Giovanni Battista BONONCINI

Giovanni Battista BONONCINI
18 juillet 1670 (Modène) – 9 juillet 1747 (Vienne)

Giovanni Bononcini

ABDOLOMINO
livret de Silvio Stampiglia – représenté au Hoftheater de Vienne, le 3 février 1709 – reprise au teatrao San Bartolomeo de Naples, le 1er octobre 1711
GLI AFFETTI PIU GRANDI, VINTI DAL PIU GIUSTO
livret de Donato Cupeda – représenté au Teatro della Favorita de Vienne, le 30 août 1701
ALESSANDRO IN SIDONE
livret d’Apostolo Zeno – représenté au Kleines Hoftheater de Vienne, le 6 février 1737
ALMAHIDE
AMORE DOPPIO
L’AMORE EROICA FRA PASTORI / LA PASTORELLA / LOVE’S TRIUMPH
favola pastorale en trois actes pour marionnettes – livret de Pietro Ottoboni – en collaboration avec Carlo Francesco Cesarini (acte I), Giovanni Lorenzo Lulier (acte II), acte III de Bononcini – représenté en février 1696 au Palazzo della Cancelleria, à Rome – reprise à l’Ambassade de Venise à Rome, en février 1705, sous le titre La Pastorella, avec des airs d’Alessandro Scarlatti – reprise sous le titre Love’s Triumph le 26 février 1708 à Londres, au Queen’s Theatre, dans une version révisée par P. A. Motteux et V. Urbani)
AMOR NON VUOL DIFFIDENZA
serenata – exécutée au palazzo Colonna, à Rome, le 10 août 1695
AMOR PER AMORE
serenata – exécutée au palazzo Colonna, à Rome, le 10 août 1696
GLI AMORI DI CEFALO E PROCRI
représentée à Berlin, le 16 octobre 1704
L’ARRIVO DELLA GRAN MADRE DEGLI DEO IN ROMA
représenté le 6 mai 1713 au teatro di Corte de Milan
ASTARTO
ASTIANATTE
livret d’Antonio Salvi – représenté à Venise, au Teatro San Giovanni Grisostomo, durant le carnaval 1718, dans des décors de Romualdo et Giuseppe Mauri, avec Faustina Bordoni dans le rôle d’Ermione – reprise au Haymarket Theatre de Londres, le 6 mai 1727, et jusqu’au 6 juin (neuf représentations) avec un livret revu par Nicolo Haym – lors de la représentation du 6 juin, Francesca Cuzzoni et Faustina Bordoni (dans le rôle d’Ermione) en vinrent aux mains sur scène, en présence de la princesse Amelia Sophie Eléonore, entraînant la fermeture du théâtre.
CAIO GRACCO
livret de Silvio Stampiglia – représenté au Hoftheater de Vienne, le 8 février 1708
CALPURNIA
livret de Nicolo Haym, d’après G. Braccioli – représenté au Haymarket Theatre de Londres, le 18 avril 1724 – le livret fait référence à la fille du consul Calpurnius Pison, que César épousa en 58 av. J.-C.
CEFALO
pastorella – livret de A. Guidi – représenté au Litzenburgtheater de Berlin, au printemps 1702
LA CLEMENZA D’AUGUSTO
La Clémence d’Auguste – livret de Carlo Sigismondo Capeci – représenté au teatro di Tordinona, à Rome, le 4 février 1697 – en collaboration avec De Luca (acte I), C. F. Pollarolo (acte II) – acte III de Bononcini
LA COSTANZA NON GRADITA NEL DOPPIO AMORE D’AMINTA
serenata – livret de Silvio Stampiglia – exécutée au Palazzo Colonna, à Rome, le 17 août 1694
CRISPO
dramma per musica – livret en trois actes de Gaetano Lemer – représenté au Teatro Capranica de Rome, en 1721 – reprise, avec succès, au Haymarket de Londres durant la troisième saison d’opéra de la Royal Academy, le 10 janvier 1722, dans une version revue par Paolo Antonio Rolli – avec les sopranos Maria Maddalena Salvai (Fausta) et Anastasia Robinson (Olimpia) – autres personnages : Costante (castrat soprano), Crispo (castrat alto), Costantino(castrat alto), Ablavio(castrat alto)
ENDIMIONE
Endymion – livret de Silvio Stampiglia, d’après F. de Lemene – représenté au Palazzo di Belfonte, à Vienne, le 6 juillet 1706 – reprise à Vienne en juillet 1720
ENEA IN CANONIA
1711
ERACLEA
ou Il Ratto delle SabineEraclée ou le Rapt des Sabines – livret de Silvio Stampiglia, d’après Niccolo Minato – pasticcio en trois actes, représenté au teatro di Tordinona, à Rome, le 12 janvier 1692 – on estime qu’il contient au moins une vingtaine d’airs de Bononcini
ERMINIA
Erminie – représenté au Teatro della Pace de Rome durant le carnaval 1719 – repris, sans succès, au Haymarket Theatre de Londres, le 30 mars 1723, sur un livret de Paolo Antonio Rolli
ETEARCO
EULEO FESTEGGIANTE NEL RITORNO D’ALESSANDRO MAGNO DALL’INDIE
exécutée le 9 août 1699, à Vienne, dans le Giardino della Favorita impérial
FARNACE
livret de L. Morani – représenté, sans succès, au Haymarket Theatre de Londres, le 27 novembre 1723 – repris sur un livret de L. Luchini, à Lisbonne, à l’Académie de la Place de la Trinité, le 26 décembre 1735
LA FEDE PUBBLICA
La Confiance publique – livret en trois actes de Donato Cupeda – représenté au Cesareo Palazzo de Vienne, le 18 janvier 1699
IL FIORE DELLE EROINE
La Fleur des héroïnes – livret de Donato Cupeda – représenté à Vienne, le 10 juillet 1704
LA GARA DELLE QUATTRO STAGIONI
exécutée à Vienne, le 21 avril 1699
LA GRISELDA
LOVE’S TRIUMPH
Le Triomphe de l’Amour – représenté au Haymarket de londres, le 26 février 1708
MARIO FUGGITIVO
livret de Silvio Stampiglia – représenté au Hoftheater de Vienne, le 8 février 1708 – avec la collaboration de Gioseffo Hoffer pour les ballets
MUZIO SCEVOLA (1695)
MUZIO SCEVOLA (1721)
– 
IL NATALE DE GIUNONE DESTEGGIATO IN SAMO
représenté à la cour de Vienne, le 21 avril 1708
LA NEMICA D’AMORE FATTA AMANTE
LA NOTTE FESTIVA
La notte festiva per il giorno natalizio di D. Maria de Giron y Sandoval Duchessa di Medina-Celi – livret de Silvio Stampiglia – exécutée à Rome, sur la Piazza Spagna, le 5 août 1695
LA NUOVA GARA DI GIUNONE E DI PALLADE TERMINATA DA GIOVE
1705
L’ODIO ED AMORE
La Haine et l’Amour – livret de Paolo Antonio Rolli d’après Matteo Noris – représenté au Haymarket Theatre de Londres, le 20 mai 1721
POLIFEMO
PROTEO SUL RENO
représentée à Vienne, le 19 mars 1703
IL RATTO DELLE SABINE
voir Eraclea
LA REGINA CREDUTA RE
La Reine que l’on croyait Roi – livret de Matteo Noris – représenté au teatro Sant’Angelo de Venise, durant le carnaval 1706
LA RINOVATA CAMILLA
livret de Silvio Stampiglia – représenté au Teatro Capranica de Rome, le 18 janvier 1698
IL RITORNO DI GIULIO CESARE VINCITORE DELLA MAURITANIA
Le Retour de Jules César, vainqueur de la Mauritanie – livret de Silvio Stampiglia – représenté à Vienne, en décembre 1712
LI SACRIFICI DI ROMOLO PER LA SALUTE DI ROMA
représenté à la cour de Vienne, le 26 juillet 1708
SACRIFICIO A VENERE
représenté le 28 août 1714 à Rome, Piazza de’SS Apostoli
SEMIRAMIDE
livret de Matteo Noris – représenté à Brunswick, en 1706
TEMISTOCLE IN BANDO
Thémistocle en exil – livret d’Adriano Morselli – représenté au teatro Capranica, à Rome, en février 1698 – acte III de Bononcini
IL TRIONFO DI CAMILLA, REGINA DE VOLSCI
TULLO OSTILIO
livret d’Adriano Morselli – représenté au teatro di Tordinona, à Rome, en février 1694 – Tullus Hostilius, troisième roi de Rome de – 672 à – 640, détruisit la ville d’Albe et déporta sa population à Rome ; il mourut dans son palais foudroyé
TURNO ARICINO
livret de Silvio Stampiglia – représenté à Florence, en 1704, puis au teatro della Favorita, à Vienne, le 26 juillet 1707, pour l’anniversaire de Joseph Ier, avec des airs de ballet de Gioseffo Hoffer
I VARII EFFETTI D’AMORE
scherzo musicale – exécuté à Wiener Neustadt en 1700, avec des airs de ballets de Gioseffo Hoffer
XERSE
Xerxès – livret en trois actes de Silvio Stampaglia, d’après Niccolo Minato – représenté au teatro di Tordinona, à Rome, le 25 janvier 1694
ZENOBIA

Violoncelliste, il se forma à Bologne auprès de G. P. Colonna. Durant son séjour dans cette ville, il publia deux recueils de trios (1685) et trois de sinfonie (1685-1687). Il fut membre de l’Accademia Filarmonica, musicien à San Petronio (il y composa deux oratorios de carême, 1687-1688) et finalement maestro di cappella à San Giovanni in Monte jusqu’en 1689 (ses quatre messes à double choeur, publiées en 1688 comme opus 7, furent composées pour les offices dans cette église). De Bologne, il se rendit à Milan pour répondre à une commande du duc de Modène, et de là à Rome – via Bologne, où il joua dans l’orchestre du cardinal Pamphili. Durant ses années au service de Filippo Colonna à Rome, Bononcini collabora avec le poète Silvio Stampiglia pour six serenatas, un oratorio et cinq opéras, dont le dernier, Il Trionfo di Camilla, fut le plus grand succès du carnaval 1696-1697 à Naples. Ses opéras étaient alors donnés dans toute l’Italie, mais sa réputation lui venait tout autant de ses cantates. Sa musique avait un impact tel qu’en 1698 il fut engagé à la cour de Leopold Ier à Vienne, où il devint l’un des musiciens favoris de son héritier Joseph Ier (qui régna de 1705 à 1711). Stampiglia, accompagné du frère cadet de Bononcini, Antonio Maria (1677-1720), également violoncelliste dans l’orchestre de Pamphili et compositeur d’opéras, le rejoignit bientôt à Vienne. A Vienne, Giovanni composa des opéras, des oratorios et des dizaines de cantates, mais n’en saisit pas moins toutes les occasions de présenter sa musique ailleurs : les restrictions dont souffrit la musique du fait de la guerre de Succession d’Espagne permirent aux deux Bononcini de visiter la cour de Berlin en 1702, et durant l’année de deuil consécutive à la mort de l’empereur (1705-1706). Giovanni put voyager en Italie. De 1706 à 1709, son opéra Camilla fut représenté 64 fois au Théâtre royal de Druiy Lane à Londres, devenant ainsi le premier opéra italien à acquérir sur une scène anglaise quelque popularité (en particulier parce qu’il fut alors chanté en anglais par des chanteurs anglais). A la mort de l’empereur Joseph Ier en 1711, les deux frères quittèrent la cour pour l’Italie, mais Giovanni utilisa ses relations pour entrer au service de l’ambassadeur d’Autriche à Rome et composa pour lui Astarto (texte de Rolli) en 1715.

Il resta à Rome jusqu’en 1719, date à laquelle il fut invité à Londres par le comte de Burlington pour devenir compositeur de la Royal Academy of Music sous la direction de Haendel. Il fut chaleureusement accueilli à Londres, où Astarto ouvrit la deuxième saison du King’s Theatre (Haymarket), rejetant dans l’ombre les opéras de Haendel. L’année suivante, il fournit le deuxième acte (les premier et troisième l’étant par son collègue violoncelliste Filippo Amadei et par Haendel) de Muzio Scevola. Un mois plus tard suivit au Haymarket Theatre L ‘odio e l’amore (texte de Rolli). Après ces débuts prometteurs, Bononcini ne comprit pas ce qu’impliquait son acceptation d’une commande passée en 1722 par la duchesse de Buckingham, qui soutenait les Stuarts, pour la composition de choeurs destinés à Marcus Brutus, la pièce de son défunt mari. Son catholicisme lui aussi posait problème, de sorte que son contrat avec l’Academy ne fut pas renouvelé à l’automne de 1722. Cette décision n’en fut pas moins rapportée un an après : Erminia (1719) et Farnace y furent produits en 1723. Il passa l’été de 1723 à Paris, où un poste lui fut offert par la maîtresse du Régent: de fait, il y résida aussi l’été suivant, avec des chanteurs (parmi lesquels Cuzzoni) venus de Londres.

Bononcini retourna cependant à Londres, et accepta le poste de directeur des concerts privés de la duchesse de Marlborough, qu’il conserva jusqu’en 1731. En 1727, son opéra Astianatte (texte de Haym) fut présenté au Haymarket accompagné d’une publicité à sensation de la part des admirateurs rivaux de Cuzzoni et de Faustina. A peu près à cette époque, ses relations avec l’Academy of Ancient Music prirent brutalement fin après que Maurice Greene eut présenté une oeuvre qu’il croyait de Bononcini : certain qu’elle était de Lotti, Bemard Gates révéla la supercherie lors d’une représentation, au grand embarras de Bononcini et de Greene. Bononcini maintint ses relations avec la France, où il se rendit de nouveau en 1731 puis en 1733, ayant quitté définitivement l’Angleterre après un autre incident pénible provoqué par la seconde édition de ses sonates pour violon ou flûte (1722). A Paris, sa musique (notamment le Laudate pueri pour voix et orchestre) fut exécutée au Concert-Spirituel. En 1735, on le vit à Lisbonne, et au milieu de l’année suivante il était à Vienne, où il resta jusqu’à sa mort une décennie plus tard. Furent alors exécutés deux de ses opéras (sur des textes l’un de Zeno, l’autre de Métastase) et un oratorio. Sa dernière oeuvre connue est un Te Deum commandé par l’impératrice en 1741. (Guide de la Musique baroque – Fayard)

Giovanni Bononcini, né à Modène (Italie) le 18 juillet 1670, est l’aîné et le plus connu des trois fils de Giovanni Maria Bononcini (1642-1678). Le parcours de Giovanni Bononcini – marqué par la précocité, un talent de violoncelliste et de compositeur- n’est pas sans rapport avec la renommée de son père. Ce dernier, violoniste, compositeur et théoricien, a en effet largement contribué à conduire la musique instrumentale vers ses formes modernes. Son traité, Musico prattico (1673), fut utilisé jusqu’en 1725 et son influence sur les musiciens du XVIIIème siècle est notoire.

La jeunesse de Giovanni Bononcini est difficile : orphelin de mère à sept ans et de père à huit ans, il vit alors dans l’extrême pauvreté, comme il le rappelle dans la dédicace de son op. 3 – « De mes parents, j’eus ce peu de vie qui suffit à m’offrir à la misère, tandis qu’en mourant, ils m’abandonnèrent encore enfant dans les bras de la pauvreté. ». Cependant, Giovanni Bononcini bénéficia d’appuis de mécènes qui soutenaient auparavant son père. Ses études musicales commencées avec ce dernier, il les poursuivit dans un premier temps à Modène, soutenu par Francesco II, duc de Modène, puis à Bologne où il étudia la composition et le violoncelle, encouragé par le mécène Alessandro Sanvitali.

Très tôt reconnu comme un excellent violoncelliste et compositeur, il publie ses op.1 à 3 à 15 ans et entre à 16 ans à l’Accademia Filarmonica. Toujours à Bologne, en 1687-1688 il fait partie de la Chapelle de San Petronio en tant que chanteur et violoncelliste, et simultanément, est nommé maître de chapelle à San Giovanni in Monte jusqu’en 1689. Il compose pour la première deux Oratorios du Carême (1687-1688), et pour la seconde quatre messes brèves pour double chœur (1688, op.7). Mandaté par le duc de Modène, Francesco II d’Este, Giovanni Bononcini passe un an à Milan où il a pour charge d’écrire pour son protecteur un oratorio, La Maddalena ai piedi di Cristo (1690). La même année, il est membre de l’orchestre du cardinal romain Benedetto Pamphili.

Après ce bref séjour à Milan, le jeune compositeur italien s’établit en 1692 à Rome au service de la famille Colonna. Ce séjour romain marque un tournant dans la carrière de Giovanni Bononcini. Il fait la rencontre de Silvio Stampiglia -déjà chez les Colonna depuis 1680- qui devient alors son librettiste. De leur collaboration naissent six sérénades (dont La nemica d’amore fatta amante), un oratorio et cinq opéras qui feront sa renommée de compositeur et d’homme de théâtre. Deux de ces opéras ont particulièrement marqué la collaboration du compositeur et du poète-librettiste : le Xerse (1694), qui sera repris par Georg Friedrich Haendel dans son Serse en 1738, et Il trionfo di Camilla, créé à Naples le 27 décembre 1696, et repris 64 fois au Theatre Royal Drury Lane de Londres, entre 1706 et 1709. Déjà connu dans toute l’Italie, il est le premier à recevoir une telle popularité sur la scène londonienne pour un opéra italien : c’est le début d’une reconnaissance européenne pour Giovanni Bononcini.

C’est en 1697, à la mort de son protecteur, Filippo Colonna, que s’achève son séjour à Rome. Après une année passée à Venise, Giovanni Bononcini s’établit en 1698 à Vienne où il est nommé compositeur à la cour de Leopold I. Il devient le favori de Joseph I qui accède au trône en 1705. Une grande partie des opéras composés à Vienne, par exemple La fede pubblica (1699), sera d’ailleurs dédiée à Joseph I ou à sa femme. Durant son séjour, sept opéras seront mis en scène. Bénéficiant ainsi d’un appui important et de conditions matérielles avantageuses, il fait venir son frère Antonio Maria (1677-1726), violoncelliste, compositeur et chef d’orchestre, et Silvio Stampiglia avec qui il collabore à nouveau. Cependant, la situation politique – guerre contre Louis XIV pour la succession espagnole et défense des Habsbourg – rendait la vie musicale plutôt calme et Giovanni Bononcini en profita pour faire de nombreux voyages en Italie (Rome, Padoue, Bologne, Parme, Modène). Il fut même invité à Berlin entre 1702 et 1703 par Sophie Charlotte de Hanovre – elle avait déjà accueilli Arcangelo Corelli – à la cour de Frédérick I de Prusse pour diriger le Teatro d’Opera Italiano. Après la mort de Joseph I en 1711, Giovanni reste encore quelque temps à Vienne avant de partir définitivement pour Rome en 1714, où il trouve en Johan Wenzel Graf Gallas, ambassadeur de Vienne à Rome un protecteur éclairé. Le compositeur italien y séjourne jusqu’en 1719 et écrit pendant cette période une sérénade (Sacrificio a Venere, 1714) et trois opéras, dont le plus important est l’Astarto (1714). A la suite de sa représentation à Rome, Richard Boyle, comte de Burlington, invite Giovanni Bononcini et Paolo Rolli, le librettiste de l’Astarto, à s’établir à Londres.

Quand il arrive à Londres en 1720, Giovanni bénéficie déjà depuis plusieurs années d’une renommée européenne. Il est nommé directeur du King’s Theatre et compositeur à la Royal Academie of Music dirigée par Georg Friedrich Haendel. La représentation de l’Astarto est un triomphe, et Crispo (1721) et Griselda (1722) remporteront également un important succès populaire. Durant deux saisons entières, les opéras de Giovanni Bononcini sont les plus représentés : on compte alors 71 représentations de ses opéras contre seulement 26 pour ceux de Haendel. Ce succès écrasant est en bonne partie à l’origine de la querelle entre le compositeur italien et le compositeur allemand. Tout à la fois rivaux et collègues, il est cependant difficile de savoir si une réelle inimitié existe entre eux. En effet, ils ont plusieurs fois l’occasion de travailler ensemble dans l’orchestre de l’opéra où Giovanni Bononcini tient la partie de violoncelle et Georg Friedrich Haendel celle de clavecin. De plus, les emprunts du compositeur allemand à l’œuvre de l’italien témoignent d’une estime pour ce dernier. Néanmoins, ils étaient inévitablement concurrents et leur talent a d’ailleurs été directement comparé dans Muzio Scevola (1721) dont Filippo Amadei composa le premier acte, Giovanni Bononcini le second et Georg Friedrich Haendel le troisième.

Leur rivalité est d’autant plus complexe qu’une scission se crée au sein du public alimentée par des intérêts politiques – tensions entre les catholiques et les protestants mais aussi entre les Jacobins du parti Stuart et les opposants à la famille royale. Le compositeur allemand était soutenu par le roi et la cour alors que Giovanni l’était par le duc de Malborough. La mort de ce dernier en 1722 contribua à affaiblir quelque peu les appuis du compositeur italien pendant que Georg Friedrich Haendel s’affirmait de plus en plus : il est à ce moment directeur du Haymarket Theatre et règne de manière incontestable sur la vie musicale londonienne. Malgré cet affaiblissement, Giovanni Bononcini, reste à Londres pour occuper le poste de directeur des concerts privés de la Duchesse Henriette, fille du duc de Malborough. Cependant, un épisode assez étonnant vient marquer la fin de son séjour londonien. En 1731, lors d’une réunion musicale, on s’aperçoit que l’œuvre de Lotti exécutée (Duetti, terzetti e madrigali) est la même que In una siepe ombrosa présentée par Giovanni trois ans plus tôt. Le litige entre les deux compositeurs devient public et donnera tort à Giovanni Bononcini. La situation devient difficile pour lui et il quitte Londres en 1731 pour la France. Il y reviendra très brièvement en 1732 (représentation de la fête pastorale Amore per Amore) pour en partir définitivement en 1733. Il s’installe alors à Paris où ses œuvres sont jouées aux Concerts Spirituels. Il semble qu’il ait également joué en présence de Louis XV. Sa dernière œuvre connue est le Te Deum en do majeur (15 février 1741) commandé par l’impératrice Marie Thérèse de Vienne. Il fait ensuite de nombreux voyages notamment à Lisbonne, Venise et Vienne où il s’éteint en 1747. Ainsi, malgré son talent et la richesse de ses œuvres (une trentaine d’opéras, 320 cantates, de nombreuses pièces de musique de chambre, 4 messes, des oratorios, des psaumes, des Sinfonie…), Giovanni Bononcini est peu à peu tombé dans l’oubli du public qui pourtant l’avait porté aux nues. (Zig-Zag Territoires)