CD Alcina (2005)

Le compositeurL’oeuvre

ALCINA

COMPOSITEUR

Georg Friedrich HAENDEL

LIBRETTISTE

Antonio Marchi

 

ORCHESTRE Orchestre de l’État de Bavière
CHOEUR
DIRECTION Ivor Bolton

Alcina Anja Harteros
Ruggiero Vesselina Kasarova
Morgana Veronica Cangemi
Bradamante Sonia Prina
Oronte John Mark Ainsley
Melisso Christopher Purves
Oberto Deborah York

DATE D’ENREGISTREMENT juillet 2005
LIEU D’ENREGISTREMENT Munich – Prinzregententheater
ENREGISTREMENT EN CONCERT oui

EDITEUR Farao Classics
DISTRIBUTION Integral
DATE DE PRODUCTION 17 septembre 2007
NOMBRE DE DISQUES 3 SCAD / CD hybrides
CATEGORIE DDD

Critique de cet enregistrement dans :

Diapason – février 2009 – appréciation 4 / 5 – technique 7 / 10

  « Après Serse, Ariodante et (en DVD) Rodelinda, quatrième opéra seria de Haendel donné à Munich sous le règne du Londonien Peter Jonas à laisser une trace. En résumé, il s’agit d’inscrire au répertoire d’une grande scène lyrique internationale tout un cycle de chefs-d’oeuvre anciens en mêlant partitions complètes, langue et tessitures originales, orchestre traditionnel sous la houlette d’un expert et mises en scènes ‘provoc’ (Cesare à Jurassic Park) ou aimablement postmodernes (cette Alcina due à Christof Loy).

Le chef tient la soirée d’aplomb sans faiblir, les feux de la rampe portent peu à peu les personnages à ébullition, les gosiers rivalisent de volume et de caractère, Alcina n’est plus une âme en peine mais cette magicienne au coeur noir qui change les hommes en bêtes. Ruggiero est un vrai chevalier, Morgana une soeur légère d’Alcina, non sa camériste, Oberto un bébé courageux, Bradamante une épouse fidèle. Quant à Oronte et Melisso, on ne trouvera au catalogue ni plus crédible ni mieux chanté.

Si vous cherchez de l’action, précipitez-vous. Si vous pensez qu’Alcina représente, en 1735, l’apothéose du bel canto, passez votre chemin. Toutes les dames manquent de souffle, ce qui les fâche avec la justesse. En 2005, la fantastique Anja Harteros n’était déjà plus une prima donna haendélienne, son vibrato et son soutien en force lui font parfois perdre la ligne, souvent les paroles. De ligne, Kasarova n’en a plus : ce beau timbre frémissant et mâle erre en quête d’un cantabile qui se dérobe sans cesse. Curieusement, la véhémente Sonia Prina traverse l’ouvrage sans passion ‘ et sans souffle, elle aussi. Quant à l’orchestre, il imite au mieux ‘ ce qui se fait ‘ mais en reste à l’imitation et pas toujours la plus jolie (ce luth-guitare acharné sur les allegros, qu’on le ligote !). Tant de couleurs, de nuances, de perspectives, d’arrière-plans, de mouvements passionnels disparaissent dans le tourbillon (assez sage cependant) du ‘ grand opéra ‘ ! Hickox 1985 ne craint donc rien ‘ ni, pour le couple central mais pour lui seulement, Bonynge 1962. Malgré tout, une Alcina de théâtre, simple, solidee, tendue, cela ne se refuse pas. Combien sont-elles ? »

 ClassiqueInfo.com

« Abondamment illustré, le livret donne quelques regrets de ne pas voir paraître un DVD plutôt qu’un disque, car les photos de la production réglée par Christoph Loy sont fort belles, et donnent l’impression d’un spectacle très abouti. Ce léger regret n’empêche cependant pas d’apprécier pleinement cet album, dont les qualités musicales se suffisent à elles-mêmes.

La distribution est un mélange de grandes voix lyriques « traditionnelles », et de chanteurs d’obédience baroque, mais n’est pas pour autant hétérogène, et les différents styles se marient finalement fort bien. Comme nous le soulignions dans notre compte-rendu des Noces de Figaro, Anja Harteros est l’une des chanteuses préférées de l’Opéra de Bavière, où elle multiplie les apparitions marquantes. La versatilité de cette grande et large voix straussienne est impressionnante. Sans être particulièrement idiomatique, sans être stylistiquement tout à fait orthodoxe, elle semble toujours à sa place dans tout ce qu’elle chante, de Traviata à la Comtesse, de Eva à Arabella, de Desdemona à ici Alcina. Son Alcina est un doux mélange de sombre passion et de noblesse, d’une beauté de timbre ensorcelante. La voix n’est pas la plus agile qui soit, est parfois un tout petit peu dépassée en pure virtuosité, mais elle compense largement par son étendue et son format tragique. Le rôle de Ruggiero est tenu par une autre star, la mezzo Vesselina Kasarova. Celle-ci n’est pas une styliste irréprochable : les sons tubés, le poitrinage sont parfois excessifs, mais elle fait preuve de tant de générosité et d’abattage qu’elle en devient irrésistible. De plus, elle chante toujours juste, donne de la couleur à ses vocalises, et certains airs comme « Mi lusinga il dolce affeto » ou « Sta nell’ircana pietrosa tana » sont anthologiques.

A côté de ces deux forts tempéraments, les autres ont le mérite d’exister. Morgana bénéficie de l’excellente Veronica Cangemi, aux aigus un peu stridents au départ, mais qui chante avec beaucoup de sensibilité. John Mark Ainsley est un Oronte scrupuleux, au style subtil et à l’intonation très propre, mais qui ne brûle pas les planches, et dont les aigus plafonnent un peu. Bradamante est chanté par Sonia Prina, beau timbre, aux vocalises impressionnantes, mais un peu mécaniques, et qui a quelques problèmes de justesse. Deborah York en Oberto est le point faible du plateau : la voix a de jolis aigus, mais la justesse n’est pas très constante, les graves sont émis dans la douleur, et le chant est flasque, et manque de vie et de variété.

A la tête d’un Bayerisches Staatsorchester plutôt en forme, et assez à l’aise dans la musique baroque, malgré quelques raideurs, Ivor Bolton se montre discret et attentif à ses chanteurs, on ne lui en demande pas plus.

A l’heure du bilan discographique on peut considérer que cette nouvelle intégrale est à placer au sommet. Elle surclasse la distribution disparate et peu idiomatique de la version Erato (Fleming, Graham, Dessay), enregistrée dans la foulée de représentations à l’Opéra de Paris, malgré la direction plus intéressante de William Christie, et égale la référence déjà assez ancienne de chez EMI, récemment rééditée. La distribution de cette version dirigée par Richard Hickox est certes plus globalement plus stylée et plus homogène, mais elle présente un peu moins de tempérament théâtral (Auger, Jones, Harrhy). Pour connaître Alcina, on collectionnera donc les albums Hickox et Bolton, deux versions somme toute complémentaires. »

 Opéra Magazine – avril 2009 – appréciation 4 / 5

« Au Festival de Munich, en juillet 2005, le rôle-titre est confié à la soprano Anja Harteros, davantage habituée à fréquenter Puccini,Verdi ou Wagner que Haendel. On attendrait d’un tel pedigree un chant solide, mais peut-être la fréquentation d’un répertoire plus lourd a-t-elle prématurément émoussé cette belle voix. Nous n’assistons pas à une grande performance sur le strict plan vocal, mais la fragilité nourrit l’interprétation et convient à ce personnage de géante aux pieds d’argile. Une Alcina honorable donc, et qui sait nous toucher. À ses côtés, son amant, sa soeur et sa rivale sont campés avec une bonne tenue par Vesselina Kasarova infiniment supérieure ici à son médiocre récital Haendei enregistré pour BMG ,Veronica Cangemi et Sonia Prina. N’oublions pas l’excellent Oronte de John Mark Ainsley, ainsi que la direction efficace, stylée et pleine de relief d’Ivor Bolton. Au bilan, une version qui n’a rien d’exceptionnel, mais dont l’écoute ne lasse pas et procure même quelques plaisirs. »