newport Classics 3 italien
2009 2010 Alan Curtis Virgin 3 italien

 

Dernier opéra (HWV 38) écrit par Haendel pour le Théâtre du Covent Garden, terminé 27 janvier 1737, créé le 18 mai 1737, en présence de la famille royale, représenté à quatre reprises.

Haendel venait de subir une attaque qui l’avait paralysé de tout le côté droit.

La distribution réunissait Anna Maria Strada del Pò, soprano (Berenice), Gioacchino Conti dit Il Giziello, soprano castrato (Alessandro), Domenico Annibali, alto castrato (Demetrio), Francesca Bertolli, alto (Selene), Maria Caterina Negri, alto (Arsace), John Beard, ténor (Fabio), Henry Theodore Reinhold, basse (Aristobolo).

Gioacchino Conti dit Il Giziello

Reprise à Brunswick en 1743.

 

Personnages : Berenice, reine d’Egypte (soprano), Selene, soeur de Bérénice, amante de Demetrio (alto), Alessandro, prince romain (soprano), Demetrio, macédonien, amant de selene (alto), Arsace, Egyptien (alto), Fabio, envoyé de Rome (ténor), Aristobolo, conseiller à la cour (basse)

 

Synopsis

En Égypte, vers l’an 81 av. J-C

Acte I

Bérénice aime Demetrio, qui s’est allié à l’ennemi de l’Egypte, le roi Mithridate ; mais elle est prête à laisser la politique gouverner son coeur : pour conclure une alliance avec Rome, elle épousera un Romain. Fabio, l’envoyé romain, lui présente l’homme que Rome lui a choisi pour époux, Alessandro. Ce dernier tombe amoureux de Bérénice dès qu’il la voit. Mais voilà qu’elle refuse que l’on choisisse pour elle. Fabio rappelle à Alessandro que si Bérénice le refuse, il devra épouser sa soeur Sélène. Il suggère à Alessandro de suivre l’exemple de l’abeille, qui ne s’arrête jamais longtemps sur une fleur.

Dans les appartements royaux de la princesse Sélène

Demetrio et Sélène s’aiment en secret. Sélène sait que sa soeur, la reine, serait furieuse si elle l’apprenait et le supplie de partir. Mais il lui confie que son ami Mithridate pourrait l’aider à détrôner sa soeur. Il part et Sélène apprend de la bouche d’Aristobolo que Rome insiste maintenant pour que Bérénice épouse Alessandro ; Demetrio doit être exécuté. La nouvelle bouleverse Sélène. Bérénice vient informer sa soeur qu’elle doit épouser « un prince de sang royal ». Lorsqu’elle comprend qu’il s’agit d’Arsace, Sélène est amèrement déçue. Bérénice prend la rougeur qui monte aux joues de Sélène pour une preuve d’amour. Arsace s’imagine que l’amour qu’il porte à Sélène a maintenant quelque chance de succes.

Une salle du palais

Alessandro a sauvé la vie de Demetrio, et Bérénice le regarde maintenant d’un nouvel oeil. Mais il repousse sa gratitude : il ne recherche que le mérite de l’honneur. Bérénice promet à Demetrio qu’elle prendra son parti : ses ennemis à lui seront ses ennemis à elle (duo Se il mio amor).

Acte II

Dans les appartements de la reine

Sans sa chère Sélène, Demetrio dépérit. Il a perdu le goût du pouvoir et est horrifié lorsqu’il entend Fabio annoncer que Rome désire maintenant qu’Alessandro épouse Sélène. Bérénice rejette la requête en affirmant que Sélène est déjà promise à Arsace. Fabio lui présente une alternative simple, la guerre ou la paix. Demetrio reste impassible à l’idée d’une guerre, ce qui plaît à Bérénice, car elle aime le voir en colère. Resté seul, Demetrio s’imagine que Sélène l’a trahi en acceptant d’épouser Arsace. Pour se venger, il conspirera avec Mithridate, et même avec les Furies des Enfers, contre l’Egypte (Su, Megera, Risifone, Aletto !)

Alessandro rêve d’adorer sa déesse Bérénice. Il entend Aristobolo ordonner à Arsace de laisser Sélène à Alessandro afin de préserver la paix avec Rome. Alessandro refuse de se marier sans amour et est donc heureux de céder Sélène à Arsace. Mais Aristobolo persuade Arsace de renoncer à Sélène. Arsace évalue les risques conflictuels de l’amour et de la gloire, et accepte avec perplexité. Comme le souligne Aristobobo, sans la politique le monde serait beaucoup plus honnête.

Dans les appartements de Sélène

La jalousie pousse Demetrio à accuser Sélène d’infidélité ; il menace de tuer son rival Arsace et admet avoir feint d’aimer Bérénice. Bérénice entend cette révélation et explose de fureur contre la trahison de Demetrio. D’une manière vindicative, la reine force Sélène à accorder sa main à Arsace. Toutefois, Arsace insiste pour sacrifier son propre bonheur à l’Egypte et offre donc Sélène à Alessandro, qui la refuse à son tour, car elle ne l’aime pas. Furieuse, Bérénice envoie Demetrio à la tour. Il se déclare enfin : il aimera toujours Sélène, même en prison (Si, tra i ceppi). Sélène rejette Arsace parce qu’il s’est montré indigne d’elle.

Acte III

Bérénice entend Demetrio confirmer qu’il est prêt à mourir pour Sèlène. Rome perd patience envers l’Égypte. Bèrénice confie à Fabio son anneau royal : à lui de décider qui elle épousera ; l’homme qu’il aura choisi lui rapportera l’anneau. Seule, elle constate que cette divinité aveugle qu’est l’amour a des caprices incompréhensibles (Chi t’intende).

Le jardin royal

Arsace fait à nouveau la cour à Sélène, qui promet de l’épouser s’il libère Demetrio. Alessandro apporte à Arsace l’anneau royal : comme il provient de Fabio et non de Bérénice elle-même, Alessandro refuse naturellement d’en tirer avantage. Arsace l’accepte et promet de faire connaître à la reine les sentiments d’Alessandro. Lorsque Fabio revient pour mener Alessandro à son mariage, il est horrifié de découvrir que le Romain insiste encore pour laisser Bérénice choisir elle-même son mari. Alessandro explique que Cupidon a remis son sort entre les mains de la reine.

Bérénice décide de punir Demetrio pour sa double trahison et ordonne à Aristobolo de lui apporter la tête de Demetrio au temple. Elle s’ordonne à elle-même de ne pas pleurer (Avvertite, mie pupille).

Bérénice confie Demetrio à la déesse Isis et à ses ministres. Sélène la supplie de le laisser en vie, puis demande de se joindre à Demetrio dans la mort. Arsace intervient, offre sa propre vie et rend son anneau à Bérénice. Alessandro explique qu’il l’a donné à Arsace, car il souhaitait être choisi pour mari par Bérénice et non par Rome. Emue par le beau geste d’Alessandro, elle découvre qu’elle l’aime. Dans un duo, ils célèbrent leur amour mutuel. Bérénice laisse à Alessandro le soin de décider du sort de Demetrio et il lui sauve la vie. Arsace autorise ensuite Demetrio à épouser Sélène et tous celèbrent la fin des querellesentre l’amour et la politique. (Kobbé – Robert Laffont)

Livret

 

Représentations :

Vienne – Theater an der Wien – 27 janvier 2011 – version de concert – Il Complesso Barocco – dir. Alan Curtis – avec Klara Ek (Berenice), Ingela Bohlin (Alessandro), Franco Fagioli (Demetrio), Romina Basso (Selene), Mary-Ellen Nesi (Arsace), Anicio Zorzi Giustiniani (Fabio), Matteo Ferrara (Aristobolo)

 

 Théâtre des Champs Élysées – 21 novembre 2009 – en version de concert – Il Complesso Barocco – dir. Alan Curtis – avec Klara Ek (Berenice), Ingela Bohlin (Alessandro), Toby Spence (Fabio), Franco Fagioli (Demetrio), Romina Basso (Selene), Mary Ellen Nesi (Arsace), Vito Priante (Aristobolo)

 

Karlsruhe – 23 octobre 2001, 27 février, 1er, 4 mars 2002 – Kleines Haus – Deutsche Händel-Solisten – dir. Andreas Spering – mise en scène Ulrich Peters – décors Martin Warth – costumes Götz Lanzelot Fischer – avec Susanne Cornelius (Berenice), Rosemara Ribeiro (Selene), Marianne Kienbaum (Alessandro), David Cordier (Demetrio), Martin Wölfel (Arsace), Guido Jentjens (Aristobulo), John Pickering (Fabio) 

 

Düsseldorf – avril 2001

 

Karlsruhe – Kleines Haus – 24 février 2001 et sq. – Deutsche Händel Solisten – dir. Andreas Spering – mise en scène Ulrich Peters – décors martin Warth – costumes Götz Lanzelot Fischer – dramaturgie Frank Gersthofer – Première recréation – avec Kornelia Eng (Berenice), Rosemara Ribeiro (Selene), Johanna Stojkovic (Alessandro), David Cordier (Demetrio), Martin Wölfel (Arsace), Alexander Pfitzenmeier (Fabio), Guido Jentjens (Aristobolo). Airs en italien, récitatifs en allemand.

« Berenice a été le dernier opéra écrit par Haendel pour le theâtre de Covent Garden, la même année qu’Arminio et Giustino, au cours d’une période de crise marquée par la désaffection de plus en grande du public londonien pour l’opéra italien. Créée le 18 mai 1737, Berenice ne devait connaître en tout que quatre représentations, devant des salles de plus en plus clairsemées. Hormis une reprise allemande en 1743, à Brunswick, on n’en retrouve plus aucune trace ensuite, jusqu’à cette nouvelle production du Festival de Karlsruhe. En dépit de la rareté de l’oeuvre, il est difficile de considérer son retour à l’affiche comme un événement majeur. Haendel y déploie tout son savoir-faire de vieux routier de l’opera seria, mais ne parvient pas à transcender un livret à la fois fort complexe et incurablement statique pris au piège de conflits politiques et amoureux insolubles, les personnages y enchaînent des airs de belle facture, mais d’une caractérisation qui évolue fort peu. La soirée semble s’enliser au fut et à mesure que se cristallise une situation sans issue, qui ne se débloque qu’au tout dernier moment, au cours d’un finale complètement artificiel. Les meilleurs moments se trouvent dans la première partie ensuite, la belle mécanique haendelienne semble tourner en rond, et ce d’autant plus que l’orchestre, exceptionnellement avare en couleurs instrumentales (avec simplement les cordes et deux hautbois) n’apporte ici que fort peu de variété.

En dépit de ces relatives faiblesses, Ulrich Peters est parvenu à proposer un spectacle qui soutient presque toujours l’intérêt, grâce à une direction d’acteurs très vivante et une bonne dose d’humour. Le jeu sait s’écarter quand il le faut d’une adhésion trop fidèle au texte chanté, en créant çà et là de savoureuses distorsions, et l’on retrouve le même esprit parodique dans le dispositif scénique très étudié de Martin Warth, ainsi que dans les costumes très imaginatifs dessinés par Gotz Lanzelot Fischer. L’impossible semble avoir été fait pour tirer un spectacle viable d’un ouvrage mal ficelé – et, dans l’ensemble, c’est assez réussi. Du côté des solistes, le bilan est, là encore, très positif. La Berenice de Kornelia Eng fait valoir une voix lumineuse et flexible, homogène sur toute la tessiture ; David Cordier est un Demetrio de belle prestance, en dépit d’un timbre parfois fluctuant, Martin Wôlfel tire le maximum d’Arsace et Johanna Stojkovic affronte les difficultés des airs d’Alessandro avec beaucoup de dignité. Haendel écrit ici pour quelques-uns des meilleurs chanteurs de son temps, et le grand mérite de cette distribution est de le faire oublier, sauf lors des apparitions de Rosemara Ribeiro, qui n’est vraiment pas en mesure de rendre justice au rôle es-sentiel de Selene. Les Deutsche Händel Solisten ne sont pas le meilleur orchestre baroque du moment, ce que l’écriture dépouillée Haendel de certains passages élégiaques souligne parfois assez cruellement, mais Andreas Spering semble en tirer le maximum d’expressivité possible. En revanche, son idée de faire chanter les airs en italien, en alternance avec des récitatifs traduits en allemand, n’est guère défendable. » (Opéra International – avril 2001)

 

Cambridge Handel Opera Group – 1993 

 

Keele University – avril 1985 – dir. George Pratt – première recréation