DVD King Arthur (direction Nikolaus Harnoncourt)

COMPOSITEUR Henry PURCELL
LIBRETTISTE John Dryden
ORCHESTRE Konzertvereinigung Wiener Staatsopernchor – Concentus Musicus Wien
CHOEUR
DIRECTION Nikolaus Harnoncourt
MISE EN SCÈNE Jürgen Flimm
DÉCORS Klaus Kretschme
COSTUMES Birgit Hutter
CHORÉGRAPHIE Catharina Lühr
LUMIÈRES Manfred Voss

 

Isabel Rey soprano
Barbara Bonney soprano
Birgit Remmert alto
Michael Schade ténor
Oliver Widmer basse

 

DATE D’ENREGISTREMENT 24-28 juillet 2004
LIEU D’ENREGISTREMENT Felsenreitschule Salzburg – Salzburger Festspiele

 

EDITEUR EuroArts
DISTRIBUTION Intégral
DATE DE PRODUCTION 29 août 2005
NOMBRE DE DISQUES 2
FORMAT Pal 16 /9 – Son PCN Stéréo / Dolby Digital 5.1 / DTS 5.1
DISPONIBILITE Toutes zones
SOUS-TITRES EN FRANCAIS oui

 

 

Critique de cet enregistrement dans :

Diapason – février 2006 – appréciation 2 / 5

« Gentleman-farmer contrarié par la guerre, Arthur décapsulera-t-il sa cannette aussi adroitement que cette racaille d’Oswald ? Vous le saurez en admirant ce reflet d’un spectacle présenté au Festival de Salzbourg en 2004. Un nom n’apparaît nulle part sur la jaquette, celui de John Dryden. C’est pourtant bien son drame en cinq actes, ici traduit on allemand et adapté avec une finesse khaulossale qui occupe la moitié de ces trois longues heures. Drame transposé plus ou moins dans les années, on ne saurait dire, 1900, 1950, 2000. Tout y est : vidéorama, sofa labial, teintures trash, dérision, mise en abyme, casques verts où ça cogne, pingouins et bonnets de laine où ça gèle, dans un désordre savamment contrôlé par Jürgen Flimm, prochain directeur du festival. On se demande où se cache Dryden parmi ces clichés tour à tour guillerets et ridicules, mais la fantaisie a de la gueule.Celui qu’on ne trouve nulle part, c’est Purcell. Car si les acteurs flamboient, les chanteurs naviguent, en anglais, assez loin du ton (Bonney, Schade en panne de diapason, Widmer contraint d’octavier), toujours à cent lieues d’une mélodie ou d’un début de style. Choeurs bâclés, air du froid massacré, sirènes sans grâce, “ Fairest Isle “ aux forceps, passacaille à la hache… on attend avec impatience le prochain dialogue. Ouant à l’orchestre, à force d’écraser ses archets sur les temps forts comme des massues sur un crâne welche, la “ plus belle des îles “ le recrutera plutôt pour son régiment que pour ses théâtres.Tandis que Bretons et Saxons s’embrochent, l’elfe Philidel traqué par l’affreux Grimbald saute dans l’orchestre : « Alice ! » (Alice Harnoncourt, toujours là, fidèle au poste à côté d’Erich Höbarth “ Alice ! A l’aide ! Maestro sauvez-moi ! Jouez, je ne sais pas, Schubert, ou Schumann, ou Verdi, ou Monteverdi, ou Offenbach, ou Tchaïkovski. Vous devez bien savoir jouer quelque chose Nono, Ruzicka, Lachenmann… Stockhausen “ Et même pas ! »

 

Opéra Magazine – janvier 2006 – appréciation 2 / 5

« Ouvrage hybride constitué d’une pièce de théâtre et de sept tableaux musicaux, King Arthur ne se laisse pas facilement cataloguer. L’intrigue, principalement centrée sur des épisodes de la vie du roi Arthur, se déroule au travers de tableaux parlés ; la musique, quant à elle, se charge d’illustrer les scènes allégoriques. Pourtant, aucun des deux genres représentés — théâtre et opéra — ne peut se départir réellement l’un de l’autre, la danse occupant en plus une place non négligeable.Nikolaus Harnoncourt et Jürgen Flimm ont souhaité exacerber la dimension protéiforme de ce type de spectacle. Il est sûr que l’histoire, avec ses personnages multiples et exotiques, se prête facilement à des découpages façon comédie musicale. Mais si l’idée se défend, la réalisation, elle, déçoit par son manque d’unité, de rythme et de réelle imagination. À grand renfort de moyens — nous sommes au Festival de Salzbourg en 2004, dans le Manège des rochers —,tout semble ici viser l’effet, le coup d’éclat. Entre les éternelles projections vidéo, les accessoires high-tech, les costumes bariolés, les pantalonnades pour grands enfants, on reste à l’arrivée très loin du compte, la partie théâtrale — traduite pour l’occasion en allemand — n’échappant pas, elle non plus, à l’emphase.Il reste des chanteurs aguerris, lesquels ne sont pourtant pas au meilleur d’eux-mêmes, affairés dans ce curieux méli-mélo sonore et visuel. Coincé dans la vaste percée ovale qui lui sert de fosse, le Concentus Musicus se contente de répondre sagement aux indications de son chef. Entre des partis pris métronomiques étranges et une justesse approximative des pupitres de bois, Harnoncourt semble absent, malgré ses mimiques de clown, son bonnet multicolore et son oeil exorbité. On s’ennuie ferme. »

 

Classica / Répertoire – décembre 2005 – appréciation 8 / 10

« Vareuses de l’aimée britannique, cheveux à la Nigel Kennedy, costumes violemment pop et steetwar, abus de bleu Klein, de vert pelouse, de rouge sang et de néons fluo, ajoutez l’agressivité des projections vidéo et trois paires de seins à l’air : pendant les dix premières minutes de ce King Arthur cru Salzbourg 2004, on craint le pire. Mais on a tort : la vision de Jürgen Flimm allie le moderne et le baroque dans un tourbillon d’idées inattendues et jamais gratuites, dont les caméras de Hannes Rossacher ont d’ailleurs du mal à suivre les débordements incessants. Le théâtre de Dryden, traduit et donné en allemand (ce qui n’est pas le cas pour le chant, en anglais) est servi par une palette d’acteurs tous remarquables, du Philidel déchaîné d’Alexandra Henkel au Merlin lunatique de Chrispshe Bantzer. Les Saxons, dans la langue do Goethe, sont gutturaux à souhait et les Bretons ont cette morgue amusée des Anglais de l’ancien temps. L’aveugle Emeline de Sylvie Rohrer est une héroïne étrange et émouvante, le roi Arthur de Michael Maertens un snob des plus sympathique. Même Harnoncourt est mis à contribution dans la salle circulaire du Felsenreitschule, un édifiœ par ailleurs contemporain de l’oeuvre de Purcell. Le Concentus Musicus, placé au centre du dispositif scénique, joue avec une vigueur bien appariée au spectacle.Quant aux solistes vocaux qui doublent les acteurs, ils s’amusent autant qu’ils séduisent : Barbara Bonney est impeccable et Michael Schade royal. Seules Birgit Remmert et Isabel Rey déparent parfois, mais œ sont de petits riens dans ce grand capharnaüm pop lequel, à aucun moment, n’escroque une intrigue entre farce Ita­lienne et roman de chevalerie. Bien au contraire : il rajoute du piquant à cet enchaînement a priori daté de sacrifices païens, de plaintes et de bergeries. Et l’on se surprend vite à répéter de sa téléconmande, quelques moments de grâce comme la chaconne lascive ou les effets vidéo éclairant le théâtre du champ de bataille, d’un usage perspicace sans jamais être lourd comme il peut souvent l’être, par exemple chez la Sellars de El Niño. Un tel désir de revoyure, dans le déroulement d’un DVD, marque la réussite de ce spectacle houleusement accueilli à se création. On avait tort. »

 

ResMusica

« Fantastique évènement DVD que ce King Arthur de Purcell, représenté lors de l’édition 2004 du Festival de Salzbourg, dans la grandiose salle baroque du Felsenreitenschule construite en 1693, deux ans après la création du chef-d’œuvre de Purcell, au Dorset Garden de Londres. King Arthur est le premier des « masques » composés par Purcell, en collaboration avec John Dryden, un genre tout à fait original et propre à l’activité musicale et artistique de l’Angleterre de la fin du XVIIe siècle, qui mêle à la fois théâtre, danse et musique. Il ne s’agit donc pas d’un opéra ; l’intrigue principale, l’action dramatique se déroule dans les scènes parlées. La musique, elle, outre l’ouverture introductive, les interludes et les danses se charge de traiter principalement les scènes allégoriques, sous la forme de tableaux musicaux ; inventive et délicieusement inspirée, surtout dans les chants et les chœurs, elle semble révéler le sens plus profond de l’action théâtrale. L’œuvre dans son ensemble est construite autour d’une histoire d’amour ; Arthur, roi des Bretons, est épris d’Emmeline, la belle aveugle. Mais la même Emmeline est convoitée par Oswald, le roi des Saxons… L’histoire d’amour forme donc le noyau central de l’œuvre, mais la rivalité qu’elle provoque symbolise surtout la lutte entre les Anglais et les Saxons, et par-là même toutes les différences qui les opposent. La bestialité, l’archaïsme, le caractère guerrier, sauvage et barbare des Saxons fait nettement contraste avec le civisme et l’élégance nettement plus marquée des Bretons. La magie et la divinité sont aussi largement présentes dans l’intrigue, personnifiées par divers esprits, dont le célèbre enchanteur Merlin… Cette adaptation de King Arthur au festival de Salzbourg 2004 est un véritable festin pour les yeux comme pour les oreilles. Ce qui surprend d’abord c’est la modernité frappante de la mise en scène, les innombrables anachronismes, mais également le jeu très expressif, très libre des acteurs et des chanteurs. Plus surprenant et plus audacieux encore sans doute, les chorégraphies parfois inspirées des comédies musicales d’aujourd’hui ! Les puristes crieront sans doute fort au scandale face à toutes ces prises de liberté, et s’arracheront à coup sûr les cheveux lorsque au finale de l’acte V le ténor Michael Schade s’empare du micro et se transforme en super rock-star pour chanter « Your hay it is mow’d », glissant des genoux sur la scène et conviant le public à reprendre en chœur le refrain, le tout avec le renfort des percussionnistes du Concentus Musicus dirigé par Nikolaus Harnoncourt… Ce dernier participant d’ailleurs lui-même comme acteur dans l’intrigue ; ainsi se fait-il interpeller par Merlin qui descend des cieux sur sa planche à voile, ou par les esprits Philidel et Grimbald qui lui supplient de jouer du Schubert, du Tchaïkovski ou du Stockhausen, se promenant entre les musiciens… Tous les musiciens portent des bonnets en laine lors de la scène du froid, où surgissent par ailleurs des pingouins dont un se laisse glisser sur la banquise, tous entonnant la mâchoire tremblante le fameux chœur du froid. Il faut aussi faire remarquer que l’orchestre est disposé dans une sorte de cavité au centre même de la scène, et se retrouvent donc fréquemment au milieu de l’action dramatique. Rappelons aussi contre les traditionalistes d’aujourd’hui, qu’à l’époque des masques à la fin du XVIIe siècle, le public londonien était friand des effets scéniques exagérés et des surprises. On insistait beaucoup sur l’aspect visuel et spectaculaire de l’action. Pour Nikolaus Harnoncourt, ce King Arthur fait figure de « première comédie musicale de l’histoire ». Et il est évident que c’est ce que le chef autrichien a voulu faire ressortir dans cette production à laquelle il a d’ailleurs largement participé. Une chose est sûre, c’est que l’on ne s’ennuie pas tout au long de ce « spectacle » avec musique, danse et théâtre, bourré d’humour, de surprises, d’audace et de provocation … »

 

Anaclase.com

« Eté 2004, pour la première fois dans l’histoire du festival de Salzbourg, un opéra de Henry Purcell est joué dans le cadre de la célèbre manifestation. La direction n’a pas donné dans la demie mesure : une dizaine de représentations et une affiche prestigieuse : Nikolaus Harnoncourt, Barbara Bonney, Michael Schade… King Arthur, sur un livret de John Dryden, est toujours une partition problématique à cheval entre l’opéra et la musique de scène. Dans cette « première comédie musicale de l’histoire », selon Nikolaus Harnoncourt, la musique ne traite que les scènes allégoriques, alors que l’intrigue est contée par des dialogues parlés. Les chanteurs ne sont pas exclusivement dévoués à un rôle mais incarnent tour à tour des dieux, des bergers, des nymphes. Adaptée au goût particulier du public anglais de la fin du XVIIe siècle, l’œuvre mélange humour, dérision, émotion, alors que les effets se veulent spectaculaires et grandiloquents. Lors de la première, John Dryden aurait fourni aux comédiens des éponges gorgées de sang pour rendre les scènes de bataille plus réalistes !L’actuelle production, mise en scène par Jürgen Flimm, futur directeur du festival de Salzbourg, pose de nombreuses questions. Espérant faciliter la compréhension du public, le texte original de Dryden a été retravaillé en profondeur et traduit en allemand. Les dialogues sont donc parlés dans cette langue tandis que la musique est chantée en anglais ! Mais pour en rajouter dans la farce à l’autrichienne, le metteur en scène ne recule devant aucune facilité : « How happy the lovers » a été placé en fin de spectacle, histoire d’affirmer le côté grand opéra de la chose. La machinerie baroque est évidemment actualisée : le magicien Merlin se déplace en planche à voile… Les costumes visent forcément à stéréotyper : l’Anglais Arthur est vêtu de grotesques vestes en tweed et le saxon Oswald chausse des bottes de cuir et porte une culotte de cheval, bien entendu ! La direction d’acteur vise uniquement à amuser, si bien qu’encore acceptable dans les Actes 1 et 2, elle devient proprement insupportable dans les trois suivants, à l’image du célèbre air du génie du froid où baryton et choristes se trémoussent dans d’immondes costumes de pingouins. Le sommet du ridicule est atteint quand Merlin travesti en épouse réactionnaire de banquier allemand vient haranguer le public, coutume certes fréquente dans Fledermaus mais inopportune ici. D’autant que le discours est d’une épouvantable complaisance vis à vis des goûts de la majorité du public : ainsi la foule applaudit-elle quand Merlin se plaint de l’absence d’une navette d’hélicoptères pour desservir le palais des festivals ! Dans la fosse, Nikolaus Harnoncourt s’est passablement embourgeoisé. Son Concentus Musicus est toujours aussi affûté, mais la direction du chef manque de punch, de légèreté et de second degré. Les chanteurs sont carrément hors propos, si l’on attend un chant fidèle à l’esprit de l’œuvre. Barbara Bonney, courte en projection, semble chanter Strauss. Michael Schade, qui paye extrêmement de sa personne dans ce spectacle, est très musical, mais on à l’impression que Tamino s’est égaré chez Purcell. Mention passable pour Birgit Remmert, Isabel Rey et Oliver Widmer. Le Chœur de l’Opéra de Vienne est le seul à se sortir honorablement de ce bien décevant spectacle qui ne peut que nous interpeller sur le niveau de ce qui fut la Mecque de la musique. «