La Nemica d’amore fatta amante (L’Ennemie de l’amour rendue amoureuse)

COMPOSITEUR Giovanni BONONCINI
LIBRETTISTE Silvio Stampiglia
DATE DIRECTION EDITEUR NOMBRE LANGUE FICHE DETAILLEE
2003 Chiara Banchini Zig-Zag Territoires 1 italien

 

Serenata pastorale à trois parties (Clori, Tirsi et Fileno), sur un livret de Silvio Stampiglia, exécutée au Palazzo Colonna, à Rome, le 10 août 1693.

Palazzo Colonna sur la Piazza dei Santi Apostoli

 

« L’histoire a essentiellement retenu le nom de Giovanni Bononcini comme associé puis rival de Haendel dans le Londres lyrique des années 1720. La présente sérénade remonte aux années de jeunesse d’un compositeur au service de la célèbre famille romaine Colonna. La Nemica d’amore fatta amante (L’Ennemie de l’amour rendue amoureuse) réunit trois personnages : la nymphe Tirsi, qui refuse l’amour, le berger Tirsi, qui brûle de passion pour elle, et le satyre Fileno, qui s’échauffe tout autant.

Cette oeuvre, conformément aux lois du genre, séduit davantage qu’elle ne bouleverse. En plus de courbes mélodiques avantageuses et d’une incontestable sensibilité psychologique, la musique de Bononcini vaut pour son écriture orchestrale aérée et propre àmettre en valeur des solistes instrumentaux (à cordes exclusivement). » (Le Monde de la Musique – septembre 2003)

 

« C’est lors de son premier séjour à Rome que Giovanni Bononcini compose la majeure partie de ses cantates (près de trois cents) qui ont fait sa renommée internationale. Il est avec Alessandro Scarlatti le plus important compositeur de cantates au début du XVIIIe siècle en Italie. Une partie de celles-ci – pour la plupart commandées par des princes, des cardinaux, des diplomates et dédiées à leur femme, mais aussi par des académies comme l’Arcadia – ont pris le nom de Serenate quand elles étaient jouées le soir. On peut les définir comme se situant entre une grande cantate et un petit opéra en raison de l’intrigue qui s’y joue.

Les six premières Serenate commandées à Giovanni Bononcini tous les mois d’août pour la fête de Lorenza Colonna, femme de son protecteur, ont été écrites entre 1692 et 1697 en collaboration avec Silvio Stampiglia, et sont à l’origine de son succès international. La « Nemica d’amore fatta amante » a été créée en plein air au Palazzo Colonna le 10 août 1693 : Giovanni Bononcini n’a alors que 23 ans. D’après une source italienne de l’époque, la représentation était « somptueuse » et « tout Rome » y assista. Le très grand succès populaire du jeune italien s’explique par son style agréable et facile,ses mélodies élégantes et expressives enrichies par des lignes de basse vigoureuses et variées (Ernst Galliard 1716). Giovanni Bononcini est souvent rapproché de Alessandro Scarlatti, mais les tournures « nobles et majestueuses » de ce dernier sont plus difficiles d’accès pour le public.

L’accompagnement orchestral de « La nemica d’amore fatta amante » est particulièrement riche. La Sinfonia introductive est composée sur le mode du concerto grosso avec une alternance de soli et de tutti. Les airs débutent et se terminent par des ritournelles d’orchestre. Outre la recherche d’équilibre entre l’orchestre et les chanteurs, on peut également remarquer la mise en valeur d’instruments solistes, comme dans l’air de Clori, « Tortorella innamorata », accompagné par un solo de violon, et dans l’air de Tirsi, « Pur ti riveggio ancor », avec violoncelle solo, dont Giovanni Bononcini connaissait si bien toutes les possibilités. Cette Serenata illustre ainsi la capacité du jeune compositeur italien à marier habilement la musique et le texte. » (Zig-Zag Territoires)

 

« Violoncelliste talentueux, fils d’un théoricien de la musique renommé, Bononcini fut très tôt orphelin mais bénéficia de l’appui de nombreux mécènes. Il poursuivit donc activement ses études musicales à Modène, sa ville natale, avant de rejoindre Bologne. C’est à Rome, alors qu’il est au service de la célèbre famille Colonna, que sa carrière débute grâce à la rencontre de Silvio Stampiglia qui va devenir son librettiste. Six sérénades, un oratorio et cinq opéras naîtront de leur collaboration.

La sérénade « La nemica d’amore fatta amante » (L’Ennemie de l’amour rendue amoureuse), contribua à faire connaître les deux artistes. Elle fut créée en plein air au Palazzo Colonna le 10 août 1693 et remporta d’emblée un réel succès populaire. L’histoire raconte les souffrances de la nymphe Clori, persuadée par le satyre Fileno de la cruauté de l’amour. Mais les sentiments amoureux du pasteur Tirsi la touchent. Après les larmes d’usage, les deux tendres amants se retrouveront à chanter les ardeurs de l’amour et à louer les vertus de la fidélité.

Si le propos n’est guère original, le langage musical, lui, est digne d’intérêt. Le succès de Bononcini s’explique par l’élégance des mélodies et la grâce des ornements, les tournures relativement simples des airs ne nuisant jamais à l’expression de profonds sentiments. » (Répertoire – octobre 2003)

 

La Serenata « L’ennemie de l’amour rendue amoureuse », qu’il composa à 23 ans, illustre pourtant la parfaite maîtrise de son talent, l’élégance et l’expressivité de ses mélodies, la richesse des lignes de basse, l’équilibre de l’orchestre et des voix, la clarté réservée aux instruments solistes (dont le sien propre, le violoncelle), la richesse mélodique des airs aux ritournelles, les sou, les tutti, la beauté et la précision orchestrale qu’anticipe superbement la sinfonia introductive. Aucun ennui, aucune répétition dans la partition d’un livret à l’intrigue rudimentaire (une nymphe déclare enfin son amour à un patre après en avoir été dissuadée par un satyre jaloux qui prétextait la sauver des affres de l’amour et de l’inconstance des hommes) mais à l’écriture intelligente et suave, faite pour la musique. C’est à Rome que Bononcini rencontra son librettiste chez leur protecteur au sein de la famille Colonna : Silvio Stampiglia et lui écrivirent ensemble six Sérénades, un Oratorio et cinq Opéras. Un épisode pourtant dans la vie du compositeur à la carrière précoce. Fils du très respecté Bononcini père, lui-même violoniste, compositeur et théoricien, référence musicale encore au XVIIIe siècle, notre Bononcini fils (l’aîné de 3 fils), orphelin à 8 ans connut la misère mais ne cessa d’étudier la musique, publia ses trois premiers opéras à 15 ans, voyagea de Modène à Bologne, Rome, Vienne, Londres et Paris, adulé puis injustement oublié. » (Crescendo – octobre/novembre 2003)

 

Synopsis

La belle nymphe Clori (Chloris) s’était toujours déclarée ennemie de l’amour et avait méprisé et raillé le sentiment du pasteur Tirsi (Thirsis) qui l’aimait depuis longtemps. Pourtant, au début de la Sérénade, elle aussi est touchée par l’amour de Tirsi et contrainte par une douleur insoutenable à se déclarer à lui. Tirsi croit d’abord que les souffrances de Clori ne sont que tromperies et simulations pour le tourner plus encore en dérision et Clori doit le convaincre peu à peu qu’elle l’aime vraiment. Quand Tirsi est persuadé que Clori est sincère, leur douleur cède la place à la joie.

Le satyre Fileno a écouté le dialogue entre Clori et Tirsi ; il aime lui-aussi Clori depuis longtemps et lui reproche à présent d’avoir cédé à l’amour, insinuant que si les astres ne vengent pas la trahison de la nymphe, c’est la Terre qui s’en chargera. Après avoir chanté les louanges de l’amour, qui au contraire rend la Terre pleine de vie, Clori rappelle que c’est précisément Fileno qui, par jalousie, lui avait enseigné à mépriser l’amour, lorsque Tirsi lui avait déclaré sa flamme, un an auparavant. À cette occasion, et après que Tirsi repoussé se fût éloigné en pleurs, Fileno avait à son tour déclaré son propre amour à la nymphe ; à présent il affirme l’avoir fait seulement pour la mettre à l’épreuve. Clori l’accuse de mensonge et de l’avoir convaincue que l’amour était cruel, par crainte qu’elle ne se donne à un autre, et elle le chasse. Après avoir en vain cherché à excuser ses fautes et ses mensonges par la force irrésistible de l’amour même, et tenté de convaincre Clori d’avoir pitié de lui, Fileno s’éloigne en promettant vengeance et en invoquant les furies.

Resté seul avec Clori après le renvoi de Fileno, Tirsi propose à la nymphe de trouver un réconfort en donnant libre cours à leurs ardeurs, mais Clori répond que son honnêteté lui impose de se donner à Tirsi seulement après les noces, et Tirsi, plus amoureux que jamais, accepte avec bonheur. Tous deux font les louanges de l’amour qui les unit et s’échangent des promesses de fidélité éternele, rappelant à tous ceux qui n’aiment pas et ne veulent aimer que l’amour frappe avec plus de force précisément celui qui le méprise. (Zig-Zag Territoires)

 

Représentations :

Morez – Eglise Notre-Dame – Festival de Musique du Haut-Jura – 20 juin 2004 – Ensemble 415 – dir. Chiara Banchini – avec Adriana Fernandez, Furio Zanasi, Carlos Mena

Périgueux – Eglise St-Etienne-de-la-Cité – 6 septembre 2003 – Ensemble 415 – dir. Chiara Bianchini – avec Adriana Fernandez (Clori), Martin Oro (Tirsi), Furio Zanasi (Fileno)

XXIIe Festival de Sablé – Brûlon – Eglise Saint-Pierre-Saint-Paul – 24 août 2002 – Ensemble 415 – dir. Chiara Bianchini – avec Adriana Fernandez (soprano), Martin Oro (contre-ténor), Furio Zanasi (baryton)

 

Innsbruck – Festival de Musique Ancienne – Spanischer Saal – Schloss Ambras – 16, 17 août 2002 – La Cetra Barockorchester Basel – dir. Attilio Cremonesi – avec Nuria Rial (soprano), William Purefoy (contre-ténor), Riccardo Novaro (baryton)

« Attilio Cremonesi, ancien assistant et continuiste de René Jacobs avec qui il partage le souci de la précision, le sens des contrastes, le travail sur le texte, particulièrement dans les récitatifs, dirige une jeune formation baroque créée en 1999, La Cetra Barockorchester Basel, déjà d’un excellent niveau. Le trio vocal est quelque peu déséquilibré par le contre-ténor anglais William Purefoy, au timbre d’une rare séduction mais qui ne se soucie pas du texte dans les récitatifs de la sérénade (les rendant ennuyeux) et qui trouve ses limites dans les vocalises périlleuses, au contraire des deux autres interprètes. La soprano catalane Nuria Rial au timbre capiteux, à l’italien impeccable et à la virtuosité irrésistible et le brillant baryton italien Riccardo Novaro qui, malgré un engorgement du timbre, fait preuve d’une grande musicalité et d’une technique lui permettant de dominer les vocalises les plus vertigineuses » (ConcertoNet)

Prague – Château de Troja – 30 juillet 2000 – Collegium Marianum – dir. V. Luks – avec H. Jonasova (Clori), M. Forster (Tirsi), R. Janal (Fileno).

La Nemica d'amore fatta amante