CD Griselda (2005)

LA GRISELDA

COMPOSITEUR

Antonio VIVALDI

LIBRETTISTE

Apostolo Zeno/Carlo Goldoni

 

ORCHESTRE Ensemble Matheus
CHOEUR
DIRECTION Jean-Christophe Spinosi

Gualtiero Stefano Ferrari ténor
Griselda Marie-Nicole Lemieux contralto
Costanza Veronica Cangemi soprano
Roberto Philippe Jaroussky contre-ténor
Ottone Simone Kermes soprano
Corrado Iestyn Davies contre-ténor

DATE D’ENREGISTREMENT novembre 2005
LIEU D’ENREGISTREMENT Brest – Foyer du marin – Salle Surcouf
ENREGISTREMENT EN CONCERT non

EDITEUR Naive
COLLECTION Tesori del Piemonte – volume 32
DATE DE PRODUCTION 29 août 2006
NOMBRE DE DISQUES 3
CATEGORIE DDD

Édition critique  de Alessandro Borin et Marco Bizzarini

« Da capo » de Damien Colas 

 Critique de cet enregistrement dans : 

Diapason– septembre 2006 – appréciation : Diapason d’or

  « Les mémoires de Goldoni ont ouvert le ban : elles racontaient comment le jeune librettiste avait « assassiné » le drame de Zeno à la demande de Vivaldi, peu sensible à la cohérence sémantique. Vite assimilée à un catalogue d’airs pyrotechniquos, Griselda est restée incomprise, c’était le mal aimé des opéras vivaldiens. Galvanisé par l’enjeu du défi, Jean-Christophe Spinoni lui rend enfin justice. Il y entend la quintessence de la maturité vivaldienne, le symbole d’une fidélité à l’irréductible singularité de son langage en dépit des rejets et des humiliations, la fusion idéale entre le vertige vocal des Napolitains et le monde unique de son orchestre. Ajoutez à cela le culte de l’extrême, des chanteurs à la quête de leurs limites, un tissu orchestral complexe, enlaçant les voix, tourbillonnant autour, personnage à part entière figurant l’emprise de Vivaldi sur le moindre accent : un manifeste partagé à la fois par le compositeur et l’audacieux chef du Matheus.

Savoureuse basse continue, protéiforme et volontiers dépouillée, confiée au seul théorbe, écrin précieux portant l’action. Les récits vivaldiens sont un monde inouï fait d’un presque rien inimitable. Les personnages ? Une Griselda qui soupire et se pâme., comédienne fascinant son public par son jeu, prima donna assoluta anachronique en temps de suprématie des vocalises napolitaines’ extraordinaire Marie-Nicole Lemieux, incarnation vocale patfaite d’Anna Giro. Un archétype du castrat pour Ottone, poussé à des limites démentielles d’ambitus et de souffle (Simonø Kermes, aux aigus tétanisants et à l’aplomb jubilatoire). Pour Gualtiero, un modèle de ténor vivaldien devant stoïquement affronter dès le premier air des vocalises fortifiantes (Stefano Ferrari, sensible, élégant et agile, doté d’un beau timbre naturel). Restent Costanza, tour à tour hallucinée et palpitante (Véronica Cangemi, merveille de légèreté et d’élégance) et Roberto, castrat alto divinement précieux (Philippe Jaroussky, émission de rêve, épanoui et velouté). Même le ravissant et coloré Corrado du jeune Lestyn Davies n’est pas sacrifié. L’accompagnement constamment impliqué de Matheus subjugue. Une mention particulière pour les da capo épatants élaborés par Damien Colas. Bravissimo ! »

Opéra Magazine – octobre 2006 – appréciation  5 / 5

« Si Vivaldi n’eut jamais les honneurs du plus prestigieux théâtre de Venise, le San Giovanni Grisostomo, propriété de la famille Grimnani, Griselda, créée au San Samuele en 1735, n’en fut pas moins commandée par cette même famille et, en ce sens, constitua une sorte de reconnaissance potu le compositeur. L’oeuvre regorge d’airs superbes (voir 1e célébrissime « Agitata da due venti » popularisé, entre autres, par Montserrat Caballé et Cécilia Bartoli), ce qui n’en fait pas pour autant la plus accomplie du prete rosso. Le livret, d’Apostolo Zeno à l’origine et retouché par Carlo Goldoni, a certes des qualités mais le récit des mésaventures de Griselda, pour l’auditeur actuel, finit par ressembler à une longue glorification du masochisme davantage que de la vertu. Une remarque qui ne venait pas spontanément à l’esprit à l’écoute de la Griselda, d’Alessandro Scariatti (1721)… Manquerait-il un petit quelque chose à cet opus vivaldien ?

Les interprètes ne ménagent pourtant pas leurs efforts pour nous captiver.Très belles prestations de Marie-Nicole Lemieux, malgré une tendance persistante à appuver l’émission, et de Veronica Cangemi, virtuose à souhait. L’assurance et le sens du risque de Simone Kermes impressionnent dans la partie ô combien redoutable d’Ottone. Une fois encore, Philippe Jaroussky excelle par sa finesse danslec rôle de l’amoureux se croyant délaisse. Le jeune contre-ténor Iestyn Davies manque encore un peu de corps, mais surprend agréablement. Reste le cas de Gualtiero. On a rarement entendu ténor vocalisant avec la vélocité de Stefano Ferrari les passages plus lents, malheureusement, révèlent un chant en force hors de propos ici.

L’Ensemble Matheus, toujours franc dans ses attaques et jouant des nuances sous la direction théâtrale de son chef, n’appelle aucun reproche dans un opéra qui joue plus la carte du spectaculaire que de l’émotion et où, malgré les excellents récitatifs, un liant dramatique fait parfois défaut. »

Blog « Etjedanse »

« Il y a eu l’Orlando Furioso du même Spinosi ou le Bajazet de Fabio Biondi, mais on tient avec cette Griselda le meilleur enregistrement d’un opéra de Vivaldi à ce jour. La distribution est superbe. Veronica Cangemi possède la voix idéale pour le rôle de Costanza : légèreté, virtuosité (ahurissant ‘ Agitata da due venti ‘ ) et charme. Si le rôle de Griselda paraît un peu sacrifié par rapport aux autres, l’engagement de Marie-Nicole Lemieux le rend passionnant. Il faut écouter comme elle déclame ses récitatifs et la fureur qui accompagne chacune des ses interventions. Philippe Jaroussky chante mieux de disque en disque et la tessiture du personnage de Roberto lui sied à merveille. Citons aussi les trois autres protagonistes, un tout petit peu en dessous : Stefano Ferrari (au timbre un peu ingrat, mais qui surmonte les difficultés inhumaines de son premier air), Simone Kermes (aux aigus flamboyants mais un peu moins impliquée) et Iestyn Davies (contre-ténor plus quelconque que M. Jaroussky mais lui aussi d’un incroyable agilité). Les brusqueries et tics des précédents enregistrements de Spinosi ont ici disparu et l’on sent qu’il est passionné (et il nous passionne) à chaque instant. Saluons enfin la beauté des cordes de l’ensemble Matheus et de son continuo, tout comme l’inventivité des da capo. »

 Crescendo – décembre 2006 / janvier 2007 – appréciation Joker

  « Oublions les pochettes des opéras vivaldiens publiés chez Naïve : bustes parfaits de mannequins aux lignes pures privées de toute expression, images glacées qui superposent aux codes du XVIIIe siècle ceux des magazines aseptisés où se reconstruit le nôtre, sur des modèles inhumains impossibles àatteindre sans retouche numérique. Le message cependant est clair, pourvu qu’il soit pensé comme tel : les opéras de Vivaldi dressent de magnifiques portraits de valeurs statufiées auxquelles la musique et le chant peuvent, seules, donner vie et beauté frémissante, Le livret de Griselda, tiré d’une nouvelle édifiante de Boccace où une femme reprend en main sa destinée, lénifié par Zeno et redynamisé par Goldoni, n’échappe pas à de cruelles et bavardes longueurs entre les airs ! Il aurait gagné à plus de concision pour une histoire plutôt sommaire et atterrante : Griselda, par amour pour Gualtiero son roi d’époux, accepte toutes les humiliations avec courage, passive mais inflexible. Enlèvement de leur fille à sa naissance, répudiation, éloignement de leur fils… Vertueuse elle est, vertueuse elle restera. C’est là le courage et la force morale des vraies princesses, bien qu’elle se croie bergère, et que son roi d’époux en fait ne soit occupé qu’à la tester pour satisfaire son peuple. La politique a-t-elle évolué ? L’histoire ne nous le dit pas… Heureusement que la fougue de l’Ensemble Matheus, dirigé par le toujours aussi passionné Spinosi, nous fait oublier la pauvreté du contenu de ce drame dans l’exaltation de la musique. La générosité rafraîchissante de Marie-Nicole Lemieux, sa vivacité vocale et son intensité veloutée, donnent de l’épaisseur à Griselda : elle compose avec chaleur une femme toute de sentiments et que nulle méchanceté ne corrompt, violemment et intégrement aimante, sans recul, une sorte de sainte à la sensualité innocente. Les airs d’Ottone, interprété par la très pure soprano Simone Kermes, sont de grands moments de clarté et de ravissement. Philippe Jaroussky (Roberto) et Veronica Cangemi (Costanza) incarnent un duo vocal d’une deacute;licate et frémissante magie, subtile et envoûtante. L’engagement du ténor Stefano Ferrari n’a rien à leur envier dans les grands moments de Gualtiero, difficile personnage interprété avec retenue et intériorité. On remarquera également la discrète efficacité du contre-ténor Iestyn Davies qui se glisse dans le rôle de Corrado avec légèreté, fermeté et puissance. » 

Res Musica – Grisante Griselda

http://www.resmusica.com:80/aff_articles.php3?num_art=2911

 Distinctions

« Disc of the Month » de BBC Music Magazine,

Midem Classical Awards

« Opera of the Year » selon les lecteurs de BBC Music Magazine

« Excepcional » de Scherzo