CD Ercole amante (2007)

L’oeuvreLe compositeur

ERCOLE AMANTE / BALLET D’HERCULE AMOUREUX

COMPOSITEUR

Pier Francesco CAVALLI / Jean-Baptiste LULLY

LIBRETTISTE

Francesco Buti

 

ORCHESTRE Solistes et Choeur de la Simphonie du Marais
CHOEUR
DIRECTION Hugo Reyne

Françoise Masset
Céline Ricci
François-Nicolas Geslot
Florian Westphal

DATE D’ENREGISTREMENT 22 et 23 mars 2007
LIEU d’ENREGISTREMENT Sablé-sur-Sarthe – Centre Culturel Joël le Theule
ENREGISTREMENT EN CONCERT oui

EDITEUR Accord
DISTRIBUTION Universal
DATE DE PRODUCTION octobre 2007
NOMBRE DE DISQUES 1 (CD 2 du coffret Lully ou le Musicien du Soleil – volume IX – Musiques pour le mariage de Louis XIV) – extraits (*)
CATEGORIE DDD

(*) Ercole amante : Prologue, Choeur des Fleuves « O Gallia fortunata », Choeur des Planètes « Quel grand’eroe », duo Ercole e la Belleza « Cosi un giorno », Choeur des Planètes « Virtu che soffre »

Ballet d’Hercule amoureux : entrées I et II. Ballet des 7 Planètes : Ouverture, entrées IX à XVIII.

 

Critique de cet enregistrement dans :

Classique.news

« Hugo Reyne impose une sonorité opulente, ductile, riche et pleine, en conformité avec la musique éclatante et pompeuse voulue par le jeune Louis XIV. Le souci de la précision et le respect des réalités historiques conduisent chef et musiciens à éclairer certaines colorations plus intimes dans cette fresque grandiloquente des fastes royaux. Ainsi, dans le Jubilate Deo ou dans la conclusion du Ballet des 7 planètes, c’est un souverain nostalgique de ses aventureuses amoureuses passées, qui est allusivement suggéré (séparé de Marie Mancini). Le chef de la Simphonie du Marais ajoute également trois airs de la Paix, (deux de Lully, un de Lambert) qui célèbre le jeune souverain, « jeune et galant ». Le programme du cd1 souligne l’éclat de la musique royale voulue par un roi omnipotent et fastueux, à l’aube d’un règne spectaculaire par ses guerres et ses chantiers artistiques, nouvel Alexandre, qui l’année suivant son mariage, après le décès de Mazarin, prend le pouvoir (le 10 mars 1661). Une ascension politique à laquelle, répond celle tout aussi fracassante de Lully qui devient le 16 mai 1661, Surintendant de la musique de la chambre. Juvénilité et grandeur: deux qualités auxquelles les interprètes apportent tout leur engagement.

Le cd2 évoque l’initiative d’italianisation de la cour française, orchestrée non sans mal par Mazarin qui de son côté, pour commémorer le mariage du Roi à Paris, fait venir le plus grand compositeur d’opéra de l’heure, Francesco Cavalli pour donner un nouvel ouvrage, Ercole Amante (Hercule Amoureux): rien de mieux pour illustrer les noces du héros français. On sait que la greffe italienne ne prendra pas, mais c’est un italien francisé, intime du roi, Lulli devenu Lully qui concevra l’opéra royal rêvé par Louis XIV. La leçon de Cavalli et l’exemple de son Ercole, même s’il fut moins applaudi que les ballets de Lully, n’auront pas été inutiles. Il est même légitime de reconnaître à l’opéra cavallien son oeuvre fondatrice dans la conception de l’opéra à la française, quoiqu’en ait dit Lully a posteriori. Ercole ne fut pas donné en 1661 car la nouvelle salle des Tuileries commandée pour l’opéra, avec sa nouvelle machinerie, ne fut prête qu’en 1662. Entretemps Mazarin s’était éteint mais Louis XIV poursuivra l’oeuvre de son ministre pour sa propre gloire. Hugo Reyne retient le prologue et le final auxquels il ajoute les ballets de Lully dont surtout le ballet final de tout le spectacle, le ballet des 7 planètes dont le dernier tableau en pluie d’étoiles (15 jeunes beautés dont 12 issues de la noblesse) laissa un souvenir mémorable: déjà, l’opéra du roi consacrait le talent de la beauté dansante par ce vocable encore usité aujourd’hui d’étoile de la scène. Le ballet où participa le roi qui venait de créer l’académie royale de danse (mars 1661), y figurant selon la symbolique personnelle qu’il ne cessera de développer ensuite, la Maison de France, Mars, Pluton et surtout, le Soleil.

En associant à la succession des ballets comme des épisodes solennels, la voix d’un récitant qui déclame les témoignages d’époque et récapitule la chronologie des épisodes du Mariage proprement dit (Jean-Denis Monory), le programme restitue aux côtés de la force des évocations musicales, l’impact du verbe: le français déclamé étant inséparable du spectacle dansé à la française. On sait avec quel succès l’articulation et la projection spécifiques de la langue de Racine structureront la future tragédie lyrique Versaillaise. Les instrumentistes de la Simphonie du Marais qui souffle en 2007 ses 20 ans, témoignent d’une implication indiscutable: entre solennité, grandeur, ferveur (Jubilate Deo), langueurs cavaliennes, la vitalité des accents, le sens du rebond, donnent chair et corps à l’orchestre du Roi, tout entier dévolu à sa grandeur. Le programme ambitieux et reparquablement servi poursuit l’oeuvre de défrichement du répertoire du Grand Siècle, en particulier des oeuvres de Lully (« le musicien du Soleil », selon le titre de la collection ainsi constituée): il affirme la maîtrise actuelle d’Hugo Reyne et de ses troupes. »

 Le Monde de la Musique – novembre 2007 – appréciation 3 / 5

« Avec un constant souci didactique, Hugo Reyne entreprend une édition Lully qui vise autant à la découverte de la musique qu’à la connaissance de son environnement historique. Aussi ne se contente-t-il pas de feuilleter le catalogue établi par Herbert Schneider (LWV Lully Werke Verzeichnis) mais préfère réunir des oeuvres autour d’un programme.

Le neuvième volume de la collection « Lully le musicien du soleil » propose ainsi des musiques susceptibles d’avoir accompagné le mariage de Louis XIV et de l’Infante d’Espagne. Comme il ne reste pas de témoignage précis des pages entendues à Saint-Jean-.de-Luz en 166o, Hugo Reyne les a imaginées : le Ballet de Xerxès, des « airs de la Paix » puis le motet Jubilate Deo LWV 77/16 pour le retour de la cour à Paris, à quoi succéda en 1662 la fastueuse représentation aux palais des Tui­ leries d’Ercole amante (« Hercule amoureux »), opéra de Francesco Cavalli, ponctué d’entrées de ballet spécialement composées par Lully. Le roi, qui dansait encore, incarnait le Soleil qu’il venait d’adopter comme emblème.

Le premier disque réunit les musiques de circonstance, le second des extraits de l’opéra et de son ballet. Des textes, issus de diverses correspondances et Mémoires d’époque et déclamés par Jean-Denis Monory en français « restitué », assurent la transition entre les plages et balisent la chronologie.

Comme à l’accoutumée, La Simphonie du Marais évolue avec aisance dans un environnement qui lui est familier : l’homogénéité des pupitres, la spontanéité des phrasés en attestent. Les chanteurs ne peuvent en revanche pas toujours prétendre au même pouvoir de séduction malgré une diction soignée (et « moderne »). La relative sécheresse de la prise de son (ou de l’acoustique) n’apporte pas, il est vrai, un soutien généreux. »

 Diapason – novembre 2007 – appréciation 5 / 5

« Un projet passionnant, comprenant plusieurs inédits au disque. Les noces de Louis XIV et de Marie­Thérèse d’Autriche furent célébrées le 9 juin 1660 à Saint-Jean-de-Luz. Les musiques exécutées pour l’occasion ne sont pas connues. En revanche, pour célébrer le retour triomphal du couple royal à Paris, à la fin de l’été, Lully composa un grand motet de réjouissance (Jubilate Deo) et un Air de la Paix sur des vers de Pierre Corneille. Ces pièces rares, accompagnées de deux ballets contemporains, sont supérieurement interprétées par La Simphonie du Marais, dont la familiarité avec le style lulliste transparaît à chaque instant (élégance du phrasé, chatoiement des couleurs, intelligence de la déclamation). Des récits empruntés à des chroniques de l’époque, déclamés à l’ancienne par Jean-Denis Monory, soulignent le caractère didactique de cette réalisation.

Un opéra italien avait été commandé àFrancesco Cavalli pour les festivités parisiennes commémorant les noces. Cependant, le deuil causé parla mort de Mazarin a repoussé sa création jusqu’en février 1662. Ercole amante (Hercule amante fit alors l’objet d’une violente cabale née par le parti anti-italien et par Lully, qui avait composé les ballet ornant la tragédie. De plus, l’acoustique du théâtre était déplorable, les machineries bruyantes, et le public toléra difficilement ce spectacle hybride et long, chanté une langue honnie depuis la Fronde.

Pour évoquer ces représentations houleuses, Hugo Reyno a choisi de faire entendre le prologue et le finale de l’opéra, agrémentée de leurs ballets. Cette confrontation Cavalli-Lully avait été restituée pour la première fois en 2006, dans la très discutable production scénique d’Ercole amante par l’Académie d’Ambronay, sous la direction de Gabriel Garrido. La rstitution musicale de Hugo Reyne est d’une rigueur et d’une qualité sans comparaison, même si elle pas sans défaut. L’interprétation orchestrale des ballets est admirable, d’une parfaite cohésion et surtout d’une grande pertinence du sentiment chorégraphique. En revanche, les épisodes italiens sont souvent décevants, même en regard de l’antique et unique version de l’opéra enregistrée par Michel Corboz en 1980 (Erato). On déplorera en particulier la justesse hasardeuse des choeurs (redoutable « O Gallia fortunata » et la dureté des récits de soprano. En somme, on éprouve combien la musique de cet Ercole peut, comme il ya trois siècles et demi, sembler une langue étrangère pour les musiciens français actuels. »