CD Alceste (direction Malgoire)

ALCESTE

(ou Le Triomphe d’Alcide)

Edition Montaigne

COMPOSITEUR

Jean-Baptiste LULLY

LIBRETTISTE

Philippe Quinault

 

ORCHESTRE La Grande Ecurie et la Chambre du Roi
CHOEUR Ensemble Sagittarius – dir. Michel Laplénie
DIRECTION Jean-Claude Malgoire

Alcide (ou Hercule) Jean-Philippe Lafont baryton
Alceste Colette Alliot-Lugaz soprano
Admète Howard Crook ténor
Céphise, la Gloire Sophie Marin-Degor soprano
Lychas Gilles Ragon ténor
Straton Jean-François Gardeil baryton
Lycomède, Pluton François Loup baryton
Caron Gregory Reinhart basse
Phérès Michel Dens ténor
Proserpine, Femme affligée, Nymphe de la Marne, Nymphe des Tuileries Véronique Gens soprano
Thétis, Diane, Nymphe de la Mer Claudine Le Coz soprano
Nymphe de la Seine Miriam Ruggeri soprano
Eole, Cléante, Homme désolé Olivier Lallouette baryton
Alecton, Apollon Douglas Nasrawi ténor

DATE D’ENREGISTREMENT janvier 1992
LIEU D’ENREGISTREMENT Théâtre des Champs Elysées
ENREGISTREMENT EN CONCERT oui – mise en scène : Jean-Louis Martinoty

EDITEUR Audivis
COLLECTION Astrée
DATE DE PRODUCTION novembre 1992 (Disques Montaigne) /1994
NOMBRE DE DISQUES 3
CATEGORIE DDD

Critique de cet enregistrement dans :

Barockmusik

« La réalisation de Malgoire est louable à plus d’un titre : en premier lieu, le chef est depuis longtemps un familier de l’oeuvre dont il a déjà enregistré une quasi-intégrale vingt ans auparavant (1975). C’est donc en territoire connu voire conquis que s’aventure La Grande Ecurie et la Chambre du Roy, pourvue d’un effectif impressionnant et conforme à la réalité de l’exécution lullyste. De plus, le « son français », singulier dosage de bassons et hautbois dominés par les cordes, est parfaitement rendu. Dans la scène infernale, les trompettes se glissent délicatement derrière les violons, loin de leurs excès guerriers du second acte. La diversité de situations appelle celle des climats. Là encore, l’orchestre coloré et énergique excelle à peindre les tableaux. Les danses sont particulièrement bien jouées, souvent accompagnées de percussions qui accentuent leur caractère fonctionnel.

Le véritable problème vient lorsque la faiblesse du livret, pourtant très drôle, est accentué par celle des chanteurs : Collette Alliot-Lugaz est catastrophique en Alceste et devrait être proscrite d’un répertoire qui visiblement n’est pas le sien. Voix de tête stridente et sifflante, lourdeur du chant, articulations du récitatif lullyste incomprises… Brisons là la litanie de l’échec. Sophie Martin Degor semble également peu à l’aise et manque de naturel et de fluidité. Sa prestation est cependant sauvée par ses talents de comédienne et son incarnation de l’inconstante Céphise est pleine de vie. Gilles Ragon, Howard Crook et François Loup sont parfaits dans leurs rôles respectifs. On pourra leur reprocher une certaine froideur pompeuse très « courtisan versaillais » mais n’est-ce pas là ce que l’on attend d’un héros ou d’un Roi ? Jean François Gardeil est admirable en amant trompé et ses colères de pacotille en feront sourire plus d’un. Les choeurs sont corrects mais la prise de son brouillonne ne permet pas de bien juger des divers pupitres.

En conclusion, cet Alceste, seule « tragi-comédie lyrique » de Lully vaut le détour pour l’indéniable souffle que Jean-Claude Malgoire insuffle de bout en bout à son équipe. Les situations sont peu vraisemblables, l’action digne d’un mauvais roman feuilleton et certains chanteurs donnent l’impression d’avoir été soudainement « parachutés ». Qu’importe, on trouve un plaisir immense à goûter cette sorte de labyrinthe excentrique et outré. Alceste, c’est cent tragédies lyriques en une, un bouillonnement d’idées d’où l’auditeur ne ressortira pas indifférent.

Technique : enregistrement live de très médiocre qualité. Nuisances sonores nombreuses (spectateurs qui toussent, pas des chanteurs sur la scène, bruitages des machineries pendant les passages instrumentaux). »

Goldberg – automne 1998 – 4 étoiles

« Malgoire a traité deux fois le sujet d’Alceste, la plus versaillaise des tragédies du Surintendant Lully gravé par Silvestre. Sa seconde approche plus inspirée prolonge une série de représentations à Versailles justement (mais à l’opéra royal de Gabriel), puis au Théâtre des Champs-Elysées à l’hiver 1991. La prise live restitue la tension liée aux mouvements de scène. Comparé à sa première lecture, Alceste II captive grâce à la sincérité et la spontanéité des chanteurs. Certes, l’Hercule/Alcide de Laffont est un peu raide (où sont les nuances qu’apportait en 1975, Max Von Egmond ?) mais Howard Crook campe un Admète convaincant dans le style et l’articulation. Les instrumentistes se délectent à ciseler les passages, les rythmes, les couleurs (castagnettes infernales du IV), la diversité des tableaux. Le choeur est constamment juste (cynisme murmuré par les suivants de Pluton aux Enfers : « Tout mortel doit ici paraître, on ne peut naître que pour mourir « , IV, 3). Tonicité, style, cohérence, Malgloire confirme une intuition sûre propre à dévoiler la nostalgie et l’éloquence morale du propos d’Alceste. Comme le précise le sous-titre, c’est bien la vertu d’Alcide, vainqueur des Enfers et de lui-même, qui est le caractère principal de l’ouvrage et donne le sujet de la pièce : vertus du demi-dieu. » 

 Opéra International – janvier 1993 – appréciation 2 / 5

« Par rapport à la gravure d’Alceste d’il y a près de vingt ans, il faut souligner le chemin parcouru : évolution plus que notable en ce qui concerne l’orchestre qui bénéficie d’une maîtrise du style et des instruments anciens…Pour le reste, Malgoire ne semble pas avoir fondamentalement révisé sa conception d’ensemble de l’ouvrage…Du côté des solistes, la nouvelle équipe ténoigne d’une meilleure homogénéité, mais bien peu sont investis dans leur rôle pour toucher vraiment l’auditeur…Howard Crook reste peu convaincant avec un Admète qui oublie le chant et se montre résolument trop maniéré. L’Alcide de Jean-Pierre Lafaont, le Lycomède de François Loup et la Straton de Jean-François Gardeil réservent plusieurs bons moments, la meilleure part revenant au Lychas de Gilles Ragon. La Céphise un peu acerbe de Sophie Marin-Degor s’avère en définitive plutôt bien à sa place…Privée de son contexte visuel, Alceste accuse encore plus nettement ses longueurs…L’orchestre manque du souffle et de l’ampleur minimum qu’on attend pour un « grand spectacle ». »