Artémise (Artemisia)

Artemisia - livret - 1656

COMPOSITEUR Francesco CAVALLI
LIBRETTISTE Niccolo Minato
ENREGISTREMENT ÉDITION DIRECTION ÉDITEUR NOMBRE LANGUE FICHE DÉTAILLÉE
2010 2011 Claudio Cavina Glossa 3 italien

Dramma per musica, sur un livret en un prologue et trois actes, de Niccolo Minato, représenté, avec succès, au SS Giovanni e Paolo de Venise, le 10 janvier 1657, sous la direction du compositeur.
Il fut repris au teatro San Bartolomeo à Naples en 1658, dans une adaptation de Francesco Provenzale, dont le livret et la partition sont perdus. Puis à Palerme en 1659 (on a conservé le livret), à Milan en 1663, à Gênes en 1665.
Le manuscrit est conservé à la Biblioteca Marciana dans la Collection Contarini. Les deux premiers actes sont de la main de Cavalli, et furent utilisés par Cavalli pour la production vénitienne ; le troisième n’est qu’une copie, et aurait été utilisée par un autre claveciniste – qui pourrait être Giovanni Battista Volpe – pour une autre représentation.
Le livret fut édité par Andrea Giuliani, avec une dédicace, datée du 16 janvier 1656, de Minato Alla Ser: Real Altezza Di Ferdinando Carlo Arciduca D’Austria. Il comporte aussi un avis au Lettore et un Argomento (traduction en français sur livretsbaroques.fr).
Artemisia - livret - 1656
La production vénitienne comporte deux ballets à la fin de l’acte I (Huit archers forment le ballet) et de l’acte II (Huit Pages forment le ballet).

Personnages : Melpomene, Talìa, Apollo, Due Raggi d’Apollo, La Fortuna, La Virtù, La Cortesia, Le tre Gratie (Prologue) ; Artemisia (Artémise), reine de Carie (soprano) ; Meraspe (Méraspe), prince de Cappadoce, déguisé en Clitarco (alto) ; Alindo (Alyndos), prince de Bythinie, général d’Artemisia (alto) ; Artemia (Artémie), princesse feudataire (soprano) ; Ramiro (Ramire), prince feudataire (soprano) ; Oronta (Orontas), princesse de Chypre, en habit de soldat sous le nom d’Aldimiro (Aldimir) (soprano) ; Eurillo (Euryllos) (soprano) ; Erisbe (Érisbé) (ténor) ; Indamoro (Indamoros), précepteur de la reine (basse) ; Niso (Nisus), esclave d’Oronte (alto) ; Ombra di Mausolo (Ombre de Mausole) (basse) ; Echo I (soprano) ; Echo II (soprano) ; Choro di Damiglielle d’Artemisia, Choro di Soldati d’Artemisia, Choro di Soldati d’Alindo, Choro di Paggi d’Alindo, Choro di Paggi di Ramiro, Choro di Damiglielle d’Artemia, Choro di Servi d’Oronta, Choro di Intagliatori del Mausoleo, Choro di Arcieri (Primo ballo), Choro di Paggi (Secondo ballo)
Décors : palais des Fortunés (prologue) ; place avec un mausolée ; jardin ; arsenal ; arsenal royal ; tentes royales en vue de l’armée ; appartements royaux délicieux ; galerie avec pièces ; palais de Messi
La scène se passe à Messi, capitale de Carie, au temps où se prépare la guerre contre les Phrygiens.

Livret original

http://daten.digitale-sammlungen.de/~db/0004/bsb00048073/images/index.html?id=00048073&fip=qrsfsdrxdsydeayayztsewqxdsydxdsydxdsyd&no=3&seite=5
http://badigit.comune.bologna.it/cmbm/viewscheda.asp?path=/cmbm/images/ripro/libretti/Lo05946/&id=14944
http://www.urfm.braidense.it/rd/00506.pdf

Livret disponible sur livretsbaroques.fr

Partition : édition Bärenreiter – par Hendrik Schulze – 2010

Le livret s’inspire de l’histoire de la reine de Carie, Artémise II (morte en 351 av. JC), qui ordonna la construction de l’une des sept merveilles du monde, le fameux Mausolée d’Halicarnasse, dédié à son époux défunt, Mausole. Elle était réputée mêler journellement dans sa boisson les cendres de son défunt époux.
Reconstitution du Mausolée d'Halicarnasse

Synopsis détaillé

Acte I
La place du Mausolée
Sc. 1 – Artémise est devant le mausolée qu’elle a fait édifier pour son époux. Elle invite Euryllos à célébrer la mémoire du roi Mausole. De son côté Indamoros, précepteur de la reine, l’invite à épouser un prince pour être heureuse à nouveau. Artémise feint de refuser, mais on comprend qu’elle brûle déjà pour quelqu’un.
Sc. 2 – Méraspe, qui se fait appeler Clitarque, arrive. Lui et Artémise s’aiment, chacun en secret. Artémise lui rappelle qu’elle a promis d’épouser celui qui lui ramènerait le meurtrier de son époux. Méraspe répond que la tâche impossible, et Artémise en déduit qu’il ne l’aime pas. Méraspe comprend qu’il est aimé de la reine.
Sc. 3 – en présence de Ramire et d’Artémie, Méraspe lit la promesse d’Artémise gravée sur le mausolée. Méraspe reconnaît avoir tué Mausole en tournoi par accident. Ramire aime Artémie qui le repousse car elle aime Méraspe. En vain, car celui-ci aime Artémise.
Sc. 4 – Orontas, princesse de Chypre, en habit d’homme, est avec son esclave Nisus, à qui elle a recommandé de l’appeler Aldimir.
Sc. 5 – Alyndos, général d’Artémise, tombe sur Orontas et Nisus qui lui racontent qu’ils sont des guerriers pris par un pirate qu’ils ont réussi à fuir, et qu’ils recherchent un nouvel emploi. Séduit, Alyndos accepte de les prendre à son service. Orontas lui apprend qu’il a rencontré une Orontas, capturée elle aussi, en habits masculins, et qui le recherche par amour. Alyndos répond qu’il ne l’aime plus, mais qu’il est maintenant épris d’Artémise.
Sc. 6 – Ramire tente d’éveiller l’amour d’Artémie, mais celle-ci le repousse. La même scène se reproduit entre Artémie et Méraspe.
Sc. 7 – Artémise s’irrite de voir Artémie parler d’amour avec Méraspe. Elle se fait remettre par Artémie un portrait qui la représente, et la chasse. Elle rappelle Méraspe/Clitarque qui nie aimer Artémie. Artémise l’interroge, mais celui-ci élude les questions, qualifant son amour d’impossible.
Sc. 8 – Alyndos vient auprès d’Artémise accompagné de Ramire et Orontas. Alyndos est déçu de son accueil, mais Artémise l’éconduit.
Sc. 9 – Indamoros revient à la charge auprès d’Artémise, la pressant de trouver un nouvel époux pour satisfaire le peuple.
Sc. 10 – Euryllos vient chanter à la reine une chanson qui compare les blessures d’amour à la sculpture dans le marbre. Artémise interroge Méraspe sur un époux possible. Méraspe cite d’abord Alyndos, puis Méraspe, prince de Cappadoce, assurant qu’il est épris de la reine. Celle-ci ne veut pas entendre parler d’un ennemi. On entend l’Ombre de Mausole qui rappelle à Artémise son épitaphe : Pardonne à mes ennemis. Méraspe invite la reine à suivre son conseil.
Sc. 11 – Erisbé se lamente sur son vieil âge. Nisus s’amuse à se faire passer pour un mort. Erisbé ne goûte pas la plaisanterie, et le bat.
Un jardin
Sc. 12 – Euryllos refuse à Alyndos de servir d’intermédiaire auprès de la reine, et se retire. Orontas/Aldimir insiste pour parler à Alyndos de son ancien amour pour Orontas. Alyndos se moque de lui.
Sc. 13 – Artémie est tout à son amour. Elle s’agace des avances répétées de Ramire et le chasse.
Sc. 14 – Artémise tente de se raisonner, sa passion pour Méraspe/Clitarque ne pouvant aboutir. Survient Méraspe.
Sc. 15 – Erisbé offre des fleurs à Artémise qui en offre une à Méraspe. Alyndos survenant, Artémise tente de rattraper son geste en sa faveur. Méraspe se sent bafoué.
Sc. 16 – Alyndos chérit les fleurs offertes par la reine, mais Orontas tente de calmer son ardeur en lui retirant les fleurs. Orontas avoue à Alyndos qu’elle l’aime depuis longtemps, de réputation, et refuse de lui rendre les fleurs. Nisus, sur ordre d’Alyndos, se saisit des fleurs.
Sc. 17 – Ramire revient à la charge auprès d’Artémie. Il menace de dénoncer Méraspe. Artémie, pour sauver ce dernier, feint de céder à Ramire, et lui jure amour et fidélité. Artémie le quitte pour aller chercher un collier qu’elle dit avoir perdu.
Sc. 18 – Méraspe épanche sa douleur. Artémise lui fait comprendre qu’elle l’aime.
Sc. 19 – Alyndos annonce à Artémise que son armée est sûre de la victoire contre les Phrygiens. Artémise l’assure de sa confiance, mais Alyndos demande plus. Méraspe demande à rejoindre l’armée, mais la reine refuse. Méraspe lui rend un bijou qu’il sait lui appartenir, mais Artémise refuse de le prendre. Méraspe ne sait plus quoi penser.
Sc. 20 – Nisus vient encore se moquer d’Erisbé. Celle-ci appelle des archers à son secours. Huit archers forment le ballet.

Acte II
L’arsenal
Sc. 1 – Orontas/Aldimir se lamente d’être ignorée par Alyndos. Arrive ce dernier, à qui elle fait croire qu’Orontas est arrivée et qu’elle se plaint qu’il l’ait abandonnée. Elle tente de l’attendrir, en vain. Alyndos, excédé, la renvoit.
Sc. 2 – survient Artémise qui veut parler de la guerre à Alyndos, alors que ce dernier ne veut parler que d’amour.
Sc. 3 – alors qu’Artémise et Méraspe/Clitarque discutent, Indamoros survient, qui reconnaît un bijou d’Artémise au bras de Méraspe, et s’en offusque. Artémise tente de sauver la situation, et est aidée par Artémie qui explique que le bijou lui a été donné par la reine, et le réclame à Méraspe. Celui-ci r(este interdit.
Sc. 4 – Artémie, qui se lamente de l’indifférence de Méraspe, est à nouveau abordée par Ramire. Elle feint de l’aimer.
L’armurerie royale
Sc. 5 – Nisus cherche à se faire pardonner d’Erisbé qui lui réclame un cadeau. Nisus lui promet une liqueur qui rend plus belle, tout en confiant à Euryllos qu’en fait la liqueur teint les cheveux en noir.
Sc. 6 – Indamoros annonce que l’ennemi s’approche. Euryllos profite de la présence d’Artémise pour chanter une chanson. Artémise confie à Erisbe un portrait d’elle pour Méraspe qui doit lui être remis secrètement. Erisbe accepte, ne pensant qu’à rejoindre Nisus.
Sc. 7 – Erisbé rejoint Nisus, mais ils sont dérangés par Méraspe/Clitarque.
Sc. 8 – Erisbé montre à Méraspe un portrait de la reine qu’elle dit peu ressemblant. Méraspe la contredit, le trouvant fidèle au modèle. Méraspe demande à Erisbé de le lui donner ; Erisbé acccepte après s’être fait prier.
Sc. 9 – Méraspe se pâme devant le portrait d’Artémise. Celle-ci arriven et invite Méraspe à aimer la personne que représente le portrait, et même à l’épouser. Artémise, consciente d’être allée trop loin, se reprend et fait appeler Artémie, la lui destinant comme épouse. Devant le refus de Méraspe, elle soutient que le portrait est bien celui d’Artémie. Méraspe se sent trompé.
Sc. 10 – Artémie et Alyndos arrivent. Artémise rend le portrait à Artémie qui confirme que c’est bien le sien. Alyndos se plaint que la reine l’ignore.
Sc. 11 – Nisus répand la liqueur sur Erisbé, qui se croit plus belle. Euryllos fait semblant de voir à sa place une jolie jeune fille, et se propose comme amant et serviteur. Nisus recommande à Erisbé de ne pas se regarder dans un miroir au risque de devenir noire.
Sc. 12 – Artémie se plaint de ne pas être aimé de Méraspe. Ramire vient pour être rassuré sur ses sentiments. Artémie feint toujours.
Sc. 13 – Ramire annonce trimphalement à Méraspe qu’Artémie l’aime. Celle-ci doit nier aimer encore Méraspe.
Sc. 14 – Méraspe est las de se faire tromper par la reine. Celle-ci lui redonne espoir, et lui fait cadeau de belles armes.
Sc. 15 – Alyndos survenant à cet instant, Artémise sauve la situation en demandant à Méraspe de porter les armes en son nom à Alyndos. Celui-ci revient à la charge auprès d’Artémise qui le renvoit.
Les pavillons royaux en face des armées
Sc. 16 – Artémie feint toujours d’aimer Ramire. Celui-ci réclame un baiser en gage d’amour. Artémie refuse.
Sc. 17 – Nisus ne sent pas une âme de guerrier, et se propose pour d’autres fonctions. Alyndos le chasse. Survient Orontas qui se prétend l’interprète de la « vraie » Orontas, mais ne peut émouvoir Alyndos.
Sc. 18 – Alyndos poursuit de ses avances la reine qui le renvoit.
Sc. 19 – Artémise mandate Indamoros pour dire à Alyndos de faire cesser la guerre contre les Phrygiens. Indamoros la questionne en vain.
Sc. 20 – Erisbé, se croyant belle, flirte avec Euryllos qui joue le jeu. Un groupe de pages l’entoure avec des miroirs. Erisbé refuse de les regarder. Huit pages forment le ballet.

Acte III
Les appartements royaux
Sc. 1 – Artémie s’abandonne à la douleur, et commence à écrire un billet à son aimé.
Sc. 2 – Artémise survient, qui se fait remettre le billet, le lit avec colère, et chasse Artémie. Artémise demande à Méraspe de répondre au billet. Méraspe lit le billet d’amour en croyant qu’il a été écrit par la reine, et est rempli de joie.
Sc. 3 – Méraspe cache le billet alors que survient Artémie. Devant lui, celle-ci feint de vouloir épouser Ramire. Celui-ci délire de joie, mais Artémie en profite pour changer d’avis.
Sc. 4 – Orontas cherche à faire croire que la « vraie » Orontas a voulu se tuer, puis a fui de douleur. Alyndos reste indifférent. Orontas est au désespoir.
Sc. 5 – Alyndos, en colère, annonce à la reine qu’il se démet de sa charge, puis se reprend. La reine le chasse.
Sc. 6 – Artémise demande à lire la réponse que Méraspe a faite au billet, où il dit qu’il brûle d’amour.
Sc. 7 – survient Indamoros qui voit le billet. Artémise affirme qu’il a été écrit par Artémie, et celle-ci confirme. Méraspe, qui croyait que le billet était écrit par Artémise, ne comprend plus. Artémie, lisant la réponse de Méraspe, croit que celui-ci l’aime, mais Méraspe nie, et se retire.
Sc. 8 – Erisbé se croit toujours belle. Nisus et Euryllos continuent à se moquer d’elle.
Sc. 9 – Artémise demande à Euryllos de chanter. Puis elle le charge de porter une lettre à Méraspe/Clitarque, dans lequel elle lui avoue qu’elle n’aime pas Alyndos, et que c’est lui qu’elle aime.
Sc. 10 – Artémise reproche à Alyndos de la poursuivre de ses avances. Alyndos, la lettre entre les mains, la menace en retour de dévoiler ses amours coupable. Artémise, pour sauver la situation, lui répond qu’elle a voulu le mettre à l’épreuve, et que c’est lui qu’elle aime. Alyndos se laisse convaincre.
Sc. 11 – une fois seul, Alyndos se sent trompé. Orontas revient à la charge. Alyndos la chasse.
Sc. 12 – voyant venir Méraspe, Artémise feint de dormir. Méraspe, laisse aller son coeur et dévoile son identité. Artémise se réveille et le renvoit. Elle prend conscience que Clitarque n’est autre que Méraspe qui a tué son époux.
Sc. 13 – Ramire menace Artémie de dévoiler que Clitarque est Méraspe. Alyndos, qui a entendu, court pour le dénoncer à la reine. Artémie fait des reproches à Ramire qui décide de prévenir Méraspe.
Sc. 14 – Artémise suggère à Méraspe de punir Alyndos en se faisant passer pour le prince Méraspe.
Sc. 15 – Alyndos arrive auprès de Méraspe et le fait arrêter par ses soldats qui lui prennent son épée. Il lui annonce qu’il épousera Artémise. Méraspe se sent trahi par la reine.
Sc. 16 – Erisbé comprend qu’elle a été ridiculisée. Nisus et Euryllos se moquent d’elle.
Sc. 17 – Orontas entend Méraspe se lamenter, lé delivre, et et lui promet son secours, sans se faire connaître.
Sc. 18 – Orontas dévoile à Artémise l’identité de Méraspe, et réclame de l’épouser en vertu de la promesse de la reine. Orontas demande le pardon de la reine pour Méraspe. Celui-ci est effondré.
Sc. 19 – Alyndos réclame la main d’Artémise, lui promettant de lui remettre Méraspe prisonnier. Artémise se moque de lui. Alyndos apprend d’Euryllos que Orontas/Aldimir a libéré Méraspe, et qu’il a obtenu la main de la reine.
Sc. 20 – Orontas demande à la reine de choisir son époux. Alyndos lui reproche de lui avoir volé son épouse. Orontas lui répond qu’il va au contraire la lui rendre, et se fait connaître. Alyndos est désespéré, mais se laisse attendrir. Son amour pour Orontas renaît, et souhaite du bonheur à Artémise et Méraspe.


Représentations :

Somerville – The Center for Arts at the Armory – Massachussets – 18, 19 janvier 2013 – Helios Early Opera – dir. Dylan Sauerwald & Zoe Weiss – mise en scène Aria Umezawa – avec Julianne Gearhart (Artemisia), Andrew Pickett (Meraspe), Dawn Bailey (Artemia), Margot Rood (Ramiro), Erika Vogel (Eurillo), Gerrod Pagenkopf (Niso), Marcio de Oliveira (Erisbe), Elizabeth Merrill (Oronta), Raquel Winnica Young (Alindo), Will Prapestis (Indamoro)



Hannover – Herrenhausen (Festwochen) – 26 juin 2010 – Ensemble La Venexiana – dir. et clavecin Claudio Cavina – mise en scène Paolo Reggiani – Montpellier, Opéra Comédie – 24 juillet 2010 – version de concert – avec Francesca Lombardi Marzull (Artemisia), Sakiko Abe (Artemia), Valentina Coladonato (Oronta), Maarten Engeltjes (Meraspe), Roberto Balconi (Alindo), Marina Bartoli (Ramiro), Silvia Frigato (Eurillo), Salvo Vitale (Indamoro) – édition Bärenreiter

enregistrement audio (Montpellier – 24 juillet 2010) – CDHouse of Opera
Classique.news

« Montpellier poursuit la vague cavalienne, en programmant en juillet 2010: la belle Artemisia, drame musical en un prologue et 3 actes de 1657 d’après le livret de Niccolo Minato. C’est un événement et une création française! Dans le rôle titre Francesca Lombardi Mazzuli (soprano) soutenue et certainement mise en confiance musicale par une équipe de complices, les instrumentistes de La Venexiana (direction: Claudio Cavina).
Le maître de l’écriture lyrique, qui composa pas moins de 40 ans opéras, pour Venise dès 1639, soit 2 années après l’ouverture du premier théâtre public, collabore à nouveau avec Minato, après leur Serse de 1655. D’après un sujet historique et non plus mythologique, la reine Artémise II (décédée en 351 avant JC. cf son portrait ci contre par Francesco Furini) doit la célébrité post mortem pour avoir honoré comme peu le souvenir de son défunt mari (Mausole): elle fait édifier le fameux Mausolée d’Halicarnasse, l’une des 7 merveilles du monde antique. Minato fusionne épopée historique et petite histoire sentimentale: Artémise qui avait juré de venger l’honneur de son époux assassiné, en condamnant son meurtrier, s’éprend de Clitarco… qui est l’assassin du regretté Mausole. Autour de ce couple principal, 3 autres se mêlent et s’entrechoquent, créant des quiproquos savoureux, pourtant chacun promis à une heureuse issue. Cavalli et Minato poursuivent leur travail qui réorganise et clarifie les genres comiques et héroïques, badins et sérieux; comme le compositeur réalise nettement la caractérisation des arias et des récitativos, bientôt promis à une alternance si mécanisée dans l’école napolitaine au siècle suivant. »

Mesures du temps

« un Cavalli — Artemisia — laborieux avec un ensemble Venexiana décoloré, sans mise en scène, ni surtitres, dans un Opéra Comédie étouffant. »

Maville – Montpellier

« L’opéra de Francesco Cavalli Artemisia, son 23 e , créé en 1657, a toutes les séductions d’une généreuse débauche vocale. Cette fois, il faut s’accrocher vraiment (*) pour suivre une intrigue pleine de rebondissements. Huit personnages, trois couples et des péripéties amoureuses où les liens se défont plus qu’ils ne se nouent, créant une action dramatique construite sur feintes et faux semblants. Il n’y manque aucun indispensable accessoire : fleur, portrait, collier, lettre, aveu, travesti, funeste lame. Cela s’enchaîne avec une facilité médusante .
On prend plaisir à la galanterie, jouée avec conviction par les chanteurs, qu’accompagne l’ensemble La Venexiana dirigé au clavecin par Claudio Cavina. Les interprètes et musiciens sont rompus à ce style, à l’aise pour négocier les difficultés et donner du bouffant aux scènes bouffes.
Francesca Lombardi Mazzulli est une Artemisia puissante, veuve du roi Mausole rouée et un brin garce, expressive et royale dans l’ornementation. Remplaçant Roberta Mameli, souffrante, la soprano Sakiko Abe est Artemia et tient dignement tête à la galanterie de Ramiro chanté par Marina Bartoli. Valentina Coladonato campe une guerrière Oronta aux nobles inflexions. Sans faute pour Silvia Frigato et Salvo Vitale. Quant aux deux contre-ténors, on ne saurait les comparer : Maarten Engeltjes (Méraspe) et Roberto Balconi (Alindo) ont des timbres intéressants, bien différents, le premier plus droit mais plus linéaire, le second plus nuancé, mais pas toujours audible.
L’heureux et prévisible dénouement est précédé de fort beaux airs : évocation du sommeil, scène de fureur. C’est fantasque parfois, maniéré souvent. Il n’y faut pas attendre l’art de Monteverdi… »

Opéra Magazine – septembre 2010

« Pour sa première présentation en France, trois siècles et demi après sa création à Venise (1657), l’Artemisia de Francesco Cavalli ne pouvait rêver meilleurs interprètes. Il s’agit certes là d’une version de concert, mais pour qui veut suivre d’un peu près les paroles, le théâtre reste toujours présent au cours de ccs trois actes. Même si les scènes bouffes présentant Niso et Erisbe ont été supprimées dans cette révision de la partition, rien n’est perdu pour autant de la vivacité qui marque tout l’ouvrage.
Car nous sommes bien loin ici de certains aspects empesés que connaîtra l’opéra italien par la suite. Bien qu’il se réfère à un sujet antique (Artemisia, veuve de Mausole, entend se venger de l’assassin de son époux, sans savoir qu’il s’agit de Meraspe, qu’elle aime et qui l’aime, le livret de Nicolo Minato repose sur des personnages proches de la vie quotidienne, qui n’en finissent pas de se livrer aux jeux compliqués de la politique et de l’amour. Travestissements, méprises, mensonges, stratégies foireuses : cette intrigue qui dès le départ, pouvait paraître complexe s’embrouille cncore un peu plus, avant de se dénouer avec la plus grande légèreté et la plus rare élégance.
Une musique en continuel renouvellement épouse le flux brillant des paroles, réservant au passage quelques fort beaux airs, qui témoignent de la science extrême de Cavalli : «Aure, tacete» (chanté par Meraspe) ou « Ardo, sospira e piango » (confié à Artemia) apparaissent ainsi comme les fleurons d’un art vocal qui atteint là son apogée. À côté de ces moments de grâce, il en est d’autres plus vifs, moins pathétiques, qui ajoutent une pointe indispensable d’humour à ce tableau des passions humaines.
Maître d’œuvre de cette résurrection bienvenue, Claudio Cavina, à la tête de son ensemble La Venexiana, trouve d’emblée le ton chaleureux qui convient à ce «drame musical» sans déclarations ampoulées, ni interminables morceaux de bravoure. Avec lui, nous sommes loin de la componction et de la raideur rythmique que certains associent toujours au répertoire baroque !
La distribution bénéficie d’interprètes familiers de ce type d’ouvrage. Parce que la partition lui réserve ses plus beaux morceaux, on remarque tout d’abord le Meraspe de très grande classe incarné par Maarten Engeltjes, contre-ténor néerlandais, au timbre onctueux et à la musicalité souveraine. La soprano japonaise Sakiko Abe offre à Artemia une technique sûre, bien qu’un peu trop froide dans son expression. Roberto Balconi fait ressortir de manière exquise le caractère ampoulé d’Alinco. Francesca Lombardi Mazzulli et Valentina Coladonato rivalisent d’intensité et de fougue dans des emplois plus dramatiques. Enfin, Marina Bartoli, Silvia Frigato et Salvo Vitale apportent à leurs rôles une même justesse de ton.
Souhaitons donc qu’ainsi sortie des mausolées de l’histoire, Artemisia ne retombe pas aussitôt dans un injuste oubli. Comme on s’en est rendu compte, à Montpellier, plus de trois siècles n’ont en rien altére sa modernité. »