Hésione

COMPOSITEUR André CAMPRA
LIBRETTISTE Antoine Danchet

 

 Tragédie en musique en cinq actes et un prologue (Les Jeux Séculaires), sur un livret d’Antoine Danchet, d’après la légende de Laomédon et Hésione par Apollodore (Bibliothèque) et Hygin (Fables).

Création, avec grand succès à l’Académie royale de musique, le 21 décembre 1700, avec une distribution réunissant Mlle Maupin (la Prêtresse du Soleil), Hardouin, basse (le Soleil) pour le prologue, Hardouin (Laomédon), Thévenard, basse (Anchise), Mlle Moreau (Hésione), Mlle Desmatins (Vénus), Chopelet (Télamon), Dun (Cléon, Neptune), Mlle Maupin (Une Prêtresse de Flore), Mlle Heuzé (Une Grâce), Boutelou (Un Plaisir). 

Ballets : une Lydienne ; une Prêtresse de Junon (Mlle Subligny) ; un Plaisir (Pécourt) et les Grâces ; Héros (Balon) ; Vent souterrain et Vent de l’air (F. Dumoulin) ; un Romain.

En décembre 1700, Campra avait obtenu depuis deux mois son congé de maître de musique à Notre-Dame. Jusque là, il signait ses oeuvres profanes du nom de son frère cadet Josep.

Selon les frères Parfaict : On trouva la versification du poème très exacte, et la musique chantante d’un bout à l’autre. Le Prologue plut beaucoup, et l’on s’accordait à qualifier d’heureuse l’idée du spectacle des Jeux séculaires. On y trouva plein de choses neuves et brillantes. Au IIe acte le dialogue d’Anchise et Hésione attendrissait les âmes sensibles, et tout le monde convenait que la scène du IIIe acte qui met en présence la princesse et Telamon atteignait à une grande force scénique. Enfin celle d’Anchise et hHsione, au IVe acte, provoquait une vive impression. Il y eut aussi des critiques, et Danchet et Campra se virent traités de fripiers d’opéra.

On lit dans le Cours de littérature ancienne et moderne de Jean-François de La Harpe et Léon Thiessé (1839) : Cet opéra, joué la première année de ce siècle, eut un grand succès, et le méritait. Il est bien conçu et bien conduit ; il y a de l’intérêt : le style en est médiocre, mais point au-dessous du genre, et s’il s’élève peu, il ne tombe pas. Il y a même des morceaux qui ont marqué, et tous les amateurs ont retenu ces vers du prologue, qui sont, il est vrai, les meilleurs qu’il ait faits, et que lui fournit la circonstance du siècle qui commençait :

 

Père des saisons et des jours,

Fais naître en ces climats un siècle mémorable.

Puisse, à ses ennemis ce peuple redoutable,

Être à jamais heureux et triompher toujours !

Nous avons à nos lois asservi la victoire;

Aussi loin que tes feux nous portons notre gloire.

Fais dans tout l’univers craindre notre pouvoir :

Toi qui vois tout ce qui respire,

Soleil, puisses-tu ne rien voir

De si puissant que cet empire !

L’œuvre fut reprise :

le 19 juillet 1709, avec une distribution réunissant Mlle Dujardin (La Prêtresse du Soleil) et Hardouin (Le Soleil) pour le prologue, Hardouin (Laomédon), Mlle Poussin (Hésione), Mlle Journet (Vénus), Thévenard (Anchise), Cochereau (Télamon), Dun (Cléon, Neptune), Chopelet (Mercure, un Plaisir), Mlle Dujardin (Une Prêtresse de Flore), Mlle Dun (Une Grâce, une Troyenne) ; ballets : une Lydienne, un Troyen et Prêtresse de Junon, les Grâces, Héros et Héroïnes, Vent souterrain, et Troyens ; le 13 septembre 1729, et jusqu’à la fin d’octobre, avec Mlle Eremans (La Prêtresse du Soleil) et Chassé (Le Soleil) pour le prologue, Dun (Laomédon), Mlle Pélissier (Hésione), Mlle Antier (Vénus), Chassé (Anchise), Tribou (Télamon), Dun (Cléon, Neptune), Dumast (Mercure, un Plaisir) ; ballets : une Prêtresse du Soleil, un Troyen et une Prêtresse de Junon, un Plaisir et les Grâces, Héros et Héroïnes, Vent souterrain, et un Phrygien.

Selon Parfaict : Cette reprise fut très favorable ; le public goûta les beautés de cette pièce qu’il avait vue assez indiféremment. Mlle Pélissier avait repris le rôle-titre, dont, selon Parfaict, elle s’acquitta avec ce pathétique et ces entrailles que tout le monde lui connaît.

Le 18 octobre, le roi Stanislas vint assister incognito à une représentation, dans la loge du duc d’Orléans.

en janvier 1730, sans le prologue ; le 31 janvier, Hésione fut suivie d’une Pastorale héroïque de la fête des ambassadeurs plénipotentiaires d’Espagne, à l’occasion de la naissance du Dauphin, futur Louis XVI, sur un texte de La Serre, en un acte et en vers libres ; le 31 août 1730, avec Mlle Le Maure, qui avait quitté le théâtre au mois d’août 1727, et y chanta le principal rôle avec beaucoup d’applaudissement, et Marie Anne de Cupis de Camargo, dite la Camargo, alors âgée de vingt-ans, dans le ballet ;

En décembre, le Ier acte fut joué au Concerts de la Reine, puis les IIe et IIIe le 8 janvier 1731, et les IVe et Ve le 10 janvier, avec Mlle Lenner dans le rôle d’Hésione, le tout avec un vif succès.

Hésione fut à nouveau inscrit aux Concerts de la Reine, les 26 et 28 septembre 1740, à Fontainebleau.

le 1er mars 1743, avec Mlle Fel (La Prêtresse du Soleil), Le Page (Le Soleil) et La Tour (Un Phrygien) pour le prologue, Le Page (Laomédon), Mlle Le Maure, puis Mlle Clairon, alors âgée de vingt ans (Hésione) (*), Mlle Chevalier (Vénus), Chassé (Anchise), Jélyotte (Télamon), La Tour (Un Plaisir), Mlle Bourbonnois (Une Grâce), Mlle Fel (Une Phrygienne). Ballets : Saliens, et Prêtresse du Soleil, Prêtresse de Junon, Jeux, Plaisir, et les Grâces, Ombres de Héros, Vent souterrain, une Phrygienne.

D’après Arsène Houssaye : Mlle Clairon apparut à l’Opéra sous la figure de Vénus, dans l’opéra de Hésione. Quoique assez mauvaise musicienne, elle fut très applaudie. On avait alors à l’opéra l’esprit d’applaudir la beauté. La beauté, n’est-ce pas la musique ?

(*) Claire Josèphe Hippolyte Léris, surnommée Clairon de la Tude (25 janvier 1723 – 31 janvier 1803). Elle ne resta que quelques mois à l’Opéra et débuta sa carrière de tragédienne en septembre 1743 avec le rôle de Phèdre à la Comédie Française. Elle se retira du théâtre en 1765.

Mademoiselle Clairon

le 6 octobre 1743, avec Mlle de Romainville, qui fut très applaudie dans le rôle d’Hésione ;  ainsi qu’à Bruxelles, au Théâtre de la Monnaie, en 1710, et à Lyon, dans la salle du Jeu de Paume de la Raquette Royale, en 1742.

L’oeuvre fit l’objet d’une parodie sous le titre la Parodie d’Hésione, en un acte et vaudevilles, par Dominique & Romagnesi, représentée au Théâtre Italien, le 22 octobre 1729. 

 La BNF conserve un livret de l’édition de 1743 par Jean-Baptiste Christophe Ballard.
51me Opé. C’est une Trag. de Danchet, mise en musique par Campra, représentée pour la premiere fois le 21 Déc. 1700, & imprimée en musique partition in-4°. Cet Opé. eut un succès extraordinaire, & il a été repris en 1709, 1729 & 1743 : les jeux séculaires forment le Prol. Le sujet du Poëme est l’amour d’Hésione pour Anchise, Prince Troyen, traversé par Venus & par Telamon. (de Léris – Dictionnaire des Théâtres)
Personnages : Laômédon, roi de Troie ; Hésione, fille de Laômédon ; Anchise, prince troyen, épris d’Hésione, aimé de Vénus ; Télamon, roi de Salamine, épris d’Hésione ; Cléon, prince grec, confident de Télamon ; Vénus, Mercure, Neptune.

Synopsis

Prologue : les Jeux Séculaires

Un amphithéâtre de l’ancienne Rome, où on avait l’habitude de célébrer des jeux en l’honneur du Soleil, au commencement de chaque siècle. Au commencement du jour.

La Prêtresse du Soleil annonce d’heureux présages. Les Saliens et les Lidiennes commencent les jeux. Le Soleil glorifie le Héros glorieux qui préside aux destinées du peuple.

Acte I

Un temple que l’on doit consacrer aux dieux

Télamon, roi de Salamine, se lamente : Hésione lui préfère Anchise et va l’épouser. Cléon, son confident, lui rappelle que le Roi Laômédon a fait aussi preuve à son égard d’ingratitude, car Alcide et lui l’ont protégé de la colère de Neptune.

Vénus descend du ciel sur un char environnée d’amours. Elle annonce à Télamon qu’elle vient à son secours et qu’elle va entreprendre de séparer les amants. Télamon reprend espoir, alors qu’arrivent le Roi, Hésione et Anchise. Le Roi est soulagé car Neptune ne demande plus que l’on célèbre des jeux et que l’on consacre un temple. Des Sacrificateurs et des Prêtresses arrivent pour consacrer le temple. La cérémonie commence. Le Roi fait hommage à Apollon et à Neptune. Mais lorsque ils s’apprêtent à entrer dans le temple, la terre tremble, le tonnerre gronde, le temple s’embrase. L’Oracle demande qu’Anchise aille au pied du Mont Ida apprendre la volonté des dieux.

Acte II

Un désert au pied du Mont Ida. On voit des précipices et des torrents qui tombent dans la mer

Hésione, inquiète, a voulu accompagner Anchise. Le Roi lui demande de laisser Anchise seul , comme l’a ordonné l’Oracle. Anchise tente de la rassurer. On entend une symphonie affreuse. Anchise essaye de dominer sa peur. On entend une symphonie agréable, et la scène se change en jardins agréables, où paraît Vénus sur un trône de fleurs, au milieu des Plaisirs, des Grâces, des Ris et des Jeux, avec l’Amour. Vénus demande aux Grâces et aux Amours de charmer Anchise par un divertissement. Puis Vénus avoue à Anchise qu’elle vient lui demander son coeur. Anchise lui résiste et la quitte. Vénus demande à l’Amour de le suivre. Elle s’irrite qu’Anchise ait méprisé son amour, puis décide de se venger sur Hésione, en éveillant sa jalousie.

Acte III

Une colonnade, avec le palais de Laômédon en perspective

Hésione est éperdue de jalousie, mais se demande comment lutter contre Vénus. Télamon ne comprend pas qu’elle aime encore Anchise alors que ce dernier a cédé aux charmes de Vénus. Hésione, trop troublée, le quitte. Télamon invoque Vénus qui le rassure : elle va combler ses voeux avec l’aide de Proserpine.

Aux Champs Elysées, Vénus vient invoquer l’aide de Proserpine. Les Ombres fortunées et les Nymphes de Proserpine se mettent au service de la déesse. Vénus annonce à Télamon qu’Hésione va s’attendrir mais qu’ils doivent partir tous les deux. Mais Télamon refuse de devoir Hésione à un enchantement.

Acte IV

D’un côté, la ville de Troie, de l’autre, des bois, la mer, et le port de Sigée

Anchise est fou de jalousie : Vénus lui a fait voir Hésione et Télamon ensemble. Il prépare sa vengeance. Hésione survient. Chacun reproche à l’autre son inconstance. Anchise, pour prouver sa bonne foi, tire son épée pour se tuer. Hésione l’arrête et se rend compte qu’elle est la victime de Vénus. Ils se réconcilient. Vénus survient, ils fuient sa colère. Vénus invoque Neptune pour qu’il lance la mer contre Troie. Une tempête se lève, la terre frémit, le ciel gronde. Neptune apparaît, heureux de pouvoir assouvir sa colère contre Troie. Les Dieux marins s’emploient à détruire les remparts de la ville. Neptune fait sortir un monstre de la mer : seul Télamon pourrait le vaincre, mais le Roi devra lui céder la princesse.

Acte V

Une campagne ravagée par le monstre

 Vénus se rend compte des ravages qu’elle a provoqués. Anchise apparaît, un tronçon d’épée à la main. Il ne comprend pas pourquoi le monstre est invincible, sans pour autant l’attaquer. Vénus lui explique qu’elle réserve à son rival le soin de tuer le monstre, ce qui lui vaudra la main d’Hésione. Anchise veut se sacrifier pour celle-ci, mais Vénus reste inflexible.

Le peuple phrygien fait fête à Télamon qui a vaincu le monstre. Anchise s’insurge, mais le Roi lui confirme qu’il a dû obéir à Neptune, en donnant la main de sa fille au vainqueur. Anchise maudit le Roi, lui prédisant que la Grèce s’assemblera contre lui, et que Troie sera réduite en cendres. Vénus s’apprête à apaiser sa douleur, quand apparaît Mercure, qui annonce que les dieux ont décidé qu’Anchise lui reviendrait. Vénus se réjouit et fait enlever Anchise par des Zéphyrs.

 

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