La Toison d’or

COMPOSITEUR ?
LIBRETTISTE Pierre Corneille

 

Pièce à machines, mêlée de chant, écrite par Corneille à la demande du marquis de Sourdéac, représentée en 1660 à Neubourg, dans le château de ce dernier.

Vestiges du château du Neubourg

Alexandre de Rieux, marquis de Sourdéac, devenu baron de Neufbourg par son mariage, était pour le moins un original, passionné de spectacle, au point d’aménager une salle dans son château. Tallemant des Réaux le décrit ainsi : Il se fait courre par ses païsans, comme on court un cerf, et dit que c’est pour faire exercice ; il a de l’inclination aux méchaniques ; il travaille de la main admirablement : il n’y a pas un meilleur serrurier au monde. Il luy a pris une fantaisie de faire jouer chez luy une comédie en musique, et pour cela il a fait faire une salle qui luy couste au moins dix mille escus. Tout ce qu’il faut pour le théâtre et pour les sièges et les galeries, s’il ne travailloit luy-mesme, luy reviendroit, dit-on, à plus de deux fois autant.

Dans un premier temps, il avait commandé une pièce à Corneille intitulée Les Amours de Médée, qui devint La Conquête de la Toison d’or.

M. le marquis de Sourdéac fit en 1660 représenter dans son château de Neubourg en Normandie, une pièce de machines intitulée la Toison d’Or, que composa M. Corneille l’aîné. M. de Sourdéac prit le temps du mariage de S. M. Louis XIV pour faire une réjouissance publique de la représentation de cette pièce, et outre tous ceux qui étaient nécessaires pour l’exécution de ce dessein, qui furent entretenus plus de deux mois à Neubourg à ses dépens, il traita et logea dans son château plus de cinq cents gentilshommes de la province, pendant plusieurs représentations que la troupe du Marais y donna de cet ouvrage. Ce n’était partout que tables servies avec une abondance et une propreté admirables. (Histoire de l’Académie royale de musique)

Chappuzeau (*), dans son Théâtre François qualifie l’oeuvre d’« Opera » : La Toison d’or, dont un des Grands Seigneurs d’une des premières Maisons du Royaume, plein d’esprit et de générosité, fit seul la belle depencepour en régaler dans son château toute la Noblesse de la province. Depuis, il voulut bien en gratifier la troupe du Marais, où le Roi, suivid e toute la Cour, vint voir cette merveilleuse pièce.Tout Paris luy a donné ses admirations, et ce grand Opera qui n’est dû qu’à l’esprit et à la magnificence du seigneur dont j’ay parlé, a servi de modèle pour d’autres qui ont suivy.

(*) Samuel Chappuzeau, né à Paris en 1625, mort à La Celle en 1701. Auteur de pièces et de nombreux ouvrages. Son « Théâtre françois divisé en trois Livres, où il est traité I. De L’Usage de la Comédie. II. Des Auteurs qui soutiennent le Theatre. III. De la Conduite des Comédiens », parut à Lyon en 1674.

Voltaire souligne dans ses Commentaires sur Corneille : Ce qui suprit le plus, ce fut la nouveauté des machines et des décorations. La musique tenait une place limitée dans La Toison d’or, avec notamment un Chant des Sirènes et un Chant d’Orphée. L’auteur de la musique est inconnu (*).

(*) à titre anecdotique, une carte postale ancienne du Neubourg attribue la musique à Lulli…

La pièce fut remise au théâtre en 1664 avec succès. Le 9 Juillet 1683 on la reprit, avec un Prolog. de La Chapelle, & il y avoit tout lieu de croire qu’elle auroit encore un grand succès ; mais à peine achevoit-on le Prolog. à la dixieme représentation, que les Comédiens interrompirent le spectacle, étant informés que la Reine venoit de mourir, & ils firent rendre l’argent à la porte. (Léris)