DVD Dido and Aeneas (2001)

DIDO AND AENEAS

COMPOSITEUR

Henry PURCELL

LIBRETTISTE

 

ORCHESTRE Les Arts Florissants
CHOEUR
DIRECTION William Christie
MISE EN ESPACE Vincent Boussard

Dido Stéphanie d’Oustrac
Aeneas Nicolas Rivenq
Belinda Sophie Daneman
La mMgicienne Michel Puissant
Première Sorcière Gaëlle Méchaly
Seconde Sorcière Camilla Johansen

DATE D’ENREGISTREMENT Janvier 2001
LIEU D’ENREGISTREMENT Vire – Le Préau
ENREGISTREMENT EN CONCERT

EDITEUR Aller Retour Productions
DISTRIBUTION Malavida
DATE DE PRODUCTION 30 août 2004
NOMBRE DE DISQUES 1 ( Actéon – Marc Antoine Charpentier)
CATEGORIE Pal – 4/3 – Son stéréo
DISPONIBILITE Toutes zones

 Critique de cet enregistrement dans :

Anaclase

« Ce DVD propose deux joyaux de la musique baroque, deux oeuvres miniatures à peu près contemporaines l’une de l’autre : Actéon de Marc Antoine Charpentier (1684) et Dido and Aeneas de Henry Purcell (1689). Si toutes deux ont des points communs (sujets tirés de la mythologie, chasses tournant au drame à cause du courroux de forces surnaturelles, raffinement de la partition’), elles présentent certaines différences considérables. La principale est que Dido and Aeneas figure depuis très longtemps au répertoire et fut l’un des opéras les plus enregistrés, alors qu’Actéon tomba dans l’oubli, et dut attendre que les oeuvres de Charpentier soit progressivement redécouvertes (enregistrement par William Christie) – voir la toute récente production de l’Opéra de Rennes.

Si Charpentier est considéré comme le plus grand compositeur français de musique religieuse baroque, Purcell, lui, est considéré comme le plus grand compositeur anglais avant Britten – qui proposa d’ailleurs une réorchestration de Dido and Aeneas. L’une des principales raisons est qu’il fit une synthèse remarquable entre les styles élisabéthains, italiens et français, et que, ayant été organiste à la Chapelle Royale, il était aussi à l’aise dans la musique profane que religieuse. Dido and Aeneas est considéré comme le seul véritable opéra de Henry Purcell ; King Arthur, Fairy Queen sont d’avantage des semi opéras, alternant musique et scènes parlées – caractéristiques du genre masque, typiquement anglais, créé sous le règne de Elisabeth Ière – et divertissements musicaux allégoriques apparaissant dans des pièces de théâtre. Il a été composé sur un livret de Nahum Tate, tiré du livre IV de l’Enéide de Virgile et a longtemps été entouré de mystères : orchestration incomplète, et même oeuvre inachevée, selon certains musicologues, signification obscure (politique ?), etc. Hésitations également quand aux circonstances de la composition : pour la cour d’Angleterre ou pour un pensionnat de jeunes filles nobles ? On est quasiment sûr aujourd’hui que cette oeuvre fut représentée la première fois au pensionnat de jeunes filles de Chelsea, dirigé par Josas Priest, maître de ballet à la cour, et ami du compositeur, mais elle le fut ensuite à la cour du Roi d’Angleterre. L’influence française est manifeste dans cette oeuvre, sans doute en raison de l’admiration de Charles II pour le mode de vie à la cour de Louis XIV (suite à son exil lié à la dictature de Cromwell), mais aussi de la connaissance qu’avait Purcell des compositeurs français et de l’influence de celui qui fut son Maître, John Blow – particulièrement avec Venus and Adonis.

La mise en espace de Vincent Boussard est très sobre : un fond éclairé de bleu, et quelques chaises. Chanteurs et musiciens sont en noir ; seules les quatre chanteuses sont vêtues de couleurs vives (rouge, jaune, bleu, vert). Plusieurs passages retiennent l’attention : le Ballet des Nymphes, rendu très vivant par Gaëlle Mechaly sautant à cloche pied, ou encore la scène des sorcières, où les solistes s’amusent comme ont dû s’amuser les jeunes filles de Chelsea !

Une équipe de chanteurs aguerris dans le domaine baroque fait honneur à cette soirée. L’effectif choisi est restreint : un tout petit choeur, essentiellement masculin, parfaitement bien préparé. Certains choristes ont des petits rôles tandis que des solistes se mêlent parfois aux parties de choeur. Sophie Daneman est une Belinda éclatante et une Diane gracieuse, Gaëlle Méchaly chante ses rôles avec verve et dynamisme. La sorcière pouvant être interprétée aussi bien par un homme que par une femme, c’est le contreténor Michel Puissant qui joue ici, de manière à la fois comique et perverse (tradition élisabéthaine) à l’aide d’une gestuelle et de grimaces bien étudiées, de la couleur sournoise donnée à son timbre. Nicolas Rivenq, Enée indifférent, n’est pas très à l’aise – comme le fait remarquer Christie dans le documentaire qui suit, ce rôle est trop étriqué pour une voix comme la sienne. Et le meilleur : Paul Agnew, Actéon touchant, presque naïf, semble bien injustement puni, car s’étant trouvé plus par hasard que volontairement sur le chemin de Diane. La belle Stéphanie d’Oustrac, habillée et maquillée de rouge vif – couleur en accord avec ses deux rôles -, d’une voix à la fois sombre et souple, chante Junon outragée et Dido abandonnée avec une intensité et une aisance égales, paraissant à la fois irréelle et charnelle.

L’orchestre de William Christie, les Arts Florissants, placé sur la scène est une merveille : soigné, coloré, discret. Dans le deuxième acte de Dido and Aeneas, pour figurer l’ambiance festive, la guitariste se joint au groupe et débute le continuo avec de beaux accords. En complément de programme, un petit documentaire permet au chef d’orchestre, accompagné de toute l’équipe, de présenter les deux oeuvres avec précision et conviction. »

Opéra International – septembre 2004 – appréciation 5 / 5

« Bel exemple de  » mise en place  » que ce DVD enregistré au Théâtre du Préau de Vire proposant, outre le célèbre opéra de Purcell, Actéon, une pastorale de Charpentier qui est une sorte de condensé de l’art lyrique français où, en seulement six scènes, on glisse du divertis-sement insouciant à l’absolue tragédie. Sur un fond bleu, quelques chaises, le clavecin de  » Bill  » et ses instrumentistes attendent l’arrivée, élégante, des protagonistes en costumes mi-scène mi-ville, griffés Christian Lacroix. Il suffit d’un air chanté à cloche-pied par la pétillante Gaëlle Méchaly pour figurer les nymphes s’ébattant dans l’eau, d’un voile de gaze rouge sur le chef de Junon pour incarner tout le terrible de la divinité jalouse. Le punch naturel de Paul Agnew, comme sa retenue, en font un Actéon brillant dans la virtuosité de l’air « Liberté, liberté « , et très émouvant lors de sa métamorphose. Suivies par des caméras attentives, les deux mises en scène minimales prouvent que l’opéra, avec un tant soit peu d’imagination, est susceptible d’habiter tous les espaces (scène, salle de musée, cloître) si l’on désire dépasser la culture en rang d’oignons de la version de concert, ou éviter le gaspillage en décors problématiques. De quoi donner de belles idées aux directeurs artistiques pour de prochaines saisons. Vincent Boussard, l’auteur de ce travail avec les Arts FIo, tire le maximum de sens d’un minimum de gestes. La mort de Didon où excelle la bouleversante Stéphanie d’Oustrac est un modèle de gestuelle. Chacune des oeuvres est ici doublée d’une leçon de musique (publique) offerte par William Christie, qui s’avère un pédagogue talentueux et plein d’humour. Désire-t-on tout savoir sur l’opéra anglais du temps de Purcell, ou sur les notes inégales dans la tradition lyrique française, il suffit d’écouter « Bill » entouré de ses musiciens : leur jubilation est communicative. Leur art disséqué complète bien ces deux oeuvres, parmi les plus intenses du répertoire baroque. »

  Le Monde de la Musique – septembre 2004 – appréciation 4 / 5

« Quel bel objet pédagogique que ce film réalisé en co-production avec France 5 ! On y voit, dans une habile mise en espace de Vincent Boussard (et des robes très chics signées Christian Lacroix), deux courts chefs-d’oeuvre contemporains mais relevant de cultures différentes, Actéon de Marc-Antoine Charpentier (1683-1685) et Didon et Enée de Purcell (1689). Mais surtout, on assiste à une brillante séance de travaux pratiques menée par William Christie à propos de ces piliers du répertoire des Arts florissants. Installé au clavecin, celui-ci nous explique, entouré de ses troupes toujours prêtes à illustrer les exemples choisis par le maître, le pourquoi et le comment de l’opéra français naissant, et met l’accent, à propos de Purcell, sur le jeu des influences et des spécificités qui, déjà, faisait l’Europe musicale. Qui veut comprendre, par exemple, ce que sont les notes inégales trouvera ici son bonheur, en écoutant tel passage d’Actéon joué comme le faisaient les Allemands dans les années 1950, puis interprété avec des nuances si subtiles qu’il est impossible de les noter sur une partition. En scène comme en cours, la mezzo Stéphanie d’Oustrac est une Didon émouvante et le haute-contre Paul Agnew est un artiste d’exception. »

  Diapason – septembre 2004

« Deux concrts enregistrés au Théâtre du Préau de Vire, et la meilleure des cartes de visite pour qui ne connaîtrait pas Les Arts Florissants. La mise en espace de Vincent Boussard est adroite, Christian Lacroix a signé des robes dont les couleurs explosives se voient de loin, Bill Christie et certains de ses habituels complices sont en grande forme : bref, tout est pour le mieux en pays bas-normand. Complément de taille : deux sessions enregistrées au Conservatoire de Caen, à la fois cours d’histoire et d’interprétation, qui font mouche auprès d’un large public, introduit aux mystères des notes inégales et de la basse continue. Lorsque le maître parle, la salle est suspendue à ses lèvres. Charpentier et Purcell sont aux anges. »