CD Alcina (2007)

Le compositeurL’oeuvre

ALCINA

COMPOSITEUR

Georg Friedrich HAENDEL

LIBRETTISTE

Antonio Marchi

 

ORCHESTRE Il Complesso Barocco
CHOEUR
DIRECTION Alan Curtis

Alcina Joyce Di Donato
Ruggiero Maité Beaumont
Morgana Karina Gauvin
Bradamante Sonia Prina
Oronte Kobie van Rensburg
Melisso Vito Prinate
Oberto Laura Cherici

DATE D’ENREGISTREMENT septembre 2007
LIEU D’ENREGISTREMENT
ENREGISTREMENT EN CONCERT

EDITEUR Archiv Produktion
DISTRIBUTION Universal
DATE DE PRODUCTION 23 mars 2009
NOMBRE DE DISQUES 3
CATEGORIE DDD

Critique de cet enregistrement dans :

Opéra Magazine – avril 2009 – appréciation Diamant Opéra

  « Avec l’enregistrement réalisé en studio par Alan Curtis pour Archiv, en septembre 2007, nous tenons probablement, disons-le d’emblée, l’Alcina la mieux chantée de la discographie. Vocalité, style, affects, compréhension des caractères, rien ne manque et la distribution, fait rare, ne comporte aucun point faible.

Curtis est de ces chefs qui aiment prendre des risques et en faire prendre aux chanteurs. En apprenant qu’il envisageait de confier le rôle-titre à Joyce DmDonato, nous avions été nombreux, admirateurs de la dame, à nous demander si elle pourrait, avec son mezzo d’argent, se couler dans le moule du soprano. Le pari est gagné : vocalement, musicalement et dramatiquement, sa performance est d’une prodigieuse finesse. La cantatrice nous fait en effet partager les émotions de l’héroïne au fil d’un portrait d’une richesse et d’une variété rares, là où ses consoeurs ont souvent tendance à privilégier le profil « vaincu » du personnage (voir Renée Fleming dans l’intégrale Erato, profondément émouvante mais assez monolithique). Di Donato sait se montrer révoltée et, quand il le faut, dégager une aura de puissance et de séduction bienvenue (un « Ah mia cor » d’anthologie). À chacune de ses interventions, on a la tentation d’appuyer sur la touche « repeat » du lecteur CD, ce qui serait injuste vis-à-vis de ses partenaires, tous excellents. On aurait peut-être aimé un timbre plus sombre pour Ruggiero, notamment pour faire contraste à celui de son Alcina. On ne peut pourtant reprocher à la mezzo espagnole Maite Beaumont, qui campe un héros aussi juste de ton qu’impeccablement chanté. En totale rupture avec la vision erronée souvent proposée a la scène, ces dernières années (voir Natalie Dessay dans la version Erato susmentionnée, en grande partie victime de la mise en scène de Robert Carsen), Karina Gauvin n’a rien d’une soubrette en Morgana. Au contraire, la soprano canadienne s’attache à brosser un portrait complexe – personnage, à la fois intéressant et émouvant (très beau «Credete al mia dolore»). Elle prend désormais la tête de la discographie.

Quant à la Bradamante de Sonia Prina (déjà dans le live munichois), elle se situe presque au niveau de Kathleen Kuhlmann encore meilleure avec Richard Hickox (EMI) qu’avec Wïlliam Christie (Erato). Les rôles secondaires sont impeccables avec une mention pour le ténor sud-africain Kobie van Rensburg. Côté orchestral, on peut, une fois encore, reprocher à Alan Curtis une certaine placidité et des choix de tems relativement monotones. Il ne le fait pas par négligence ni par méconnaissance du style de cette musique, mais parce qu’il a résolument décidé de bannir tout excès, en plaçant les instruments un peu en retrait par rapport aux chanteurs. Le vision d’ensemble s’en ressent et manque souvent de contrastes, péché véniel, cette fois, en regard de la qualité du plateau. Une édition qui marquera sans doute durablement la discographie haendélienne : elle vient rejoindre sur les sommets l’intégrale Hickox EMI, à la distribution moins équilibrée mais immortalisant l’Alcina d’Arleen Auger d’une extraordinaire finesse et profondément bouleversante. Les autres sont loin derrière même si la version Christie ne manque pas de séduction. »

 Classica – avril 2009 – appréciation 3 / 4

  « Que dire? Que c’est superbe, assurément. Et l’on aurait alors envie de s’étendre abondamment sur cet aspect indiscutable de l’enregistrement et, pour étayer notre propos, de convoquer jugements et analyses engageant tel aspect d’ensemble ou de detail un tant soit peu significatif. Mais voilà sur cet enregistrement, il n’y a strictement rien à dire tout simplement parce nous n’avons affaire à rien d’autre qu’à de la musique toute pure, et qu’une telle pureté ‘ ou interprétation par défaut ‘ résiste à toute entre­prise de qualification. Une beauté de tout premier ordre, certes, mais sans aspérités ni expressivité d’aucune sorte, sans passion ni théâtre. Sans signification, donc, autre que celle qui résulte de la seule musique. Non pas froide, assurément, car c’est si scrupuleusement la lettre de Haendel qui nous est donnée, et la seule beauté sonore est telle, que nous ne sombrons jamais dans l’ennui complet. Mais tiède, et qui glisse dans notre oreille sans l’émouvoir comme elle glisse entre nos mots, que l’on déplore de ne pouvoir rendre plus enthousiastes. Impossible de se rattraper sur les chanteurs ‘ et Dieu sait combien nous adorons Mesdames DiDonato, Gauvin et Beaumont ‘ car ils se réduisent presque tous ici à la dimension de beaux instruments : les plus belles voix, le style le plus impeccable qu’il soit permis d’imaginer, mais rien que des instruments. Certains se réjouiront de pouvoir accéder à cette lettre ainsi revirginisée car il est devenu de bon ton, par un retour de balancier caractéristique, de taper sur les excités de la baguette, les exhibitionnistes du détail, et autres histrions de la vocalise. Mais nous, nous ne parvenons pas à nous en pa­ser, et pensons qu’Alcina mérite bien plus. Les versions Hickox, Bonynge et Christie l’ont déjà montré. »

 Diapason – avril 2009 – appéciation 4 / 5

« De son honnête ensemble, Alan Curtis tire une sonorité ferme et homogène, mais ni profonde, ni variée, produisant une interprétation générique, à la température ambiante. C’est dans les enchaînements qu’on reconnaît le chef ; or, ici, rien ne relie jamais le récitatif à l’air censé en procéder. De même, rien n’est vraiment caractérisé, comme en témoignent deux airs voisins à l’acte II d’apparence similaire, ‘ Ama, sospira ‘ de Morgana et ‘ Mio bel tesoro ‘ de Ruggiero. Marqués andante et à 6/8, ils nécessitent un calcul extrêmement fin, tant ils sont loin d’exprimer la même chose. Or on passe ici de l’un à l’autre sans cligner des oreilles… Que le tempo soi lent ou rapide, il n’avance guère (cf. l’autre merveille de Morgana,’ Credete al mio dolore ‘ avec violoncelle obligé : catatonique). Afin que l’opéra se fasse, les chanteurs y vont de leur poche, chacun selon ses moyens. Joyce DiDonato s’affirme avec son panache habituel, timbre, virtuosité et parole, couvrant presque tout le registre de ce rôle écrasant, sauf le mol abandon bel cantiste du ‘Ah, mie cor’. Sa solitude est communicative, et nulle part davantage que dans ‘ Ombre pallide ‘… La tessiture plutôt centrale du rôle (que des sopranos poussent parfois ad libitum vers l’aigu) ne semble poser aucun problème à sa voix de haut mezzo.

Maite Beaumont, plus amante que guerrière, rivalise mieux qu’honorablement avec le Ruggiero de… Joyce DiDonato que dessine notre imagination. Avec ses moyens d’Alcina, donc possédant l’exacte mesure de Morgana, Karina Gauvin chante très bien.., comme au concert, sans égaler ses autres incarnations, sous d’autres baguettes. Sonia Prina se sort bien des terribles périls de Bradamante, même si le rôle exige plus de résonance dans le grave et plus de vélocité. Les autres ne déméritent pas. On traverse ces plages non sans plaisir, mais Alcina n’y fait que de brèves et fugaces apparitions. »