Venus et Adonis : Masque for the entertainment of the King

Venus et Adonis - Le Titien

COMPOSITEUR John BLOW
LIBRETTISTE anonyme
ENREGISTREMENT ÉDITION DIRECTION ÉDITEUR NOMBRE LANGUE FICHE DÉTAILLÉE
1951 1953 Anthony Lewis L’Oiseau Lyre 1 (LP) anglais
1951 2000 Anthony Lewis Naxos Classical 1 anglais
1984 1990 Anthony Rooley DHM 2 anglais
1988 1992 Charles Medlam Harmonia Mundi 1 anglais
1992 1992 Philip Pickett Decca 1 anglais
1992 2008 Philip Pickett L’Oiseau Lyre 1 anglais
1998 1999 René Jacobs Harmonia Mundi 1 anglais
1998 2008 René Jacobs Harmonia Mundi 1 anglais
2010 2011 Elizabeth Kenny Wigmore Hall 1 anglais
2011 Paul O’Dette/Stephen Stubbs CPO 1 anglais

 

Masque pour le divertissement du roi, en un prologue et trois actes, sur un livret d’auteur inconnu, créé devant la cour d’Oxford au cours de l’été 1681.
Le rôle de Vénus était chanté par Mary Davies, dite Moll, née en 1657, ancienne maîtresse de Charles II Stuart, et celui de Cupid par Lady Mary Tudor, leur fille, à peine âgée de neuf ans (1673 – 1726).
Lady Mary Tudor
Le livret fut publié en 1684, date à laquelle eut lieu une représentation au pensionnat de filles de Josias Priest à Chelsea, où devait être représenté, cinq ans plus tard, Dido and Aeneas de Purcell.4
Toùmbée dans l’oubli, l’œuvre ne fut exhumée qu’à la fin du XIXe siècle, et publiée en 1902.

 

Synopsis

Prologue
Cupidon apparaît au milieu de bergers et bergères, un arc dans la main et une flèche dans l’autre, et d’autres flèches autour de la ceinture. Cupidon chante son pouvoir et appelle à l’inconstance des amants, car seuls les sots, les laids et les vieux font preuve de fidélité.
Acte I
Vénus et Adonis sont assis sur un divan. Ils échangent des baisers et des mots d’amour. On entend des meutes de chasseurs. Adonis ne veut pas chasser, mais Vénus le presse de rejoindre les chasseurs, car « l’absence enflamme des désirs nouveaux ». Des chasseurs s’approchent d’Adonis et le convient à chasser un puissant sanglier.
Acte II
Vénus et Adonis entourés de petits Cupidons. Cupidon demande des conseils à sa mère. Puis il fait la leçon aux petits Cupidons. Vénus teste Cupidon en lui demandant comment rendre Adonis éternellement fidèle. Elle rit beaucoup de la réponse de son fils : « fais-le beaucoup souffrir ». Danse de Cupidon. Les petits Cupidons s’amusent entre eux, puis sont brusquement dispersés par l’effroyable Cupidon masqué. Cupidon ayant fait appel aux Grâces, ils réapparaissent avec précaution et se joignent à elles en chantant. Danse des Grâces. Les Cupidons parent Vénus.
Acte III
Vénus apparaît, mélancolique. Affligé, un Cupidon traverse la scène et lui brandit une flèche. On amène Adonis qui a été blessé par le sanglier. Vénus pleure. Adonis meurt. Les Cupidons emportent Adonis dans les airs, pour qu’il trône dans les cieux.

 

Livret en français disponible sur livretsbaroques.fr
Représentations :

Innsbruck, Innenhof der Theologischen Fakultät – 14, 17, 19 août 2013 – The Pavillon Ensemble – dir. Piers Maxim – mise en scène Laurence Dale – costumes Gabriella Ingram – chorégraphie Benito Marcelino – avec Kelebogile Boikanyo (Venus), Edward Grint (Adonis), Jake Arditti (Cupid), Einat Aronstein (Shepherdess), Jeffrey Francis (Shepherd)

 

Théâtre de Caen – 12, 13 octobre 2012 – Théâtre de Lille – 19, 20, 22, 23 octobre 2012 – Luxembourg – Grand Théâtre – 9, 10 novembre 2012 – Les Musiciens du Paradis – La Maîtrise de Caen – Paris – Opéra Comique – 12, 13, 14, 15 décembre 2012 – Grenoble – 20 et 21 décembre 2012 – Angers – 6, 8 et 9 janvier 2013 – Nantes – Théâtre Graslin – 14, 15, 17, 18 et 20 janvier 2013 – Les Musiciens du Paradis – dir. Bertrand Cuiller – mise en scène Louise Moaty – décors Adeline Caron – costumes Alain Blanchot – lumières Christophe Naillet – chorégraphie Françoise Denieau – avec Marc Mauillon (Adonis), Céline Scheen (Vénus) – Coproduction avec Théâtre de Caen; Les Théâtres de la Ville de Luxembourg; Angers Nantes Opéra; Opéra Comique; Centre de Musique Baroque de Versailles



Maville.com

« Joué encore ce soir et demain, Vénus et Adonis est la création de l’année au théâtre de Caen. Un plateau de 48 artistes pour un opéra baroque contant la passion déchirante de la déesse de l’amour avec son bel Adonis. Campée par la soprano belge Céline Scheen, cette dernière est troublante de justesse et d’émotion et tient subtilement la barre de ces trois actes filant presto (1 h 30). Ses inénarrables « Adooonis » vous réveilleraient un mort qui restera pourtant à trépas. Revisité par la jeune metteuse en scène Louise Moaty, ce premier opéra anglais de John Blow plonge le spectateur de tout son long dans une ambiance à la bougie augmentée de jolies mélodies. Après une ode adoratrice des vertus de la musique, il s’ouvre avec enthousiasme et quelques drôleries shakespeariennes sur la question de la fidélité que le jeune éphèbe Cupidon taquine avec espièglerie. Une danse aphone ouvre quelques contemporanéités à un propos globalement fidèle aux lois du genre baroque, mais cette transition est un peu longue. Peut-être le seul bémol de ce spectacle traversé de légèreté via à la présence de six très jeunes choristes. Prélude à une conclusion tragique, le passage des Grâces est un instant du même nom. Et tout au long, les seconds rôles emportent cette œuvre d’où ils viennent : d’un petit recoin du Paradis. Un travail de titans surmonté d’orfèvreries. »

Concertclassic

« L’histoire a parfois la mémoire ingrate. Si Didon et Enée de Purcell a passé la rampe de la postérité, son « modèle », Vénus et Adonis (vers 1683)de son maître et ami John Blow(1649-1708) – premier exemple d’opéra anglais conservé – n’a pas connu les mêmes faveurs. C’est au Théâtre de Caen – qui avait déjà donné sur sa scène le masque de Blow en 1986 – que revient l’honneur d’inaugurer la nouvelle production commandée à Louise Moaty et Bertrand Cuiller. Double réparation oserait-on écrire, puisque c’est également une Ode à Saint-Cécile de Blow, « Begin the song », qui ouvre la soirée.
On sait le goût de la condisciple de Benjamin Lazar pour l’intimisme de l’éclairage à la bougie. Sur un plateau dénudé, les candélabres sont allumés un par un à partir d’une chandelle, tandis que l’on voit arriver les membres du choeur des Musiciens du Paradis et les danseurs, tous de noir vêtus, et dont se distinguent l’assurance émérite d’Alain Buet ainsi que la vitalité et la juvénilité percutantes de David Tricou. Mais cette pénombre feutrée donne à la variété d’inspiration de l’ode des allures de leçons de ténèbres, et les mouvements chorégraphiques, imaginés par Françoise Denieau à partir des codes baroques, qui se prolongent en écho des dernières notes, ne convainquent que rétrospectivement.
Car avec Vénus et Adonis, tout s’éclaire. Les personnages en couleurs se détachent du noir plus anonyme des chœurs. On comprend la continuité entre les deux ouvrages, l’Ode tenant lieu de prologue allégorique, à l’instar des tragédies lyriques à la française qui inspire l’ouverture solennelle du masque, même si un contraste visuel aurait sans doute été plus dynamique. Les cénotaphes, globes, tombeaux et instruments de musique au milieu des arbres mêlent l’innocence de la pastorale au memento mori de la vanité, soulignant la vulnérabilité des hommes et des sentiments dans un esprit très dix-septième siècle.
Céline Scheen incarne Vénus avec une fraîcheur aussi émouvante que l’Adonis très théâtral de Marc Mauillon. Mais c’est sans doute la large participation de la Maîtrise de Caen, dont est issu Grégoire Augustin, Cupidon, qui donne sa tonalité particulière au spectacle, tant il est vrai que c’est la puissance expressive plus que la beauté formelle du chant qui ici prévaut, et qui participe de l’originalité de l’ouvrage – à l’image des audaces harmoniques jusque dans le bouleversant choeur final, sommet de la musique anglaise qui surpasserait même celui de Didon et Enée. Suivant les conseils d’Eugène Green, les chanteurs ont réalisé un travail de restitution linguistique plus favorable à l’exotisme baroque qu’à l’intelligibilité du texte. Pour son baptême de fosse, Bertrand Cuiller révèle les contrastes de la partition, entre ivresse rythmique – le ground au deuxième acte ! – et sonorités âpres, et l’on ne peut que souligner l’excellence des Musiciens du Paradis, où l’on reconnaît le premier violon de Sophie Gent ou l’archiluth de Thomas Dunford (entendu la semaine précédente au côté d’Hugo Reyne à l’Hôtel de Soubise).
Après avoir été étrennée à Caen, la production tournera à Lille, Luxembourg, Paris, Grenoble, Angers et Nantes. Assurément, les occasions de succomber à la musique de Blow ne manqueront pas. »

Forum Opéra

« Attention chef-d’œuvre inconnu » allions-nous titrer, en forçant à peine le trait, car l’unique opéra de Blow se fait extrêmement rare sur les scènes de France et de Navarre. Aussi n’est-il pas inutile de le présenter avant que de partager notre enthousiasme pour une production touchée par la grâce. Contrairement à une idée reçue, Venus & Adonis (1681 ou 1683) n’est pas le premier opéra en langue anglaise, mais le plus ancien qui nous soit parvenu, la musique du Siege of Rhodes (1656) ayant malheureusement disparu. Matthew Locke, qui prit part à l’écriture de cet ouvrage conçu à six mains (un librettiste et cinq compositeurs), exerça une profonde influence sur John Blow et Henry Purcell, mais celle-ci ne peut suffire à expliquer les nombreuses similitudes entre Dido & Aeneas (1689) et Venus & Adonis. « Les ressemblances entre ces œuvres sont troublantes, observe Bertrand Cuiller, et leurs liens contextuels frappants : je pense qu’il y a eu des échanges d’idées importants et fréquents entre les deux hommes, qui ont nourri la composition de l’un et l’autre opéra », une émulation réciproque d’autant plus plausible que nous savons que Blow a très vite décelé l’immense potentiel de cet élève qui devint également son ami.
L’identité du librettiste de Venus & Adonis demeure un mystère, mais l’hypothèse selon laquelle il serait de la plume d’Aphra Behn, avec laquelle Blow collaborera plus tard, ne laisse pas d’étonner, surtout lorsque cette conjecture prétend s’appuyer sur les accents féministes du texte. C’est oublier un peu vite qu’Adonis est né de l’union contre-nature de Myrrah avec son propre père Cinyras dont, follement éprise, elle partagea la couche à la faveur de l’obscurité. En outre, l’auteur du poème flatte-t-il la gent féminine en rendant Vénus responsable de la mort d’Adonis ? Alors que chez Ovide la déesse met en garde son amant contre les dangers de la chasse : « Ton âge et ta beauté, qui ont charmé Vénus, ne sauraient charmer les lions, les sangliers hérissés de soies, frapper les yeux et les cœurs des bêtes sauvages », comme si elle en pressentait l’issue fatale, dans l’opéra, elle l’y encourage, le presse même, par un froid calcul de coquette: « Une absence enflamme des désirs nouveaux, je ne voudrais pas que mon amant se lasse ». Il faut saluer ici un coup de génie, sur le plan dramaturgique, car à la douleur de la perte, se mêle le poison du remords. Cet infléchissement du mythe accentue le contraste qu’offre le dénouement tragique après la pastorale enjouée des deux premiers actes, émaillée d’allusions savoureuses aux mœurs légères de la cour de Charles II où fut créé ce mask pour huit chanteurs solistes, chœur, orchestre (deux parties de violons, une d’alto, deux flûtes à becs) et basse continue. La maîtresse du roi, Mary (« Moll ») Davies, incarnait Vénus alors que leur fille, Lady Mary Tudor, âgée de neuf ans, se frottait au rôle de Cupidon.
On a du mal à comprendre pourquoi Venus & Adonis n’est pas plus souvent à l’affiche. Certes, le chef-d’œuvre de Purcell fut édité à trois reprises au cours du XIXe siècle quand celui de Blow dut attendre 1902, et Dido & Aeneas fit ainsi son entrée au répertoire des sociétés chorales avant d’intégrer celui des maisons d’opéra. Mais le renouveau baroque est passé par là, des musicologues ont étudié les partitions de Blow et revu le jugement sans nuance de Charles Burney, qui assimile les hardiesses expressives du compositeur à des « gaucheries » et lui reproche « d’insulte [r] l’oreille de ses harmonies litigieuses ». Burney connaissait-il Venus & Adonis ? Rien n’est moins sûr, il ne le cite jamais et ses critiques portent sans doute exclusivement sur la musique liturgique de Blow, qui, certes, constitue le cœur de son activité, le musicien ayant été le premier à occuper la fonction de compositeur officiel de la Chapelle royale. La brièveté de l’ouvrage, qui dure moins d’une heure, ne représente, pas plus que celle de Dido & Aeneas, un obstacle insurmontable ni une raison valable pour ne pas le monter.
En choisissant l’ode à Sainte Cécile « Begin the Song » (1684) pour précéder l’opéra, Louise Moaty et Bertrand Cuiller n’ont pas seulement complété le programme et révélé une page magnifique qui, par ses qualités tant musicales que littéraires, égale les meilleures contributions de Purcell au genre. Ils ont conçu un spectacle cohérent et harmonieux où les œuvres entrent en résonnance, gestuelle et mouvements chorégraphiés animant et unifiant le discours porté par les mêmes interprètes. Une danse, précisément, « prolongée quelques instants dans le silence, comme une respiration, explique Louise Moaty, vient dessiner la course du temps et suspendre le nôtre pour nous plonger dans celui de la tragédie ». Cette transition déroutante pourra sembler un peu longue, d’autant que le bruit des pas brise le silence, mais elle s’achève avant d’avoir estompé le charme d’un visuel de rêve, nimbé de mélancolie, où affleure le souvenir de Vanités, de Dürer, des Cranach ou encore de Thomas Hilliard dont les modèles semblent jaillir sous nos yeux.
Lorsque nous l’avions interviewé au lendemain d’une représentation de l’Egisto à Favart, Marc Mauillon se réjouissait à l’idée d’aborder Venus & Adonis car il retrouverait l’esthétique de Benjamin Lazar, avec qui Louise Moaty a beaucoup travaillé, de même qu’Adeline Caron (décors), Alain Blanchot (costumes), Françoise Denieau (chorégraphie) et Christophe Naillet, responsable de ces fascinants clairs-obscurs qui, cette fois, ne nous privent d’aucun détail. La comédienne et metteure en scène a toutefois développé son propre langage, s’affranchissant notamment d’un jeu exclusivement frontal, pour concevoir un théâtre à la fois contemplatif et dynamique, à l’image de ce tableau de l’ode, d’une beauté irréelle et d’une grande force d’évocation, où Alain Buet, immobile à l’avant-scène, chante un solo d’une ensorcelante douceur alors que la foule rassemblée au fond, dos au public, lève les bras et trace des gestes alentis en regardant au loin, comme pour saisir l’insaisissable. Les mots nous semblent incapables de restituer cette magie qui naît dans l’instant et que la photographie peine aussi à capturer ; quand bien même ils y arriveraient, nous nous en voudrions de dévoiler les idées lumineuses, drôles ou poétiques qui surprendront et raviront le spectateur.
Les enfants participent bien sûr à la fraîcheur du spectacle. Si l’option s’impose d’un point de vue scénique pour camper les Amours de l’acte II, Blow destinait probablement aussi les chœurs de Venus & Adonis à ses chanteurs de la Chapelle royale et donc la partie de soprano aux boyish trebles. En l’occurrence, bien qu’ils n’égalent ni en éclat ni en puissance les choristes d’Outre-Manche, les garçons de la Maîtrise de Caen, au premier rang desquels Grégoire Augustin dans le rôle de Cupidon, s’en tirent avec les honneurs. On n’en dira pas autant du seul soprano adulte, issu du chœur des Musiciens du Paradis, qui détonne par rapport à ses partenaires, les ténors David Tricou et Robert Getchell d’une tout autre sûreté, sans parler d’Alain Buet (Bergers, Chasseurs), dans une forme superlative et maître du verbe comme jamais. En revanche, l’orchestre des Musiciens du Paradis connaît plus d’une fois le purgatoire. Décalages, approximations et baisses de régime jalonnent une performance inégale, entre fulgurances et flottements. Lors de son exil à Paris, Charles II avait pris goût à la tragédie lyrique, dont le modèle a influencé Blow et ses compatriotes (ouverture, prologue, danses, etc.), mais également aux flûtes à bec dont il fera importer l’usage. L’introduction d’un hautbois et d’un basson, particulièrement indiqué pour la scène des chasseurs, cadre avec les pratiques de l’époque et enrichit les couleurs d’une fosse où le splendide théorbe de Thomas Dunford tire particulièrement bien son épingle du jeu.
Silhouette de Diane, timbre scintillant mais sans rondeur, la Vénus de Céline Scheen se révèle au troisième acte : du murmure de la sidération au cri du désespoir, elle incarne le surgissement du tragique dans un climax quasi insoutenable, la bouleversante déploration du chœur achevant d’enténébrer le finale de l’opéra. Créature ambiguë, innocente mais fruit du plus coupable des amours, Adonis hérite de la vocalité non moins singulière de Marc Mauillon, âprement douce, et de sa présence au texte, qui confèrent un relief appréciable au personnage. Même si la réalisation musicale n’a pas tenu toutes ses promesses ce 20 octobre, avec cette lecture de Venus & Adonis, Louise Moaty et Bertrand Cuiller nous rappellent que si l’opéra peut divertir, émouvoir, troubler, interroger, il peut aussi réenchanter le monde. »

Le Figaro

« Pur produit de la tradition britannique, maître à chanter – et à penser – de Henry Purcell, John Blow reste surtout connu des amateurs de baroque pour sa musique sacrée. Pourtant, il est aussi le père de l’un de ces masques typiques d’Albion, écrit pour le divertissement du roi Charles II et qui aurait pu servir de modèle à ce que l’on a coutume de considérer comme le premier opéra anglais: Didon et Énée.
Sa Vénus et Adonis, relecture tragique du mythe amoureux, est un bijou de poésie et d’élégance, où la légèreté, comme chez Purcell, le dispute au drame. Il n’est donc nullement question de remettre en cause les qualités musicales de l’œuvre: la nouvelle production que propose l’Opéra-Comique (créée en octobre au Théâtre de Caen) est avant tout l’occasion de redécouvrir ce bref chef-d’œuvre, subtil alliage de grâce pastorale et de sensibilité doloriste. On s’interrogera en revanche sur la pertinence du passage d’un tel ouvrage à la scène. Car une fois passée la poétique claire-obscure et onirique de la partition, l’absence de véritable dramaturgie, eu égard au miracle théâtral que sera ­Didon et Énée, laisse le spectateur sur sa faim. La mise en scène de Louise Moaty, dont on avait tant aimé le Rinaldo épique et sensuel, semble s’enliser dans une esthétique de Vanités et d’éclairages à la bougie qui soulignent les faiblesses du livret, plus qu’elle ne les compense. «Le feu comme matière vivante, au même titre que le végétal ou l’animal (incarné un peu artificiellement par de véritables chiens de chasse, NDLR), les hommes et leur musique, leur plaisir, leur savoir, leur folie, viennent ici s’offrir en contraste dans la profondeur de la nuit», explique-t-elle dans sa note d’intention. Las, le plaisir et la folie firent justement défaut lors de la création, à Caen, de cette production trop dirigée vers les modes interprétatives et pas assez vers le propos théâtral ou musical. Dommage! Méritants, les enfants de la Maîtrise de Caen ont travaillé la diction baroque avec le vénérable Eugène Green.
Mais la récitation du vieil anglais ne leur est pas naturelle, et cela se sent. Le jeune orchestre des Musiciens du Paradis, sous la baguette de Bertrand Cuiller, se tire fort honorablement d’une partition fort peu jouée mais le chœur, lors de la première, ne semblait pas suffisamment prêt. Une consolation cependant: le merveilleux couple composé par Marc Mauillon et Céline Scheen. Ces derniers démontrent une fois de plus qu’ils sont bien les meilleurs espoirs de la scène baroque actuelle. »

Classica – novembre 2013 – Erreur d’aiguillage

« Titien, Véronèse, Rubens soulignent l’intensité amoureuse et la volupté qui lient le couple Vénus et Adonis, même lorsque ce dernier part pour une chasse au sanglier qui lui sera fatale. Louise Moaty, peut-être influencée par le tableau de Poussin du musée de Caen, ville où se crée son spectacle, annonce d’emblée le drame à venir : éclairage minimal des bougies, costumes uniformément noirs, excepté ceux des protagonistes, décor allégorique échappé d’une vanité. Ce bref opéra conçu pour le divertissement du roi Charles II est-t-il vraiment animé de la «puissance tragique » que lui prête la jeune metteuse en scène? On a fini par le croire à force de rapprocher l’œuvre de John Blow du Didon et Énée de son ancien élève Henry Purcell. Mais Vénus et Adonis s’apparente davantage à une pastorale, comme Acis et Galatée de Haendel inspiré des mêmes Métamorphoses d’Ovide. La fin tragique ne relève pas d’un complot ni d’une volonté supérieure, mais de la simple malchance. Céline Scheen et Marc Mauillon (Vénus et Adonis) ont alors beau chanter au mieux leurs personnages, ils ne peuvent leur donner une consistance que le livret et, parfois, la musique leur refusent malgré le soutien des Musiciens du Paradis et de la Maîtrise de Caen menés du clavecin par Bertrand Cuiller. L’Arcadie ne se laisse plus faacilement visiter. »

Versailles – Opéra Royal – 13 janvier 2012 – Les Arts Florissants – dir. Jonathan Cohen

 

Château d’Hardelot – Tour vagabonde – 10 juin 2011 – The New London Consort – dir. Philip Pickett – avec Joanne Lunn (Venus), Michael George (Adonis), Juliet Schiemann (Cupidon), Julia Gooding (une bergère), Christopher Robson (un berger, un chasseur), Andrew King (un berger, un chasseur), Simon Grant (un berger, un chasseur)

ConcertClassic

« Folie d’un riche Anglais au XIXe siècle, Sir John Hare, le château d’Hardelot – néo-Tudor et pré-disneylandesque – a été totalement restauré à l’initiative du Conseil Général du Pas-de Calais entre 2007 et 2009 et héberge désormais le Centre Culturel de l’Entente Cordiale.
L’an dernier naissait le Midsummer Festival d’Hardelot, manifestation partagée entre musique et théâtre autour de la rencontre entre les cultures britannique et française. Placée sous la direction artistique de Sébastien Mahieuxe, la manifestation doit une part de sa singularité au lieu dans lequel elle se déroule. A quelques pas du château est en effet installée spécialement pour le festival une Tour Vagabonde en bois, librement inspirée (en petit format) du Globe Theater de Londres (photo). L’intimisme de cette salle éphémère crée une proximité pour le moins unique entre la scène et le public. La soirée inaugurale de l’édition 2011, avec Philip Pickett et ses chanteurs et musiciens du New London Consort, a permis de s’en convaincre. (…)
L’ouvrage n’est pas souvent donné en France. Avec ce Masque for the entertainement of the King en trois actes (1683) on remonte à la source de l’opéra britannique. Sur un livret d’Anne Kingsmill, une demoiselle d’honneur de la Duchesse de York, Blow a signé un ouvrage séduisant par sa concision, sa variété, sa beauté mélodique et la gamme de sentiments qu’il explore, de la drôlerie (les irrésistibles Petits Cupidons à l’Acte II) au drame (la mort d’Adonis face une Vénus éplorée à l’Acte III). Un certain William Purcell, élève de John Blow, n’a pas manqué de méditer l’exemple de son maître…
L’atmosphère chaleureuse de la Tour Vagabonde s’avère idéale pour goûter un petit bijou lyrique donné dans une version mise en espace, avec le plus strict minimum d’accessoires, musiciens disposés sur scène côté jardin. Qu’importe la modestie de la réalisation, le charme opère immédiatement sous la conduite de Philip Pickett, familier d’une partition dont il soigne avec amour le relief et les coloris délicats. »
Avantage aux dames dans une distribution d’où se détachent la sensuelle Vénus de Joanne Lunn et le piquant Cupidon de Juliet Schiemann. Plus qu’honorable prestation de Michael George dans Adonis, même si le baryton a plus le physique pour un rôle de père que pour celui qu’il tient là… Délicieux Petits Cupidons de Anne et Leo Bevan – une paire de jumeaux ou ça en a tout l’air -, jolie bergère de Julia Gooding, chasseurs non exempts de reproche pris individuellement mais satisfaisants dans les ensembles (Christopher Robson, Andrew King et Simon Grant). »

Milwaukee – Florentine Opera – 13, 14, 15, 18, 19, 21, 22 mai 2011



Boston – New England Conservatory’s Jordan Hall – 29 novembre 2008 – Boston Early Music Festival – version semi-scénique – Boston Early Music Festival Chamber Ensemble – dir. Paul O’Dette et Stephen Stubbs – mise en scène Gilbert Blin – avec Amanda Forsythe (Venus), Jesse Blumberg (Adonis), Mireille Lebel (Cupid)



Wiener Kammeroper – 24, 26 février, 1er, 3, 5, 8, 10, 12, 15, 17, 19, 22, 24, 31 mars, 2, 5, 7, 9 avril 2005 – dir. Bernhard Klebel – mise en scène, décors, costumes Daniel Angermayr, Thomas Görge – lumières Lukas Kaltenbäck – avec Lusine Azaryan (Venus), Daniel Schmutzhard (Adonis), Max Riebl / Juliette Khalil (Amor)


Varsovie – Opéra de Chambre de Varsovie -12 octobre 2004 – Musicae Antiquae Collegium Varsoviense – dir. Jerzy Zak – mise en scène et décors Ryszard Peryt – scénographie Andrzej Sadowski – avec Marzanna Rudnicka (Venus), Slawomir Jurczak (Adonis), Olga Pasiecznik (Cupido)



Toronto – Canadian Opera Company – 31 janvier 2001 – dir. Richard Bradshaw, mise en scène Alfred Kirchner – avec Susan Marie Pierson (Prima Donna, Venus), Timothy Noble (Hero-Player, Mars), Alan Woodrow (Clemente, Adonis).

Anvers – Opéra des Flandres – 6, 8, 10, 12, 14 novembre 1998 – Gand – 20, 22, 24, 26, 27 novembre 1998 – Il Fondamento – dir. René Jacobs – mise en scène Lawless – avec Rosemary Joshua (Vénus), Nancy Argenta (Cupido), Daniel Mobbs (Adonis)

 

Gand – 15, 17, 19, 22 et 23 novembre 1996 – Anvers – 13, 15, 17, 18 et 20 décembre 1996 – Il Fondamento – dir. René Jacobs – mise en scène Stephen Lawless- décors Benoît Dugardin – avec Janice Hall, Daniel Mobbs, Susan McLean, Ned Barth, Kathleen Brett, Susan Bickley

 

Innsbruck – Festival de Musique Ancienne – 23, 25 et 26 août 1995 – dir. René Jacobs – mise en scène Stephen Lawless – décors Benoît Dugardyn – costumes Lez Brotherston – avec Elizabeth Gale (Venus), Per Vollestad (Adonis), Paula Hoffmann (Cupidon)

« Dans la mise en scène de Vénus et Adonis, l’équilibre est superbe entre l’émotion et l’humour, essentiel ici le prologue chantant les désirs amoureux est fort plaisant. On y voit de petits Amours voletant au loin transformés en écoliers anglais, dans la scène de la leçon, ils sont irrésistibles, surtout lorsque les adultes – Dominique Visse, en voyou oxfordien – se mêlent à eux, également en culottes courtes… les décors, les éclairages, élégants et envoûtants à la fois, et les superbes toiles peintes, sont finement exploités, autant qu’une chorégraphie, efficace… (Opéra International – octobre 1995)

Poissy – Théâtre – 10 mars 1995 – Orchestre et Choeur de The Age of Enlightenment – dir. René Jacobs – avec Rosemary Joshua (Vénus), Gérald Finley (Adonis), Constanze Baches (Cupidon)

« En première partie, le chef ne trouve pas le ton juste dans Vénus et Adonis. Sa direction ne sait pas s’incliner devant l’apparente simplicité de la musique, afin d’en faire ressortir la richesse harmonique, elle se raidit trop souvent et le phrasé manque vraiment de souplesse. L’orchestre, the Age of En-ightenment, dans ses conditions, ne se présente pas sous son meilleur jour, tandis que la distribution paraît elle aussi un peu juste. Rosemary Joshua laisse ainsi une impression mitigée : l’autorité et la pétulance sont indéniables en Vénus, mais l’humour et la douceur font défaut. Constanze Baches incarne Cupidon d’une voix très « boyish », au charme piquant, mais avec les limites de timbre et d’intonation d’une voix de garçon ! Gerald Finley reste ce soir-là fixe d’émission, la justesse douteuse, sommaire en Adonis… (Opéra International – mai 1995)

Opéra Comique – 15 octobre 1990 – The London Baroque – dir. Charles Medlam – avec Nancy Argenta, Stephen Varcoe, Olivia Blackburn

Théâtre de CaenThéâtre des Arts de Cergy-Pontoise – 1986 – production de l’Arcal – dir. Jonathan Darlington – mise en scène Christian Gangneron – scénographie Thierry Leproust – chorégraphie Robert Kovich

Nottingham – Holme Pierrepont Hall – septembre 1980 – dir. Peter Holman – mise en scène Jack Edwards – décors Robin Linklater – avec Elizabeth Brice (Venus), Margaret Perry (Adonis), Geoffrey Dalton (Mars)


Paris – Studio 104 – concert radiophonique – dir. Delage – avec Christiane Eda-Pierre, Meneut, Selig, Demigny

Cambridge – Etats Unis – 11 mars 1941