CD Amadis

AMADIS

COMPOSITEUR

Jean-Baptiste LULLY

LIBRETTISTE

Philippe Quinault

 

ORCHESTRE La Simphonie du Marais
CHOEUR Choeur du Marais
DIRECTION Hugo Reyne

Corisande Françoise Masset dessus

Arcabonne

Céline Ricci

dessus

Oriane

Guillemette Laurens

bas-dessus

Amadis

François-Nicolas Geslot

haute-contre

Florestan

Bertrand Chuberre

basse taille

Arcalaüs

Florian Westphal

basse

Urgande

Camille Poul

dessus
Alquif, un Geôlier, l’Ombre d’Ardan Matthieu Heim basse

Suivante d’Urgande, une Bergère

Agathe Boudet

dessus

Suivante d’Urgande, une Bergère, une Captive

Hélène Richer

dessus
Une Captive Maïlys de Villoutreys dessus
Un Captif Benoît Porcherot haute-contre
Un Berger Daniel Lalandre contre-ténor
Un Berger, un Captif Thomas Van Essen taille

DATE D’ENREGISTREMENT 11 juillet 2006
LIEU D’ENREGISTREMENT Eglise des-Lucs-en-Boulogne – Vendée – Xe Festival de la Chabotterie
ENREGISTREMENT EN CONCERT oui

EDITEUR Accord
DISTRIBUTION Universal
DATE DE PRODUCTION 23 octobre 2006
NOMBRE DE DISQUES 3
CATEGORIE DDD

Volume VIII de la collection « Lully ou le musicien du Roi Soleil »

d’après l’édition Ballard de 1684, reconstituée par Hugo Reyne et Julie Dessaint

Critique de cet enregistrement dans :

Classica – décembre 2006 – appréciation 7 / 10

  « Annoncé l’été prochain au festival de Beaune sous la direction de Christophe Rousset, Amadis est la partition de Lully à la mode. Tant mieux : on attendait impatiemment la troisième des tragédies chevaleresques du surintendant avec Roland et Armide. Entre l’Arioste et le Tasse, Quinault et Baptiste, pour la saison 1684, puisent dans l’Amadis des Gaules, le roman-fleuve de Herberay des Essarts paru en 1540, une somme de huit mille pages à côté de laquelle La Recherche de Proust paraît une nouvelle d’Amèlie Nothomb… Adoré des Précieuses et d’Henri IV, c’est un roman d’aventures et un manuel des sentiments amoureux. On y croise des magiciennes, on y tue des géants et le héros, un ténébreux aux amours contrariées, y est protégé par la fée Urgande mais jalousé par la méchante Arcabonne. Apologie de la constance chevaleresque, c’est d’ailleurs une surdose d’Amadis qui fait tourner la tête à Don Quichotte. L’antépénultième opéra de LulIy offre peu de guerres, de trompettes, de tempêtes. La scène de magie de l’acte II est déjà le jardin enchanté d’Armide gardé par les voix languides et les flûtes douces. La scène de prison de l’acte III est sombre comme l’acte carcéral de Fidelio et l’on s’amuse d’y croiser un second rôle nommé Florestan.Tout n’est que plaintes, sommeils et magie crépusculaire, avec un exceptionnel récitatif où Quinault et Lully atteignent la perfection.

La Simphonie du Marais, approximative dans les premiers volumes de la collection Lully, a surmonté ses faiblesses. L’orchestre sonne plein et dense, les cordes sensuelles et les bois sont sans défauts. Il manque pourtant ici un plateau digne de faire entendre les subtilités du trop décrié Quinault. Bien sûr, Guillemette Laurens, malgré un timbre durci, reste l’artiste concernée dont les interventions toujours bouleversent. Mais le reste de la distribution, banale, n’a pas d’envergure. Françoise Masset se contente de chanter et François-Nicolas Geslot. sans détonner, reste à l’extérieur d’un rôle qui peut vite n’être que platitude. On souffre du timbre acide de Céline Ricci dont la diction est un éprouvant salmigondis. Salomé Haller, Anna Maria Panzarella ou Karine Deshayes ont une autre envergure vocale : les entendrons-nous avec la Simphonie du Marais dans d’autres Lully inédits? Il le faudrait: les Rachel Yakar, Howard Crook, ou Philippe Huttenlocher d’hier réclament une relève urgente. »

Diapason – décembre 2006 – appréciation 4 / 5

« Sa majesté voudra bien choisir un sujet. Mais certainement. Louis XIV retient Amadis de Gaule, le Beau ténébreux d’un roman composé en Espagne au XVe siècle. « Non, pour être invincible, on n’en est pas moins sensible » : portrait du monarque en preux chevalier, inaccessible aux flèches de l’ennemi mais vulnérable aux flèches de l’Amour. Ainsi Lully et son poète Quinault arrachent-ils la tragédie lyrique aux demi-dieux grecs qui régnaient jusqu’alors sur notre Opéra. Après Amadis viendront le Roland de l’Arioste et l’Armide du Tasse, autres figures romanesques nées sous un ciel chrétien. Le roi change, l’opéra change. La forme, elle, demeure et, à quelques signes près, qui connaît Alceste, Atys, Phaëton ou Persée reconnaîtra Amadis.

Si l’oeuvre nous ensorcelle comme au soir de sa création en 1684, c’est de toute façon moins par son livret, harmonieux mais surpeuplé (quatre « héroïnes » on se perd), que par les charmes sans fin de sa musique. Entre le choeur voluptueux qui ouvre le prologue et l’immense chaconne conclusive, surgissent appels et cris, larmes et coups, choeurs et divertissements dont la science ne le dispute qu’à la puissance. Ne détaillons pas les airs d’Arcabonne, ‘ Amour, que veux-tu de moi ‘, et d’Amadis, ‘ Bois épais ‘ : telle fut leur gloire posthume qu’en un temps où LuIIy était oublié, une Emma Calvé, une Rosa Ponselle, un Caruso ou un Pinza n’y résistaient pas. Mais les sonneries du tournoi qui ferme l’acte II Mais l’invocation,’ Toi qui dans ce tombeau ‘! Mais la scène d’Arcalaüs, ‘ Dans un piège fatal ‘ ! Mais.., on n’en finirait pas. Amadis est un catalogue.

Le choisir pour succéder à Isis comme volume VIII de la collection Lully dirigée par Hugo Reyne tombait donc sous le sens. C’est peu dire qu’une première mondiale de cette valeur comble une lacune. D’autant que le chef voit toujours plus loin, plus large, que Lully lui parle comme un frère, que les couleurs de ses vents nous enchantent sans répit. Encore une fois, n’écoutez que le prélude du prologue ‘ ou le divertissement pastoral de l’acte II, ce traité de la tendresse humaine.

Hélas ! dans un opéra, il faut aussi chanter, ce dont Nicholas McGegan, chef bien plus distant qu’Hugo Reyne, ne doutait pas lors du seul enregistrement connu de l’ouvrage, diffusé en 1987 par la BBC, jamais commercialisé, mais où conversaient Howard Crook, Jennifer Smith, SaIly Bradshaw, Russell Smythe, Julianne Baird, JiII Feldman, David Thomas, Michael George et John Mark Ainsley ! Rien de comparable vingt ans plus tard. François-Nicolas Geslot dispose d’un organe vaillant et d’une élocution soignée, mais il s’agit d’un ténor de caractère : le lyrisme, la mélancolie, la noblesse d’Amadis lui demeurent inaccessibles. Que fait Céline Ricci en Arcabonne ? Elle mime le satanisme en gonflant sa voix, devient criarde et inintelligible quand la nature l’a faite légère et virtuose. Il y avait près d’elle une Arcabonne idéale, Guillemette Laurens. Mais la pauvre s’échine sur Oriane, vierge tourmentée, parfait contre-emploi. Ainsi de suite. Victoire, haut la main, pour le couple Corisande-Florestan (la prison du III, autre zénith), incarné par Françoise Masset, seul vrai personnage du plateau, et Bertrand Chuberre, excellent baryton. Un peu court pour trois heures de drame. Reste la musique. Si choeur et cordes sont perfectibles, eux, assurément, ne jouent pas à contre-em­ploi. Ils incarnent. Amadis leur doit tout. »

 Le Monde de la Musique – février 2007 – appréciation 4 / 5

  « Après avoir visité l’Olympe avec la fortune que l’on sait, Lully et son librettiste Quinault, guidés par Louis XIV, s’orientent vers les récits chevaleresques. Amadis (1684), Roland (1685) et Armide (1686) réunissent les éléments propres à réussir une tragédie en musique, un roman ou un film : des princes et des princesses, des amours contrariés, des désirs de vengeance, une forêt enchantée. Avec ces ingrédients communs à tous les récits épiques, ils ont signé un chef-d’oeuvre qui, paradoxalement, n’avait pas encore connu les honneurs (officiels) du disque. Le huitième volume de la valeureuse collection Lully entreprise par Hugo Reyne répare cette injustice. Dans Amadis, le compositeur accorde ses lignes mélodiques à celle d’une architecture de lus en plus souple. La rigueur de la déclamation cède la place à des airs plus développées et plus nombreux. Triomphe du chant à la française, Amadis, comme Roland ou Armide, enjoint l’orchestre à participer au drame et ne le réduit pas à un simple rôle de commentateur ou de décor. Cet orchestre, Hugo Reyne en laisse entendre toute la palette des nuances. Pendant pès de trois heures, le chef et sa Simphonie du Marais agitent les passions, enflamment les coeurs et distillent les larmes. L’extraordinaire troisième acte, dans lequel les héros sont captifs, la gigantesque chaconne du cinquième acte ou les danses intermédiaires confirment avec quelle facilité Hugo Reyne et ses musiciens parlent désormais la langue de Lully.

Cet enregistrement, capté en concert, atteindrait l’idéal si les chanteurs faisaient montre d’une égale aisance. Malgré une diction soignée et une inclination naturelle à l’élégie, François-Nicolas Geslot incarne un Amadis plus berger que chevalier. Une regret­table erreur d’aiguillage a attribué en outre le rôle de la tendre Oriane à l’impressionnante Guillemette Laurens, alors que la douce Céline Ricci s’évertue à vouloir nous effrayer. Le couple Fia­restan-Corisande trouve en revan­che en Bertrand Chuberre et Française Masset des interprètes parfaits de style comme de sentiment. «