Andromède

COMPOSITEUR Charles COYPEAU dit DASSOUCY
LIBRETTISTE Pierre Corneille

 

Tragédie à machines de Pierre Corneille, commandée par le cardinal Mazarin, représentée en 1650 (pendant la Fronde), avec des décors et machines de Giuseppe Torelli, dans la salle du Petit Bourbon (située à l’emplacement de la Cour Carrée du Louvre, détruite en 1660).

Pierre Corneille

On réutilisa les décors créés par Torelli pour l’Orfeo de Rossi en mars 1647. Dès la fin de l’année, Mazarin avait envisagé de faire resservir les décors pour une pièce française. Il fit donner 2 400 livres d’avance à Pierre Corneille pour une tragédie qui devait porter le titre d’Andromède et Persée, et 13 à 14 000 livres à Torelli pour adapter les décors. Le projet prit du retard en raison de la maladie du jeune roi (petite vérole).

L’ouvrage fut repris à Carcassonne, en 1652, pour l’assemblée des États, puis en Avignon, en 1655, par la troupe de Molière (ce dernier jouant le rôle de Persée) que Dassoucy avait rencontrée à Lyon.

 Castil-Blaze attribua faussement la musique à Jean-Baptiste Boësset, fils d’Antoine.

On a conservé quelques airs, dont un duo, et une ritournelle instrumentale, dans un style italien.

 

Synopsis

Au prologue apparaît, d’un côté, le Soleil naissant sur un char, et de l’autre Melpomène, muse de la tragédie qui, de concert avec le Soleil, chante à la louange du roi un air dont le chœur répète les derniers vers.

Le Ier acte exhibe Vénus accompagnée d’un chœur de musique exécutant l’hymne Reine de Paphe et d’Amathonte.

Au IIe acte, on entend l’air d’une nymphe de Phinée et un dialogue en musique entre cette nymphe et le page de Phinée, dialogue qui roule sur le bonheur des deux amants. Chaque couplet du dialogue a pour refrain une partie chantée par les deux voix réunies, et reprise ensuite par tout le chœur Heureux amant, heureuse amante.

Lorsqu’au IIIe acte, Persée combat le monstre, un chœur Courage enfant des Dieux vient soutenir l’action du héros et célèbre son triomphe,

et au IVe, au moment de la réunion des deux amants, le chœur exécute un chant nuptial. Enfin, le Ve acte donne encore lieu à une intervention du choeur pour hâter l’apparition de Jupiter. La pièce se clôt par un ensemble vocal.

 

A propos de la musique, Corneille prit soin de préciser qu’il ne l’a employée qu’à satisfaire les oreilles, tandis que les yeux sont arrestés à voir descendre ou remonter les machines, ou s’attachent à quelque chose qui les empêche de prêter attention à ce que pourroient dire les acteurs, et qu’il s’est bien gardé de rien faire chanter qui fût nécessaire à l’intelligence de la pièce. Nulle part il ne cita le nom du compositeur, et c’est Dassoucy lui-même qui le fit connaître dans une lettre où il parlait de ses relations avec Molière : Il sçait que c’est moy qui ay donné l’âme aux vers de l’Andromède de M. de Corneille. Pourtant, Corneille appréciait la musique de Dassoucy, allant jusqu’à écrire : Cet autheur a quelque génie. Ses airs me semblent assez doux.

Il reconnaissait aussi les mérites de Torelli : Les machines ne sont pas, dans cette tragédie, comme les agréments détachés : elles en font le neoud et le dénouement, et y sont si nécessaires que vous n’en sauriez retrancher aucune que vous ne fassiez tomber tout l’édifice. J’ai été assez heureux à les inventer et à leur donner place dans la tissure de ce poème : mais aussi faut-il que j’avoue que le sieur Torelli s’est surmonté lui-même à en exécuter les dessins, et a eu des inventions admirables pour les faire agir à-propos.

 

Tra. de Pierre Corneille. Cette piece fit du bruit par les machines & les décorations magnifiques dont elle fut accompagnée : ces changemens de Thé. donnerent lieu à Corneille d’user d’un peu plus de liberté que les regles ordinaires n’en permettent ; sa piece fut jouée par la Troupe Royale, au petit Bourbon, au commencement de l’année 1650, & eut 45 représentations ; les machines étoient de l’invention de Torelli, Italien. Les Comédiens du Théatre de Guénégaud la remirent en 1682, & Corneille y fit alors quelques augmentations dans les vers que des Comédiens & des Comédiennes chantoient, & où ils sont nommés. Elle se trouve dans le 4e vol. de ses OEuv. (de Léris – Dictionnaire des Théâtres)

 

« Andromède, tragédie de Pierre Corneille, représentée avec machines et décorations, en 1650, donna une idée des opéras que l’on jouait à Venise, au regard de la magnificence du spectacle. Elle fut faite pour divertir le roi Louis XIV, pendant sa minorité. La reine-mère, qui n’entreprenait rien que de grand, fit orner magnifiquement la salle du Petit-Bourbon. Le théâtre était superbe, élevé, profond. Torrelli, gentilhomme de Padoue, organisa les machines d’Andromède; elles parurent si belles, ainsi qne les décorations, qu’elles furent dessinées et gravées en taille-douce.

Les grands applaudissements que reçut cette tragédie engagèrent les comédiens du Marais à la remettre en scène après la démolition du Petit-Bourbon. Ils réussirent dans cette entreprise, qui fut renouvelée encore en 1682, par la grande troupe des comédiens, avec le plus brillant succès. » Comme on renchérit toujours sur ce qui a été fait, on représenta le cheval Pégase par un véritable cheval, ce qui n’avait jamais été vu en France. Il jouait admirablement son rôle, et faisait en l’air tous les mouvements qu’il aurait pu faire sur terre. Voici comment on procédait pour inspirer au cheval une vivacité que le public prenait pour de l’ardeur guerrière. Le jeûne le plus austère lui donnait un grand appétit ; et quand on le faisait paraître, un palefrenier vannait de l’avoine dans la coulisse. L’animal, pressé par la faim, hennissait, trépignait et répondait ainsi parfaitement au dessein qu’on s’était proposé. Ce jeu du cheval contribua beaucoup au succès de la pièce. » (Le Mercure galant – juillet 1682)

 

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