ORLANDO |
COMPOSITEUR |
Antonio VIVALDI |
LIBRETTISTE |
Grazio Braccioli |
ENREGISTREMENT | ÉDITION | DIRECTION | ÉDITEUR | NOMBRE | LANGUE | FICHE DÉTAILLÉE |
2012 |
2012 |
Federico Maria Sardelli |
Naïve |
2 |
italien |
Le chef Federico Maria Sardelli a découvert un Orlando Furioso inédit que l’on attribuait à Giovanni Alberto Ristori alors qu’il s’agit en réalité de la première version de l’opéra composé par Vivaldi, créée en 1714 au théâtre Sant’Angelo à Venise. L’écriture musicale de cette version diffère assez profondément de celle de 1727. Il a été exécuté au Festival baroque de Beaune, en juillet 2012 (les deux premiers actes seulement, le troisième étant perdu).
« Cet Orlando est une des plus remarquables productions vénitiennes. En 1714, nous ne sommes plus à l’apogée du luxe et des représentations diplomatiques qui donnaient à Venise la reconnaissance d’être une capitale culturelle des plus modernes et plus prestigieuses du moment car c’est maintenant Naples qui brille ‘ notamment avec Scarlatti. Vivaldi trouve une place royale dans la République de Venise avec son librettiste de prédilection Grazio Braccioli (la saison précédente les avaient portés aux nues avec Orlando Furioso ‘ avec la signature apocryphe de Giovanni Maria Ristori ). Que dire des grands chanteurs qu’ils choisissent ? Ils sont au plus haut niveau de leur art car la grande Margherita Gualandi pour Ersilla, Anton Francesco Carli pour Orlando et le castra le plus prestigieux du moment ‘ Andrea Pacini pour le rôle d’Argillano ‘ leur assureraient un succès extraordinaire. C’est peut-être le modernisme de l’écriture que le public bouda en son temps ? » (ResMusica)
Représentations
Beaune, Basilique – 20 juillet 2012 – version de 1714 en concert – Modo Antiquo – dir. Federico Maria Sardelli – avec Riccardo Novaro (Orlando), Gaëlle Arquez (Angelica), Romina Basso (Alcina), Teodora Gheorghiu (Bradamante), David DQ Lee (Ruggiero), Delphine Galou (Medoro), Roberta Mameli (Astolfo)
ResMusica
« … l’orchestre revient dynamisé par un chef décidé à donner vie à un projet pour lequel il s’est énormément investi : l’exécution en première mondiale de l’opéra Orlando, partition récemment réattribuée au jeune Vivaldi. Curieux d’entendre ce nouvel Orlando antérieur de 13 ans à son Orlando furioso et qui n’a musicalement rien de commun, le public est venu nombreux. Malgré le travail de reconstruction, fort louable au demeurant, des arias incomplètes des actes I et II (le III restant introuvable) par Sardelli, l’audition de la partition en version de concert révèle une oeuvre bien plus sage que l’Orlando furioso que nous connaissons, une écriture plus « simpliste » composée d’airs courts (peu développés), à l’orchestration souvent réductrice, entrecoupés de longs récitatifs pas vraiment passionnants.
Ainsi, la tache qui attend les interprètes est d’autant plus ardue. En effet, comment rendre passionnante une oeuvre qui ne l’est pas ou peu ? Certainement en réunissant une distribution de haut niveau, c’est dans l’ensemble ce qu’a réussi à faire Sardelli. A commencer par l’Orlando souverain du baryton-basse Riccardo Novaro. Même privé d’un troisième acte supposé faire éclater sa folie et surtout cantonné à un seul air et quelques récitatifs accompagnés (bien moins développés et éclatants que dans l’Orlando furioso de 1727), sans parler de son rôle naïf pour ne pas dire niais, il parvient à s’imposer crânement grâce à une diction impeccable, une voix percutante forte de caractère et un timbre des plus séduisants.
La cause de tout son tourment n’est autre que la douce Angelica qui feint de se pâmer d’amour pour lui alors qu’elle est déjà engagée à Medoro. Teodora Gheorghiu s’acquitte convenablement de ce rôle, sans plus. Le Medoro de Delphine Galou en revanche charme d’emblée par sa voix rare de contralto. Son aplomb et la facilité de ses vocalises font mouche au point de rendre intéressant l’air du papillon à la métaphore pourtant bien naïve. On se souvient qu’elle avait déjà brillé, entre autre, dans le rôle titre de l’Orlando Furioso de Vivaldi au concert comme à la scène, rôle bien plus passionnant que celui dans lequel elle est cantonnée ici.
La maléfique Alcina, quant à elle, est rageusement incarnée par une Romina Basso fort inspirée. Sa personnalité marquante, son interprétation débridée, rehaussée de riches da capo, font forte impression auprès d’un public presque ahuri par tant d’audace vocale.
Le rôle d’Astolfo qui a très certainement dû être créé pour un castrat sopraniste, est chanté ici par la soprano Roberta Mameli qui se montre du coup moins brillante qu’à son habitude mais pas moins efficace pour autant, contrainte de solliciter davantage la partie basse de sa longue voix qui heureusement le lui permet sans forcer. Ce n’est pas le cas du contre-ténor David DQ Lee, quasi inaudible dans le rôle de Ruggiero, aux prises avec une tessiture trop basse pour sa voix. Cependant il parvient à retourner la situation à son avantage dans le da capo de l’air « Piangero » , subitement pris plus haut et émis avec une ineffable poésie, faisant de cette reprise le bijou de la soirée. Mais c’est finalement la Bradamante de la soprano Gaëlle Arquez qui a suscité le plus d’&eacue;motion, notamment dans la délicieuse scène du rossignol. Sa voix, éclatante et sonore, passionne, faisant un redoutable contrepoids à celle d’Alcina. On se souvient l’avoir entendue, de manière inégale, dans l’autre Orlando de Vivaldi à Madrid sous la houlette du chef Jean-Christophe Spinosi. Les progrès sont probants.
Il est évident que même si la musique du prete rosso ne tient pas toutes ses promesses et pour des raisons musicologiques évidentes, cet Orlando se devait d’être redécouvert et enregistré (prochainement chez Naïve). Porté par un orchestre tonique à l’image de son chef, et surtout par une distribution hautement qualifiée, l’oeuvre aurait pu courir à l’échec dans le gosier de chanteurs moins aguerris et aux caractères moins trempés.
Paradoxalement, l’exécution de l’oeuvre ne semble pas souffrir de l’absence du troisième acte, le deuxième se terminant sans choeur de lieto fine, ni air ou duo mais plus subtilement par le récitatif poignant d’un Orlando désespéré et comme condamné à souffrir éternellement. »