CD Dardanus (2005)

L’oeuvreLe compositeur

DARDANUS

COMPOSITEUR

Jean-Philippe RAMEAU

LIBRETTISTE

Charles-Antoine Le Clerc de la Bruyère

 

ORCHESTRE Orchestra of the Antipodes
CHOEUR

Cantillation

DIRECTION Anthony Walker

Vénus Penelope Mills
Teucer Stephen Bennett
Iphise Kathryn McCusker
Dardanus Paul Agnew
Anthénor Paul Whelan
Isménor Damian Whiteley
Première Phrygienne, un Songe Miriam Allan
Une Phrygienne Anna Fraser
Un Phrygien David Greco
Un Songe Dan Walker
Un Songe Corin Bone

DATE D’ENREGISTREMENT 30 novembre, 3, 4 et 5 décembre 2005
LIEU D’ENREGISTREMENT Sydney – City Recital – Hall Angel Place
ENREGISTREMENT EN CONCERT oui

EDITEUR ABC Classics
DISTRIBUTION Codaex
DATE DE PRODUCTION 29 janvier 2007 (Australie) – 12 mars 2009 (France)
NOMBRE DE DISQUES 2
CATEGORIE DDD

  

version de 1739

Critique de cet enregistrement dans :

 Diapason – mai 2009 – appréciation 2 / 5 – technique 7 / 10

« Le Pinchgut Opera de Sidney se consacre à la défense de l’opéra des XVIIe et XVIIIe siècles aux antipodes. En 2005, c’était la création australienne de Dardanus, captée sur le vif dans la version de 1737 augmentée des joyaux de 1744 (le Bruit de guerre et le monologue de la prison). C’était déja le choix de Marc Minkowski (Archiv, 2000), sauf qu’Antony Walker a écarté le somptueux Prologue et divers numéros dans les divertissements ; il conserve en revanche l’intégralité des scènes entre Antenor et Dardanus.

D’une énergie constante, cet enregistrement est marqué par la tension scénique, à l’image de Tambourins au jarret et au talon conquérants. Malheureusement, cette manière de veiller jalousement à la pulsation se révèle vite uniforme, univoque. L’orchestre manque – comme le choeur – de raffinement et de virtuosité. Phrases raidies (III, 1), bassons parfois triviaux, continuo pesant au-dela du raisonnnable (II, 2), sécheresse globale qui tue tout mystère dans la scène des songes ou dans la « solitude » d’Ismenor.

Ce rô1e est du reste torpillé par une basse scabreuse et fausse, la plus pénible d’une troupe qui comprend un Teucer rustaud et un Antenor malaisé. Verbe incertain chez tous les trois, ce qui n’est pas le cas d’une Iphise soignée, presente, mais qui pâtit d’une voix victorienne et sans charme. Vénus en a moins encore, mais elle ne fait que passer. Paul Agnew n’a pas de mal des lors à se détacher, et d’abord par sa déclamation caractéristique : Dardanus dramatique, torturé, c’est-à-dire aussi affecté. L’ariette de la gloire le montre en peril, tandis que « Lieux funestes » reste fort beau, de coloris et de sentiment. Mais comment rivaliser avec le Dardanus de Minkowski, magnifiquement distribué jusque dans les plus petits rôles, un des fleurons de la tragédie lyrique enregistrée ? « 

 Qobuz

« Cette version live venue d’Australie est la troisième disponible de Dardanus. En 1998 Minkowski offrait la plus fidèle aux représentations de 1739, prologue inclus. Témoignage de sa période survitaminée, elle pèche par excès de contrastes. Elle effaçait celle de Raymond Leppard (1980), vieillie, faisant suite aux productions de Lavelli pour l’Opéra Garnier.

Dardanus, tragédie guerrière et magique, ne captive guère les maisons d’opéra. Sauf à Sidney : voyez le travail fervent du Pinchgut Opera (www.pinchgutopera.com) à l’origine de cette édition. De notables différences concernent l’établissement du texte. Ici pas de prologue, des danses manquent au divertissement de l’acte III et aux songes du IV. Mais leur intégralité était aussi omise chez Minkowski, qui devait tenir son Dardanus en deux CD.

La mise en scène moderne dont cette nouvelle version est l’écho en a gommé le rococo. Plus soucieuse de tragique que d’esthétique, on y entend des séquences omises par Minkowski, comme le duo Anténor-Dardanus (III4) ou l’air d’Anténor (« Arrache-moi le jour », IV5). Dans le rôle-titre Paul Agnew est magistral de tendresse et de clarté. Les rôles masculins ont la diction honnête, dont Paul Whelan en rival racé de Dardanus. L’Iphise de Kathryn MacCusker a le français approximatif et la voix mal posée. Un choeur sans reproche et un orchestre puissant apportent les nuances demandées par Anthony Walker : martiales dans le premier acte, enflammées dans le troisième (« Paix favorable, paix admirable » déclenche une réécoute enthousiaste). L’acte de la prison est bien mené côté harmonie (basson, jeux des flûtes).

Sidney livre donc un Dardanus moins décoratif, mais complémentaire à la version de 1998 et qu’on aurait tort de dédaigner. »

 Opéra Magazine – juin 2009 – appréciation 3 / 5

« Enregistré en 2005 dans le cadre de représentations données au Pinchgut Opera de Sydney, ce Dardonus ne bouleverse en rien une svelte discographie, dominée à ce jour par la superbe gravure de Marc Minkowski (Archiv). Sans nécessairement démériter, les forces réunies autour du chef australien Antony Walker affichent très tôt de cruelles limites en termes d’éloquence linguistique, Malgré un chant éduqué, parfois même capiteux, dévoilant au passage de possibles affinités avec la musique de Rameau, l’improbable élocution de la plupart des chanteurs demeure trop souvent rébarbative. Du coup, l’expression dramaturgique en prend un sale coup : les mots de La Bruère se teintent d’un exotisme pour le moins curieux sur cette mouture sans Prologue, alliant les versions de 1739 et 1744. Et, en dépit d’une vivacité orchestrale significative, l’interprétation se barricade pour le meilleur et pour le pire dans le décoratif, peinant à soutenir le drame.

La présence de Paul Agnew dans le rôle éponyme n’est ici qu’un très mince atout. La diction du ténor britannique se montre toujours remarquable, mais la voix semble en posture délicate sur les registres extrêmes (son « Lieux funestes » ouvrant l’acte IV en offre une illustration patente). Le reste de la distribution alterne des profils vocaux d’intérêt divers. Stephen Bennett Paul Whelan et Damian Whiteley se confondent par leur manque de caractère, et ce malgré des voix graves plutôt bien charpentées (le couplet « Par des n’uds solennels, Mânes plaintifs, tristes victimes ! », à l’acte I, souffre d’une vraie linéarité). Kathryn McCusker use et abuse d’une voix vacillante pour simuler l’effroi en Iphise, ce qui n’est pas franchement du meilleur effet : pénible « Ô jour affreux ! » (acte III, scène 1). Penelope Mills et Miriam Allan sont toutefois les plus incertaines : insondable « Venez, Songes flatteurs » à l’acte IV pour la première, incompréhensible « Volez, Plaisirs, volez » à l’acte III pour la seconde.

En contrepoint le choeur Cantillation se résout à une prestation tonitruante, parfois même assez rustre. Reste une direction musicale pleine d’énergie dont on ne peut, en définitive, que louer les efforts pour faire rayonner le génie de Rameau dans des contrées aussi lointaines. »