CD Lotario (direction Paul Goodwin)

LOTARIO

COMPOSITEUR

Georg Friedrich HAENDEL

LIBRETTISTE

Giacomo Rossi, d’après Antonio Salvi

 

ORCHESTRE Kammerorchester Basel Barock
CHOEUR
DIRECTION Paul Goodwin

Lotario Lawrence Zazzo contre-ténor
Adelaide Nuria Rial soprano
Matilde Annette Markert contralto
Idelberto Robert Cornelius contre-ténor
Berengario Andreas Karasiak ténor
Colodomiro Huub Claessens basse

DATE D’ENREGISTREMENT 4 juin 2004
LIEU D’ENREGISTREMENT Martinskirche Basel
ENREGISTREMENT EN CONCERT oui

EDITEUR OEHM Classics
DISTRIBUTION
DATE DE PRODUCTION septembre 2004
NOMBRE DE DISQUES 1 (extraits)
CATEGORIE DDD

Critique de cet enregistrement dans :

Classica/Réperetoire – avril 2005 – appréciation 5 / 10

« …face à l’excellent enregistrement proposé pan Alan Curtis (certes tronqué, mais dans une bien moindre mesure), celui-ci ne fait pas le poids. Toute l’équipe chante ici correctement mais pâlit sans conteste devant le beau cast vocal réuni par son prédécesseur. Nuria Rial, en Adelaide, ne saurait rivaliser en termes de virtuosité comme de joliesses vocales avec la merveilleuse Simone Kermes. Son grand morceau de bravoure « Scherza in maria navicella  » est bien terne et sage. L’excellent Lawrence Zazzo, particulièrement à l’honneur ici, pourrait constituer une altemative convaincante au Lotario de Sara Mingando, d’une extrême séduction vocale et d’une grande intelligence théâtrale mals d’une féminité gênante. L’émission est homogène, le style très élégant (« Rammentati, cor mio »), et c’est de surcroît un des rares contre-ténors à pouvoir jouir d’une vraie puissance vocale, mais le timbre n’est pas toujours de toute beauté. Annette Markert est presque trop élégante et trop bien chantante pour le rôle de la perfide Matilde.Andreas Karasiak (Berengario) est un ténor baroque plus que prometteur, cependant que Huub Claessens remplit son contrat de basse haendélienne, avec toutefois quelques difficultés dans l’aigu. La direction vivante, aérée, do Paul Goodwin révèle rapidement certaines limites : un manque d’imagination qui rend l’ensemble assez mécanique et répétitif. Décidément l’enregistrement de Curtis s’impose. »

Opéra International – janvier 2005 – appréciation 4 / 5

 « …Voici que paraît une version d’extraits, donnée par le hautboïste Paul Goodwin dirigeant un orchestre joliment dynamique. S’il est permis de trouver plus subtile la direction d’Alan Curtis, c’est ici la distribution vocale qui mérite l’achat comparatif. Principalement pour mettre « bouche à bouche » le contralto de Sara Mingardo et le fastueux haute-contre de Lawrence Zazzo dans le rôle-titre. Deux incarnations opposées, chacune enquête de la voix fantasmée des castrats, en l’occurrence celle d’Antonio Maria Bernacchi. Fascinante comparaison : autant Mingardo est troublante et profonde, autant Zazzo donne au personnage du généreux comte d’Arles et roi de Germanie virilité et complexité. Moelleuse s’avère sa ligne de chant dans le suave  » Non disperi peregrino « , acerbe et perturbé son  » Già mi sembra « , enjôleur le  » Tiranna, ma bella « . Le timbre, l’un des plus accomplis du moment, est en droit de provoquer un début de collectionnite…

A ses côtés, la soprano catalane Nuria Rial en Adelaide s’avère plus fruitée que Simone Kermes. Certes, elle ornemente moins ostensiblement l’impitoyable  » Scherzo in mar la novicella  » et s’abstient de couronner l’air par de sidérants aigus comme sa consoeur, mais le mariage Zazzo et Rial, dans l’émotif duo « Si, bel sembiante  » est un instant magique, de ceux que ce splendide haute-contre sait réserver à son public comme à ses partenaires, tant il sait fondre sa voix dans celle de l’autre. Conçu autour de Lotario et d’Adelaide, ce CD ignore bien des rôles subalternes. Mais celui de Matilde, incarnée chez Curtis par Sonia Prina, permet la découverte de l’intéressant alto d’Annette Markert. Si l’on reste plus réservé quant à la prestation de l’approximatif ténor d’Andreas Karasiak (Berengario], la basse Huub Claessens (Clodomiro), bien qu’un peu brouillonne dans les cadences de « Non t’inganni la speranza « , montre une mâle bravoure dans l’agité (sic!)  » Se il mar promette calma ». »

Diapason – janvier 2005 – appréciation 3 / 5

« Aussitôt après l’intégrale d’Alan Curtis arrive le concert du 4 juin dernier à Bâle, finalement réduit à l’Ouverture, onze airs, le duo et le coro final. Il y a soudain du Lotario dans l’air. Si le falsettiste Lawrence Zazzo ne peut s’élever en timbre ni en plénitude à la hauteur d’une Sara Mingardo, son Lothaire a plus de cran, plus de force – a tel point justement qu’on le trou-vera çà et là un peu « forcé ». Doté d’un soprano somptueux, de vocalises dardées alla Stich-Randall et d’un style très personnel, la jeune Nuria Rial imposerait sans peine son Adélaïde, n’était un manque d’imagination dans le caractère et un souffle beaucoup trop court, qui neutralisent ses da capo et l’obligent à tailler ses motifs en pièces. Les comparses, même la vaillante Annette Markert, courent derrière la partition plus qu’ils ne la vivent. On se demande enfin quel critère a guidé la sélection, peu judicieuse au demeurant (quelques airs anecdotiques mais ni « D’una torbida sorgente » d’Adelaide, ni « Arma lo sguardo » de Matilde, fameux brouillon de Jephtha, ni ses ultimes « Furie ». En fin de compte, l’atout majeur du florilège sera l’excellent orchestre bâlois, plus sûr et mieux sonnant (sous la voûte de la Martinskirche, il est vrai, contre toute vérité historique ou théâtrale) que le Complesso de Curtis, sous la direction attentive et pertinente de Paul Goodwin. »

 Forum Opéra

« Cet enregistrement fut réalisé quelques jours à peine avant l’intégrale d’Alan Curtis pour les micros de Virgin. Si, en réalité, le chef américain pratique des coupes sombres dans la partition, cet album est encore plus fragmentaire et ne constitue donc pas une alternative. La sélection proposée ne rend pas non plus totalement justice aux beautés d’une oeuvre, certes fort inégale (en cela, cet album est assez objectif et représentatif), mais qui méritait d’être exhumée. Les impondérables artistiques et techniques du concert ont sans doute limité la marge de manoeuvre des producteurs.

Avec quatre airs et le seul duo de l’opéra, le héros se taille la part du lion, éclipsant même la prima donna ! Le public le plus récalcitrant à l’idée que des contre-ténors puissent succéder aux castrats (Antonio Bernacchi en l’occurrence) pourrait bien rendre les armes : Lawrence Zazzo apporte au magnanime roi d’Allemagne une vigueur, un relief, une intensité qui font, hélas, défaut au contralto splendide, mais trop moelleux et extérieur de Sara Mingardo. Ce n’est pas qu’une question de tempérament : la voix du chanteur américain est pleine et chaude, puissante, son timbre pénétrant et nullement androgyne, des qualités sans doute peu courantes chez les falsettistes, mais que la mauvaise foi et les partis pris leur dénient aussi volontiers. Que les sceptiques écoutent seulement et se rendent à l’évidence… D’aucuns ergoteront qu’il en fait même trop (« Già mi sembra »), mais, après tout, les contre-ténors ont aussi le droit de croire à leurs personnages et de se donner sans compter ! Avec des artistes de la trempe de Lawrence Zazzo, David Daniels ou Bejun Mehta, il faudra vous y habituer.

Nuria Rial séduit d’emblée par un grain ensoleillé, racé et une agilité renversante. Son duo avec Lotario est un pur ravissement. En revanche, un volume confidentiel ainsi qu’un soutien fragile devraient, pour l’instant, poser problème à la scène. L’interprète se révèle encore bien timide, mais la nudité de ses reprises demeure préférable aux cocottes narcissiques de Kermes qui défigurent la musique. Bien encadrée, la jeune Catalane a tout le temps de s’épanouir et d’affirmer sa personnalité.

Si le personnage d’Idelberto, lui, manque à l’appel, ce n’est pas une grande perte. Berengario (Andras Karasiak) se voit également réduit à la portion congrue, mais l’exécution laborieuse de « Non pensi quell’altera » n’inspire aucun regret. Enième baryton égaré dans un rôle de basse, qui plus est desservi par un organe sourd et à la dynamique extrêmement réduite, Huub Claessens (Clodomiro) s’essouffle vite et perd son latin dans les cadences de « Non t’inganni la speranza ». En Matilde, figure jouissive et noire à souhait, Sonia Prina signe chez Curtis une composition particulièrement fouillée et convaincante ; dotée d’un métal plus dense et sombre, Annette Market parvient en deux airs à susciter l’intérêt – notre imagination devra toutefois suppléer l’absence de son air de bravoure « Arma lo sguardo », alors qu’il nous faut supporter le routinier et longuet « Vanne a colei che adori ».

Enfin et sans véritable surprise, Paul Goodwin l’emporte haut la main sur Alan Curtis au jeu des comparaisons : sans être particulièrement inventive ni raffinée, sa direction s’avère nettement plus ferme, énergique et il ne fait aucun doute que Lotario retrouve avec lui la colonne vertébrale qui lui manque cruellement chez son confrère. Avec un ténor plus assuré et une vraie basse, l’intégrale aurait probablement inflig&ecute; une rude concurrence à la version de Curtis… «