Il Coriolano (Coriolan)

Il Coriolano - livret - 1669

COMPOSITEUR Francesco CAVALLI
LIBRETTISTE Cristoforo Ivanovich

 

Dramma, sur un livret de Cristoforo Ivanovich (*), représenté au Teatro Ducale de Plaisance, le 27 mai 1669.

(*) Cristoforo Ivanovich, né en 1620 à Budua, en Albanie vénitienne, actuellement Budva au Montenegro. Il arrive à Vroneen 1665, puis passe à Venise en 1657. Il y devient secrétaire de Leonardo Pesaro, procurateur de Saint-Marc. En 1676, il devient chanoine de la basilique Saint-Marc. Il meurt en 1689. Son ouvrage « Il tavolino di Minerva », Venise, 1681, regroupe des lettres, des essais et de la poésie, en italien et en latin, et se termine par des « Memorie teatrali di Venezia », recensant (avec un certain nombre d’erreurs) tous les ouvrages qui ont été représentés dans les différents théâtres de Venise entre 1637 et 1680.

Cristoforo Ivanovich

La musique de Cavalli est perdue.

Une copie du livret, publiée par l’imprimerie ducale de Giovanni Bazachi, à Plaisance, est conservée à la Biblioteca Nazionale Braidense de Milan. Elle comporte une double dédicace All’altezze Serenissime di Ranuccio 2. Farnese, e di Maria, Principessa D’este, Duchi di Piacenza, e Parma (*), sous la forme d’une Ode adressée A sua Altezza Serenissima, et d’un Sonnet adressé A loro Altezze Serenissime, d’un Argomento, d’une liste des Personnagi nel Prologo et nel Drama, d’une liste des Musici, et d’une liste des Scene (décors)

(*) Ranuce II Farnese (1630 – 1694), sixième duc de Parme et Plaisance, septième duc de Castro. Marie d’Este (1644 – 1684) était sa troisième épouse, la précédente étant sa propre soeur, Isabelle d’Este, morte en 1666.

Intitulé du frontispice : Il Coriolano. Drama rappresentato nel Teatro Ducale di Piacenza, l’anno 1669… Poesia et opera del dottor Christoforo Ivanovich, posta in musica dal sig. Francesco Caualli maestro di capella in San Marco di Venetia. Piacenza, nella stampa Ducale di Gio. Bazachi

 

Personnages :

Prologue : Eridano (Eridan), Coro di Ninfe (choeur des Nymphes), Lucina (Lucine), Imeneo (Hyménée), Zeffiretti (Zéphyrs).

Caio Martio Coriolano (Caius Marcius Coriolan) ; Silenio (Silénius) et Titurio (Titurius), capitaines volsques ; Sesto Furio (Sextus Furius), consul de Rome ; Appio Claudio (Appius Claudius), sénateur crû père de Vitellio ; Vitellio (Vitellius) et Emiliano (Emilianus), capitaines romains ; Martia, fille de Publicola, amante de Vitellio ; Volumnia (Volumnie), épouse de Coriolano ; Emilia (Emilie), enfant, fille de Coriolano ; Vetturia (Vetturie), mère de Coriolano ; Momerco (Momercus), écuyer de Martia. Choeurs des Pages de Coriolano, des Pages de Sesto Furio, des Guerriers des capitaines volsques, des Guerriers des capitaines romains, des Demoiselles romaines de Vetturia.
La distribution réunissait : Giovan Battista Pizzala (Caio Martio Coriolano) ; D. Giorgio Martinelli (Silenio) ; Sebastiano Cioni (Triturio) ; Antonio Formenti (Sesto Furio) ; Carlo Andrea Clerici (Appio Claudio) ; Carlo Antonio Riccardi (Vitellio) ; Alessandro Bifolchi (Emilio) ; Antonia Coresi (Martia) ; Anna Caterina Bertini (Volumnia) ; Caterina Forti d’anni dieci (Emilia) ; Filippo Bombaglia detti il Monello (Vetturia) ; Tomaso Bovio (Momerco)

Le livret mentionne Gasparo Mauro comme Ingegniere del Teatro, Ippolito Mazzarini, Antonio Fumiani, et Domenico Mauro comme Pittori (peintres), Oratio Franchi comme Inventore degli Habiti (costumes), et Giulio Cesare Crivelli comme Maestro de’ Balli.

 

Le livret fait référence à Cneius Marcius Coriolanus, héros de la lutte de Rome contre les Volsques entre 488 et 486 av. J-C. Général romain, il s’empara de la ville volsque de Corioli. Il attira la haine du peuple et fut banni, l’obligeant à se réfugier chez les Volsques, avec lesquels il vint assiéger Rome. Sa mère Vetturia et son épouse Volumnia le convainquirent de lever le siège.

Argument

Après qu’eut été rejeté le joug tyrannique des orgueilleux Tarquins, la liberté romaine aspirait à un gouvernement paisible. Un des patriciens les plus en vue était Caius Martius, qui, pour avoir tué le dernier des Tarquins, obtint, le premier à Rome, la récompense de la couronne de chêne. Pour avoir conquis Corioles, cité des Volsques, il s’acquit le glorieux surnom de Coriolan. Il fut toujours ennemi de la plèbe, qui, avec une insolente obstination, refusait de se soumettre au Sénat. Cette même plèbe, qui conspirait pour le faire mourir, en fut empêchée par le sénateur Appius Claudius ; mais Coriolan fut envoyé en exil perpétuel.

Par désir de vengeance, il s’allia aux Volsques, ses anciens ennemis, qui firent de lui leur général ; victorieux et redoutable, il entreprit d’assiéger Rome et installa son camp aux Fosses Cléliennes, qui en sont peu éloignées. Le dessein de Coriolan était glorieux : il voulait, avec les armes des ennemis eux-mêmes, établir la supériorité absolue du patriciat sur l’insolence de la plèbe. Il se montra donc sourd à toutes les prières qui demandaient la paix, et n’accorda celle-ci qu’aux instances de sa mère Vetturie, comme l’écrit Plutarque dans sa vie de Caius Martius Coriolan.

Les éléments suivants, quoique vraisemblables, sont inventés :

Pour enrayer les progrès du siège conduit par Coriolan, les Romains organisent une sortie confiée aux capitaines Vitellius et Émilius.

Une fois Vitellius parti, Martia, fille de Publicola, poussée par l’amour, le suit en habit guerrier ; tous deux se retrouvent prisonniers de Coriolan.

Émilius, apprenant la capture de Marcia, se déguise en Volsque et, avec Momercus, écuyer de Marcia, il pénètre dans le camp ennemi pour la libérer.

Volumnie, épouse de Coriolan, vêtue en paysanne, se rend dans le camp des Volsques pour y retrouver son mari ; mais, arrivée aux tentes, elle tombe sur Titurius, un des capitaines ennemis qui, séduit par sa beauté, au lieu de la conduire à Coriolan comme elle le demandait, l’emmène ailleurs, sans la reconnaître.

De là naissent les intrigues qui, unies aux faits historiques, conduisent le drame à une fin aussi joyeuse que glorieuse.

L’action commence au temple de Castor et Pollux avec les spectacles qui eurent lieu au temps du siège.

La scène se situe à Rome et aux Fosses Cléliennes (*).

(*) il s’agit de fossés creusés pour drainer une zone marécageuse, à dix milles de Rome.

 

Synopsis (*)

Prologue

Le mont Vésulus, contigu aux Alpes.

L’Éridan, c’est-à-dire le Pô, et ses nymphes, présentent leurs hommages au duc de Parme et Plaisance Ranuce II Farnèse. Lucine, déesse des accouchements, et Hyménée, dieu du mariage, descendent d’un nuage, pour assister avec Éridan à la représentation à Plaisance (Piacenza) de Coriolano, spectacle offert au duc par ses sujets. Ils souhaitent un avenir glorieux à son fils Odoardo II, né trois ans plus tôt, et célèbrent le récent mariage de Ranuce avec Maria d’Este (sœur de la défunte Isabelle d’Este, mère d’Odoardo).

Acte I

Forum du peuple romain. Le temple majestueux de Castor et Pollux

Sc. I : cérémonie en l’honneur de Castor et Pollux, pour demander que Rome soit toujours victorieuse.

Sc. II : Vitellius et Émilius protègent contre les insultes de la plèbe Vetturie et Émilie, respectivement mère et fille de Coriolan, que les Romains se préparent à combattre. Le consul Sextus assure à son tour leur protection, puis envoie les deux jeunes homme vers Tusculum, en manœuvre de diversion.

Sc. III : Vitellius déplore de devoir quitter Martia, malgré les pleurs de celle-ci, mais le devoir est le plus fort.

Sc. IV : Martia pleure le départ de Vitellius ; le bouffon Momercus, qui l’épie, raille les pleurs féminins.

Les Fosses Cléliennes, occupées par l’armée des Volsques.

Sc. V-VI : Volumnie, épouse de Coriolan, s’est déguisée en paysanne pour rejoindre son mari. Le capitaine Titurius lui offre de la conduire à lui, mais ses intentions sont libidineuses.

Sc. VII-VIII : Coriolan se prépare à combattre l’ingrate Rome, et donne ses instructions au capitaine Silénius.

Les thermes pompiliens

Sc. IX-X : à Rome, Appius suggère à Vetturie d’aller trouver son fils pour implorer la paix. Cette idée, présentée comme venant d’elle, est approuvée par Sextus.

La via Tusculana, frontière des Romains

Sc. XI : Martia s’est déguisée en soldat pour suivre Vitellius. Momercus blâme l’amour qui fait commettre de si dangereuses folies.

Sc. XII à XV : Coriolan combat avec Vitellius, Émilius avec Silénius. Vitellius reste sur le terrain, blessé ; il mourrait heureux s’il voyait Martia. De même, Martia, également blessée, voudrait entendre Vitellius. Ils se reconnaissent et s’évanouissent ensemble. Momercus, qui les croit morts, critique les folies de l’amour, puis se cache au milieu d’un tas de cadavres.

Sc. XVI : Silénius identifie les blessés, qui sont faits prisonniers ; Coriolan chante sa victoire et son futur triomphe.

Sc. XVII : Momercus apprend à Émilius le triste sort de Martia. Émilius, amoureux d’elle, décide de se déguiser en Volsque pour s’introduire dans le camp ennemi et la délivrer. Momercus est réticent.

Ballet de fouriers

Acte II

Le temple de Vulcain, à Rome

Sc. I à III : Appius et Sextus déplorent la défaite romaine et la mort de Vitellius ; l’intervention de Vetturie leur paraît rester le seul espoir. Vetturie est en proie au doute. Elle compte sur la petite Émilie pour attendrir son père ; la petite fille est plus optimiste. Appius chante l’espérance.

Un bois avec des machines de guerre, dont une en chantier, près du camp de Coriolan

Sc. IV : l’infâme Titurius se déclare à Volumnie, puis veut la prendre de force ; elle se défend énergiquement. Titurius se console : « Je ne veux pas suivre une beauté plébéienne ».

Sc. V : sur une tour de siège en construction, une inscription promet la victoire à Coriolan ; mais la foudre tombe et modifie l’inscription en annonçant la victoire de Rome. Coriolan est atterré par le prodige.

Sc. VI-VII : Silénius amène prisonniers Vitellius et Martia. Ceux-ci se montrent offensants envers Coriolan, qui les condamne à mort. Chacun des deux s’y résignerait si l’autre était sauvé.

Sc. VIII : arrive Volumnie, qui se fait reconnaître et réclame la vie des condamnés, qu’elle a reconnus.

Appartements de Coriolan dans un palais des Romains

Sc. IX à XI : Émilius et Momercus sont déguisés en Volsques. Coriolan, toujours perturbé, s’irrite en voyant les condamnés encore vivants. Volumnie obtient leur grâce en faisant valoir que Coriolan a jadis dû la vie au père de Vitellius : Martia retournera à Rome, Vitellius restera prisonnier. Être séparés ne les enchante pas.

Sc. XII : Émilius se sépare de Momercus, qui blâme l’amour.

Sc. XIII à XV : Volumnie se plaint à Martia du peu d’affection que son mari lui a montré. Elles s’embrassent, observées par Émilius caché. Titurius voit Volumnie, qui lui a résisté, dans les bras d’un supposé soldat, et, indigné, tire l’épée ; Émilius sort de sa cachette, le désarme et le poursuit.

Sc. XVI : Vitellius a vu la poursuite et, craignant pour Martia, se prépare à la venger.

Ballet de petits esclaves romains

Acte III

Un jardin avec des fontaines derrière le palais

Sc. I à III : Émilius espère voir son amour triompher. Momercus trouve qu’il prend trop de risques. Émilius parti, arrive Silénius qui, méfiant, interroge Momercus, lequel feint la folie avant de prendre la fuite.

Sc. IV-V : Vitellius, bien que prisonnier, veut se battre pour défendre l’honneur de Volumnie et la vie de Martia. L’infamie de Titurius éclate ; Coriolan lui pardonne néanmoins, tout en accordant sa liberté à Vitellius.

Sc. VI : Volumnie demande plus de chaleur à son époux, qui reste anxieux.

Sc. VII : Vitellius et Martia, rassérénés, se promettent un amour éternel.

Les tentes des Volsques, avec un pavillon orné de trophées pris sur les Romains

Sc. VIII à X : Volumnie, que Coriolan veut renvoyer à Rome, craint pour lui. Lui espère un revirement de la Fortune. Arrive Vetturie, reçue avec tous les égards. Soutenue par Volumnie et la petite Émilie, elle argumente de façon pathétique et finit par obtenir que son fils renonce à la guerre.

Salle royale, à Rome

Sc. XI à XIII : Sextus et Appius espèrent la réussite de Vetturie. Arrive Émilius, qu’on croyait mort, et qui, joie supplémentaire, apporte la nouvelle de la paix, lui-même étant douloureusement éprouvé dans son amour. En effet, Martia lui ôte tout espoir ; d’ailleurs, elle veut retourner se battre.

Sc. XIV-XV : dans l’allégresse générale arrivent Vetturie et Coriolan. Ce dernier précise qu’il n’en voulait pas à sa patrie, mais seulement à l’insolence de la plèbe. Vetturie invitée à choisir une récompense demande l’érection d’un temple à la Fortune.

Sc. XVI : arrivée de Vitellius, qui réclame la main de Martia, au grand dam d’Émilius, qui l’invite à se battre. Appius les retient et révèle que Vitellius est en réalité le fils caché de Publicola, donc le frère de Martia, qu’il ne peut plus épouser. Marcia épousera donc Émilius, ce qui ne semble plus lui poser aucun problème.

(*) par Alain Duc

 

Livret en français disponible sur livretsbaroques.fr
Livret original ( Milan – Biblioteca Nazionale Braidense) : http://www.urfm.braidense.it/rd/06105_3.pdf