Après un hiver haletant, côté représentations – on n’oubliera pas de sitôt « La Griselda » de Scarlatti, puis la Trilogie de Monteverdi version Malgoire/Rivenq au Théâtre des Champs Elysées, ni « La Finta Cameriera » par la Capella della Turchini – et côté enregistrements – « Rinaldo » par Hogwood et les « monstres sacrés » Bartoli et Daniels, et « L’Incoronazione » de Monteverdi par Garrido se sont fait une belle place dans les discothèques – voilà que continuent à tomber des annonces qui ne peuvent que réjouir l’amateur d’opéra baroque.
Que le disque de musique classique le plus vendu en 2000 soit l’Album Vivaldi de Cecilia Bartoli, doit-on faire la fine bouche en décelant quelques relents de marketing ? On préfère remercier la Bartoli d’avoir tant fait pour que Vivaldi ne soit pas éternellement et uniquement associé au « Quatre Saisons ». Et si on s’intéressait vraiment aux trésors qui dorment dans l’abondante production lyrique du Prêtre Roux ?
Que 20 000 enregistrements du « Croesus » de Keiser par Jacobs se soient vendus en quelques mois, par contre, qui l’eût cru ? Un opéra baroque inconnu, en allemand de surcroît ! Mais comment se fait-il alors qu’on ne trouve actuellement qu’en Allemagne un enregistrement d’un autre opéra de Keiser, « Der geliebte Adonis » ?
Que le « Didon et Enée », par le même Jacobs, n’ait pratiquement reçu que des louanges, on pouvait s’en douter. Cet enregistrement semble bien parti pour faire aussi un « carton commercial ». Et pourtant, ce ne sont pas les enregistrements du plus court opéra baroque qui manquent !
Que Harmonia Mundi, qui édite ces deux enregistrements, ait ainsi la main heureuse, ce ne sont pas les amateurs de baroque qui s’en plaindront. Au moment où des labels aussi mythiques que Teldec et Erato passent à la trappe, on ne peut que souhaiter longue vie à cet éditeur qui nous a procuré tant de moments d’enchantement.
Que la revue Diapason ait prévu de consacrer son prochain numéro de mai à une interview de Marc Minkowski et à « Trente disques pour découvrir l’opéra baroque », réjouissant, non ? Y fera-t-on des découvertes…comme celle de ce compositeur espagnol, Antonio de Literes, dont deux oeuvres ont été déjà enregistrées par Eduardo Lopez Banco : « Los Elementos », un « opera armonica » et, plus récemment, « Acis y Galatea », une zarzuela.
Qu’Antonio Florio soit de retour au Festival de Sait Denis, en juillet prochain, avec « La Colomba Ferita » de Francesco Provenzale et un pasticcio d’opéra buffa, et on se lèche les babines à l’avance.
Que le Festival de Beaune nous propose, cette année encore, un programme de rêve, on l’espérait ! William Christie dans « L’Allegro, il Pensroso ed il Moderato » de Haendel, Christophe Rousset dans « Persée » de Lully, Jordi Savall dans « Il Combattimento » de Monterverdi, Gabriel Garrido dans « I Strali d’Amore », une création de Francesco Cavalli, Rinaldo Alessandrini dans « La Senna Festeggiante » de Vivaldi, n’en jetez plus !
Enfin, façon de parler ! on voudrait que cela continue, sans s’arrêter jamais.
Jean-Claude Brenac – Avril 2001