CD Ballet de la Prosprité des Armes de France

BALLET DE LA PROSPÉRITÉ DES ARMES DE LA FRANCE

COMPOSITEUR

François de CHANCY

LIBRETTISTE

Jean Desmarest de Saint-Sorlin

 

ORCHESTRE

La Simphonie du Marais

CHOEUR

Le Choeur du Marais – Institut Musical de Vendée (dir. Odile Amossé)

DIRECTION

Hugo Reyne

Catherine Padaut

dessus

Stéphane Lévy

haute-contre

Thomas van Essen

basse-taille

Sydney Fierro

basse

Hugo Reyne

récitant

DATE D’ENREGISTREMENT

29 avril au 3 mai 2008

LIEU D’ENREGISTREMENT

Paris – Salle Akustika –

ENREGISTREMENT EN CONCERT non

EDITEUR

Musiques à la Chabotterie

DISTRIBUTION
DATE DE PRODUCTION

25 septembre 2008

NOMBRE DE DISQUES

2 (CD1 : Musiques sacrées – Motets, Te deum, messes, De profundis, de Antoine Boesset, Bouzignac, Nicolas Formé, Annibal Gantez – CD 2 – Ballet de la Prospérité des Armes de France)

CATEGORIE

DDD

Musiques au temps de Richelieu

Partition restaurée par Gérard Geay

 

Critique de cet enregistrement dans :

 Présentation La Simphonie du Marais
« Vers 1635, le théâtre à l’italienne est introduit en France par Richelieu, premier ministre de Louis XIII, qui en fait construire un dans sa résidence parisienne, le fameux Palais Cardinal (il s’agit aujourd’hui du Palais Royal). En effet, participant en ceci à l’esprit cartésien purement français, la séparation scène-salle s’opère progressivement entre les années 1635-1640 (avant l’introduction des théâtres à l’italienne, les ballets de cour sont représentés dans des grandes salles de réception des Palais avec des allers et venues continuels entre la scène et la salle). Le premier théâtre à l’italienne en France est donc inauguré par Richelieu en 1638. Il est fascinant de penser que cette même salle servira à Molière de 1659 jusqu’à sa mort sur le même lieu puis à Lully qui y installe l’Académie royale de musique qui y restera jusqu’à l’incendie de 1763.

Le ministère de Richelieu s’attache à rationaliser les m’urs de la noblesse française, d’où la nouvelle conception du ballet de cour de style épique et à vocation politique. Succédant au ballet de cour de style comique et grotesque, le divertissement du roi sous Richelieu privilégie l’actualité de la cour.

En 1641, Richelieu fait représenter sur son théâtre le Ballet de la Prospérité des armes de France. Avec un livret de Jean Desmarest de Saint-Sorlin, des musiques vocales de François de Chancy et des danses dont on ne connaît les compositeurs, ce ballet « représente les prospérités de cette année par mer et par terre : au moins une partie, car il serait difficile de représenter en un soir ce qui a occupé durant tant de mois les veilles et les travaux de tant d’hommes, et l’attention de toute l’Europe ».

Construit autour de ce Ballet de la Prospérité des armes de France, notre programme sera agrémenté d’anecdotes de l’époque illustrant la vie de Richelieu, du Lamento del Marquese Cinq-Mars de Barbara Strozzi (au départ favori de Louis XIII, Cinq-Mars était un jeune marquis qui complota contre Richelieu et qui fut exécuté en 1642), ainsi que d’airs de cour d’Etienne Moulinié et d’Antoine Boësset dédiés à Richelieu. »

Classique.news

« Au programme des réjouissances, le Ballet de la Prospérité des Armes de France, commandé par Richelieu à un collectif de musiciens dont se détache Chancy, en particulier pour les récits de chaque acte, pour quatre voix solistes, sauf le Trio des Sirènes (Acte III). Hugo Reyne restitue la partition d’après la copie postérieure de Philidor (1690), malheureusement incomplète. Comme il le démontrait lors du concert en plein air donné en « recréation », à la Chabotterie, dans le cadre du Festival Musiques à la Chabotterie 2008 (23 juillet 2008, concert inaugural), le directeur de la Simphonie du Marais s’est ingénié à « marier les bandes »: celles des hautbois, avec celles des luths et des cordes. Comme l’Etat se recompose et s’unifie, les parties diverses composant les familles d’instruments sont invitées à jouer partition commune, de surcroît simultanément. Rien n’est suffisant pour célébrer l’autorité centrale du Monarque: même les Grands du royaume paraissent dans chaque entrée de ballet, devant maîtriser l’art de la danse. Toute une époque. Côté voix, le quatuor des solistes n’est pas encore individualisé comme il le sera plus tard dans l’opéra à venir, avec Lully. Voix indistinctes chantant un même texte, leur fonctionnement est encore celui des madrigaux italiens et force est de reconnaître que dans l’articulation du français baroque, les quatre chanteurs choisis par Hugo Reyne, savent convaincre.

La Symphonie du Marais rétablit et la puissance et la poésie des tableaux, avec toujours cet allant solennel, dont la vitalité chorégraphique se gorge d’une indiscutable opulence. Victoires sur la terre et sur la mer, peuples soumis convoqués (Espagnols, Flamands…), peuplades exotiques non moins inféodées (Américains), allégories de l’harmonie, de la fortune, des arts (avec le tableau des Muses et de l’entrée d’Apollon, à l’acte IV), les instrumentistes, déployant une belle pâte sonore, cohérente et bondissante autant que détaillée (couleurs des guitares et des luths, surtout, timbres mordants et saillants et tout autant fruités des hautbois, de la flûte et du basson), savent projeter le nerf dansant de chaque entrée, sous la houlette de leur chef, lequel devenu aussi récitant, précise le sujet de l’action, avant chaque entrée. Quel chemin rétabli, de ce premier ballet politique (avec le Ballet Comique de la Reine, de 1581) aux futurs ballets fastueux de Lully sous Louis XIV, propre aux années 1660. En dansant, les Français façonnent leur conception du grand divertissement. Hugo Reyne nous offre une nouvelle étape de ce parcours passionnant. Le Ballet de la Prospérité en un jalon éblouissant. Révélant aussi le mécénat artistique de Richelieu, le coffret de 2 cd, magistralement édité (comprenant illustrations et livret abondamment documenté sur les oeuvres, la période, Richelieu), constitue l’événement discographique de l’été et de la rentrée 2008, dans le registre baroque. Voilà qui accrédite la ligne artistique du label créé en liaison avec les concerts de La Chabotterie. »

Musebaroque

« On avait déjà pu entendre des extraits de ballet du premier XVIIème siècle dans certains disques du Poème Harmonique (par exemple celui consacré à Antoine Boësset), on avait pu entendre un Concert donné à la Saint-Louis à Louis XIII dans le disque l’Orchestre de Louis XIII dirigé par Jordi Savall (Astrée), mais un ballet entier, jamais. Enfin, pour mieux dire, presque entier, car la fin du Ballet de la Prospérité des armes de France est perdue. Il faut dire aussi que dans les recueil de Philidor qui contiennent les entrées instrumentales des ballets faits sous les règnes antérieur à celui de Louis XIV, seule les parties extrêmes, dessus et basse, sont données, ce qui signifie qu’il faut réécrire ce les parties intermédiaires, qu’une équipe de spécialistes, sous la direction de Gérard Geay (à qui l’on devait déjà les parties intermédiaires de la Sémélé de Marais chez Glossa), a restituées avec succès.

Voici donc un ballet en cinq actes, avec à chaque acte une ouverture et un récit, puis les entrées dansées. Au total, 27 entrées instrumentales (il manque une partie de celles de l’acte IV et toutes celles de l’acte V), quatre ouvertures (la cinquième est perdue) et cinq récits pour nous donner une idée de ce spectacle magnifique que représentait un ballet de cour.

Les récits ne manquent guère d’imagination, tant sur le plan du texte que sur celui de la musique. N’est-ce pas comme un prologue que ces Récit des Muses (piste 31) ? Ne croit-on pas voir la sage Harmonie (piste 2) comme on verrait la Musica au début d’un Orfeo ? L’Italie (piste 11) ne semble-t-elle pas s’affaiblir et s’épuiser à mesure qu’elle essaie d’appeler ? Ne sont-ce pas telles sirènes (piste 31) qu’entendit autrefois le rusé Ulysse ? Les voix sont toujours belles et surtout se marient parfaitement, ce qui est indispensable dans ces ensembles quasi madrigalesques.

La musique de ballet est loin d’être négligeable, et ne constitue pas que l’accompagnement d’un spectacle. Voilà une musique qui peut s’écouter comme « musique instrumentale pure » diraient certains, et mieux encore si l’on a un peu d’imagination. On verra alors ici des Démons espiègles (piste 3), des Parques affairées (piste 5), des Furies imposantes (piste 6), des Fleuves au cour calme (piste 12), des Esclaves enchaînés les uns aux autres (piste 29), des Espagnols fiers (piste 14), Flamands joyeux drilles (piste 16), et même des Américains presque aussi sautillants que les Démons (piste 25). Il serait hélas fastidieux de tout détailler.

Hugo Reyne manie avec talent la palette sonore à sa disposition, séparant ou mélangeant bande de hautbois t bande de violons, choisissant avec intelligence les luths en lieu des clavecins pour la basse continue, faisant de ce ballet un voyage au cours duquel il nous guide, drapé dans sa tunique de récitant souvent souriant. »

Au final, ce coffret fait prendre conscience que, si la musique française du premier XVIIème siècle n’eut n’a pas son Monteverdi, elle n’en existe pas moins dans sa belle beauté.