Il Ritorno d’Ulisse 2002

COMPOSITEUR Claudio MONTEVERDI
LIBRETTISTE Giacomo Badaoro

 

ORCHESTRE Les Arts Florissants
CHOEUR
DIRECTION William Christie
MISE EN SCENE Adrian Noble
DECORS ET COSTUMES Anthony Ward
LUMIERES Jean Kalman
CHOREGRAPHIE Sue Lefton

 

Ulisse Kressimir Spicer
Penelope Marijana Mijanovic
Umana fragilita Rachid Ben Abdeslam
Il Tempo, Nettuno Paul-Henry Vila
Katalin Karolyi La Fortuna, Melanto
Amore, Minerva Olga Pitarch
Giove Eric Raffard
Giunone Rebecca Ockenden
Telemaco Cyril Auvity
Antinoo Bertrand Bontoux
Pisandro, Feace Christophe Laporte
Anfinomo Andreas Gisler
Eurimaco Zachary Stains
Eumete Joseph Cornwell
Iro Robert Burt
Ericlea Geneviève Kaemmerlen
Feaci Marcio Soares Holanda
Feaci Bertrand Chuberre

 

DATE D’ENREGISTREMENT juillet 2002
LIEU D’ENREGISTREMENT Festival d’Aix en Provence – Théâtre du Jeu de Paume

 

EDITEUR Virgin Classics
COLLECTION
DATE DE PRODUCTION 3 février 2004
DISPONIBLE toutes zones
FORMAT 16:9 – stéréo PCM – Dolby Digital 5.1
SOUS-TITRES EN FRANCAIS oui

 

 

Grand Prix de l’Académie Charles Cros

Critique de cet enregistrement dans :

Anaclase.com

« Deux murs jaunes côté jardin et côté cour, un fond de scène bleu outremer, du sable ocre au sol… Une allégorie sert de Prologue : l’Humaine Fragilité, homme nu près d’une flamme tel un Prométhée avant la chute, se lamente de la condition de l’homme, en proie aux agacements d’aveugles et de boiteux, soit le Temps, la Fortune et l’Amour. L’acte I et II de l’opéra nous livre une trame familière : tandis que Penelope, entourée de prétendants au trône, attend le retour d’Ulisse, ce dernier arrive en terre d’Ithaque. Minerve l’accueille, lui assure son soutien et le transforme en vieillard pour qu’il passe inaperçu. Ulisse rencontre ensuite le porcher Eumete – il lui annonce que son maître est vivant -, Telemaco – à qui il dit la vérité -, la vieille nourrice Euryclea – qui reconnaît une ancienne blessure mais doit garder le silence. Vient ensuite le fameux défi à bander l’arc d’Ulisse, au terme duquel Penelope inspirée par Minerva a promis sa main. Le seul gagnant est Ulisse qui transperce alors les trois prétendants. Dans l’acte III, nous assistons à une réunion divine qui mettra fin à la colère de Nettuno (Neptune) contre son souffre-douleur mais surtout à la conversion de Penelope qui ne voit qu’un imposteur ou une tromperie divine dans cet homme qu’on semble lui rendre. Ulisse donne une preuve de sa connais-sance de la chambre conjugale et Penelope retrouve enfin la paix.
Vêtue de noir comme une veuve typique du sud, Marijana Mijanovic offre au personnage de Penelope sa voix tragique et sa beauté froide. Krešimir Špicer, ténor aux mediums et graves corsés, est un Ulisse crédible et émouvant, aux aigus un peu verts mais au chant très nuancé. Cyril Auvity est Telemaco, élégant, dont on signalera le beau duo de retrouvailles – tout en douceur – avec son père (II, 2). Parmi les Dieux, Olga Pitarch (Minerva) a une voix agile qu’elle agrémente de beaux ornements ; Paul-Henry Vila (Nettuno) affirme des graves sonores. Les prétendants réalisent un très beau trio, dans une écriture madrigaliste, mais c’est Andreas Gisler (Anfinomo) qui s’en sort le mieux, avec son timbre clair et un art appréciable de la nuance. Enfin, les personnages populaires : Katalin Károlyi (la jeune servante Melanto), au chant très égal, possède un timbre frais et de beaux graves ; Zachary Stains (Eurimaco, son amoureux), malgré quelques notes tenues instables et des ornements imprécis, a pour lui un timbre brillant et des aigus extrêmement doux ; Joseph Cornwell (Eumete) et Robert Burt (Irus) sont tous deux sonores, efficaces et attachants.
Recommandons aux curieux et aux amateurs Il Ritorno d’Ulisse in patria : cette production du Festival d’Aix-en-Provence (2000) bénéficie de la mise en scène inventive et chaleureuse – avec trois fois rien ! – de Adrian Noble, et de la direction d’orchestre souple, claire et articulée de William Christie, à la tête des Arts Florissants. »

Diapason – mars 2004 – apppréciation Diapason d’or

« Aix 2000. Stéphane Lissner termine sa trilogie monteverdienne avec ce Retour d’Ulysse, dans un lieu fraîchement restauré, le Théâtre du Jeu de paume – acoustique et dimensions idéales. Le succès est triomphal. Deux ans plus tard, la reprise est filmée avec, à de rares exceptions près, une distribution identique. Le miracle se reproduit-il ? Assurément. Christie anime avec émotion et jubilation sa petite formation ; discrétion sonore n est pas synonyme ici de monotonie ou de grisaille picturale, au contraire, les timbres, les couleurs revendiquent leur diversité. Des couleurs, le spectacle n’en est pas avare, des ocres, des bleus, des rouges ; que ce soit les décors ou les costumes, tout est simple et juste, et la mise en scène d’Adrian Noble va dans le même sens, ramenant les héros au rang d’êtres humains, tandis que le léger décalage cher à l’humour britannique les rend encore plus attachants. Mijanovic, Spicer ne sont plus désormais des révélations ; mais, comme leurs partenaires, ils n’ont rien perdu de leur fraîcheur. Une date dans l’histoire aixoise, heureusement préservée. »

Opéra International – février 2004 – appréciation 5 / 5

« Créée en 2000, cette production est un des joyaux de l’ère Lissner au Festival d’Aix-en-Provence. Le présent DVD a été enregistré lors de sa reprise en 2002, après plusieurs tournées. Sans revenir sur le spectacle, il faut, avec le recul du temps, souligner combien Adrian Noble a réalisé ses intentions : les principes de l’humanité dans le prologue (part souvent sacrifiée de l’oeuvre) et les principes de la représentation de la parole intime et sociale de l’être humain. L’unicité du décor – un espace de jeu sableux entre deux murailles – et la subtile ductilité des lumières est juste rompue par une imaginative figuration de tempête. Adrian Noble et William Christie sont en parfaite osmose. Sobre mais intériorisée direction d’acteurs pour le premier; subtile palette de couleurs et d’agogique pour le second. Refusant de rejoindre la démarche agazzarienne du continuo (un alliage d’écriture polyphonique et de semi-improvisations) prônée par Jacobs ou Garrido, il prend le pari – et le tient haut la main – d’une déclamation simple mais profonde.
Cette production est, à notre sens, proche de l’idéal, tant la distribution est composée de jeunes chanteurs, tous à leur juste place – les hauts éloges revenant à Marijana Mijanovic (Penelope) et à Kresimir Spicer (Ulisse). Jamais indiscrète, la réalisation de l’image permet de prolonger le rêve de ceux qui admirèrent cette production et de le créer pour les autres. »

Forum Opéra

« Il devait ressembler à ce Retour d’Ulysse dans sa Patrie, le spectacle total dont rêvaient les membres de la Camerata de Bardi, le cénacle florentin dont faisaient partie Caccini, Strozzi, Cavalieri ou encore Rinuccini. Spectacle de bout en bout éblouissant dont la réussite revient à Adrian Noble qui parvient à nous rendre sensible et humain le drame de Monteverdi, tout en le maintenant dans la sphère mythique et antique à laquelle le compositeur voulait le rattacher.
Captée lors du Festival d’Aix-en-Provence, au terme d’une tournée de deux ans, cette représentation fut donnée dans le cadre idoine du théâtre du Jeu de Paume, qui évoque par ses dimensions (modestes) et son architecture (italienne) les salles vénitiennes de l’époque de Monteverdi. Mille détails font que le bonheur est total et l’émerveillement constant. Dans une Grèce caniculaire aux couleurs vives et à la lumière méditerranéenne qui n’est pas sans rappeler quelques toiles de Chirico, les images d’une beauté plastique rare se succèdent – on pense notamment aux interventions divines, particulièrement réussites. Aidé par des chanteurs qui possèdent le physique de leur rôle et évoluent avec une totale liberté, le metteur en scène sait être tour à tour virtuose et bouleversant dans sa direction d’acteurs : la reconnaissance de Télémaque et d’Ulysse reste assurément le moment de grâce absolu du spectacle. De même, il peut se montrer tantôt élégant, tantôt vulgaire dans le traitement des personnages – Ino est à cet égard d’une délicieuse répugnance. Essence même du dramma per musica qui tente de saisir l’existence humaine dans sa totalité, le mélange des genres ne s’est jamais imposé avec une telle évidence, avec un naturel aussi désarmant.
Il faudrait citer un à un tous les solistes ; on se contentera du couple royal, tout simplement exceptionnel. Elle, Marijana Mijanovic, est Pénélope : grande figure tragique au timbre étourdissant, voix rauque et matricielle qui porte en elle vingt années d’attente et de désolation. Lui, Kresimir Spicer, a d’Ulysse la grandeur mythique : stature impressionnante, voix d’airain qui va du désespoir initial à la félicité retrouvée et nous étreint à chacune de ses apparitions… Mais puisque le spectacle parfait n’existe pas, regrettons l’italien parfois inintelligible de certains protagonistes, un élément pourtant essentiel dans cette oeuvre qui cherche en permanence la fusion (voire la réconciliation) du chant et du verbe.
Les Arts Florissants, attentifs aux chanteurs, tissent un tapis sonore idéal, varient couleurs et tempi et font que les trois heures du spectacle passent comme un rêve – bien réel cependant, heureusement pour nous. A regarder jusqu’à l’éblouissement. »