CD Lotario (direction Alan Curtis)

LOTARIO

COMPOSITEUR

Georg Friedrich HAENDEL

LIBRETTISTE

Giacomo Rossi, d’après Antonio Salvi

 

ORCHESTRE Il Complesso Barocco
CHOEUR
DIRECTION Alan Curtis

Lotario Sara Mingardo mezzo-soprano
Adelaide Simone Kermes soprano
Matilde Sonia Prina contralto
Idelberto Hilary Summers mezzo-soprano
Berengario Steve Davislim ténor
Colodomiro Vito Priante basse

DATE D’ENREGISTREMENT 22 au 28 juin 2004
LIEU D’ENREGISTREMENT Chiesa dell’Annunziata – Ravello – Salerne
ENREGISTREMENT EN CONCERT non

EDITEUR Deutsche Harmonia Mundi
DISTRIBUTION BMG
DATE DE PRODUCTION 10 octobre 2004
NOMBRE DE DISQUES 2
CATEGORIE DDD

Critique de cet enregistrement dans :

Le Monde de la Musique – décembre 2004 – appréciation 4 / 5

« La première représentation de Lotario à Londres, le 2 décembre 1729, fut un échec, malgré une mise en scène exubérante présentant dix décors différents. L’oeuvre tomba aux oubliettes jusqu’à la fin du XXe siècle. Certes, on est loin des sommets de Giulio Cesare et de Rodelinda, antérieurs de quelques années, et les musicologues s’accordent pour expliquer le fiasco par le conventionnel de l’intrigue et la médiocre facture des airs, ainsi que par un curieux traitement musical qui rend deux personnages de second plan plus captivants que les protagonistes.

C’est donc un exploit que réalise Alan Curtis en rendant cette oeuvre passionnante. I.’éditeur lui ayant demandé de faire tenir l’enregistrement en deux CD pour des raisons économiques, il a coupé dans les récitatifs et supprimé les du capo de certains airs. Certes, on peut crier au sacrilège, mais cette version tronquée présente une brochette d’interprètes hors pair qui donnent à cette entreprise sa pleine justification. Tant la soprano Sirnone Kermes, qui s’était déjà lait remarquer dans un récital et une intégrale de Deidamia, que le magnifique ténor australien Steve Davislim suscitent l’enthousiasme. Les entoure un brelan de voix graves féminines, magnifiquement timbrées, à commencer par la superbe contralto Sara Mingardo qui chante le rôle-titre écrit pour un castrat soprano, Antonio Bernacchi. Enfin la direction d’Alan Curtis, loin de toute muséologie, nous entraîne dans ce drame avec une puissance d’autant plus convaincante que les coupes lui permettent de maintenir le rythme de l’action. »

  Opéra International – novembre 2004 – appréciation 3 / 5

« Le vingt-sixième opéra de Haendel, Lotario, fut créé le 2décembre 1729 au King’s Theatre de Haymanket. Les proportions relativement modestes (l’oeuvre tient sur deux disques), ce dramma per musica en trois actes ne se distingue pas par des accents d’une grande fantaisie. Entre une ouverture criblée de motifs italianisants fort convenus et une kyrielle d’airs assez uniformes (excepté peut-être la ravissante aria d’Adelaide à la fin de l’acte 1, « Scherzo in maria navicello »), la partition ne cultive pas l’effet de surprise. Reconnu pour son inaltérable sens du défrichage, Alan Curtis semble depuis maintenant de nombreuses années s’être fait l’apôtre des oeuvres rares, oubliées, voire des causes perdues. Plusieurs gravures haendéliennes plus ou moins récentes, Admeto, Rodrigo, Arminio et Deidamia (toutes enregistrées pour le label Virgin) montrent l’opiniâtreté du chef américain en la matière. Epaulé par les sages et fidèles instrumentistes de son ensemble Il Complesso Barocco, cet artisan-musicien (autrefois brillant claviériste) se retranche, une fois de plus, dernière une lecture stylistiquement correcte mais des plus indolentes : les tempi sont trop modérés, les effets timides, les couleurs discrètes… »

Une approche musicale aussi placide s’avère d’autant plus regrettable que les chanteurs, ici pour moitié italiens, apportent ce qu’il faut d’énergie, d’ensoleillement et de verve. Le contralto suave de Sara Mingardo (Lotario) est comme toujours d’une envoûtante profondeur (« Non disperi peregrino »), le mezzo de Sonia Pnina (Matilde) ductile et charnu (« Orgogliosetto va l’augelletta »), quant au baryton-basse Vito Priante (Clodomiro), il affronte bravement les laborieuses cadences que lui réserve son rôle (« Non t’inganni la speranza »). Le ténor australien Steve Davislim (le timbre rappelle celui de l’Anglais Ian Partridge) se montre lui aussi très satisfaisant dans son personnage de tyran désappointé. En revanche, ni Hilary Summers (Idelberto), contralto excessivement androgyne et artificiel, ni Simone Kermes (Adelaide), soprano à l’intonation indécise et aux coloratures franchement indigestes, ne parviennent à convaincre. Sans la contribution précieuse (et flatteuse) d’artistes tels que Mingardo ou Prina, que serait devenu ce Lotario ? Une résurrection quelque peu négligeable. »

Crescendo – octobre/novembre 2004 – appréciation 8 / 10

« Présenté en décembre 1729 pour inaugurer la première saison de la Royal Academy of Music, l’opéra Lotario s’avéra être un échec. Il est dommage que la postérité n’ait retenu que cet aspect de l’oeuvre, elle a été pratiquement ignorée depuis lors. Grâce soit donc rendue à Alan Curtis qui poursuit avec elle son périple haendélien et l’a dirigée au Festival Haendel de Göttingen en cette année 2004. Des impératifs économiques l’ont obligé à pratiquer des coupures (l’oeuvre est trop courte pour trois CD et trop longue pour deux !) dans certains arias da capo dont la reprise de la première partie a été négligée. Mieux vaut cela que pas de Lotario, il mérite bien sa résurrection même s’il n’est pas un sommet. D’économie, il en est sans doute encore question en ce qui concerne l’effectif instrumental, quelques cordes supplémentaires n’auraient en effet pas été un luxe afin de mieux soutenir dans leurs intentions les deux grandes dames de la distribution, Simone Kermes et Sara Mingardo. On ne peut évoquer l’économie en ce qui les concerne. La première, Adélaïde, brille par son sens très présent du texte, une sûreté jamais prise en défaut même dans les vocalises les plus périlleuses et une voix qui garde sa substance dans tous les registres et nuances. La présence du Lotario de la seconde est tout aussi généreuse, elle s’exprime avec conviction en de magnifiques couleurs chaleureuses. Toutes deux nous offrent d’imaginatives reprises dans les arias et leur connivence dans le duetto « Si, bel sembiante » en fin de troisième acte en fait un régal. Sonia Prina est un peu légère pour le personnage dur, cruel et obstiné qu’est Matilde, l’intensité de son expression est plus limitée mais son chant très soigné. L’Idelberto de Hillary Summers nous convainc moins car doté d’une voix sombre et lyrique peu pertinente eu égard à la jeunesse du personnage. Du côté masculin, on apprécie la plénitude et l’engagement de Steve Davislim pour traduire l’ambition, puis les remords, de Berengario ainsi que les accents menaçants, ci et là un peu maladroits, du Clodomiro de Vito Priante. La direction attentive et vivante de Alan Curtis traduit une fois de plus sa familiarité et son affection pour l’oeuvre de Haendel. La renaissance de Lotario lui doit beaucoup. »

Classica/Répertoire – novembre 2004 – appréciation 8 / 10

« Lotario n’est certainement pas le meilleur opéra de Haendel, mais c’est en revanche une des meilleures gravures d’Alan Curtis pour Deutsche Harmonia Mundi. Le point fort en est ici la distribution. D’enregistrement en enregistrement, le chef parvient en effet à s’entourer de chanteurs toujours meilleurs ou, pour les plus fidèles d’entre eux, parvenus à une maturité artistique qui les rend aujourd’hui tout à fait intéressants. Ainsi en va-t-il de la merveilleuse Simone Kermes qui, de disque en disque, confirme qu’elle est une des toutes meilleures sopranos haendéliennes du moment, avec non seulement un timbre très séduisant, une technique tout à fait satisfaisante, mais aussi – et c’est ce qu’elle révèle ici dans le rôle pourtant un rien fade d’Adelaide – une vraie présence vocale. Les risques qu’elle prend en termes d’ornements et d’expressivité dans le virtuose « Scherza in mar la navicella », mais aussi la pureté de la ligne de chant qu’elle déploie dans l’élégiaque « Menti eterne », rendent son personnage tout à fait passionnant. Mais elle n’est pas la seule à imposer une telle personnalité. Pour une fois, tous les chanteurs sont en mesure d’offrir une voix et une interprétation hautement individualisées Ce qui n’était pas une mince affaire puisque l’oeuvre requiert trois altos nettement différenciés. C’est le cas fort heureusement avec la Matilde de Sonia Prina, l’Idelberto de Hilary Summers et le Lotario de Sara Mingardo. Sonia Prina ne délivre pas un timbre de toute beauté. Son chant est un peu raide et les passages poitrinés ne sont guère séduisants. Mais dans ce rôle de méchante perfide, aux airs le plus souvent heurtés et à la vocalise assassine, cela ne gêne guère. Hilary Summers offre dans un rôle d’amoureux transi un peu désincarné une voix ronde et ample qui n’est pas sans évoquer Ewa Podles Elle est magnifique dans « Bella, non minegar ». Quant à Sara Mingardo, elle présente toutes les qualités que l’on sait : timbre superbe, chaud et frémissant, avec quelque chose de tout à fait saisissant, douloureux et implorant, dans le registre le plus grave. Le style, toujours aussi impeccable, fait merveille dans « Non disperi peregrino ». On peut cependant se demander si le travesti convien idéalement à une voix aussi féminine. Steve Davislim est un Berengario à la voix ample, tendre et virile à la fois, pas toujours impeccable dans la vocalise (« Regno e grandezza ») et Vito Priante, une basse haendélienne impeccable, avec ce qu’il faut de tranchant, de graves et de vocalises. Alan Curtis a choisi d’opérer des coupes, resserrant les récitatifs et supprimant certains da capo afin que l’oeuvre puisse tenir sur deux disques. Conséquence ou non de ce travail de condensation, cette gravure donne sur la durée l’impression d’avoir plus de cohérence théâtrale, d’expressivité, et de vitalité que la plupart des réalisations haendélïennes du chef. Reste que, même avec une interprétation de cette qualité, l’oeuvre ne s’impose pas comme un jalon majeur de la production haendélienne : l’inventitivité musicale et la finesse psychologique ne sont pas aussi riches qu’à l’accoutumée. »

Diapason – novembre 2004 – appréciation 3 / 5

« Au moins à titre documentaire, un disque évidemment s’imposait…Pionnier en ce domaine puisqu’il fut le premier avec Jean-Claude Malgoire à enregistrer un opéra seria de Haendel sur instruments d’époque, le chef américain s’est éloigné deux décennies durant de cette lice cruelle, jusqu’à un « Rodrigo » en 1997, modeste mais précurseur. Depuis, Alan Curtis s’est lié d’amitié avec la soprano Simone Kermes et la romancière Donna Leon, grâce à qui progresse l’intégrale des opéras dont Nicholas McGegan rêva naguère. « Arminio » et « Deidamia » sont déjà passés ; les deux versions (!) de Radamisto arrivent ; Tolomeo et Rodelinda doivent suivre.

C’est peu dire que la lecture ici sent la hâte. L’orchestre, âcre et minuscule, connaît plusieurs tempos mais une seule expression. Le retrait de da capo et récitatifs nous incommoderait si le temps ne semblait déjà bien long. Et l’on s’en veut de languir ainsi. Car à maintes reprises le spectacle promet ; il ne fait aucun doute que le chef avance en terrain connu ; et son équipe lui fait honneur. Manque à Steve Davislim le caractère et la virtuosité de Berengano, Duc de Spolète ; mais ce baryténor au style ferme résiste vaillamment à un emploi difficile. En mère audacieuse, Sonia Prina fait valoir une couleur sombre et un verbe énergique. Androgyne à souhait, Hilary Sommers joue les nouilles avec indulgence ; et Sara Mingardo, toujours en quête de souffle et de relief, campe un Lotario d’une bonté, d’une noblesse idéales. Noblesse qui manquerait à Simone Kermes ; mais en peu d’occasions la soprano allemande nous gratifie de son fameux contre-mi (bémol, à 415 Hz) et de ses cadences loufoques alla Erna Sack. L’air final du I passe comme un charme, le personnage tient d’aplomb. Ne fait réellement défaut qu’un travail en profondeur, nécessaire à l’imperfection de Lotario plus encore qu’à la perfection de Rodelinda. Tout mélomane aurait pu rencontrer ce fragile inédit, seul le haendélien mordu en tirera profit. »

 Forum Opéra

« En 1729, Haendel s’acharne envers et contre tout à défendre l’opéra italien tel qu’iI a toujours été pratiqué. Fidèle à son tempérament, le bonhomme fonce. Il récupère l’Academy, mise à mal par la concurrence du Beggar’s Opera, se pose non seulement en compositeur mais aussi en entrepreneur, file en Italie assembler une nouvelle troupe, engage notamment un castrat sur le retour, Antonio Maria Bernacchi, et, sans se soucier de l’évolution des modes, revient présenter au public londonien son nouvel ouvrage intitulé Lotario parce que le véritable prénom du héros, Ottone, est déjà porté par l’une de ses oeuvres antérieures. Las, les chanteurs, Bernacchi en tête, déçoivent. Le livret, improbable histoire de reines et de rois aux ambitions et aux amours contrariées, ennuie. La plupart des arias sont jugées insipides. Le spectacle tombe au bout d’une dizaine de représentations. En mai 2004, soit 275 ans plus tard, Alan Curtis, armé de son Complesso Barocco, en récupère quelques bribes qu’il présente au festival Haendel de Göttingen. Dans la foulée, il enregistre intégralement l’oeuvre pour Deutsche Harmonia Mundi. Intégralement ? Pas tout à fait car Lotario, de manière contrariante, est trop court pour occuper trois CD mais trop long pour tenir sur deux. Il faut donc tailler allégrement dans les récitatifs, ce qui ne chagrinera que les puristes. Plus ennuyeux, quelques da capo passent à la trappe. L’ensemble reste malgré tout cohérent et constitue indubitablement la version de référence. Faute de mieux : il n’existe pas d’autres intégrales sur le marché.

On jettera donc pour le moins une oreille curieuse sur cet enregistrement. La première réaction sera de trouver sévère le jugement de la postérité. Confortablement installé sur une banquette de clavecin, on traversera évidemment plusieurs tunnels, mais les opéras baroques qui n’en comportent pas se comptent sur les doigts de la main. En chemin, on croisera de nombreux paysages dont la beauté incitera à faire ensuite plusieurs fois le voyage. Il serait fastidieux de les énumérer. Mais on ne pourra passer sous silence « D’una torbida sorgente » (CD 2, plage 6) que Renée Fleming n’hésita pas à inscrire au palmarès de son dernier récital et surtout le déchirant « Vi sento, si, vi sento » (CD 2, plage 16) dont les traits de hautbois traduisent à merveille ce remord qui lacère le coeur.

Evidemment, on déplorera que Lotario et ses amis n’aient pas trouvé meilleur avocat qu’Alan Curtis pour plaider leur cause. A serpenter ainsi dans la campagne, le petit train de l’orchestre prend trop souvent des allures de tortillard. Ce ne sont pas les teintes qu’il faut ici remettre en cause, mais le rythme que le chef américain ne parvient jamais à impulser. La machine devrait de temps en temps s’emballer pour donner plus de relief au décor.

La distribution aussi ne convainc pas totalement. L’ouvrage est exigeant. Il ne comporte que six rôles, mais n’en épargne aucun. Les arie di paragone fleurissent sur la chaussée, comme autant d’occasions pour les chanteurs d’étaler leur virtuosité. Malheureusement, Simone Kermes, à trop vouloir embrasser, mal étreint. Les acrobatiques « Non sempre invendicata » (CD 2, plage 14) et « Scherza in mar la navicella » (CD 1, plage 21) basculent dans la vulgarité et transforment la noble Adelaide en mégère. En faisant assaut d’ornements, la soprano, parfois imprécise, laisse aussi transparaître la verdeur d’une voix qui gagnerait à moins de débordements. « Quel cor che mi donasti » (CD 1, plage 14) et surtout « Menti eterne, che reggete de’mortali le vicende » (CD 1, plage 26), superbement recueilli, le confirment. Au deuxième acte, l’exploit mérite d’être noté, la comparaison avec Fleming joue cependant en sa faveur.

Vito Briante ne sort pas indemne non plus de sa confrontation avec Clodomiro. Il ne dispose que de trois airs pour dresser le portrait du versatile capitaine. Si « Non t’inganni la speranza » (CD 1, plage 28) est conduit avec le mordant qu’il convient, on s’étonne de ne pas trouver la même qualité dans la vocalisation de « Alza al ciel » (CD 2, plage 23). « Se il mar promette calma » (CD 1, plage 12) se positionne entre les deux, avec un timbre d’une belle autorité mais aussi certaines notes bruyamment expectorées qui laissent, au final, une impression mitigée.

L’un des points forts de cette production est de réunir trois voix de contraltos suffisamment différenciés pour qu’il n’existe pas de confusion entre elles. Sara Mingardo, toutefois, ne parait pas vraiment concernée. Son Lotario, techniquement irréprochable, a beau parcourir superbement la partition, il n’en manque pas moins de tempérament. Est-ce bien là le glorieux roi d’Allemagne, amoureux et vengeur ? « Gia mi sembra al carro avvinto » (CD 1, plage 16) se pare dans la reprise de fioritures guerrières pour essayer, en vain, de le faire croire. L’imploration de « Rammentati, cor moi » (CD 1, plage 10), la concentration de « Non disperi peregrino » (CD 2, plage 11) conviennent mieux à cette voix qui sait alors devenir brûlante.

Dans la famille Berengario, on prendra d’abord le fils. Le rôle de l’amoureux éconduit n’est jamais très valorisant. Haendel devait partager cette opinion, car la musique qu’il réserve à ce brave Idelberto n’est pas des plus inspirées. Seul émerge son dernier air, « S’e delitto trar da’ lacci un’innocente » (CD 2, plage 29). Hilary Summers déploie des trésors d’expression pour en dresser, malgré tout, un portrait éloquent.

A Matilde, la mère, échoit le rôle de la méchante de service, ce que sa première intervention, « Vanne a colei che adori » (CD 1, plage 6), ne laisse pas deviner. Elle trouve ensuite heureusement des airs à la mesure de sa cruauté : « Arma lo squardo » (CD 2, plage 2), hérissé de coloratures, ou « Impara cocardo » (CD 2, plage 27) qui sollicite les deux extrêmes de sa tessiture. Emission franche, couleur sombre, accents incisifs, Sonia Prina verse avec bonheur le poison dans la coupe.

Parmi les chanteurs qu’Haendel ramena d’Italie figurait en bonne place Annibale Pio Fabri alors au zénith de sa gloire. Le rôle de Berengario se ressent dans sa longueur et sa complexité de cette prestigieuse filiation. Steve Davislim assure plus qu’honorablement la succession. Il échoue certes à caractériser les impitoyables vocalises de « Regno e grandezza » (CD 1, plage 23) ou « D’instabile fortuna » (CD 2, plage 9) qui tiennent alors plus du gargarisme matinal que du chant. Mais ailleurs, l’intonation fraîche et lyrique, la clarté de la projection font merveille. Par son implication et sa sensibilité, il porte « Vi sento, si, vi sento », déjà mentionné plus haut, au sommet de l’enregistrement.

On prendra congé avec le vibrant duo « Si bel ambiante » (CD 2, plage 32) qui conclut l’opéra. Seul ensemble de la partition, si on ne prend pas en compte les deux interventions sans grand intérêt du choeur, il forme la meilleure des invitations à revenir partager les aventures de Lotario et d’Adelaide. Car même si elles n’offrent pas le meilleur produit du génie haendélien, elles n’en méritent pas moins le détour. «