CD Serse (direction Brian Priestman)

SERSE

 

COMPOSITEUR

Georg Friedrich HAENDEL

LIBRETTISTE

d’après Nicolo Minato et Silvio Stampiglia

 

ORCHESTRE Orchestre de la Radio de Vienne
CHOEUR Choeur de l’Académie de Vienne
DIRECTION Brian Priestman

Serse Maureen Forrester
Romilda Lucia Popp
Atalanta Marilyn Tyler
Arsamene Maureen Lehane
Amastre Mildred Miller
Ariodate Thomas Hensley
Elviro Owen Brannigan

DATE D’ENREGISTREMENT juin 1965
LIEU D’ENREGISTREMENT
ENREGISTREMENT EN CONCERT

EDITEUR Deutsch Grammophon
DISTRIBUTION
DATE DE PRODUCTION 2 juin 2009
NOMBRE DE DISQUES 3
CATEGORIE ADD

Critique de cet enregistrement dans :

Diapason – juillet 2009 – appréciation 5 / 5 – technique 7,5 / 10

« Oui, en un presque demi-siècle le style a changé. Oui, l’orchestre viennnois sonne gris. Oui, le clavecin bavard de Martin Isepp s’épuise en fioritures. Oui, Maureen Lehane prend le jaloux Arsamene pour une matrone et Thomas Hemsley le prince Ariodate pour un bûcheron. Oui, par-dessus tout, il manque à cette lecture de studio l’esprit farouche et ironique : le quiproquo vénitien emballé par un Haendel désabusé dont l’humour annonce ici l’espiègle Haydn. Le roi de Perse est bien sérieux ce soir. Pourtant je ne vois pas meilleur Serse. Tessitures, orchestration, édition, tout crie l’amour et le respect – sentiments qu’on n’accordait ;guère à l’opera seria en 1965.

Lucia Popp qui, la même année, brossait de Cléopâtre un portrait plus délicieux que profond (dans le Giulio Cesare allemand de Leitner), campe une Romilda parfaite, simplement idéale. Le galbe, le maintien, la lumière, tout coule de source. A ses côtés, Maureen Forrester rappelle ce que primo uomo veut dire : du chant, du feu, de la stature, le mariage de la transe et de l’académie. Brian Priestman ne se trompe jamais de tempo, ne rompt pas un instant le fil narratif, et son geste est plus vif qu’on ne l’a prétendu. »

 ResMusica – Haendel, comme jamais plus ?

« A l’heure où la musique baroque semble avoir pris une vitesse de croisière irréversible, la firme Deutsche Grammophon réédite un enregistrement qui tombe comme un pavé dans la mare des baroqueux! Une version du Serse de Haendel qui aujourd’hui ressemble à une hérésie. Alors que les musicologues dépouillent les archives de la musique avec des microscopes pour tenter de donner au public le son et la manière la plus authentique, la plus vraie, la plus «plus» d’interpréter la musique du XVIIIe siècle, voilà un coffret qui va à l’encontre de tout ce qu’on a construit pour jouer la musique baroque au plus près (croit-on) de son authenticité.

Jugez plutôt : Un grand orchestre symphonique. Des instruments actuels. Un diapason à 440 Herz. Des voix immenses. Tout pour hésiter de faire sauter la cellophane qui scelle le coffret. Horreur et anathème ? Et pourtant, cet enregistrement est tout simplement superbe. Un véritable miracle qui tient à un élément majeur : la musicalité. Grâce à l’équilibre admirablement dosé entre l’orchestre et les solistes, on se prend au jeu de cette prestation en goûtant mesures après mesures la cohésion de l’ensemble. Si la contralto Maureen Forrester s’était déjà illustrée dans Serse et Rodelinda sur les scènes viennoises, sa présence dans cet enregistrement n’est pas une surprise pour l’époque. Elle imprime au rôle-titre une présence et une noblesse majestueuse démontrant sa parfaite adaptabilité à une musique paraissant éloignée de son répertoire habituel. Plus surprenante est la présence de la soprano Lucia Popp, qu’on sait excellente dans les opéras de Mozart ou de Strauss, et qui s’acquitte de ce rôle haendélien avec un bel aplomb. Si les autres chanteurs sont moins connus, ils n’en sont pas moins excellents eux aussi.

La remarquable direction d’orchestre de Brian Priestman colore l’oeuvre du brillant de l’acier et du mordoré des cuivres. Il se dégage de son interprétation une énergie rare et communicative. Autre formidable artisan de ce splendide enregistrement, le clavecin continuo de Martin Isepp. Parfaitement enregistré, ses interventions dégagent un swing digne des plus grands improvisateurs de la musique de jazz. Ça bouge, ça balance et c’est d’une vitalité débordante.

Un Haendel, comme jamais plus on ne le jouera ? Peut-être mais, c’est bien dommage. »

 Classica – octobre 2009 – appréciation 4 / 4

« Nous ne disposons toujours pas de version de référence de Serse, partition superbe bien au-delà de son air d’entrée, mais à laquelle il est difficile de rendre justice en raison de son large spectre d’atmosphères, qui va du bouffon au quasi tragique, en passant par le sentimental et l’élégiaque. Entre les versions vivantes mais orchestralement ou vocalement inégales (Malgoire et Bolton), et celles qui sont musicalement séduisantes mais théâtralement ennuyeuses (McGegan, Christie), on peine à trouver son bonheur. Du coup, les gravures historiques, servies par certains chanteurs d’exception (Wunderlich avec Kubelik, Forrester et Popp ici), exotiques par certains aspects, mais profondément « justes » par d’autres, ont toute leur place. Cet enregistrement, comme certains Haendel de Bonynge (plus encore que de Leppard), a certes parfois quelque chose d’un peu monotone (orchestre moderne manquant un peu de relief, continuo un rien uniforme, atttention limitée au théâtre et au texte – si bien que les personnnages peinent à prendre corps), mais il n’en émane pas moins un charme et une grâce incroyables. Le style n’est bien sûr pas celui que l’on attend aujourd’hui dans ce type de répertoire, mais le classicisme éléégant déployé par les interprètes, l’allant d’une direction attenntive qui respire avec les channteurs, de même que la beauté parfois confondante d’un chant frais et sans apprêt, font absolument merveille. Cette tardive réédition CD est donc plus que bienvenue. »

 Opéra Magazine – décembre 2009 – appréciation 5 / 5

« Étrange destin que celui de cet opéra, l’un des derniers de Haendel, l’un de ceux qui connut le moins de succès à sa création (cinq représentations du 15 avril au 2 mai 1738) et qui en rencontre le plus désormais, à la scène comme au disque. Parmi la dizaine d’enregistrements existants, tous avaient été publiés ou réédités en compact, sauf un qui nous revient enfin à l’occasion du 250e anniversaire de la disparition du compositeur. Un événement dans une discographie pas entièrement satisfaisante, la meilleure version à ce jour restant le DVD de la production de Michael Hampe, au Semperoper de Dresde, avec Christophe Rousset au pupitre (TDK).

Bien sûr, à quarante-quatre années de distance (l’enregistrement remonte à juin 1965), l’approche générale sonne trop sérieuse et un peu datée, l’orchestre manquant parfois d’éclat et souvent de couleurs. Mais Brian Priestman est un chef haendélien attentif au style, qui dirige avec autant d’intelligence que de sens du théâtre. Côté solistes, on pourrait souhaiter vocalise plus dynamique et plus souple que celle de Maureen Forrester, magnifique par ailleurs en Serse. Mais la densité vocale des cinq rôles principaux est telle que l’on trouve ici des plaisirs absents ailleurs, notamment du côté de l’exquise Romilda de Lucia Popp et de l’étonnante Amastre de Mildred Miller. Certes, Serse attend toujours sa version de référence, mais voilà au moins une réédition dont aucun amateur de Haendel ne voudra se priver. »